Édition du lundi 10 novembre 2025

Budget de l'état
Budget 2026 : Sébastien Lecornu consentirait à réduire l'effort des collectivités, selon Régions de France
Réclamant une contribution des collectivités réduite à « deux milliards d'euros » en 2026 au lieu des 4,7 milliards prévus, la présidente de Régions de France a assuré, lors de son congrès, que le Premier ministre aurait accepté de revoir sa copie.

Si Sébastien Lecornu n’était pas présent au congrès des régions, son ombre a largement plané sur le 21e congrès des Régions de France qui s’est tenu, jeudi dernier, à Versailles.

Absent des travées du palais des Congrès, le Premier ministre a préféré participer, en coulisses, à une « réunion de travail de deux heures » avec les représentants des régions durant laquelle il aurait convenu que l’effort des collectivités devait être revu à la baisse. 

Ramener l’effort « autour des 2 milliards » d’euros

Il ne sera donc vraisemblablement « pas de 4,7 milliards » d’euros comme prévu dans le projet de budget pour 2026, selon la présidente de Régions de France, Carole Delga (PS). « On ne peut pas vouloir une grande relance de la décentralisation et, dans le même temps, priver les collectivités locales de leurs moyens d'agir », avait d’ailleurs prévenu, en ouverture du congrès, celle qui est aussi présidente de la région Occitanie, dénonçant des mesures « mortifères » inscrites dans le prochain budget de l’État.

Convenant en clôture de congrès que « nous ne pouvons pas continuer sur cette trajectoire budgétaire qui nous amène à un étranglement par une dette trop élevée », Carole Delga a, toutefois, estimé que « nous devons toutes et tous faire des efforts, mais des efforts proportionnés ». Plaidant pour « un budget de compromis », elle a ainsi demandé que l’effort réclamé aux collectivités en 2026 soit « ramené autour des 2 milliards » d’euros pour « ne pas ajouter une crise territoriale » à la crise budgétaire. 

Un montant qualifié de « bon calcul » et d’« effort plus juste » par Carole Delga, qui s’est également opposée au « remplacement » de la TVA affectée aux régions – voire même son « écrêtement » – par « une énième DGF », comme prévu dans le projet initial du gouvernement. « La DGF actualisée, cela dure le temps d’un printemps. Et le printemps suivant cela n’existe plus, quel que soit le gouvernement », a-t-elle rappelé.

Travailler « avec les parlementaires »

La présidente de la région Occitanie a notamment salué « l’ouverture du Premier ministre » sur le financement des formations professionnelles, une des compétences régionales, pour lesquelles il manquerait 280 millions d’euros. Sébastien Lecornu aurait ainsi indiqué que « ce ne serait pas ce montant-là » et qu’il y aurait « un travail à mener avec les parlementaires ».

Le Premier ministre « s’est engagé à regarder cette question », a confirmé la ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, Françoise Gatel, au moment même où les députés se sont prononcés hier en faveur de la création du « réseau France Santé » voulu par l’exécutif pour améliorer l'accès aux soins sur le territoire, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS). 

« On ne peut garantir une offre de santé à 30 minutes de chacun de nos concitoyens que si nous avons des personnels formés », a reconnu l’ancienne sénatrice, en soulignant que « le Premier ministre a entendu [les] préoccupations [des régions], il a entendu votre souhait d’autonomie, votre préférence entre une dotation et une part de TVA… »

Appelant elle aussi à « sortir un budget de compromis et de consensus » qui « ne sera celui de personne », elle a dit « savoir l’attention du Sénat pour que l’atterrissage budgétaire concernant les collectivités soit équilibré et proportionné ».

Comme l’an passé, les collectivités pourront, en effet, compter sur la Haute-Assemblée qui a, d’ores et déjà, rejeté l’idée d’un effort de 4,7 milliards d’euros. Son président, Gérard Larcher (LR), l’a d’ailleurs rappelé, jeudi : « Les efforts à réaliser ne peuvent pas dépasser les 2 milliards ». « Pas par corporatisme, pas par clientélisme », mais parce que « 70 % de l’investissement public dans ce pays » est le fait des communes, des intercommunalités, des départements et des régions, a souligné le président de la Haute Assemblée. 

Cycle de rencontres avec les élus locaux

Par ailleurs, les régions ont très largement insisté pour réaffirmer leur rôle alors que « notre modèle fondé sur le centralisme et le jacobinisme se fissure de toutes parts ». « Les régions sont à l'avant-poste des solutions pour lutter contre les déserts médicaux, pour trouver des solutions de mobilité au quotidien, pour assurer la réindustrialisation », a ainsi rappelé Carole Delga.

