Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du mercredi 23 novembre 2022
Congrès des Maires de France

Face à « l'assèchement » des finances locales, l'AMF espère être entendue par le gouvernement

Lors de la séance solennelle d'ouverture du 104e congrès de l'AMF, hier, ses responsables se sont fait l'écho des difficultés croissantes auxquelles sont confrontées les communes, entre inflation et baisse de leurs ressources.

Par Franck Lemarc

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© A. Faidy

Le président de l’AMF, David Lisnard, a décrit toutes les difficultés auxquelles sont confrontés les maires, « ces praticiens du quotidien », entre « injonctions contradictoires et volonté recentralisatrice »  de l’État. Le « pouvoir et le devoir d’agir »  des maires sont confrontés à d’innombrables défis décrits par le maire de Cannes : « Défi de la transition écologique, défi du numérique, défi économique et social, défi démographique, démocratique, civique, sécuritaire… »  Face à ces défis, « notre pouvoir d’agir est entravé par une perte de pouvoir financier », a fustigé David Lisnard, rappelant non seulement les suppressions successives de recettes fiscales (taxe professionnelle, taxe d’habitation, maintenant CVAE), mais aussi la volonté du gouvernement de remettre en place des « contrats »  visant à réduire la hausse des dépenses de fonctionnement. 

Dans cette situation, la hausse de la DGF prévue dans le projet de loi de finances pour 2023 est, aux yeux de l’AMF, totalement insuffisante. Rappelant, sous les applaudissements de la salle, que « la DGF n’est pas un don mais un dû », David Lisnard a comparé la hausse prévue de 330 millions d’euros de la DGF aux « 800 millions », au bas mot, que l’inflation va coûter aux collectivités cette année. « Au final, le prélèvement de l’État sera supérieur à ce qu’il était quand la DGF était gelée », a martelé le maire de Cannes, qui a, une nouvelle fois, demandé l’indexation de la DGF sur l’inflation. 

David Lisnard s’est également agacé de la suspicion permanente entretenue par l’État sur les dépenses des collectivités territoriales, en multipliant les exemples sur le caractère indispensable de ces dépenses : « Nous nous honorons de recruter des ASH pour permettre aux enfants handicapés d’aller à l’école !  ».

Relation « plus respectueuse » 

Le président de l’association n’a pas ménagé ses critiques envers le gouvernement, notamment sur la question du ZAN : « L’enfer est pavé de bonnes intentions », mais la « bonne intention »  que représente la volonté de limiter l’artificialisation « ne doit pas être un frein aux aspirations au développement des communes rurales ». 

David Lisnard s’est néanmoins félicité d’une relation avec le gouvernement d’Élisabeth Borne – et avec la Première ministre elle-même – « plus respectueuse »  que ces dernières années. Le gouvernement est « à l’écoute »  et « plusieurs avancées »  ont pu être obtenues par l’AMF, notamment sur l’actualisation des valeurs locatives des biens commerciaux et industriels. Le président de l’AMF espère maintenant qu’il sera possible « d’aiguiller l’exécutif vers un nouvel acte de décentralisation », comme le président de la République en a lui-même émis le vœu, reprenant, en octobre, « mot pour mot »  les demandes de l’AMF en la matière. Il reste maintenant à « passer aux actes », a répété le maire de Cannes. 

« Billets de Monopoly » 

Le Premier vice-président de l’AMF, André Laignel, a dressé un tableau bien sombre de la situation des collectivités et des grands services publics. « L’inflation nous taraude. L’Éducation nationale est en train de se déliter en profondeur. L’hôpital public s’assèche, perd ses praticiens et ses personnels. »  Un peu moins optimiste que David Lisnard  sur l’évolution des rapports entre le gouvernement et les associations d’élus, André Laignel a fustigé un gouvernement qui « n’a rien appris en cinq ans de crises ». « Le ton a changé, nous n’en sommes plus aux invectives, mais le fond est resté le même. » 

Le maire d’Issoudun a dressé une longue liste des griefs de l’AMF : les contrats limitant la hausse des dépenses de fonctionnement ? « Un acte de méfiance inacceptable, visant à nous pointer comme de mauvais gestionnaires. »  Les CRTE ? « J’ai signé, mais depuis je cherche désespérément les crédits qui devaient en découler, et je ne les trouve pas. »  La suppression de la CVAE ? « Un nouvel acte de recentralisation. » 

Quant à la hausse de la DGF, très en dessous des chiffres de l’inflation, elle représente « un assèchement de nos finances locales ». Les annonces du gouvernement en matière de soutien face à la hausse du prix de l’énergie ne convainquent pas plus le président du Comité des finances locales : « Ces annonces seront payées en billets de Monopoly. En fait de filet de sécurité, c’est une épuisette aux mailles très larges… » 

André Laignel a certes reconnu que l’AMF a été « écoutée, longuement », par le gouvernement. « Mais rien n’en est sorti. »  Aujourd’hui, les maires en sont à se demander : « Quel service public vais-je devoir réduire ou amputer ? C’est une extrême régression. »  Le maire d’Issoudun a, lui aussi, appelé à une nouvelle et véritable étape de la décentralisation. « L’État n’a rien à y perdre, et la France a tout à y gagner. »   

L'interview de David Lisnard par Maire info hier

David Lisnard, Maire de Cannes, Président de l'AMF from Association des Maires de France on Vimeo.

 

L'interview d'André Laignel par Maire info hier

André Laignel, Maire d'Issoudun (36), Premier vice-président délégué de l'AMF from Association des Maires de France on Vimeo.

 

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