Édition du vendredi 5 décembre 2025

Politique de la ville
Dans les quartiers, la Cour des comptes suggère de transformer l'abattement de taxe foncière des bailleurs sociaux
Les magistrats financiers proposent de transformer en « subvention plus classique » cette niche fiscale créée en 2001 notamment pour compenser la dégradation des parties communes des immeubles HLM. Jugée « peu lisible » et insuffisamment contrôlée, elle constitue une perte de recettes non négligeable pour les collectivités.

L'abattement de taxe foncière dont bénéficient les bailleurs sociaux souffre « de nombreuses imperfections, qui justifient de le réformer ». Après l’ancienne ministre de la Ville, Juliette Méadel, qui l’avait dans son viseur, c’est au tour de la Cour de comptes de s’attaquer à ce dispositif fiscal de la politique de la ville instauré en 2001 qui permet de compenser la dégradation des parties communes des immeubles HLM et leurs abords. 

En ces temps de contraintes budgétaires, l’enjeu est important à la fois pour les bailleurs sociaux, l’Etat mais aussi les collectivités. Estimé à 315 millions d’euros en 2024, cet abattement constitue, en effet, une perte de recette fiscale non négligeable pour ces dernières puisqu’elle n’est compensée par l’État qu’à hauteur de 40 % (126 millions d’euros). L’an passé, elles ont donc perdu quelque 189 millions d’euros du fait de ce dispositif fiscal.

Un pilotage « peu lisible »

Pérennisé jusqu’en 2030, cet abattement permet aux bailleurs sociaux de bénéficier, dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV), d'une réduction de 30 % de la taxe foncière. En contrepartie, les organismes HLM doivent mettre en place des actions, des projets ou des travaux, visant à améliorer le cadre de vie des habitants et la qualité des services qu’ils rendent dans ces quartiers. Des contreparties qui sont d’ailleurs précisées dans une convention triennale (signée entre l’État, les collectivités territoriales et les bailleurs) et annexées au contrat de ville.

Seulement, celui-ci comporte des « imperfections multiples », constatent les magistrats financiers. D'abord, ils pointent un pilotage « peu lisible » et « à géométrie variable ». Selon eux, le rôle de chaque acteur à l’échelon national est « difficile à appréhender » et celui de l’État est « morcelé » entre trois directions et l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). 

En outre, « aucun outil n’existe pour le suivi des conventions d’abattement au plan national ou pour comparer les actions des bailleurs sociaux et leurs coûts hors et dans les QPV ». Sans compter qu’« aucune entité centrale de l’État ne dresse de bilan ou d’évaluation du dispositif », seule l’Union sociale pour l’habitat (USH) s’y attelle mais est « partie prenante » puisqu’elle est représentante des bailleurs sociaux. Par ailleurs, la Cour juge « faible » la connaissance de l’emploi de la dépense fiscale, bien que celle-ci ait bondi de 85 % entre 2019 et 2024, du fait notamment de la réforme de la taxe foncière.

Contrôle « faible » et « inégal »

Elle estime également qu’il faudrait « recentrer » l’usage du dispositif sur sa « finalité initiale ». « Faute de définition précise », certaines actions financées par cet abattement relèvent ainsi de « l'entretien normal ». Et « faute d'obligation précise » là aussi, elles sont parfois « reportées d'une année sur l'autre » ou « déployées dans un autre QPV ». « Un meilleur cadrage (...) s’impose donc », selon la Cour.

Elle critique aussi un « contrôle de la réalité des actions menées au titre de l’abattement (...) faible et inégal selon les territoires ». De plus, elle rappelle que la restitution totale ou partielle de l’abattement, dans le cas où le montant des contreparties est inférieur au montant de l’abattement, n’est pas prévue. « Les préfets et les maires ne disposent pas de leviers d'action, sauf à dénoncer la convention d'utilisation de l’abattement de TFPB, ce qui constitue une sanction peu adaptée », soulignent les magistrats financiers.