On peut aussi souligner que « la réunion de jeudi marque le début d’un cycle de rencontres avec les élus locaux, qui devrait se prolonger avec les départements (dont le congrès est programmé du 12 au 14 novembre), puis avec les maires (qui se réuniront du 18 au 20 novembre) », selon Le Monde qui cite des conseillers du Premier ministre.

Reste que l’avenir des textes budgétaires est encore loin d’être certain, notamment au regard des délais constitutionnels qui semblent désormais quasiment impossible à tenir. Le sort du gouvernement est tout aussi indécis puisque la France insoumise envisage de déposer une nouvelle motion de censure contre l’exécutif dans un mois, quand les projets de budgets de l'État et de la Sécu approcheront de leur terme, a déclaré hier le député « insoumis » des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard. 

« Il me semble évident que, avant Noël, sans doute au début du mois de décembre, il y aura une nouvelle motion de censure parce que tout le monde aura sous les yeux, à ce moment-là, la réalité de ce que sont le budget de l'État et le budget de la Sécurité sociale », a déclaré le coordinateur de LFI.
 




Nouvelle-Calédonie
La Nouvelle-Calédonie confrontée à une crise budgétaire sans précédent
Alors que la loi décalant une nouvelle fois la date des élections provinciales en Nouvelle-Calédonie a été publiée vendredi, la ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, se rend dans l'archipel où les maires font face à une situation financière gravissime.

Le Conseil constitutionnel a rendu sa décision : le troisième report des élections des membres du congrès et des assemblées de province, en Nouvelle-Calédonie, acté par le Parlement, est « conforme à la Constitution ». Même si ce report au mois de juin 2026 « a pour effet de porter à 25 mois la durée cumulée du report des élections », il conserve un caractère « exceptionnel et transitoire » et n’est pas « inapproprié »… à condition d’être le dernier : cette durée « ne saurait être étendue au-delà », préviennent les Sages. 

Les élections reportées au mois de juin 2026

La loi organique a été publiée au Journal officiel du vendredi 7 novembre : les élections qui devaient avoir lieu avant le 30 novembre auront lieu « au plus tard le 28 juin 2026 », et les mandats des élus sont prorogés jusqu’à cette date. Ce nouveau report vise à donner aux acteurs du temps pour « poursuivre la discussion en vue d’un accord consensuel sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie ». Ce qui relève de la gageure : pour l’instant, la situation est bloquée. Si l’on avait pu croire, avant l’été, qu’un début d’accord avait été trouvé avec la conclusion des discussions dites de Bougival, les indépendantistes du FLNKS, qui avaient signé le document final, ont depuis retiré leur signature : ils estiment avoir été trompés, le document qu’ils ont signé n’étant, selon eux, qu’un « document de travail » qui aurait été présenté par le gouvernement, après coup, comme un accord. 

La ministre des Outre-mer, Naïma Moutchou, va donc tenter de remettre les acteurs autour de la table, avec l’objectif de parvenir, d’ici l’été prochain, à un accord, non seulement sur la question cruciale de la définition du corps électoral – on se rappelle que c’est cette question qui a mis le feu aux poudres à l’été 2024 – mais aussi, plus largement, sur l’avenir de l’archipel. La solution proposée par le gouvernement, à savoir la création d’un État de la Nouvelle-Calédonie au sein de l’État français, ne satisfait pas les indépendantistes, qui réclament toujours une séparation complète. 

Endettement : 360 %

Mais avant même que commencent d’éventuelles négociations, des questions plus urgentes encore se posent : la Nouvelle-Calédonie doit éviter la banqueroute économique. L’archipel n’arrive pas à se remettre des émeutes de l’été 2024, dont les dégâts se chiffrent en milliards d’euros, et qui ont eu pour conséquence un ralentissement sans précédent de l’activité économique : le PIB de la Nouvelle-Calédonie a chuté de 13 %, 11 000 emplois ont été détruits et les rentrées fiscales ont diminué de 26 % par rapport à la période d’avant-crise. 

