Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 21 mai 2025
Catastrophes

Plusieurs communes du Var ravagées par des trombes d'eau

Un violent épisode orageux a frappé hier une dizaine de communes du littoral varois, à l'est de Toulon. Trois morts sont à déplorer, ainsi que des dégâts considérables. Les spécialistes du climat redoutent une multiplication de ces épisodes extrêmement intenses.

Par Franck Lemarc

« Une scène de guerre. »  C’est ainsi que le maire du Lavandou, Gil Bernardi, a qualifié l’état de sa commune après le passage d’un orage stationnaire qui a déversé 255 mm d’eau sur certains quartiers en moins de trois heures, hier. Le maire parle « d’une énorme vague », un torrent de boue qui s’est déversé notamment sur le quartier de la Cavalière, emportant tout sur son passage. « Il n’y a plus rien : les routes, les ponts, les dalles, il n’y a plus d’électricité, plus d’eau potable, plus de station d’épuration. » 

Un couple d’octogénaires est décédé au Lavandou, dans des conditions non encore précisées, ainsi qu’une femme emportée avec sa voiture à Vidauban. 

Alertes et PCS

Selon un point de situation publié à 17 h 30 hier par la préfecture, neuf communes ont été touchées par cet épisode (Le Lavandou, Vidauban, Le Luc, La Garde-Freinet, Grimaud, Collobrières, La Môle, Cavalaire et Bormes-les-Mimosas). Les pluies très intenses et « stationnaires »  ont provoqué de rapides montées des eaux et « la destruction de certains ouvrages ». Hier soir, 5 routes départementales étaient totalement fermées, et plusieurs centaines d’habitants restaient privés d’électricité.

Le bilan aurait sans doute pu être plus lourd encore sans le déclenchement de trois alertes « FR-Alert »  (qui se déclenchent sur tous les téléphones portables d’une zone à risque), demandant aux habitants de se mettre à l’abri. L’épisode ayant été anticipé par Météo-France, les maires avaient été invités à mettre en œuvre leur PCS (plan communal de sauvegarde) et notamment à « mettre en sécurité les enfants dans les établissements scolaires ». 

Réchauffement climatique et transformation des villes

Le phénomène qui a touché ces communes est un orage dit « stationnaire ». Il se forme dans les conditions habituelles d’un orage (conflit entre une masse d’air chaude et une masse d’air froid), mais au lieu de se déplacer, poussé par le vent, il reste plusieurs heures au même endroit, soit parce que des vents contraires l’empêchent d’avancer, soit parce qu’il est bloqué par le relief. Les orages stationnaires sont particulièrement dangereux parce qu’ils s’autoalimentent : les fortes précipitations qu’il génère créent une humidité intense qui « remonte »  et continue d’alimenter la force de l’orage. Avec à la clé des précipitations qui peuvent durer plusieurs heures et donner – comme cela a été le cas hier – l’équivalent de deux ou trois mois de pluie dans cet intervalle. Ce qui provoque immanquablement des inondations éclair : hier, le cours de la Môle a grimpé de 6 mètres en deux heures !

Selon les experts en météorologie, ces phénomènes s’aggravent et vont continuer à s’aggraver du fait du dérèglement climatique. L’augmentation de la température moyenne de la Méditerranée et, en contrepartie, la multiplication des « gouttes froides »  (poches d’air polaire qui glissent jusqu’à nos latitudes) provoquent des conflits de masse d’air de plus en plus fréquents et surtout de plus en plus intenses. 
Les conséquences de ces phénomènes de pluie intenses sont aggravées par les phases de sécheresse, elles aussi de plus en plus fréquentes : les sols secs ont bien plus de mal à absorber la pluie, ce qui aggrave le ruissellement. 

Face à ce risque, les experts estiment que la question de la désimperméabilisation des sols est absolument cruciale. S’il semble impossible d’empêcher la survenue de ces orages violents, il est indispensable, estime par exemple l’économiste de l’eau Esther Crauser-Delbourg, de s’attaquer à la question de la « bétonnisation »  des sols et de « transformer nos villes »  pour permettre aux sols d’absorber la pluie. Ce qui doit passer par une « débétonnisation »  massive – des cours d’école, pour ne prendre qu’un exemple. 

Cet enjeu va certainement s’avérer de plus en plus prégnant dans les mois et les années à venir. Si le chef de l’État a promis, hier, que l’état de catastrophe naturelle sera prononcé « au plus vite »  pour les communes frappées hier dans le Var, il ne suffira de traiter le problème après-coup : la question de la prévention et de l’adaptation des communes à cette situation climatique nouvelle va devoir être traitée d’urgence. 

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