Afin de corriger cette situation, ils réclament « a minima » le renforcement des contrôles, mais suggèrent également d’étudier la possibilité de transformer cet abattement en « un dispositif de subvention plus classique, à l’instar des autres outils de la politique de la ville ».

Les bailleurs très « réservés » sur une subvention

Une idée qui ne convainc guère puisque l'Union sociale pour l’habitat (USH), comme l’ANCT, ont fait part de leurs « réserves » - si ce n’est de leur « très grandes réserves » -  quant à cette hypothèse, dans leur réponse à la Cour.

Se disant « très attaché » à ce dispositif, l'USH souligne « la souplesse et la flexibilité » du dispositif actuel, alors que « le passage à un modèle de subvention risquerait d’introduire une logique d’appel à projets inadaptée » qui « risquerait d’alourdir les procédures administratives, de fragiliser la gouvernance partagée installée entre État, collectivités et bailleurs, et de priver les territoires de la visibilité pluriannuelle que permet aujourd’hui la convention d’abattement TFPB ». 

Même chose du côté de l'ANCT qui estime, toutefois, qu’un « meilleur pilotage, une clarification des rôles et un suivi avec des instances de contrôle mieux définies pourraient permettre de conserver une souplesse dans le financement de projets locaux répondant à des enjeux spécifiques aux quartiers ». 

Plus globalement, le rapport de la Cour recommande donc de s'assurer de la transmission aux préfectures des montants exonérés, de renforcer le système de contrôle, mais aussi d’élaborer un guide des bonnes pratiques et de permettre la remise en cause - partielle ou totale - d'« un abattement non dûment justifié ».

Consulter le rapport.




Urbanisme
Urbanisme et salubrité publique : un risque de pénurie d'eau peut justifier un refus de permis, confirme le Conseil d'État
Par un arrêt du 1er décembre, la Haute juridiction retient qu'un maire peut refuser une demande de permis de construire si le projet est susceptible de porter atteinte à la ressource en eau de la commune. Une clarification bienvenue.

La sécheresse peut-elle entraîner un refus de permis ? Par un arrêt qui devrait mettre fin aux tergiversations des juges du fond, les Sages du Palais-Royal viennent de répondre par l’affirmative, au titre de l’atteinte à la salubrité publique. 

L’affaire remonte à 2023, dans le Var : après un été caniculaire et une sécheresse hivernale exceptionnelle, les maires des 9 communes du Pays de Fayence (31 000 habitants) décident d’instaurer un « plan pour la maîtrise de l’urbanisme et la réduction des consommations d’eau », prévoyant une « pause de l’urbanisme » pour une période de 5 ans (lire Maire info du 27 février 2023). 

Construction nouvelle et consommation d’eau

Dans ce contexte, le maire de la commune de Fayence refuse, par un arrêté du 3 février 2023, un permis de construire portant sur la réalisation d’un immeuble de cinq logements. Un an plus tard, par un jugement du 23 février 2024, le tribunal administratif de Toulon rejette la demande du promoteur visant à faire annuler l’arrêté du maire, estimant que ce dernier a pu « légalement fonder son refus sur un motif tiré d'une atteinte à la salubrité publique au sens de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ». 

Par son arrêt du 1er décembre, la Haute juridiction confirme le jugement du TA fondé sur cet article R.111-2, qui prévoit qu’un projet « peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ».

Pour le Conseil d’État, « en jugeant que l'atteinte qu'une construction nouvelle est, par la consommation d'eau qu'elle implique, susceptible de porter à la ressource en eau potable d'une commune, relève de la salubrité publique au sens des dispositions de l'article R.111-2 du code de l'urbanisme (…}, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit ». Autrement dit, un risque de pénurie d’eau relève bien de la salubrité publique, et peut donc justifier un refus de permis.