Selon un porte-parole du groupe Calédonie ensemble, il manque 500 millions d’euros pour boucler le budget 2026. Et la Nouvelle-Calédonie est étranglée par la perspective (à partir de l’an prochain) du remboursement du PGE (prêt garanti par l’État) d’un milliard d’euros contracté auprès de l’Agence française de développement, à un taux très élevé de 4,54 %. Les élus de l’île, indépendantistes comme non indépendantistes, demandent à l’État de transformer au moins une partie de ce prêt en subvention – ce que le gouvernement ne semble, pour l’instant, pas prêt à faire. Pourtant, le taux d’endettement de l’archipel, du seul fait de ce PGE, est aujourd’hui de 360 %. 

Garrot sur les collectivités locales

Quant aux maires, ils subissent de plein fouet à la fois l’appauvrissement dramatique de la population et la diminution des moyens dont ils disposent. 

Dans la seule commune de Dumbéa, par exemple, en banlieue de Nouméa, le maire Yoann Lecourieux explique à l’AFP avoir « 800 élèves de moins dans les cantines, parce que les gens ne peuvent plus payer ». 

L’effondrement des finances publiques dans l’archipel a d’innombrables conséquences, dans l’enseignement, les transports, la santé. « La Nouvelle-Calédonie est dans une situation aujourd’hui où tout est urgent », expliquait, en septembre, le président du gouvernement de Nouvelle-Calédonie, Alcide Ponga, devant les maires. « Et l’an prochain, les contraintes financières, sociales et institutionnelles se feront ressentir avec plus d’intensité encore. » 

Déjà, en 2025, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie a dû amputer son budget de quelque 84 millions d’euros (10 milliards de francs pacifiques), en conséquence de la diminution des rentrées fiscales. Parmi les victimes de ces coupes budgétaires : les collectivités, qui se voient privées de près de 40 millions d’euros par rapport à ce qu’elles devaient toucher cette année. 

Lors de la réunion des maires organisées par le gouvernement néo-calédonien en septembre, ces coupes claires ont fait bondir les maires, qui refusent d’être « toujours la variable d’ajustement », et qui craignent d’être dans l’incapacité de boucler leur budget pour 2026. Et même de ne pas être en mesure de pouvoir verser les aides qu’ils ont pu promettre aux entreprises mises à mal par la crise. 

Mais le problème ne semble pas soluble à l’échelle de la seule Nouvelle-Calédonie, où le gouvernement ne peut pas verser de l’argent qu’il n’a pas, et où tout recours à l’endettement supplémentaire semble exclu – sauf à des taux encore plus faramineux. C’est pourquoi Pascal Vittori, président de l’une des deux associations de maires de Nouvelle-Calédonie (l’Association française des maires) estime que « seul l’État pourra nous aider ». Même son de cloche au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, dont le ministre chargé du Budget et des Finances, Christopher Gygès, expliquait encore il y a deux jours : « On ne pourra pas boucler le budget 2026 sans le soutien de l’État. On a la volonté de tout mettre en œuvre pour réduire la dépense publique, mais ce ne sera pas suffisant ». 

Pour l’instant, en métropole, le gouvernement fait la sourde oreille : pas la moindre aide directe à la Nouvelle-Calédonie n’est prévue dans le projet de loi de finances pour 2026. Il reste à savoir si Naïma Moutchou, qui va rester quatre jours dans l’archipel et va rencontrer les associations d’élus au dernier jour de sa visite, apportera d’autres nouvelles. 

La semaine prochaine, en clôture du congrès de l’AMF, Pascal Vittori, le président de l’Association française des maires de Nouvelle-Calédonie, s’adressera aux congressistes par message vidéo, peu avant l’intervention du Premier ministre, Sébastien Lecornu, qui ne pourra, de ce fait, probablement pas éviter le sujet. 




Logement
Nouvelle condamnation de l'État pour manquement à ses obligations sur l'hébergement d'urgence
Le tribunal administratif de Bordeaux a donné en partie raison au recours du CCAS de Bordeaux. Une « victoire » pour la municipalité, même si la peine prononcée par le tribunal ne dédommage pas le CCAS à hauteur de ce qu'il réclamait, loin de là. 

Le CCAS de Bordeaux mettait en cause le fait qu’il avait hébergé des personnes à la rue en lieu et place de l’État, en raison « d’une carence avérée et prolongée dans l’exercice de sa compétence en matière d’hébergement d’urgence du fait de l’insuffisance de ses interventions pour créer des places d’hébergement supplémentaires ». Ce que l’État contestait. Il avait d’ailleurs rejeté les demandes préalables d’indemnisation faites à la préfecture (en octobre 2023 et décembre 2024).

Le tribunal donne, lui, raison au CCAS dans un jugement rendu mardi 4 novembre. Mais en partie seulement.

