Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 13 novembre 2025
Aménagement du territoire

Baisse des ressources du fonds postal national de péréquation territoriale : les élus montent au créneau

Le projet de loi de finances pour 2026 prévoit une baisse de la dotation budgétaire de l'État affectée à la mission d'aménagement du territoire dans le cadre du contrat de présence postale. La nouvelle a fait vivement réagir l'AMF et l'AMRF qui craignent une remise en cause de la présence postale dans les territoires.

Par Lucile Bonnin

Depuis sa création en 2008, le contrat de présence postale (signé entre La Poste, l’État et l’AMF) fixe le cadre de contribution de La Poste pour « contribuer à la mission d’aménagement et au développement du territoire » , adapter son réseau composé de 17 000 points de contact « pour répondre aux besoins des populations desservies »  , et pour « associer les commissions départementales de présence postale territoriale (CDPPT) aux orientations et aux travaux de l’Observatoire national de la présence postale » .

Cette année, le contrat a été prolongé d’un an, jusqu’à fin 2026, en raison de l’absence de présidence du groupe La Poste à l'été. Depuis, Marie-Ange Debon a été nommée présidente du groupe, prenant la succession de Philippe Wahl. 

Bien que ce contrat soit absolument essentiel pour maintenir un maillage postal, le projet de loi de finances pour 2026 prévoit pourtant une réduction des crédits. Une manœuvre immédiatement dénoncée par les élus. 

Une enveloppe qui passerait à 122 millions d’euros

Dans un contexte de disette budgétaire, les crédits consacrés au contrat de présence postale ne semblent pas devoir être épargnés par Bercy. 

Dans le projet de loi de finances pour l’année 2026 une diminution de 44 millions d’euros de la dotation budgétaire de l’État affectée à la mission d’aménagement du territoire confiée à La Poste est prévue, faisant passer la dotation de 120 à 76 millions d’euros. Parallèlement, le rendement de l’abattement de fiscalité locale accordé à La Poste serait en baisse (46 millions d’euros au lieu de 54), en raison de la suppression progressive de la CVAE. Ainsi, le fonds postal national de péréquation territoriale passerait, si ces deux évolutions sont maintenues dans le texte, de 174 à 122 millions d’euros.

Rappelons que ce fonds postal de péréquation territorial peut bénéficier « d’un financement maximal de 531 millions d’euros »  sur les trois années du contrat, soit 177 millions d’euros par an au maximum. Ces 177 millions d’euros se décomposent en une enveloppe principale de 174 millions « provenant d’une dotation budgétaire votée annuellement par le Parlement et des abattements appliqués à la fiscalité locale due par La Poste »  ; et d’une enveloppe « complémentaire » , optionnelle, de 3 millions d’euros, « financée par un abattement sur les taxes foncières dues par les filiales directes et indirectes de La Poste » . Cette enveloppe complémentaire est destinée à être activée si la totalité de l’enveloppe principale est engagée – ce qui n’est jamais arrivé pour l’instant.

Par ailleurs, le montant de ce fonds de péréquation n’a pas évolué depuis 2019. Si cette diminution est actée, cela serait donc une première. La somme de 174 millions d’euros apparaît même déjà relativement faible alors que l’intégralité du coût net de la mission d’aménagement du territoire a été évalué à 322 millions d’euros pour l’année 2023 par l’Arcep.

Sentiment de « déjà-vu » 

C’est loin d’être la première fois que le sujet est mis sur la table. L’année dernière, à l’occasion du congrès de l'Association des maires ruraux de France (AMRF), l’ex-patron de La Poste, Philippe Wahl, avait annoncé la mauvaise nouvelle aux élus : Bercy souhaitait geler 50 millions d’euros sur ce montant de 174 millions d’euros (lire Maire info du 30 septembre 2024). 

L’affaire avait suscité l’indignation des associations d’élus si bien que Michel Barnier, à l’époque Premier ministre, avait reculé. Il avait alors assuré que les crédits seraient finalement maintenus, « jusqu’à la fin de ce contrat de présence postale ». Une promesse qui semble finalement s’être perdue entre les multiples changements de gouvernement (lire Maire info du 7 octobre 2024). 

La présence postale menacée 

C’est dans ce contexte que l’Association des maires et des présidents d’intercommunalité de France (AMF) et l'Association des maires ruraux de France (AMRF) ont adressé la semaine dernière un courrier au Premier ministre Sébastien Lecornu. 

Les associations d’élus mettent en lumière le double impact que ferait peser « cette perte de ressource » . Elle compromettrait d’une part le financement des dépenses obligatoires (estimées à 146,2 millions d’euros) nécessaires au fonctionnement des agences postales communales et intercommunales ainsi que des relais poste. « D’autre part, elle fait disparaitre, de fait, les autres dépenses gérées par les commissions départementales de présence postale territoriale »  qui adaptent les services postaux aux besoins des habitants et participent activement au maintien d’un service public de proximité.

« Sans un article rétablissant la dotation budgétaire de 44 millions d’euros complétée de 8 millions d’euros compensant la baisse d’abattement de la CVAE, c’est donc la mise en œuvre du contrat de présence postale territoriale (…) qui est menacée pour l’année 2026 » . Un amendement allant dans ce sens a d’ailleurs été déposé la semaine dernière par les députés Jean-Pierre Bataille et Michel Castellani.

Au-delà du malus financier que représenterait cette coupe budgétaire, les associations d’élus considèrent que c’est « un signal inquiétant adressé à l’AMF et à La Poste au moment où s’ouvrent les négociations du 7e contrat qui les conduisent à s’interroger sur la volonté de l’État de soutenir la présence physique de La Poste sur l’ensemble de notre territoire ». 

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