Approvisionnement par camion-citerne

Pour prendre sa décision, le maire de Fayence s’est fondé sur une étude réalisée en juillet 2021, attestant « du niveau préoccupant d'insuffisance de ces ressources en eau (…) en raison de l'assèchement de deux forages et du faible niveau d'un troisième », et concluant « à l'impossibilité à brève échéance de couvrir l'évolution des besoins en eau potable ». A cela s’est ajoutée la sècheresse de l'été 2022, ayant « entraîné des limitations de la consommation d'eau courante par foyer dans l'ensemble de la commune et la mise en place de rotations d'approvisionnement par camion-citerne ». 

En s’appuyant sur ces données pour rendre sa décision, le tribunal administratif s’est fondé sur « une appréciation souveraine des faits de l'espèce qui, exempte de dénaturation, n'est pas susceptible d'être remise en cause par le juge de cassation », estime le Conseil d’État. Et si la raréfaction des ressources devenait un paramètre incontournable de l’aménagement des territoires ?

Arrêt du Conseil d’État du 1er décembre 2025, n° 493556




Fonction publique
Fonction publique : pas d'augmentation générale des salaires en vue en 2026
Alors que le projet de loi de finances est toujours en discussion au Parlement, le ministre délégué chargé de la Fonction publique, David Amiel, a confirmé le maintien du gel du point d'indice en 2026, juste avant de recevoir pour la première fois les employeurs territoriaux.

Il ne veut pas « détruire les services publics » mais les « améliorer ». Invité de France Info le week-end dernier, David Amiel, ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l’État, a annoncé qu’il n’y aurait pas de revalorisation salariale globale dans la fonction publique en 2026.

« Dans le contexte actuel, on ne pourra pas avoir une augmentation générale des rémunérations dans la fonction publique. Tout le monde connaît la contrainte budgétaire dans laquelle on est », a expliqué l'ancien député de Paris, en estimant « qu’il y a un sujet structurel de manière générale pour nos finances publiques ».

Améliorer l’accès au logement

Après avoir été augmenté de 3,5 % en 2022 et de 1,5 % en 2023, le point d'indice sera à nouveau gelé pour la troisième année consécutive, ce qui impactera le pouvoir d'achat des fonctionnaires, également touchés par le non-versement de la Gipa (Garantie individuelle de pouvoir d’achat) en 2024 et 2025. 

Néanmoins, le ministre délégué propose de travailler sur les conditions de vie des fonctionnaires, « en rapprochant leur domicile de leur lieu de travail ». « Il y a beaucoup de choses à faire pour améliorer la vie quotidienne des agents publics, y compris sur des choses qui pèsent sur leur pouvoir d’achat, notamment la question du logement », a-t-il indiqué.

Il travaille ainsi sur une proposition de loi, avec le ministre du logement, Vincent Jeanbrun, qui devrait être examinée « en priorité » dans les semaines à venir. Son objectif est « d’améliorer l’accès au logement des travailleurs de première ligne, les aides soignantes, les infirmières, les policiers, les enseignants, qui souvent habitent à une ou deux heures de leur lieu de travail et qui parfois jettent l’éponge pour cette raison ».

Dans ce contexte, il a reçu la Coordination des employeurs territoriaux (CET) et les représentants des principales associations d’élus locaux, lundi, pour une première rencontre. « Malgré les incertitudes, (il y a) une volonté partagée d’avancer dans l’intérêt des agents », a souligné sur X le porte-parole de la Coordination des employeurs territoriaux, Philippe Laurent, au sortir d’une réunion qui « a permis d’aborder les enjeux d’attractivité et de dialogue social ».

Plus de 3 000 suppressions de postes annoncés

Pour tenter de maintenir le déficit public à 4,7 % en 2026, le gouvernement table aussi sur une réduction conséquente du nombre de fonctionnaires. Au cours de la même interview, David Amiel a confirmé la suppression « d'un peu plus 3000 emplois publics en net », sauf aux ministères de l'Intérieur, des Armées et de la Justice. « Mais dans le reste des ministères, on fait des économies considérables et ça permet, au global, d'avoir une baisse des agents de l'Etat l'année prochaine », a-t-il assuré, avant de défendre la liberté des des collectivités territoriales d'embaucher de choisir entre les embauches et les investissements.

