Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du vendredi 28 octobre 2022
Crise énergétique

Le gouvernement met 2,5 milliards d'euros sur la table pour aider les collectivités à faire face à la hausse du prix de l'énergie

La Première ministre a annoncé hier un nouveau dispositif de soutien, nettement plus conséquent que les précédents, pour aider les collectivités et les EPCI à faire face à l'explosion du prix de l'énergie. Le gouvernement va y consacrer 2,5 milliards d'euros.

Par Franck Lemarc

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© Gouvernement.fr

Cela fait plus d’un an, maintenant, que l'AMF alerte l’État sur la hausse des prix de l’électricité et du gaz – qui a commencé en septembre 2021, c’est-à-dire bien avant la guerre en Ukraine, quand la reprise économique post-Covid-19 a fait flamber les prix. 

Depuis, tout a concouru à une folle hausse des prix : le déclenchement de la guerre, la fin des approvisionnements en gaz russe, auxquels il faut ajouter l’indisponibilité d’une bonne partie des réacteurs nucléaires en France et la faible production hydroélectrique, pour cause de sécheresse. Avec pour résultats, à la fin du mois d’août, un MW/h d’électricité qui a dépassé les 1000 euros, soit vingt fois plus que son prix début 2021. 

Urgence

Les collectivités locales ont pris de plein fouet ces hausses avec, pour certaines, des factures d’électricité et de gaz multipliées par trois, par quatre, par six. Le gouvernement a mis en place un certain nombre de mesures d’aides, mais elles ont été systématiquement jugées insuffisantes par les associations d’élus. Insuffisantes, mais aussi trop complexes – c’est le cas du « filet de sécurité »  voté cet été en loi de finances rectificative et prolongé dans le projet de loi de finances pour 2023, que beaucoup qualifient, sans mauvais jeu de mot, de véritable usine à gaz. 

Mais devant les alertes répétées de toutes les associations d’élus et de la FNCCR, et face au risque, de plus en plus réel, de voir des communes dans l’incapacité de boucler leur budget pour 2023, le gouvernement a enfin décidé de prendre le problème à bras-le-corps. Le dispositif annoncé hier, par la Première ministre, va réellement donner de l’oxygène aux collectivités. 

« Amortisseur électricité » 

C’est entre autres parce que l’exécutif s’attend à « une nouvelle flambée des prix début 2023 »  qu’il a décidé « d’aller plus loin ». 

Le dispositif qui concerne directement les collectivités « et les établissements publics »  s’appelle « l’amortisseur électricité ». Ce dispositif n’est pas d’une simplicité extrême, mais on peut le résumer ainsi : l’État va prendre en charge la moitié du surcoût sur les factures d’électricité « au-delà d’un prix de référence de 325 euros le MW/h ». 

Cette mesure s’appliquera pour les contrats 2023, « y compris ceux qui sont déjà signés », a bien précisé hier Élisabeth Borne. 

Deuxième dispositif annoncé hier : « La prolongation et la simplification du filet de sécurité », qui s’appliquera également « aux surcoûts du gaz ». Peu de détails ont été donnés, pour l’instant, sur ces « simplifications »  très attendues, qui feront l’objet d’un amendement dans le PLF pour 2023. 

Ces deux mesures représenteront un budget de 2,5 milliards d’euros pour l’État, sur un total de 12 milliards pour le plan annoncé hier, le reste étant consacré à l’aide aux entreprises. 

Un dispositif pour toutes les collectivités

L’intérêt de ce dispositif est qu’il va concerner toutes les collectivités, pas seulement celles qui étaient couvertes par le bouclier tarifaire, c’est-à-dire les plus petites d’entre elles (moins de 10 agents et moins de 2 millions d’euros de recettes). Les plus petites, mais pas forcément celles qui en avaient le plus besoin : les bourgs-centres, qui supportent les charges de centralité pour des communes environnantes, sont, entre autres, particulièrement exposées depuis le début de la crise. 

Ici, les ministres ont insisté : le mécanisme s’appliquera à toutes les collectivités et établissements publics. « Il sera automatique, ne nécessitera aucun dossier, aucune instruction préalable », a expliqué la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher. Laquelle a été claire : le dispositif ne permettra pas de revenir aux tarifs de début 2021. Mais l’État prendra bien en charge directement la part de la facture correspondant à la moitié de l’écart entre le prix du marché et le seuil de 325 euros du MW/h fixé par le gouvernement. Il y aura donc toujours un surcoût important à payer pour les collectivités, ce qui signifie, a insisté la ministre, qu'elles doivent poursuivre leurs efforts de sobriété et essayer de négocier les meilleurs contrats possibles. 

Le gouvernement a promis de transmettre rapidement des éléments concrets et des exemples chiffrés pour que les élus puissent bien comprendre ce qui va être pris en charge au titre de ces différents dispositifs – les ministres qui les ont présentés, hier, s’étant eux-mêmes quelque peu embrouillés. 

Réactions des associations d’élus

L’AMF a rapidement réagi à ces annonces, hier, en « saluant »  ce dispositif de compensation : « L’AMF avait demandé à ce que toutes les communes et intercommunalités puissent bénéficier de la réouverture des tarifs règlementés de l’énergie et ce dispositif conséquent répond à la demande de l’AMF d’un mécanisme universel. »  Elle souligne en outre que « la facturation directe à l’État par les fournisseurs de la partie compensée soulagera la trésorerie des collectivités. »  L’association se dit maintenant « attentive »  à l’élaboration des décrets et arrêtés qui concrétiseront ces annonces. 

France urbaine a elle aussi salué ces mesures, qui vont « dans le bon sens », mais elle va maintenant sortir les calculatrices pour « en mesurer les impacts réels sur les finances des grandes villes, agglomérations et métropoles ». 

France urbaine « regrette », en revanche, que le filet de sécurité soit « conservé en l’état », car elle estime que la condition d’éligibilité à ce filet de sécurité (baisse de 25 % de l’épargne brute) n’est « pas pertinente ». 

Même réaction du côté d’Intercommunalités de France, qui estime que ces mesures étaient indispensables quand « plus de la moitié des intercommunalités s’attendent à une multiplication par quatre de leur facture d’énergie en 2023 ». Mais l’association estime qu’il faudra « une expertise fine »  pour mesurer les effets de ces mesures. 

Il faut maintenant attendre l’amendement modifiant le filet de sécurité pour en savoir plus. Quant à « l’amortisseur électricité », il devrait faire l’objet de textes réglementaires. 

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