| Édition du vendredi 12 décembre 2025 |
Fonction publique territoriale
Protection sociale complémentaire : la proposition de loi sur la prévoyance pour les agents territoriaux enfin adoptée !
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Le texte transpose l'accord historique conclu entre les employeurs territoriaux et les organisations syndicales le 11 juillet 2023 sur la protection sociale complémentaire. Le vote conforme de l'Assemblée nationale de la proposition de loi du Sénat portant cette transposition, hier, réjouit toutes les parties.
[Article initialement publié sur le site Maires de France]
Il aura fallu deux ans et demi d’attente pour que l’accord conclu entre les employeurs territoriaux et les organisations syndicales, le 11 juillet 2023, sur la protection sociale complémentaire (PSC) soit enfin transposé par le Parlement. Ce 11 décembre, l’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi sécurisant juridiquement le contenu de ce protocole par 106 voix contre 17 (143 votants, 123 votes exprimés, le groupe RN s’est abstenu, le groupe LFI a voté contre, l’ensemble des autres groupes ont voté pour). Cet épisode clôt un long chapitre d’incertitudes, et près d’un an de cheminement parlementaire pour traduire le résultat du dialogue social territorial.
Déposé le 3 février dernier par la sénatrice Isabelle Florennes (Hauts-de-Seine), le texte a été adopté le 2 juillet au Sénat. Il a été débattu en séance publique hier, comme l’avait demandé le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, selon la procédure dite « de législation en commission », qui permet de passer directement au vote sur l’ensemble du texte amendé en commission. Un moyen de rattraper le temps perdu par le fait que le gouvernement n’avait pas déclaré de procédure accélérée sur ce texte.
Accord signé à l'unanimité
L’État a en effet tout d’abord gardé le silence sur l’accord PSC du versant territorial de la fonction publique. Fruit de négociations collectives entre la Coordination des employeurs territoriaux et les six organisations syndicales représentatives dans les collectivités locales, le document a été signé à l’unanimité. À aucun moment l’État n’est intervenu dans les discussions. Cet accord national, premier du genre, crée un précédent dans l’histoire de la décentralisation. Pour l’anecdote, l’État n’a conclu qu’après ces conclusions unanimes son accord PSC pour ses propres agents… Et depuis 2023, les nombreux ministres de la fonction publique qui se succédé se sont certes dit favorables à une transposition, mais aucun n’a repris ou pu reprendre l’accord dans un projet de loi. Il a fallu attendre 2025 pour qu’enfin le ministère chargée de la fonction publique soutienne un texte législatif de transposition…
Unanimes dans l’accord, unis dans la réaction : les membres de la Coordination des employeurs territoriaux (AMF, AMRF, APVF, CNFPT, Départements de France, FNCDG, France urbaine, Intercommunalités de France, Ville de France, CSFPT) et les six organisations syndicales de la territoriale (CGT, CFDT interco, FO, Unsa territoriaux, FA-FPT, FSU Territoriale) se sont félicités de cette adoption dans un communiqué de presse commun car le texte « permettra aux employeurs publics territoriaux d’apporter une protection efficace face aux risques d’incapacité et d’invalidité aux 2 millions d’agents qui servent au quotidien l’action publique locale ».
Contrats collectifs à adhésion obligatoire
Le texte adopté généralise les contrats collectifs à adhésion obligatoire en matière de prévoyance pour les agents territoriaux (le recours aux contrats individuels labellisés seront exclus). Il porte à 50 % de la cotisation la participation minimale de l’employeur. Il garantit aux agents la prise en charge, par l’organisme assureur avec lequel un employeur territorial a conclu un contrat collectif à adhésion obligatoire, des suites d’états pathologiques survenus avant son adhésion. Les agents en arrêt maladie bénéficient d’une souplesse pour l’adhésion.
Mais alors que l’accord initial prévoyait une application dans un peu plus d’un, la future loi (en attendant sa promulgation) reporte l’échéance au 1er janvier 2029 pour tenir compte du retard pris et pour permettre aux collectivités de passer de nouveaux marchés. Mais les employeurs territoriaux qui le souhaitent peuvent anticiper cette échéance.