Du côté des collectivités, il a dit « croire en (leur) libre administration ». « C’est le choix des maires, des présidents de régions et de conseils départementaux ».

Selon l'estimation trimestrielle d'emploi salarié de l'Insee, le nombre d’emplois dans la fonction publique a bien augmenté au 3e trimestre 2025 (+16 600 emplois, soit +0,3 %). Il se situe même bien au-dessus de son niveau d’avant crise sanitaire (+ 200 000). Si l'étude ne permet pas de savoir précisément quelles versant de la fonction publique sont concernés par cette hausse au 3e trimestre 2025, il apparaît néanmoins que l'emploi salarié non marchand a augmenté dans l'enseignement (+ 9 500), dans l'administration publique (+ 4 400) et dans la santé publique (+ 3 600).

Mais, selon le ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l’État, le nombre d'emplois de fonctionnaire n'est pas responsable des déficits successifs. « Quand vous regardez sur une longue période, ce qui est quand même intéressant, c'est que vous voyez la part de l'emploi public dans l'emploi total en France qui a plutôt tendance à baisser, a-t-il assuré. Ce n'est pas là qu'est la raison de l'augmentation de la dette considérable depuis plusieurs décennies. » Selon le site spécialisé Fipeco, « la part de la fonction publique dans l’emploi total est passée de 19,7 % en 1997 à 19,8 % en 2020 puis 19,1 % en 2022 et 2023 ».

Déploiement de l'IA générative

Le 18 novembre, la France et l'Allemagne ont signé un partenariat pour déployer des outils utilisant l'intelligence artificielle génératives (IAG) dans leurs administrations publiques. Les sociétés européennes Mistral AI et SAP SE seront au coeur du dispositif. Objectif? « Améliorer l'efficacité, la transparence et la réactivité des services publics », selon le communiqué de presse.

« Ça va permettre de libérer du temps aux agents pour qu'ils passent, eux, plus de temps au contact du public », a assuré David Amiel, se défendant de toute velléité de remplacer des fonctionnaires par l'IAG. En France, 10 000 agents l’utilisent déjà dans leur travail dans le cadre d’une expérimentation.




Société
En zone rurale comme en zone urbaine, l'accès à l'examen du permis de conduire reste difficile
Des délais pour pouvoir passer l'examen au permis de conduire qui s'allongent, des auto-écoles menacées de fermeture, une pénurie des inspecteurs qui peine à se résorber : les tensions restent fortes dans certains départements pour obtenir un permis de conduire.

Le 29 septembre 2025, un mouvement de grève avait été initié par plusieurs fédérations d’auto-écoles afin d’alerter sur la problématique de l’allongement des délais d’inscription pour l’examen du permis de conduire (lire Maire info du 29 septembre). 

Encore récemment, plusieurs parlementaires ont interpellé le gouvernement à ce sujet. C’est le cas notamment du député Sébastien Saint-Pasteur (Gironde) qui pointe – à l’occasion d’une question écrite – « des délais de représentation de plusieurs mois, très au-delà de l’objectif de 45 jours fixé lors de la loi d’orientation des mobilités, alors même que la demande d’examens a augmenté d’environ 16 % en six ans, sous l’effet notamment de l’abaissement de l’âge du permis B à 17 ans et de la montée en puissance des dispositifs de financement (CPF, etc.) ». 

En cause principalement : un manque d’IPCSR (inspecteurs du permis de conduire et de la sécurité routière, qui sont des fonctionnaires de l’État) face à une augmentation du nombre de candidats au permis. 

En ville comme à la campagne, le phénomène s’installe 

Dans des territoires ruraux ou périurbains où les transports en communs sont loin d’être suffisants, le permis de conduire est une condition d’accès à l’autonomie et à l’insertion professionnelle pour les jeunes. Selon une étude de l’institut Terram, 69 % des jeunes ruraux disent dépendre de la voiture quotidiennement (lire Maire info du 23 mai). 

