Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 5 décembre 2025
Accessibilité

Accessibilité et inclusion : quel bilan après la loi de 2005 ?

20 ans après la loi du 11 février 2005, où en est-on ? C'est ce que l'AMF a cherché à savoir au travers d'une enquête menée auprès de ses adhérents en septembre et octobre. D'évidence, la loi a fait progresser l'accessibilité, mais son caractère universel est loin d'être atteint.

Par Emmanuelle Stroesser

« Beaucoup a été fait, cette loi est très complète et il n’est pas nécessaire d’en produire une nouvelle, mais elle n’est pas suffisamment appliquée », expliquait Isabelle Assih, maire de Quimper (29) et élue référente Handicap et accessibilité de l’AMF avec Xavier Odo, maire de Grigny-sur-Rhône (69), au micro de Maire-info lors du congrès des maires de France. Un avis très largement partagé par les communes et EPCI interrogés (77 % et 89%) selon qui la loi du 11 février 2005 a permis de réelles avancées, « mais des progrès restent à fournir ».  

D'abord, certaines communes, en raison de leur taille et de leurs moyens, rencontrent plus de difficultés. Cela se traduit par de « réelles disparités »  suivant la strate de la commune, observe l’enquête de l'AMF (1). Celles-ci sont notables dans les transports :  à peine une commune sur deux (52 %) de moins de 2 000 habitants juge les transports « plutôt ou totalement accessibles »  contre quasiment la majorité (95 %) des communes de plus de 30 000 habitants. En revanche, ces communes de moins de 2 000 habitants sont plus nombreuses à revendiquer une voirie entièrement accessible (près de 20 % contre 8 % des EPCI). 

Aussi, alors que les élections municipales approchent à grand pas, il est ainsi intéressant de noter que pour encore près de deux communes sur trois (66 %), l’accessibilité physique des bureaux de vote (locaux, isoloirs, urnes adaptées, signalétique…) reste « le principal enjeu des prochaines échéances », « bien que cela relève d’une obligation prévue par le code électoral », rappelle l’AMF.

L’accessibilité des transports, lanterne rouge

Cette loi « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap »  ne se borne pas aux seules questions de l’accessibilité. Mais c’est bien souvent par cette entrée que les communes et leurs intercommunalités ont commencé à travailler, avec l’obligation de mise en accessibilité des établissements recevant du public (ERP). 

L’état des lieux apparaît globalement plus que satisfaisant pour une majorité du panel. Plus de neuf communes et EPCI sur dix jugent « plutôt et totalement accessibles »  leurs ERP. Mais, une fois mis de côté les ERP « plutôt accessibles » , les taux chutent de façon vertigineuse. Ainsi, à peine 5 % de communes de plus de 30 000 habitants estiment que leurs ERP sont « totalement accessibles ». « Les ERP encore non accessibles sont majoritairement des bâtiments anciens, notamment les églises, les mairies ou écoles installées dans des locaux classés », précise l’enquête. 

S’agissant des agendas d’accessibilité programmée (Ad’Ap), à peine 20 % des communes et EPCI l’ont déposé et mis en œuvre « à 100 % » . Tandis qu’environ un tiers des communes de moins de 2000 habitants et des EPCI ne l’ont pas déposé avant la date limite (de 2019). 

Concernant la voirie,  76 % des communes la considère « plutôt ou totalement accessible », contre 61 % des EPCI. C’est dans le domaine de transports que les retours sont les moins bons. Près de la moitié des communes (48 %) jugent leur réseau de transport « peu ou pas accessible ». Le jugement est moins sévère pour les EPCI, puisque seuls 39 % partagent cet avis. Comme le précise l’AMF, il faut rappeler que depuis la loi d’orientation des mobilités, la compétence « transport »  n’est plus exercée par les communes, mais transférée aux EPCI ou, à défaut, à la région.  

Un accompagnement financier réclamé

Le frein financier est considéré comme le principal obstacle par les communes, les EPCI mettant, elles, davantage en cause les freins techniques. Mais tous (communes et EPCI) se rejoignent sur un point : l’augmentation des financements est « l’action prioritaire »  à mettre en place au niveau national pour améliorer l’accessibilité et l’inclusion. Et pourtant, comme l’a souligné Xavier Odo lors du forum, « le Fonds territorial d’accessibilité (par lequel l’État subventionne à hauteur de 50 % les dépenses de travaux et d’équipements de mise en conformité des ERP) est « sous-utilisé »  par les collectivités »  (lire article Maires de France). Un paradoxe qui fait écho à cet avis partagé par une faible part, mais malgré tout notable, des communes et des EPCI (15 % et 13%), qui verraient d’un bon œil un renforcement des contrôles et des sanctions en cas de non-respect des normes d’accessibilité.  

Cela explique sans doute le fort pourcentage de communes et EPCI qui réclament davantage d’informations, de sensibilisation et de formation des élus et des agents (surtout les grandes villes), pour pallier à la méconnaissance des outils existants et des actions à mettre en place. L’accessibilité numérique et des publications des collectivités reste, par exemple, mal investie, car mal identifiée ou comprise selon l’enquête. 

Ecole, crèche et temps périscolaires à investir

Sans surprise, près de la moitié des communes (40 %, mais 60 % pour les communes de plus de 2000 habitants) pointent « le manque d’accompagnants (AESH) tant sur le temps scolaire que sur le temps périscolaire ». Et beaucoup plus dénoncent le manque de place dans les établissements adaptés (Instituts médico-éducatifs,  centres médico-psychologiques, etc.). 

Pour l’inclusion des enfants en situation de handicap en crèche ou dans les accueils de loisirs, l’enquête révèle que « plus de 40 % des communes et 14 % des EPCI ne connaissent pas l’existence du bonus inclusion handicap de la CAF »  ! Et très rares (2 % des communes et 8 % des EPCI) considèrent le montant de ce bonus comme suffisant pour compenser les frais engagés par l’établissement d’accueil du jeune enfant ou l’accueil de loisirs.

Bon point sur l’emploi 

Avec un taux d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale de 7,24 % en 2024, qui plus est en progression (6,89 % en 2023) (2), les communes restent de bons élèves. Selon l’enquête, 62 % des communes de plus de 2 000 habitants et 69 % des EPCI recourent « très majoritairement »  au maintien dans l’emploi, grâce à l’adaptabilité du poste de travail, l’aménagement des horaires, ou encore la promotion du dialogue social.  

(1) Enquête menée du 16 septembre au 10 octobre 2025 auprès de l’ensemble des adhérents de l’AMF. Sur les 6 222 réponses reçues, seuls les 1 553 questionnaires entièrement complétés ont été analysés (représentant 1 644 communes et 39 EPCI).

(2) Ce taux est de 5,90 dans la fonction publique hospitalière et 4,86 % dans la fonction publique de l’État.

Consulter l'enquête de l'AMF. 

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