Un jugement en demi-teinte

Le jugement reconnaît que l’action du CCAS « revêtait un caractère supplétif et ne lui imposait pas de prendre définitivement à sa charge des dépenses incombant dans ce domaine à l’État ». Et qu’il était donc fondé à « rechercher la responsabilité de l’État en raison de sa propre prise en charge de personnes relevant de l’hébergement d’urgence ». En revanche, il estime que « la carence avérée et prolongée de l’État » à accomplir cette mission d’hébergement d’urgence n’est « pas suffisamment » prouvée par le CCAS. 

Ce dernier demandait le remboursement de la totalité des sommes engagées pour l’hébergement d’urgence de personnes sans abri entre 2020 et 2023. Soit 125 457,74 euros, correspondant à l’aménagement de 55 places dans une salle municipale ouverte de décembre 2020 à juin 2021 et aux nuitées d’hôtel pour une vingtaine de personnes et familles en 2022 et 2023. 

Le tribunal n’enjoint l’État à rembourser que 8 537,82 euros. En ne retenant que le « coût des nuitées pour un couple hébergé à l’hôtel en 2022, ainsi qu’une famille et deux personnes pour l’année 2023, déduction faite des frais liés à leur premier mois d’hébergement ». Le tribunal ne retient donc pas les dépenses engagées par le CCAS pour l’aménagement de la salle en 2020 et 2021. Les preuves versées ne suffisent pas, selon le tribunal, à établir qu’il a été « contraint de prendre en charge pour des durées significatives des personnes n’ayant pas ou plus obtenu de places d’hébergement dans les divers dispositifs gérés par les services de l’État ». 

Une deuxième condamnation

Pour le maire de Bordeaux, il ne s’agit pas moins d’une « décision importante pour rappeler urgemment l'État à refonder le système de l'hébergement d'urgence, à le doter des moyens adaptés à l’accueil des personnes et notamment des familles avec enfants », estime Pierre Hurmic, qui insiste sur le fait que « les territoires sont, comme souvent, en première ligne pour garantir notre cohésion sociale ».     

Selon la municipalité, en janvier dernier, 392 personnes étaient sans abri à Bordeaux, 245 vivaient dans des bidonvilles et 124 en squats. 

Les tableaux diffusés quotidiennement par la préfecture de la Gironde sur le taux d’occupation des places d’hébergement d’urgence montrent, elles, que le dispositif est occupé à 100 %, voire plus. 

Prochains jugements à venir

Bordeaux est la deuxième des cinq villes à obtenir un jugement favorable, après Grenoble, en mars dernier, à la suite de leur action engagée en octobre 2023 (lire Maire info du 9 octobre 2023). Trois autres recours – Lyon, Rennes et Strasbourg – sont toujours en cours d’instruction.




Services publics
Accès aux services publics : des inégalités qui vont « au-delà des fractures territoriales »
Le collectif Nos services publics publie son troisième rapport annuel sur l'état des services publics. Il pointe les limites du modèle politique et économique actuel des services publics dans tous les territoires.

« Dans les 40 dernières années, un recul important de l’implantation des services publics historiques a été constaté sur l’ensemble du territoire. Par son caractère immédiatement visible dans les territoires peu denses, il nourrit l’idée d’un abandon de la France rurale au détriment de la France urbaine. »

En réalité, les inégalités face aux services publics dépassent cette question de différenciation territoriale. C’est ce que montre cette nouvelle étude du collectif Nos services publics qui mêle données statistiques, analyses juridiques et témoignages de terrain.

La relative efficacité des espaces France services 

La présence de guichets pour l’accès aux services publics a fait l’objet d’une recomposition « dans un contexte de contraintes budgétaires fortes, où la fermeture de points d’accueil traditionnels et la numérisation des démarches s’opposent à un besoin d’accompagnement humain dans l’accès aux droits ». Aussi, on observe « depuis une décennie » que de nombreuses agences et acteurs publics réduisent leur nombre de guichets spécifiques (trésorerie, centre des impôts, agence Pôle emploi devenue France travail, Mutualité sociale agricole, caisses d’allocations familiales, etc.)