Dans ces territoires ruraux, le député de l’Aveyron Stéphane Mazars observe un « sentiment d’abandon et de relégation territoriale ». Si les délais pour passer le permis de conduire son trop longs, « les délais pour obtenir une nouvelle date d’examen – notamment après un échec – atteignent désormais quatre à six mois, voire davantage ». Rappelons que le délai médian national entre deux passages de l’épreuve pratique du permis de conduire s’établit à 77 jours avec des écarts territoriaux très marqués. « Dans certaines zones rurales du Nord, ce délai peut atteindre jusqu’à neuf mois », ajoute le député. 

Mais on constate aussi ces dérives dans des territoires plus urbains. « Dans les Hauts-de-Seine voisins, des candidats rapportent attendre huit mois pour passer l’examen. En Seine-et-Marne, un collectif de gérants d’auto-écoles dénonce la perte de 900 places d’examen entre mars 2024 et mars 2025. Une auto-école de Seine-et-Marne a signalé avoir 69 candidats en attente pour un premier passage depuis juin 2024 », rapporte la députée de Seine-Saint-Denis Aurélie Trouvé. « Cette crise, loin d’être isolée, est symptomatique d’une problématique qui s’étend à la France entière », ajoute-t-elle. 

Des situations d’annulations sont aussi à déplorer. Selon la députée des Alpes-Maritimes Christelle D'Intorni, « depuis plusieurs mois, de nombreux candidats font état d’annulations répétées, voire de dernière minute, de leur examen pratique » parfois même « quelques minutes avant l’épreuve » « faute d’examinateurs disponibles ou de remplaçants désignés ». La députée déplore « une grande détresse et un sentiment d’injustice chez les jeunes candidats ». 

Des réponses du gouvernement mais des moyens limités

Le gouvernement a apporté plusieurs réponses aux questions écrites des députés. 

Il a d’abord été annoncé en septembre la création de 80 000 places d’examens supplémentaires pour le permis B d’ici la fin 2025. « Cette mesure ambitieuse a pour objectif principal de répondre à la forte demande et de réduire les délais d’attente, particulièrement dans les départements en tension ». 

Concernant les recrutements d’inspecteurs, « 88 ont été recrutés en 2024 par concours dont 38 postes supplémentaires, 108 en deux concours en 2025 et 10 postes supplémentaires seront créés dès 2026, afin de renforcer la capacité de réalisation d’examens pratiques ». 

Aussi, « dans chaque département où le délai médian dépasse 80 jours » un comité de suivi a été ou va être créé afin de réunir les services de l’État et représentants des auto-écoles. « Ce comité placé sous l’autorité du préfet permettra de dresser un état des lieux et de piloter finement la production de places. »

Dans de nombreux cas de figure, le gouvernement a sollicité des inspecteurs retraités « pour réaliser des examens sous conventions et appuyer ainsi les départements en tension ». Les réponses du gouvernement se font au cas par cas avec les bureaux éducation routière des départements. Par exemple, des solutions sur-mesure ont été trouvées dans le Loir-et-Cher pour pallier les arrêts maladie prolongés de deux inspecteurs.

Cependant ces réponses ne visent pas à réduire durablement la pénurie d’inspecteurs. « La profession d’inspecteur souffre en outre d’un déficit d’attractivité manifeste : modalités d’accès exigeantes, première affectation souvent éloignée du département d’origine, niveau de rémunération peu incitatif en début de carrière. Autant d’éléments qui freinent les vocations et aggravent la pénurie », a rappelé le son côté le député du Morbihan Paul Molac. Ce manque d’inspecteur « impacte également les professionnels et les autoécoles qui font face à un véritable manque à gagner », ajoute le député de Saône-et-Loire Éric Michoux. « La fermeture de ses structures serait désastreuse » notamment pour les zones rurales « où le permis de conduire est une nécessité pour faire ses courses, se soigner, travailler, étudier ou encore accéder à la culture. »