Avancée majeure pour les agents territoriaux
« Cet accord marque une avancée majeure pour les agents territoriaux. Il offre un cadre de mutualisation financière plus protecteur pour les collectivités, dans un contexte où leurs marges de manœuvre sont contraintes. Cet accord rappelle une évidence : la prévoyance n’est pas une dépense accessoire. Elle est un investissement protecteur pour les agents, mais également pour les finances publiques à long terme », a estimé le député et rapporteur Stéphane Delautrette (Haute-Vienne).
Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) et porte-parole de la Coordination des employeurs territoriaux (CET), était dans l’hémicycle pour l’occasion s’est réjoui sur les réseaux sociaux du « progrès social majeur et une illustration de l’importance du dialogue social ! C’est une étape décisive pour garantir à tous les territoriaux une protection sociale plus juste, plus lisible et plus sécurisée ».
Attente des décrets
La CET et les organisations syndicales disent maintenant « attend[re], dans les meilleurs délais, la promulgation de la loi ainsi que le travail de rédaction des textes réglementaires nécessaires à son application. À l’avenir, elles entendent que le succès collectif que représente cette démarche de dialogue social puisse inspirer l’engagement de nouvelles négociations sur d’autres thématiques, animées par la détermination et l’esprit de responsabilité qui ont présidé à l’accord du 11 juillet 2023. »
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Budget de l'état
Budget 2026 : comme promis, les sénateurs exonèrent les communes du Dilico
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La Chambre haute a aussi renoncé à la très critiquée fusion des dotations d'investissement. Elle a, par ailleurs, débloqué des financements pour les Conseils d'architecture et les radios associatives menacés de disparition. Pour les petites communes, une aide a été votée afin que la réforme de la protection sociale complémentaire leur soit plus soutenable.
Comme ils s’y étaient engagés, les sénateurs ont largement revu à la baisse l’effort demandé aux collectivités à l’occasion des débats sur la mission qui leur est consacrée, et qui se sont déroulés mercredi dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2026.
Des discussions durant lesquelles, ils ont également voté – presque à contrecœur - la « prime régalienne » de 500 euros attribuée aux maires, dans le but de compenser le temps qu’ils passent à agir en tant qu’agents de l’État. La semaine passée, ils étaient aussi déjà revenus sur la réduction des allocations compensatrices relevant des locaux industriels et sur le resserrement du FCTVA.
Mais, rappelons-le, pour que toutes ces mesures voient le jour, il faudra encore que les parlementaires donnent leur approbation globale au projet de budget. Un assentiment qui reste, pour l’heure, toujours aussi incertain.
Le Dilico revu et divisé par deux
Le président du Sénat, Gérard Larcher, l’avait annoncé lors du dernier congrès des maires : la Chambre haute allait sérieusement revoir l’effort réclamé aux collectivités afin de redresser les comptes publics. L’un de ses objectifs était même d’exonérer les communes de Dilico en 2026 et de « diviser par trois » leur effort total.
Chose promise, chose due. Les sénateurs ont donc « profondément modifié » la mise en œuvre pour l’an prochain de ce dispositif d’épargne forcée créé en 2025. Contre l’avis du gouvernement, ils ont d’abord réduit de plus de la moitié cette contribution des collectivités en la faisant passer de 2 milliards à 890 millions d’euros.
Surtout, ils ont décidé d’en exonérer « entièrement » les communes et de diminuer de moitié celle des intercommunalités, « compte tenu des efforts importants qui leur sont demandés par ailleurs ». De la même manière, les départements verraient le prélèvement qui leur est imposé divisé par deux, soit « 140 millions d’euros ». Un montant jugé « acceptable » au regard de « la mobilisation du fonds de sauvegarde à hauteur de 600 millions d’euros ». Sur ce point, le palais du Luxembourg a d’ailleurs rétabli les conditions d'éligibilité de 2024 afin qu’« une soixantaine » de départements y soit éligibles, et non pas simplement « une trentaine ».
