Maire-info
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Édition du mardi 5 avril 2022
Climat

Émissions de gaz à effet de serre : selon le Giec, il ne reste que trois ans pour inverser la tendance

Les experts du Giec ont publié, hier, le troisième volet de leur 6e rapport d'évaluation. Un texte alarmant sur l'urgence des mesures à prendre, et qui montre que les collectivités ont toute leur part à prendre dans l'action collective. 

Par Franck Lemarc

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© Pixabay

Trois ans. C’est, d’après les experts du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), ce qu’il reste à la planète pour inverser la tendance. Si le pic des émissions de gaz à effet de serre (GES) n’est pas atteint en 2025 avec, à partir de là, une décrue, il sera impossible d’attendre l’objectif de limitation du réchauffement global à 1,5 °C.

Actions collectives et individuelles

Or les experts constatent que ce n’est pas le chemin que prend la situation : si une véritable diminution des émissions de GES a été constatée en 2020, elle semble n’avoir été due qu’aux confinements et à la baisse drastique de l’activité due à l’épidémie de covid-19. Mais à peine l’épidémie maîtrisée, l’activité est repartie à la hausse avec un nouveau record historique d’émissions atteint en 2021. Les États ont eu beau s’engager solennellement en 2015, lors des accords de Paris, la réalité est là : la plupart des pays, et en particulier les plus riches d’entre eux, ne respectent pas leurs engagements – puisque le rapport montre que sur environ 200 États dans le monde, seuls 18 ont réellement et durablement diminué leurs émissions. 

Le Giec appelle donc encore une fois à une réduction « rapide, profonde et immédiate »  des émissions de GES, dans tous les domaines les plus émetteurs, à savoir l’industrie, l’énergie, les transports, l’agriculture et le bâtiment. Pour la première fois, soit dit en passant, le Giec insiste sur la possibilité des « individus »  à agir, à leur échelle, en réduisant leur usage de la voiture ou de l’avion ou en adoptant une alimentation moins riche en viande – l’élevage étant une source importante d’émissions de gaz à effet de serre. 

Capter le carbone

Une importante partie du rapport insiste sur la nécessité de changer radicalement les modes de production d’énergie, en renonçant massivement aux énergies fossiles. Le Giec pose des objectifs extrêmement ambitieux à l’horizon 2050 : - 95 % sur le charbon, - 60 % sur le pétrole et - 45 % sur le gaz. Ce qui paraît, pour le moins, assez éloigné de l’ordre du jour lorsque l’on voit la situation provoquée par la guerre en Ukraine, qui met en lumière la dépendance des économies européennes au gaz et au pétrole… sans parler de la réouverture de centrales à charbon pour tenter de pallier la diminution des importations de gaz. 

Le Giec insiste cependant sur le fait que le coût des énergies renouvelables a considérablement diminué, ce qui rend possible, d’après les experts, un recours accru à ces énergies vertueuses. Entre 2000 et 2020 par exemple, le coût de production de l’énergie solaire photovoltaïque a été divisé par six, ce qui le rend compétitif vis-à-vis des énergies fossiles. 

Les experts, s’ils misent sur la réduction des émissions de carbone, soulignent aussi que les technologies de captage et de stockage du carbone produit « progressent »  – bien que trop lentement – et devraient être utilisées massivement. En rappelant que la principale et la plus naturelle des techniques pour capter le CO2 est la plantation d’arbres. Un rappel qui ne paraît pas inutile, si l’on se souvient qu’en novembre dernier, un rapport faisait état d’une augmentation de 22 % de la déforestation de l’Amazonie en un an, où 13 000 km² de forêt (l’équivalent de la surface du Liban) sont désormais supprimés chaque année. 

Ce que peuvent faire les communes et intercommunalités

Le rapport du Giec met également l’accent sur les actions qui sont – en partie du moins – à la main des collectivités : développement des transports collectifs, « électrification des villes », réseaux de chaleur renouvelables, développement des espaces verts et des zones boisées, rénovation thermique des bâtiments, construction de bâtiments aux normes les plus exigeantes… Le Giec insiste notamment sur la nécessité de « densifier »  les villes pour réduire les transports et les réseaux, et de rapprocher autant que possible les lieux de vie des lieux de travail. 

Autant d’actions qui demandent des moyens importants, dont les collectivités, pour ce qui est de la France, ne disposent pas toujours. La parution d’un rapport aussi alarmiste rend toujours plus difficile à comprendre l’obstination de l’État à ne pas vouloir mettre en place des dotations dédiées pour aider les communes et intercommunalités à réaliser, par exemple, leurs plans climat-air-énergie ; ou à diminuer le taux de TVA sur les transports collectifs. Sur le plan financier, d’ailleurs, le rapport du Giec se montre très clair : certes, une politique très ambitieuse en matière de réduction des émissions a un coût non négligeable…  mais ce coût est infiniment moins important que celui des dégâts qu’occasionnerait le dépassement de 1,5 °C de réchauffement à l’horizon 2050.  

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