Il semble qu’aucune rupture de ce phénomène inquiétant ne se profile véritablement à l’horizon puisque, comme le souligne le député Sébastien Saint-Pasteur, les crédits alloués à l’éducation routière et au fonctionnement concret des examens sont en baisse, « alors même que les indicateurs de délais d’accès à l’épreuve pratique se dégradent et que les difficultés de recrutement demeurent. » Le député propose de « redéployer une partie des crédits aujourd’hui consacrés aux grandes campagnes nationales vers ces recrutements et vers le renforcement de l’éducation routière de terrain, de manière à réduire les délais d’examen et à sécuriser réellement l’accès des jeunes au permis de conduire. »




Accessibilité
Accessibilité et inclusion : quel bilan après la loi de 2005 ?
20 ans après la loi du 11 février 2005, où en est-on ? C'est ce que l'AMF a cherché à savoir au travers d'une enquête menée auprès de ses adhérents en septembre et octobre. D'évidence, la loi a fait progresser l'accessibilité, mais son caractère universel est loin d'être atteint.

« Beaucoup a été fait, cette loi est très complète et il n’est pas nécessaire d’en produire une nouvelle, mais elle n’est pas suffisamment appliquée », expliquait Isabelle Assih, maire de Quimper (29) et élue référente Handicap et accessibilité de l’AMF avec Xavier Odo, maire de Grigny-sur-Rhône (69), au micro de Maire-info lors du congrès des maires de France. Un avis très largement partagé par les communes et EPCI interrogés (77 % et 89%) selon qui la loi du 11 février 2005 a permis de réelles avancées, « mais des progrès restent à fournir ».  

D'abord, certaines communes, en raison de leur taille et de leurs moyens, rencontrent plus de difficultés. Cela se traduit par de « réelles disparités » suivant la strate de la commune, observe l’enquête de l'AMF (1). Celles-ci sont notables dans les transports :  à peine une commune sur deux (52 %) de moins de 2 000 habitants juge les transports « plutôt ou totalement accessibles » contre quasiment la majorité (95 %) des communes de plus de 30 000 habitants. En revanche, ces communes de moins de 2 000 habitants sont plus nombreuses à revendiquer une voirie entièrement accessible (près de 20 % contre 8 % des EPCI). 

Aussi, alors que les élections municipales approchent à grand pas, il est ainsi intéressant de noter que pour encore près de deux communes sur trois (66 %), l’accessibilité physique des bureaux de vote (locaux, isoloirs, urnes adaptées, signalétique…) reste « le principal enjeu des prochaines échéances », « bien que cela relève d’une obligation prévue par le code électoral », rappelle l’AMF.

L’accessibilité des transports, lanterne rouge

Cette loi « pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes en situation de handicap » ne se borne pas aux seules questions de l’accessibilité. Mais c’est bien souvent par cette entrée que les communes et leurs intercommunalités ont commencé à travailler, avec l’obligation de mise en accessibilité des établissements recevant du public (ERP). 

L’état des lieux apparaît globalement plus que satisfaisant pour une majorité du panel. Plus de neuf communes et EPCI sur dix jugent « plutôt et totalement accessibles » leurs ERP. Mais, une fois mis de côté les ERP « plutôt accessibles », les taux chutent de façon vertigineuse. Ainsi, à peine 5 % de communes de plus de 30 000 habitants estiment que leurs ERP sont « totalement accessibles ». « Les ERP encore non accessibles sont majoritairement des bâtiments anciens, notamment les églises, les mairies ou écoles installées dans des locaux classés », précise l’enquête. 

S’agissant des agendas d’accessibilité programmée (Ad’Ap), à peine 20 % des communes et EPCI l’ont déposé et mis en œuvre « à 100 % ». Tandis qu’environ un tiers des communes de moins de 2000 habitants et des EPCI ne l’ont pas déposé avant la date limite (de 2019). 

Concernant la voirie,  76 % des communes la considère « plutôt ou totalement accessible », contre 61 % des EPCI. C’est dans le domaine de transports que les retours sont les moins bons. Près de la moitié des communes (48 %) jugent leur réseau de transport « peu ou pas accessible ». Le jugement est moins sévère pour les EPCI, puisque seuls 39 % partagent cet avis. Comme le précise l’AMF, il faut rappeler que depuis la loi d’orientation des mobilités, la compétence « transport » n’est plus exercée par les communes, mais transférée aux EPCI ou, à défaut, à la région.  