Ensuite, les sénateurs ont choisi de balayer les nouvelles modalités de reversement – très critiquées par les élus locaux – de cette version 2026 du Dilico, en revenant à celles de la version 2025. Ils ont notamment rejeté « le passage à un reversement en cinq ans sans certitude d’un retour aux contributeurs » pour le remplacer par « un reversement sur trois ans avec la certitude qu’il bénéficiera aux collectivités qui ont contribué les années précédentes ».
DETR et Dsil : la fusion abandonnée… à court terme
Autre modification très attendue, l’abandon de la fusion des dotations d’investissements dans un nouveau fonds d'investissement pour les territoires (FIT).
La Haute Assemblée a ainsi rétabli la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), la dotation de soutien à l'investissement local (Dsil) et la dotation politique de la ville (DPV), alors que le gouvernement souhaitait initialement les fondre dans une même enveloppe. À noter que l’exécutif ne s’y est pas opposé et s'en est remis à « la sagesse » du Sénat.
Les sénateurs à l’origine de l’amendement n’ont pas, pour autant, totalement balayé cette idée. Selon Isabelle Briquet (PS) et Stéphane Sautarel (apparenté LR), cette fusion « peut être envisagée à moyen terme », mais « compte tenu de l’importance des dotations d’investissement, notamment pour les collectivités les plus rurales, elle nécessite un important travail en amont pour en définir les modalités et la gouvernance ainsi que pour rassurer quant à son impact ».
En l’état, le FIT comporte, à leurs yeux, « bien trop d’incertitudes » avec « un risque de saupoudrage des crédits et la fin du financement de projets structurants ». Les deux sénateurs craignent ainsi « de nombreux effets redistributifs, qui pourraient pénaliser les collectivités rurales, qui bénéficient aujourd’hui d’une dotation dédiée avec la DETR ». Sans compter que les quelques communes bénéficiaires de la DPV risqueraient même d’être totalement « dépouillées », comme l’avait souligné le coprésident de la commission finances de l’AMF, Antoine Homé, mais aussi le ministre de la Ville, Vincent Jeanbrun, lors du congrès des maires.
Une aide d’urgence pour sauver les CAUE
Les sénateurs se sont aussi attaqués à la question particulièrement urgente des conséquences de la réforme de la taxe d'aménagement. Une réforme « mal préparée et mal exécutée », dont les importantes défaillances dans la collecte de l’impôt mettent en péril les 92 Conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (CAUE) du pays et fragilisent les finances des collectivités.
Une partie de ces organismes qui conseillent gratuitement les collectivités est ainsi en grande difficulté, certains ayant même déjà disparu. Et pour cause, la taxe d’aménagement finance à hauteur de 80 % – via une portion de la part départementale – ces structures d’ingénierie territoriale. Or celle-ci a connu un « effondrement » spectaculaire de sa collecte avec une chute de « 75 % » de son produit par rapport à 2023, selon une évaluation, fin août, de la Fédération nationale des CAUE. Quant à sa part départementale, elle aurait diminué de 40 % en moyenne pour la seule année 2024, selon Départements de France.
Pour y remédier, le palais du Luxembourg a donc approuvé la mise en place d’un « fonds exceptionnel » doté de 270 millions d’euros (comme les députés) pour « compenser » les pertes de recettes subies par les départements et afin de « leur permettre de maintenir le soutien aux CAUE ». Tout cela contre l’avis du gouvernement et de la commission.
Afin d’éviter un autre « cataclysme » en vue, le Sénat a aussi rétabli hier, au niveau de 2025, les crédits destinés aux quelque 800 radios associatives du pays. La baisse de la moitié de ces aides était prévue initialement dans le projet de budget. Les sénateurs ont ainsi adopté un amendement qui augmente de 15,7 millions d'euros les crédits alloués au Fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (FSER), ceux-ci représentant « entre 40 et 50 % » de leurs ressources. En jeu, le risque de voir disparaître « plus de la moitié d'entre elles » et le maintien de « près de 80 % des emplois du secteur, soit environ 2 400 postes directs et indirects ».