Pour « compenser » cette dynamique de retraits, depuis 2020, 2 800 maisons France services ont été déployées sur l’ensemble du territoire, où chaque mois près d’un million de personnes sont accompagnées. Selon Nos services publics, si cette initiative « permet un retour de l’accompagnement humain » elle souffre cependant « de limites réelles et en particulier pour les publics les plus vulnérables ». Par exemple, le phénomène de non-recours reste élevé (environ 34 % pour le RSA) et touche toujours les populations les plus fragiles, ce qui traduit un écart entre les dispositifs déployés et leur utilisation réelle. Ainsi « l’implantation territoriale ne suffit pas à garantir l’accès aux services publics, et l’accès aux services n’est qu’une dimension de l’accès effectif aux droits. »

Le fonctionnement du service public révèle aussi selon le collectif « un cumul des inégalités territoriales et institutionnelles ». En effet, le « développement des espaces France services implique un coût important pour les collectivités territoriales – le fonctionnement d’un espace avoisine 100 000 euros annuels, alors que la subvention étatique ne représentera que 50 000 euros en 2026. » 

Ainsi, les auteurs du rapport estiment que les « collectivités les mieux dotées financièrement et politiquement captent plus aisément les subventions et les financements par projet, tandis que les communes économiquement fragiles restent en marge du maillage territorial, avec un pouvoir de négociation affaibli face à l’État et aux opérateurs historiques. » 

Des mécanismes institutionnels qui aggravent les inégalités

L’analyse proposée par Nos services publics montre que si l’Outre-mer, les territoires ruraux enclavés ou les quartiers populaires sont « tendanciellement délaissés, les fractures sociales analysées ne recoupent pas la distinction schématique ''rural / urbain'', mais laissent plutôt place à une multiplication des clivages et exclusions. »

Toujours en défendant cette idée que « l’ineffectivité des droits dépasse largement la question de l’accès physique », le collectif prend plusieurs exemples qui tendent à démontrer que les difficultés d’accès aux services publics s’enracinent aussi « des dispositifs institutionnels, des arbitrages budgétaires et des rapports de force qui favorisent les groupes les mieux dotés. »

En matière d’éducation par exemple, dans l’enseignement primaire et secondaire, la répartition des professionnels renforce les inégalités de traitement des élèves, selon les auteurs. Concrètement, « les académies concentrant les établissements qui accueillent les plus grandes parts d’élèves issus de familles défavorisées — comme Créteil, Versailles ou la Guyane — sont celles où le manque d’enseignants est le plus criant et où le recours aux contractuels est le plus massif ».

Le rapport soulève enfin une idée intéressante concernant l’impact de la mauvaise image que peuvent avoir les citoyens des services publics. En 2023, le collectif avait identifié une montée en puissance des services privés (lire Maire info du 18 septembre 2023) notamment dans la santé, l’éducation et l’enseignement supérieur. « Face aux faiblesses réelles ou supposées des services publics, les usagers les plus aisés choisissent soit de faire appel au secteur privé soit de faire pression pour s’assurer d’accéder aux meilleures ressources publiques au détriment des usagers plus précaires ». Autre exemple : concernant l’accès à l’eau potable, les analyses réalisées par le collectif montrent qu’il existe un « phénomène de non-recours au service de la part des abonnés les moins favorisés » qui s’expliquerait en grande partie par « un manque de confiance dans le service ». Résultat : « ces foyers ont très souvent recours à l’eau en bouteille, pourtant plus chère et plus contraignante d’accès ».

La dématérialisation de la plupart des démarches accentue cette représentation négative des services publics. C’est notamment ce que montre un rapport d’information du Sénat publié en septembre qui dépeint des relations fastidieuses – quasi kafkaïennes – avec les services publics et davantage encore en ligne où « l'image du ''parcours du combattant'' vient spontanément à l'esprit » des citoyens sondés.

Rappelons d’ailleurs que les Français peuvent interpeller directement leurs services publics du quotidien sur le site Services Publics + (rubrique « Je donne mon avis » ) pour partager une expérience, bonne ou mauvaise.




Élections
Dans quel cas la commune doit-elle détruire son stock d'enveloppes de scrutin ?
Alors que les quatre années à venir vont voir se dérouler au moins 6 scrutins nationaux, les préfectures sont en train de recenser l'état des stocks d'enveloppes de scrutin dans les mairies. Contrairement à ce qu'affirment certaines préfectures, il n'est pas obligatoire de détruire systématiquement les stocks, indique le ministère de l'Intérieur. 