Un accompagnement financier réclamé

Le frein financier est considéré comme le principal obstacle par les communes, les EPCI mettant, elles, davantage en cause les freins techniques. Mais tous (communes et EPCI) se rejoignent sur un point : l’augmentation des financements est « l’action prioritaire » à mettre en place au niveau national pour améliorer l’accessibilité et l’inclusion. Et pourtant, comme l’a souligné Xavier Odo lors du forum, « le Fonds territorial d’accessibilité (par lequel l’État subventionne à hauteur de 50 % les dépenses de travaux et d’équipements de mise en conformité des ERP) est « sous-utilisé » par les collectivités » (lire article Maires de France). Un paradoxe qui fait écho à cet avis partagé par une faible part, mais malgré tout notable, des communes et des EPCI (15 % et 13%), qui verraient d’un bon œil un renforcement des contrôles et des sanctions en cas de non-respect des normes d’accessibilité.  

Cela explique sans doute le fort pourcentage de communes et EPCI qui réclament davantage d’informations, de sensibilisation et de formation des élus et des agents (surtout les grandes villes), pour pallier à la méconnaissance des outils existants et des actions à mettre en place. L’accessibilité numérique et des publications des collectivités reste, par exemple, mal investie, car mal identifiée ou comprise selon l’enquête. 

Ecole, crèche et temps périscolaires à investir

Sans surprise, près de la moitié des communes (40 %, mais 60 % pour les communes de plus de 2000 habitants) pointent « le manque d’accompagnants (AESH) tant sur le temps scolaire que sur le temps périscolaire ». Et beaucoup plus dénoncent le manque de place dans les établissements adaptés (Instituts médico-éducatifs,  centres médico-psychologiques, etc.). 

Pour l’inclusion des enfants en situation de handicap en crèche ou dans les accueils de loisirs, l’enquête révèle que « plus de 40 % des communes et 14 % des EPCI ne connaissent pas l’existence du bonus inclusion handicap de la CAF » ! Et très rares (2 % des communes et 8 % des EPCI) considèrent le montant de ce bonus comme suffisant pour compenser les frais engagés par l’établissement d’accueil du jeune enfant ou l’accueil de loisirs.

Bon point sur l’emploi 

Avec un taux d’emploi de travailleurs handicapés dans la fonction publique territoriale de 7,24 % en 2024, qui plus est en progression (6,89 % en 2023) (2), les communes restent de bons élèves. Selon l’enquête, 62 % des communes de plus de 2 000 habitants et 69 % des EPCI recourent « très majoritairement » au maintien dans l’emploi, grâce à l’adaptabilité du poste de travail, l’aménagement des horaires, ou encore la promotion du dialogue social.  

(1) Enquête menée du 16 septembre au 10 octobre 2025 auprès de l’ensemble des adhérents de l’AMF. Sur les 6 222 réponses reçues, seuls les 1 553 questionnaires entièrement complétés ont été analysés (représentant 1 644 communes et 39 EPCI).

(2) Ce taux est de 5,90 dans la fonction publique hospitalière et 4,86 % dans la fonction publique de l’État.

Consulter l'enquête de l'AMF. 




Elections municipales
Émission « Maire info, Le Débat » consacrée à la réforme du mode de scrutin
À l'occasion du Congrès des maires, notre rédaction a organisé jeudi 20 novembre un débat sur la réforme du mode de scrutin. Cette réforme est-elle un pas en avant démocratique ou va-t-elle poser des problèmes dans les communes de moins de 1 000 habitants ? Réponse en images avec Sandrine Gauthier-Pacoud, maire de Mesnois et présidente de l'association des maires du Jura et Guy Geoffroy, maire de Combs-la-Ville et vice-président de l'AMF.







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