Protection sociale : un soutien aux petites communes
Afin d’aider à financer la part obligatoire de protection sociale complémentaire (PSC) des petites communes, les sénateurs ont aussi validé la création d’un « fonds de compensation » à destination de celles de moins de 2 000 habitants bénéficiant de la fraction de la dotation de solidarité rurale (DSR). Une mesure, là aussi, pas au goût du gouvernement ni de la commission qui ont tenté en vain de s’y opposer.
Dans le cadre de la réforme de la PSC, « l’État demande aux employeurs territoriaux […] de remplir une obligation sociale nouvelle et structurante, indispensable pour garantir à tous les agents un accès équitable aux complémentaires santé et prévoyance », ont ainsi rappelé les sénateurs centristes à l’origine des deux amendements adoptés.
Si cette révision est bien considérée comme « une avancée sociale importante au bénéfice des agents actifs et retraités » de la fonction publique territoriale, celle-ci n’est supportée « que par les collectivités ». Or « cela représente un coût de 15 euros par mois et par agent pour la couverture santé et 7 euros par mois et par agent pour la couverture prévoyance », selon les sénateurs.
« Il apparaît donc cohérent, au moment où le Parlement s’apprête à adopter de manière définitive la proposition de loi PSC des agents publics territoriaux [elle a été adoptée entretemps, lire article ci-dessus], que le législateur mette en place un outil financier ciblé pour accompagner celles des collectivités pour lesquelles cette obligation représente un effort significatif », ont-ils défendu.
Après l'avoir complètement récrit, le Sénat doit voter le 15 décembre, en première lecture, sur l’ensemble de ce projet de budget de l’État. Ensuite, celui-ci repartira à l'Assemblée où il pourra être remodifié.
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Fonction publique territoriale
La périodicité des visites médicales obligatoires pour les agents de la FPT passe de deux à cinq ans
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Un décret paru hier au Journal officiel modifie les règles en matière de périodicité des visites médicales d'information et de prévention dans la fonction publique territoriale : elle passe désormais de deux à cinq ans. Explications. Â
Le projet de décret avait été unanimement rejeté par les organisations syndicales lors de son examen au Conseil supérieur de la fonction publique. Pourtant, le gouvernement l’a tout de même publié, au nom de la « simplification ». La réalité est plus triviale : les moyens de la médecine du travail ne permettent tout simplement plus aux employeurs territoriaux de faire effectuer cette visite de contrôle tous les deux ans.
Une proposition du rapport Ravignon
Les règles concernant les visites médicales d’information et de prévention pour les agents de la fonction publique territoriale (FPT) sont codifiées dans le décret n°85-603 du 10 juin 1985. À l’article 20 de ce décret, il était spécifié que ces agents « bénéficient d'une visite d'information et de prévention au minimum tous les deux ans ». Cette visite a notamment pour objet « d’interroger l’agent sur son état de santé, de l’informer sur les risques éventuels auquel l’expose son poste de travail, de le sensibiliser sur les moyens de prévention ».
Le rapport sur « le coût des normes » du maire de Charleville-Mézières, Boris Ravignon, paru en mai 2024, contenait une proposition, parmi bien d’autres, touchant à ce sujet : « La fréquence des visites médicales obligatoires pourrait être allégée et alignée sur les dispositions prévues pour les entreprises ». Boris Ravignon demandait néanmoins que « pour les cadres d’emploi à usure physique ou à risques particuliers », le rythme actuel de visites médicales soit « maintenu ».