Entre 2026 et 2029, au moins six scrutins nationaux vont se dérouler en France. Les élections municipales auront lieu en mars prochain, ainsi que le renouvellement d’un tiers du Sénat à l’automne de la même année ; en 2027, ce sera l’élection présidentielle ; en 2028 auront lieu les élections régionales et départementales (les régionales auraient dû se tenir en 2027, mais elles ont été décalées d’un an à cause de la présidentielle) ; et enfin les élections européennes en 2029. On parle ici des échéances certaines, auxquelles il faudra certainement ajouter ou bien des élections législatives anticipées dans les semaines ou les mois à venir, ou bien juste après l’élection présidentielle de 2027. 

En préparation de cette séquence où sera organisé au moins un scrutin par an, le ministère de l’Intérieur a demandé aux préfectures de « prendre l’attache des communes afin de recenser l’état de leurs stocks d’enveloppes et procéder aux compléments ou remplacements qui s’avéreraient nécessaires ». 

« Rationalisation » des couleurs

Or, a constaté le sénateur de l’Eure Hervé Maurey, « de nombreux élus signalent que (…) les services de leur préfecture leur ont demandé de détruire les enveloppes qu’ils détiennent actuellement en mairie ». Le sénateur, qui s’étonne de ce qui apparaît comme « un gaspillage sur le plan économique et écologique », a donc demandé au ministère de l’Intérieur un rappel des règles. 

Dans sa réponse, le ministère rappelle d’abord que les enveloppes de scrutin (appelées « enveloppes électorales » dans le Code) sont fournies par l’État et envoyées dans chaque mairie « cinq jours au moins » avant le jour de l’élection. Chaque bureau de vote doit impérativement mettre à disposition exactement autant d’enveloppes qu’il y a d’électeurs inscrits. Et surtout, il n’est pas possible de réutiliser les enveloppes qui ont servi au précédent scrutin : l’article  L60 du Code électoral impose que l’enveloppe, pour chaque scrutin, est « obligatoirement d’une couleur différente de celle de la précédente consultation générale ».

Pour autant, cela signifie-t-il qu’il faut détruire le stock d’enveloppe après chaque scrutin – qui peut être d’autant plus important que l’abstention est forte ? Non, répond le gouvernement : les enveloppes sont « réutilisables pour les scrutins futurs, sous réserve qu’elles n’aient pas été abîmées ou tachées lors des manipulations électorales ». 

Néanmoins, le stockage des enveloppes sur une longue période peut les conduire à se décolorer, ce qui peut nuire à « l’uniformité des enveloppes employées au sein d’un même bureau de vote » – uniformité qui est l’un des garants de l’anonymat du vote. Il est donc préconisé, « dès lors qu’une part substantielle du stocks présente des signes d’usure », de remplacer tout le stock. 

Transfert possible entre communes

Le ministère précise également qu’afin de « rationaliser » ses commandes, certaines couleurs ont été abandonnées, notamment « le violet et l’orange ». Si des communes possèdent encore des stocks d’enveloppes de ces couleurs, il faut donc s’en débarrasser. Les seules couleurs qui seront utilisées dans les scrutins à venir sont le kraft, le bleu et le jaune. 

« Si les stocks communaux ne permettent plus de couvrir les besoins d’au moins un bureau de vote entier par une couleur, les communes doivent procéder au renouvellement de leur stock », complète le ministère. Et il ajoute qu’il n’est pas obligatoire de détruire le stock : il est possible, « en bonne intelligence locale », de « transférer le reliquat encore en bon état » à une autre commune, « pour combler un déficit d’ancien coloris ». 

Rappelons enfin que si une commune, par suite d’un cas de force majeure – un incendie ou une inondation par exemple –, ne dispose plus d’enveloppes réglementaires au moment du scrutin, elle doit les remplacer par « d’autres enveloppes d’un type uniforme, frappées du timbre de la mairie », et procéder au scrutin. Il faudra, dans ce cas, « faire mention de ce remplacement au procès-verbal » et y annexer cinq des enveloppes qui ont été utilisées (article L60 du Code électoral).






Journal Officiel du dimanche 9 novembre 2025

Ministère de l'Action publique, de la Fonction publique et de la Simplification
Décret n° 2025-1070 du 6 novembre 2025 modifiant les modalités de mise en œuvre de la protection sociale complémentaire des agents de la fonction publique de l'Etat
Journal Officiel du samedi 8 novembre 2025

Ministère de l'Intérieur
Arrêté du 6 novembre 2025 modifiant l'arrêté du 4 novembre 2022 portant expérimentation d'une signalisation relative à une voie de circulation réservée à certaines catégories de véhicules et d'usagers sur le territoire de la commune de Nantes (Loire-Atlantique)

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