Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 1er février 2018
Eau et assainissement

L'Assemblée nationale adopte la possibilité de reporter à 2026 le transfert de l'eau et de l'assainissement

La proposition de loi Ferrand-Fesneau relative au transfert des compétences eau et assainissement a été adoptée mardi soir à l’Assemblée nationale, au terme d’un débat dont la longueur a été inversement proportionnelle à celle du texte.
C’est en effet un texte très court (trois articles, deux pages) qui a été adopté. Il permet d’acter ce qui était une revendication de longue date des élus, et une promesse faite par le président de la République et le Premier ministre au 100e Congrès des maires : le transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes ne sera pas totalement obligatoire le 1er janvier 2020. Si une minorité de blocage (25 % des communes représentant au moins 20 % de la population) le demande, le transfert pourra être reporté au 1er janvier 2026 au plus tard. Entre 2020 et 2026, le transfert pourra être redemandé si la communauté le souhaite, mais la possibilité de blocage demeurera, dans les mêmes conditions.
C’est donc une semi-victoire pour les associations d’élus, qui réclament une telle souplesse depuis la loi Notre. Côté verre à moitié plein : la souplesse accordée ; côté verre à moitié vide : plusieurs demandes des associations d’élus, discutées dans l’Hémicycle après le dépôt de nombreux amendements, n’ont pas été retenues. Parmi elles, on retiendra la position défendue par Marie-Noëlle Battistel, qui a déposé un amendement demandant d’une part la suppression de la référence à 2026, et donc la possibilité de reporter le transfert sine die ; et l’extension de cette souplesse au transfert vers les communautés d’agglomération. Car le texte proposé est clair : la minorité de blocage ne peut s’exercer que dans le cadre d’un transfert à une communauté de communes. L’amendement ayant été rejeté, toutes les communautés d’agglomération devront prendre les deux compétences, obligatoirement, dès 2020. Pour l’auteure de l’amendement, le problème est que la grande taille des communautés d’agglomération, depuis les fusions, rendent les territoires très hétérogènes, ce qui risque de poser des problèmes financiers et techniques considérables pour l’exercice des compétences eau et assainissement. La rapporteure du texte, Émilie Chalas, a vigoureusement défendu l’avis contraire : « Une communauté d’agglomération nous semble aussi disposer de la taille suffisante pour qu’une solidarité technique et financière puisse s’opérer. »  La ministre auprès du ministre de l’Intérieur, Jacqueline Gourault, présente lors du débat, a partagé son avis, et l’amendement a été rejeté.
Un autre débat a eu lieu sur la question, déjà largement discutée en commission, de la séparation de la compétence assainissement de celles des eaux pluviales. Plusieurs amendements ont été déposés en ce sens. En vain. Au contraire, le texte a été amendé dans le sens inverse, introduisant dans la proposition de loi l’intégration de la gestion des eaux pluviales dans l’assainissement – alors que cela n’était qu’une jurisprudence, issue d’une décision du Conseil d’État de 2013. Des députés ont tenté de faire valoir que cette jurisprudence, prise pour la communauté urbaine de Marseille, n’était « pas du tout adaptée aux collectivités rurales »  (Alexandra Valetta Ardisson), mais ils n’ont été suivi ni par la rapporteure, ni pas la ministre, ni par la majorité des députés présents.
En plein milieu du débat, notons qu’un amendement déposé par le député Modem Marc Fesneau a bien failli apporter une contrainte nouvelle par rapport à la souplesse accordée. Cet amendement conservait certes l’idée d’une minorité de blocage, mais subordonnait cette possibilité de blocage à « la réalisation d’un bilan de patrimoine exposant l'état des réseaux d'eau et d'assainissement de la commune et les investissements éventuellement nécessaires pour satisfaire aux obligations légales et règlementaires ». La rapporteure elle-même du texte s’est opposée à cette disposition, estimant qu’il n’était « pas opportun de durcir les conditions auxquelles les communes peuvent exercer leur droit d’opposition ». La ministre Jacqueline Gourault a également estimé que cet amendement n’était « pas utile ». Thibault Bazin, député LR de Meurthe-et-Moselle, a résumé le point de vue de beaucoup de députés – et certainement de beaucoup d’élus – en expliquant que ce bilan de patrimoine, forcément très coûteux, « revient donc à dire aux maires qu’il leur faut payer un rapport pour rester libres ». Marc Fesneau a finalement choisi de retirer son amendement.
Interrogée hier par Maire info, Cécile Gallien, maire LREM de Vorey et vice-présidente de l’AMF, s’est « réjouie »  du retrait de cet amendement, « parce qu’il ne rajoutait rien et qu’il représentait une certaine défiance vis-à-vis des communes. D’autant plus qu’on est en pleine période de renégociation des contrats avec les Agences de l’eau et que l’on a aucune idée, aujourd’hui, de ce que les Agences de l’eau vont financer ou non. » 
Le texte va maintenant être déposé au Sénat. Il bénéficie de la procédure accélérée, ce qui signifie qu’il ne sera lu qu’une seule fois dans chaque Chambre.
F.L.
Accéder au texte.

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