Exceptions
Cette proposition a été reprise dans le décret paru ce matin : l’article 20 du décret de 1985 est modifié pour faire passer la périodicité de ces visites médicales de deux ans à cinq ans. Pour les agents occupant des postes à risque, la périodicité va rester à deux ans. À ce sujet, le gouvernement a choisi une rédaction particulièrement compliquée : au lieu d’écrire que les agents « à risque » continuent de bénéficier d’une visite tous les deux ans, il a créé deux articles, le premier disant que ces agents bénéficient d’une visite tous les quatre ans, et le second pour dire que deux ans après cette visite, ils ont droit à une « visite intermédiaire ». « Simplification », quand tu nous tiens…
Qui sont les agents ayant toujours droit à une visite tous les deux ans ? Les personnes en situation de handicap, les femmes enceintes ou venant d’accoucher, des agents réintégrés après un congé de longue maladie, les agents « affectés sur un poste les exposant à un risque particulier pour leur santé ou leur sécurité », et les agents souffrant de « pathologies particulières ». Sont également concernés les agents dont le poste a été aménagé pour des raisons d’âge, de résistance physique ou de santé, et les agents bénéficiant d'une période de préparation au reclassement pour inaptitude.
Toutes les catégories sont concernées
Pour résumer, donc : la périodicité de la visite médicale passe à cinq ans pour tous les agents, sauf les plus fragiles ou les plus exposés qui conservent une périodicité de deux ans.
Attention, cette mesure concerne toutes les catégories d’agents, A, B et C. Dans le communiqué de presse du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale du 17 septembre, ainsi que dans plusieurs comptes-rendus syndicaux, il est fait mention d’une mesure qui toucherait « les seuls cadres d’emploi de la filière administrative pour les agents de catégorie A et B ». Mais le texte initial a été modifié par amendement, et concerne finalement l’ensemble des agents – dans la mesure où, vu le poids de la catégorie C dans la FPT, une mesure qui ne se serait appliquée qu’aux catégories A et B n'aurait eu presque aucun impact.
Les organisations syndicales ont dénoncé une mesure défavorable à la santé des agents, tandis que les employeurs territoriaux ont indiqué, en séance, qu’il s’agissait de s’adapter à la réalité, à savoir le manque criant de médecins du travail rendant impossible une visite tous les deux ans pour presque deux millions d’agents.
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Petite enfance
Entre réformes et pénurie de professionnelles : un état des lieux mitigé de l'accueil de la petite enfance
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Le rapport de l'Observatoire national de la petite enfance (Onape) vient d'être publié par la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf). L'occasion de faire un point sur l'état du secteur de la petite enfance alors que le service public de la petite enfance (SPPE) est en vigueur depuis maintenant une année.
De nombreux bouleversements sont intervenus cette année dans le secteur de la petite enfance. D’abord, depuis le 1er janvier, le service public de la petite enfance a été mis en œuvre, attribuant aux communes de nouvelles compétences en la matière. Puis, un nouveau mode de calcul a été acté pour le complément de libre choix du mode de garde (CMG) destiné aux familles qui emploient directement la personne gardant leur enfant. Tous ces changements interviennent alors que le secteur connaît depuis plusieurs années une grave crise.
La publication récente de l’Observatoire national de la petite enfance (Onape) et ses résultats montrent que les défis pour l’avenir du secteur de la petite enfance sont nombreux et que certaines dynamiques restent préoccupantes.
Accueil, naissances, inégalités territoriales : des tendances qui se confirment
Les statistiques montrent, selon la Cnaf, que certaines tendances se confirment. C’est le cas de la natalité : 661 000 bébés sont nés en France en 2024, soit 2,8 % de moins qu’en 2023. « Ce point historiquement bas est lié principalement au recul de la fécondité, avec un indice de 1,62 enfant par femme en 2024, contre 1,92 en 2016 », peut-on lire dans le rapport.
De même que les naissances, le nombre de places proposées aux familles baisse. En 2023, 1 306 600 places d’accueil sont proposées aux familles, soit une baisse de 0,6 % par rapport à 2022. Cette baisse n’est cependant pas corrélée à la diminution des naissances. En effet, le taux de couverture est bien en-deçà des besoins avec 60,9 places pour 100 enfants de moins de 3 ans. Il faut noter tout de même que ce taux est en hausse de 1,4 point par rapport à 2022.
