Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 7 décembre 2023
Budget de l'état

Budget 2024 : les sénateurs rétablissent une réserve parlementaire via la DETR

Adopté contre l'avis du gouvernement, le retour de ce dispositif permettrait aux sénateurs et députés de soutenir, à travers la dotation d'équipement des territoires ruraux, un projet de subvention jusqu'à 100 000 euros. En outre, 100 millions d'euros ont été affectés à la dotation de solidarité rurale.

Par A.W.

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« Beaucoup de maires nous demandent le retour de la réserve parlementaire ! Ce n’est ni du clientélisme ni du populisme, mais du réalisme, afin de rééquilibrer les aides pour les petites collectivités. »  A une semaine tout juste de la discussion, en séance, d’une proposition de loi transpartisane visant à rétablir la réserve parlementaire, Jean-Marc Boyer (LR) a convaincu, hier, les sénateurs de ne pas attendre et d’en réinstaurer une nouvelle sur la base de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR).

Car, au-delà de ce dispositif, ce sont bien les règles de fonctionnement et les modalités d’attribution de la DETR qui ont été largement ciblées par les membres de la « chambre des territoires », à l’occasion de l’examen des crédits consacrés aux collectivités au sein du projet de loi de finances (PLF) pour 2024.

DETR : au moins 20 % des crédits fléchés via la réserve

Le sénateur du Puy-de-Dôme a donc proposé d’instituer, dans l’enveloppe globale de la DETR, une « dotation parlementaire » qui permettrait aux sénateurs et députés, de soutenir un projet de subvention de leur département, « si son montant s’élève à moins de 100 000 euros ». Pour cela, « un minimum de 20 % »  des un peu plus d’un milliard d’euros de DETR prévus en 2024 « y serait consacré », a-t-il expliqué. 

Une proposition qui a reçu, sans surprise, une fin de non-recevoir de la part de la ministre chargée des Collectivités, laissant peu de chance à cette initiative de survivre à la navette parlementaire. En 2017, « la suppression de la réserve parlementaire faisait partie du choc de confiance souhaité par le président de la République », a ainsi rappelé Dominique Faure, celle-ci ne considérant pas que « son rétablissement soit de nature à réconcilier nos concitoyens avec les élus locaux ou nationaux ».

« Vous n’avez pas utilisé le mot clientélisme, mais vous n’en étiez pas loin », s’est indigné le sénateur de l’Oise Olivier Paccaud (LR) à l’adresse de la ministre, cette dernière réfutant cette accusation : « Pourquoi, lorsqu’un député ou un sénateur accorde une subvention, c’est du clientélisme, alors que cela n’en est pas lorsque c’est le préfet ? » « Certes, il y a eu des excès, mais on les a fait payer à tout le monde […] pour laver plus blanc que blanc », a également déploré Jean-Marc Boyer. 

Défendant le retour de la réserve parlementaire, le sénateur du Gard Laurent Burgoa (LR) a ainsi assuré que « les maires des 349 communes de [son] département [...], quel que soit leur bord politique, regrettent sa suppression. Pourquoi ? Parce qu’elle garantissait l’efficacité des politiques publiques. Parfois, 5 000 euros sont bien utiles à une petite commune ». Et celui-ci de regretter que, lors de l’instruction des dossiers, « pour les projets inférieurs à 100 000 euros, [il doive] insister par écrit auprès du préfet pour qu’il octroie les financements, six à huit mois après ! » 

Si la commission a, de son côté, émis un « avis de sagesse »  au regard du « nombre impressionnant des cosignataires et de la demande forte des territoires », l’une de ses membres, la sénatrice socialiste de la Haute-Vienne Isabelle Briquet, a pourtant fait part de son sentiment « plus que réservée »  sur une telle mesure, estimant qu’« enlever 20 % de la DETR n’est pas judicieux ».

Obligation d’informer les maires

Alors que « les deux tiers des dossiers de DETR, qui ont été rejetés, n’ont même pas fait l’objet d’une réponse au maire », les sénateurs ont fustigé « l’opacité »  et « l’abrutissement technocratique »  auxquels font face ces dossiers. « Un dossier de DETR est parfois refusé avant même d’être instruit en raison de l’avis négatif de l’architecte des bâtiments de France », ont-ils critiqué.

Afin que « les élus et les maires [puissent] comprendre les critères »  de refus, un amendement a été voté pour rendre obligatoire la transmission aux maires des raisons du rejet des demandes de subvention DETR.

A noter également, l’adoption de deux dispositions visant, pour l’une, à rendre possible l’obtention d’une subvention DETR au titre des travaux réalisés par les communes sur des immeubles en péril et, pour l’autre, à supprimer la possibilité laissée au préfet de moduler les taux de subventionnement de la DETR et de la Dsil en fonction du caractère écologique du projet. 

Autant de dispositions qui ont reçu l'avis défavorable de l'exécutif.

100 millions d’euros affectés à la DSR

Parmi la soixantaine d’amendements adoptés hier dans le cadre de la mission « Relations avec les collectivités », on peut retenir l’affectation de 100 millions d’euros issus de l’augmentation de la DGF à la dotation de solidarité rurale (DSR).

« Cette augmentation de 100 millions d'euros de la DSR ne se fera pas au détriment des autres communes car elle est très largement compensée par l’augmentation »  de DGF, explique le sénateur centriste du Cantal, Bernard Delcros, dans son amendement, similaire à celui du gouvernement.

Pour rappel, les sénateurs ont adopté une augmentation de 170 millions d’euros de DGF en première partie du PLF pour 2024 tout en refusant de l'indexer sur l'inflation, contre les 100 millions souhaités par Elisabeth Borne et annoncés lors du congrès des maires.

Sur ce point toujours, les sénateurs ont décidé de bonifier la fraction péréquation de la DSR des communes classées France ruralité revitalisation (FRR), nouveau dispositif qui va venir remplacer les anciennes ZRR. Celles-ci devant « bénéficier d’un soutien accru de l’Etat, pour les aider à surmonter leur handicap géographique et leurs problématiques structurelles », selon l'amendement sénatorial qui a reçu un avis de sagesse de la part de l'exécutif.

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