Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 23 septembre 2020
Aménagement du territoire

Comment les sénateurs veulent renforcer l'ingénierie publique locale

Dans un rapport d’information, publié lundi, la délégation aux collectivités territoriales du Sénat vante, à travers 25 propositions, les mérites de « l’ingénierie publique locale ». Elle incite l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) à « sortir de la logique verticale visant à décliner localement les programmes décidés à l'échelle nationale »  pour réduire les inégalités territoriales, criantes en la matière.

Un constat pour commencer. Aujourd'hui, « on peut estimer à 30 000 le nombre de communes ou intercommunalités qui n'ont toujours pas les moyens d'organiser leurs propres services d'ingénierie », écrivent d'emblée les sénateurs Josiane Costes (Cantal, Mouvement radical) et Charles Guéné (Haute-Marne, Les Républicains). Depuis que l'Etat s'est désengagé il y a une dizaine d'années, certains territoires « se sentent abandonnés par les services de l'État », poursuivent les auteurs du rapport d'information sur l'ingénierie locale et l'ANCT. Pour remédier à la situation, l’offre d’ingénierie publique locale s’est structurée au niveau départemental avec l’émergence continue des agences techniques départementales (ATD), plébiscitées pour leur proximité et leur mode de gouvernance partagé entre communes/EPCI et département. Mais « les données issues des études menées par les associations d'élus et de fonctionnaires territoriaux laissent apparaître de fortes inégalités en termes d'accompagnement de projets entre les territoires ». Les moyens humains et financiers sont, en effet, contraints et « l'ingénierie mise en œuvre répond essentiellement à des besoins « ordinaires »  des collectivités locales. Elle s'avère insuffisante pour des projets très spécialisés ou exceptionnels ». 

« Une ingénierie stratégique et de conception » 
Comment, dans ce contexte, accéder à « une ingénierie stratégique et de conception »  qui permette aux collectivités les moins dotées financièrement d'identifier les potentialités de développement de leur territoire et de définir des projets ? Les sénateurs proposent, par exemple, de « recenser dans chaque niveau de collectivité les ressources et compétences locales en ingénierie, qu'il s'agisse des collectivités territoriales elles-mêmes, de leurs groupements, du secteur para-public, privé, associatif ». Par ailleurs, pour augmenter le niveau d’expertise au niveau local, Il est proposé que les collectivités territoriales, leurs groupements et les PETR recrutent les personnels dont elles ont besoin sans qu'il soit possible de leur imposer des seuils démographiques pour le recrutement de certains corps ou grades. Le contrat de projet est aussi encouragé.
Enfin, pour « ouvrir de nouveaux moyens financiers en faveur de l’ingénierie publique locale », les sénateurs recommandent d’exclure du pacte de Cahors toutes les dépenses des départements liées à l'assistance technique et à l'ingénierie et d’affecter une partie des crédits de la DETR et de la DSIL vers les frais de rémunération de personnels dédiés à l'ingénierie, à titre exceptionnel et sur des territoires en besoin tels que les PETR.

Quel rôle pour l’ANCT ?
Pour les élus locaux, écrivent les sénateurs, la priorité est que l'ANCT soit en mesure de sortir de la logique verticale visant à décliner localement les programmes décidés à l'échelle nationale et soit à même de renforcer l'appui aux projets de territoire et l'aide à leur émergence. « En clair, la logique verticale et descendante des appels à projet venant du haut fait que l'aide ne va pas à ceux qui en ont le plus besoin mais à ceux qui disposent déjà d'une capacité technique minimale pour constituer leurs dossiers. Tout l'enjeu de l'ANCT doit donc être de faciliter et d'accompagner l'émergence des projets locaux ».
Les sénateurs invitent donc le gouvernement à « renforcer la dimension interministérielle »  de l’ANCT, qui deviendrait un « acteur de la différenciation et de la subsidiarité », tout en affirmant le rôle du préfet de département « comme interlocuteur unique pour la mobilisation des moyens d'ingénierie de l'Etat et de ses opérateurs. » 
D’un point de vue budgétaire, enfin, les sénateurs recommandent que les 7 millions d’euros, sur les 75 millions d'euros du budget de l'ANCT révisé pour 2020, dédiés à l’ingénierie soient « pérennes et ciblés vers les projets initiés par les collectivités qui en ont le plus besoin ». Ils ne veulent « pas de saupoudrage territorial ».

Ludovic Galtier

Télécharger le rapport.

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