Localement, entre 2022 et 2023, la Cnaf note que « le taux de couverture progresse dans les zones les moins bien dotées, réduisant ainsi les inégalités territoriales ». « Le nombre de places d’accueil disponibles et le taux de couverture seront accessibles sur le portail OpenData de la Cnaf, avec une nouvelle interface de datavisualisation, en début d’année 2026. »
L’observatoire montre néanmoins que « l’offre d’accueil en crèches progresse, portée par les créations de places dans les micro-crèches financées par la Paje, dont le nombre a augmenté de près de 9,9 % en 2024. »
Aussi, comme l’Observatoire le pointait l’année dernière (lire Maire info du 19 décembre), parmi les EAJE financés par la branche Famille via la prestation de service unique (PSU), l’effort est de plus en plus porté par le secteur privé avec un fort développement des délégations de service public (DSP). Si le nombre d’EAJE gérés par des collectivités baisse depuis 2021, ils représentent 55 % de l’offre de places au total tandis que si le secteur privé a augmenté de 30 % depuis 2019 il n’est gestionnaire que de 1 963 établissements en 2024 contre 6 997 pour les collectivités.
La pénurie de professionnelles ne se résorbe pas
Une très large partie du rapport porte sur la pénurie de professionnelles. Cette pénurie qui s’installe ne permet pas de créer de nouvelles places en crèche et entraîne le gel de nombreux berceaux, laissant ainsi certains parents sans solution d'accueil. Et les chiffres sont inquiétants.
Pour la première fois depuis son lancement, l’Observatoire consacre une partie de son rapport aux besoins de professionnelles en crèche – preuve de l’importance de cette problématique aujourd’hui.
Ainsi, la Cnaf rappelle – à partir d’une enquête réalisée en 2024 – « le nombre d’ETP vacants sur la totalité de la semaine de référence, hors congés ou RTT, s’élève à 13 700. Parmi ceux-ci, 6 300 (soit 46 % du total) le sont depuis plus de 3 mois. On estime que 40 % des crèches sont concernées par une vacance de poste. » Ce sont les gestionnaires publics qui sont les plus concernés par cette pénurie de professionnelles.
Le rapport donne également le taux de vacance par départements : en 2024, 14 départements ont un taux de vacance supérieur à la moyenne nationale située à 8,3 %.
La pénurie de professionnelles ne touche d’ailleurs pas uniquement les crèches. « Amorcée en 2013, la baisse du nombre d’assistantes maternelles se poursuit : - 4,1 % (après - 4,3 % en 2023), soit 9 800 professionnelles en moins par rapport à 2023 ». Le nombre de places offertes diminue forcément alors que c’est l’offre principale d’accueil formel. Les conditions de travail de ces professionnelles s’en retrouvent ainsi détériorées avec un volume horaire de travail qui augmente largement et ce, alors que le salaire horaire net pour la garde d’un enfant n’a que très peu augmenté : il est de 4,04 euros en 2024 (après 3,89 en 2023 et 3,76 en 2022).
Un point sur la réforme du CMG
On retrouve également dans cette publication des informations concernant le Complément de libre choix du mode de garde (CMG). La Cnaf rappelle à cette occasion que, depuis le 1er septembre 2025, « les modalités de calcul du volet relatif à la rémunération du CMG, qui prend en charge une partie du coût de la garde, ont été profondément remaniées afin de rapprocher la dépense supportée par les parents-employeurs de celle qu’ils auraient si leur enfant était accueilli en crèche. »
« Cette réforme du CMG s’inscrit dans les objectifs de la branche Famille pour le soutien au déploiement du service public de la petite enfance (SPPE), dont l’un des axes est de favoriser l’accès réel de tous les enfants aux modes d’accueil. »
De manière simplifiée, il faut comprendre qu’avec la réforme, le montant du CMG devient proportionnel au nombre d’heures de garde et que, comme dans les crèches, désormais plus les enfants sont nombreux, plus le taux d’effort est faible.
