Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 14 mai 2020
Coronavirus

Ehpad et services à domicile, le principe d'une prime acquis

Le personnel des établissements d'hébergement de personnes âgées (Ehpad) va percevoir une « prime exceptionnelle »  liée à la crise du covid-19. Le ministre l'a confirmé par communiqué ce lundi 11 mai. L'annonce était attendue par les professionnels. Le président de l'Ad-PA, Pascal Champvert, l'avait même anticipé en prenant le parti de demander aux directeurs d'Ehpad de s'engager à verser la prime, avant même que le ministre ne garantisse son financement. C'est donc fait.

Un geste bienvenu mais à préciser
Il devenait de plus en plus du difficile de justifier que le travail du personnel des Ehpad, auprès du public vulnérable des personnes âgées dépendantes, ne soit pas également salué par une prime, comme celle promise au personnel soignant des hôpitaux. Depuis le 1er mars, 9 988 décès ont été enregistrés dans des établissements sociaux et médico-sociaux, soit essentiellement des Ehpad, indiquait le ministre de la Santé dans son point du 12 mai - soit près de 37 % des décès. Cette prime est donc « bienvenue et donne du baume au cœur », réagit Pierre Martin, maire de Chauvé, représentant de l'AMF au collège âge du Haut conseil de l’enfance, de la famille et de l'âge. Mais cette annonce reste encore une promesse avec beaucoup d'inconnues. Les professionnels ne sont pas mieux informés par leurs Agences régionales de santé, dans l'attente également des précisions sur les modalités de versement de ces primes.
Ce que l'on sait, c'est que cette prime va être financée par l'Assurance maladie. Elle le fera « dans les prochaines semaines ». Sans certitude donc qu'elle puisse être versée sur la paye de mai. Car il faut encore savoir à qui elle sera versée. Le sera-t-elle à tous les employés, de l'agent administratif à l'infirmière en passant par le cuisinier ? Ou ceux les plus exposés à un contact avec le virus ? Quel sera son montant, 1 000 ou 1 500 euros ? Sera-t-elle calculée au prorata du temps de travail ? Quel que soit le contrat ? Quid des agents en arrêt de travail ? Pour l'heure, la seule précision apportée par le ministère est qu'elle sera de 1 500 euros pour « tous les professionnels des Ehpad, qui ont travaillé dans les trente-trois départements les plus touchés par l’épidémie », et de 1 000 euros dans les 68 autres.

La question du domicile
L'autre forte interrogation porte sur le fait que cette prime soit également versée aux employés et agents œuvrant dans les services à domicile. « La dangerosité est au moins aussi forte à domicile qu'en établissement », relève Pierre Martin. Le ministère s'y engage, en disant qu'elle « sera également versée dans les services d’aide et d’accompagnement à domicile, dont l’engagement durant la crise est à souligner ». Mais les modalités sont encore plus floues, et surtout encore suspendues à des « échanges »  entre l’État et les départements, « dans le respect des compétences de chacun, pour en assurer le financement ». Du côté de l'Assemblée des départements de France (ADF), on indique que « la négociation est toujours en cours »  pour savoir qui prendra quoi en charge. Pour l'ADF, il revient aux départements de décider des montants versés de même que des métiers bénéficiaires, sans généralisation d'emblée. 
Autre principe défendu : cette prime ne doit pas faire oublier la nécessaire revalorisation de ces métiers. « Verser une prime, c'est un beau geste, mais le secteur des personnes âgées manque de reconnaissance tout court et a besoin d'argent sur la durée », souligne Pierre Martin. C'est ce que demandait, notamment, le rapport El Khomri, rendu en octobre 2019, pour revaloriser ces métiers. 
Dernier point polémique : il porte sur le fait que la prime financée par l'Assurance maladie sera aussi versée aux établissements privés à but lucratif. Même ceux qui auraient versé des dividendes à leurs actionnaires, comme le groupe Korian l'annonçait fin avril, à hauteur de 54 millions d'euros. La directrice de la fédération des Ehpad privés, la FEHAP, n'avait pas caché « son malaise »  face à « cette annonce », lors d'une audition de la commission des affaires sociales, fin avril, à l'Assemblée nationale. 

Emmanuelle Stroesser

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