La Cnaf estime ainsi que, à recours inchangé, 38 % des bénéficiaires du CMG verraient leur prestation augmenter par rapport à celle dont ils auraient bénéficié sans réforme ; 16 % ne verraient aucune différence et 27 % percevraient un montant de CMG plus faible.
La réforme rebat les cartes du côté des allocataires mais aussi des professionnelles. La réforme pourrait en effet, selon la Cnaf, « conduire à une augmentation du recours à une assistante maternelle. » Encore une fois, sans véritable solution apportée à la pénurie de professionnelles on peut s’interroger sur la manière dont il sera possible de faire face à l’augmentation des demandes…
17 % de l’accueil pris en charge par les collectivités
Après ce très large état des lieux vient forcément la question des financements. « Les dépenses publiques consacrées à l’accueil des jeunes enfants progressent de 4,8 % en 2024 et s’élèvent à 17,5 milliards d’euros », constate la Cnaf.
La branche Famille de la Sécurité Sociale a engagé12 milliards d’euros en 2024, soit 69 % de l’ensemble des dépenses publiques. Les collectivités prennent en charge 17 % des dépenses liées à l’accueil des moins de trois ans (soit 2,9 milliards d’euros). « Elles financent notamment les dépenses de fonctionnement et d’investissements des EAJE et, dans une moindre mesure, les écoles préélémentaires ». De son côté, l’État prend en charge 15 % de ces dépenses (soit 2,6 milliards d’euros).
Enfin, la Cnaf estime le coût d’une place en EAJE PSU à 19 450 euros en moyenne. Ce coût est en hausse de 5 % par rapport à l’année précédente. Rappelons au passage que la PSU va désormais être revalorisée de 2 % « de manière rétroactive à l’ensemble de l’année 2025. » Cette revalorisation était attendue par l’AMF qui en a formulé la demande à de nombreuses reprises, face à la hausse régulière des coûts de fonctionnement. Des précisions devraient prochainement être apportées par la CNAF concernant le montant exact de cette revalorisation.
Par ailleurs, l'AMF signale que les premiers versements aux communes du soutien financier de l'État au SPPE sont en cours. L'Agence des paiements signale que dans certaines communes, la notification par courrier risque d'arriver après le versement. 3 300 communes vont en effet recevoir un soutien financier de l'État pour la mise en place du service public de la petite enfance pour un total de 86 millions d’euros.
Consulter l'Observatoire.
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Agriculture
Dermatose nodulaire : affrontements en Ariège, nouvelles mesures de surveillance et de prévention instaurées par arrêté
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Alors que des affrontements violents se sont produits hier soir en Ariège entre éleveurs et forces de l'ordre, un arrêté paru ce matin au Journal officiel instaure une nouvelle zone de vaccination obligatoire.Â
Réapparue en Savoie en juin dernier, la DNC (dermatose nodulaire contagieuse) n’est toujours pas éradiquée dans le pays, malgré les mesures rigoureuses prises par le gouvernement. Pire, elle gagne de nouvelles régions. Avant-hier, un foyer a été repéré dans une exploitation des Hautes-Pyrénées, ce qui a entraîné des mesures de restriction et de surveillance dans les départements voisins (Pyrénées-Atlantiques, Gers et Haute-Garonne).
Affrontements en Ariège
Un autre foyer a été repéré, mercredi 10 décembre, en Ariège, dans le village de Bordes-sur-Arize. La décision d’abattre les 207 vaches de l’élevage a provoqué la colère des éleveurs, relayée – ou alimentée – notamment par la Coordination rurale, syndical agricole né d’une scission de la FNSEA, dont certains dirigeants sont proches du Rassemblement national et dont la ligne semble de plus en plus dure. Le nouveau président de la CR, Bertrand Venteau, a notamment déclaré au moment de son élection, en novembre dernier : « Les écolos veulent nous crever, nous devons leur faire la peau », propos qui ont conduit à l’ouverture d’une enquête par le parquet d’Auch.
La Coordination rurale, ainsi que la Confédération paysanne – elle, en revanche, très marquée à gauche –, ont appelé hier les agriculteurs à « défendre » la ferme de Bordes-sur-Arize et à empêcher les services vétérinaires d’y accéder pour procéder à l’abattage du troupeau. La ferme a été encerclée de tracteurs, des arbres ont été abattus pour fermer les routes, et des tranchées ont même été creusées, selon les médias présents sur place.
D’importants effectifs de gendarmerie, équipés de véhicules blindés Centaure, ont été dépêchés sur place, et des affrontements violents ont eu lieu toute la soirée – avec jets de projectiles et de cocktails Molotov d’un côté et grenades lacrymogènes et grenades assourdissantes de l’autre. Environ 400 agriculteurs ont pris part à ces affrontements, mais le ministère de l’Intérieur parle également ce matin d’éléments extérieurs, faisant partie de « l’ultragauche ».
La ferme a été « reprise » par les forces de l’ordre vers 23 heures. Mais la mobilisation ne s’arrête pas : depuis hier soir, plusieurs dizaines de tracteurs bloquent l’autoroute A75, d’abord à Séverac-le-Château (Aveyron), puis à Saint-Chély-d’Apcher (Lozère). La préfecture de la Lozère indique ce matin, par communiqué, que l’autoroute reste fermée dans ce secteur. À plusieurs endroits, comme on peut le voir sur des vidéos diffusées sur X, des agriculteurs ont abattu des arbres et les ont tractés sur l’autoroute.
D’autres actions ont débuté ce matin devant des préfectures, notamment à Agen (Lot-et-Garonne) et à Périgueux (Dordogne). Le président de la CR, Bertrand Venteau, a demandé hier à la ministre de l’Agriculture, Annie Genevard, d’arrêter de « s’entêter », sans quoi elle risque de « mettre la ruralité à feu et à sang ». La Coordination rurale, comme la Confédération paysanne, demandent au gouvernement de reconnaître « l’échec » du protocole fixé par le ministère pour éradiquer la DNC, et d’y renoncer – notamment le fait d’abattre la totalité d’un troupeau lorsqu’une seule bête est atteinte. À noter que la FNSEA, elle, est sur une position tout autre, estimant que la stratégie du gouvernement est la seule possible.
Nouvelles zones de vaccination obligatoire
En début de semaine, la ministre de l’Agriculture estimait, au sortir d’une réunion du Comité national d'orientation de la politique sanitaire animale et végétale, que la stratégie choisie portait ses fruits, puisqu’elle a permis de « lever trois des cinq zones réglementées mises en place autour des foyers ». Cette stratégie, pour mémoire, repose sur « trois piliers » : abattage de l’ensemble des bovins du foyer, limitation des mouvements et vaccination rapide obligatoire autour des foyers.
Ce matin, au Journal officiel, un nouvel arrêté est paru pour modifier certaines règles de surveillance et de prévention de la maladie.
Cet arrêté fixe une obligation de vaccination de tous les bovins sur l’ensemble de la Corse, ainsi que dans toutes les communes de l’Aude, de la Haute-Garonne, du Gers, des Landes et des Pyrénées-Atlantiques. Dans ces départements, la sortie des bovins des zones de vaccination est interdite. Par ailleurs, sur l’ensemble du territoire métropolitain, les « manifestations et rassemblements temporaires » de bovins sont interdits jusqu’au 1er janvier 2026.
Le gouvernement ne semble toujours pas décidé, en revanche, à vacciner l’ensemble du cheptel, comme le demande notamment la Confédération paysanne.
La colère ne retombe pas parmi les éleveurs, et si une nouvelle décision d’abattage d’un troupeau devait être prise dans les prochains jours, elle pourrait encore s’amplifier. Le gouvernement redoute maintenant des mouvements de blocage à l’occasion des prochains grands départs pour les congés de Noël.
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