| Édition du lundi 21 juillet 2025 |
Sécurité
Un week-end marqué par des violences urbaines sur fond de narcotrafic
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Charleville-Mézières, Limoges, Béziers, Nîmes, Compiègne, Vendôme : des violences urbaines ont éclaté dans chacune de ces communes ce week-end. Ces troubles, souvent liés au trafic de drogue, ont pris pour cible aussi bien les forces de l'ordre que certains élus de ces villes moyennes. Si le phénomène n'est pas nouveau, il semble se développer et touche des communes auparavant épargnées.
Un appartement incendié par un tir de mortier à Béziers samedi soir, des voitures détruites à coup de batte de baseball à Limoges dans la soirée du vendredi, le commissariat de Compiègne attaqué cette même nuit, une nouvelle fusillade qui éclate à Nîmes, des affrontements violents entre plus de 80 jeunes à Vendôme… Ce week-end a été particulièrement marqué par des actes de violences graves qui ne s’observent désormais plus uniquement dans les grandes agglomérations autour de Paris, Lyon ou encore Marseille.
Ces évènements viennent évidemment réveiller le spectre du mois de juin 2023 où de violentes émeutes avaient éclaté partout en France après la mort du jeune Nahel Merzouk et où de nombreux bâtiments publics – mairies, bibliothèques, commissariats, voire casernes de pompiers – avaient été pris pour cible et parfois complètement détruits. D’autant qu’une nouvelle fois, un maire a été directement pris pour cible, comme l’avait été l’ex-maire de l'Haÿ-les-Roses, Vincent Jeanbrun. Cette attaque des plus violentes avait suscité une vague d'indignation chez les maires, dans un contexte où les élus locaux sont de plus en plus pris pour cible.
Un tir de mortier a visé le maire de Charleville-Mézières
Mercredi dernier, alors que le maire Boris Ravignon suivait une opération de sécurisation devant un café de Charleville-Mézières, dans les Ardennes, un tir de mortier a été tiré en direction de l’élu qui « intervenait avec ses équipes pour poser deux blocs de béton devant le café de la poste dans le quartier de la Houillère », selon les informations du journal local L'Ardennais.
Sur son compte X, le maire a indiqué que, dans la nuit du vendredi, « des délinquants organisés, armés de mortiers d’artifice et ultra violents se sont déchaînés à la suite de la fermeture de leur point de deal déguisé en café place Albert-Poulain ». Pour le maire, la volonté de ces individus était claire : « Casser, brûler, prendre à partie les forces de l’ordre. » Un affrontement a eu lieu entre les assaillants, les policiers nationaux, municipaux et les gendarmes mobilisés, et ce « pendant plusieurs heures ». « Cinq interpellations ont été réalisées », selon le maire.
Selon les informations d’Ici (anciennement France bleu), la procureure de la République de Charleville-Mézières a indiqué qu’une enquête judiciaire est ouverte pour « flagrant délit du chef de violences volontaires avec armes sur personnes dépositaires de l'autorité publique ».
David Lisnard, président de l’AMF, a exprimé sur son compte X son soutien à Boris Ravignon « face à cette agression ainsi que dans son combat quotidien pour protéger les habitants et lutter contre une minorité violente et nuisible », avant d’ajouter qu’il « revient à la justice de punir réellement ces violences parallèlement à l’action des élus ».
« Narcotrafic » et « démission parentale »
Les maires, élus en première ligne sur le terrain, sont en effet des victimes collatérales de la montée en puissance du trafic de drogues aussi bien en milieu rural qu’en milieu urbain. Interrogé ce matin sur France info, Philippe Laurent, vice-président de l’AMF, confirme que les maires observent une généralisation du phénomène « même dans des villes qui apparaissent calmes comme Auch ou Vendôme. Si le phénomène n’est pas nouveau, cette généralisation l’est. »
« C’est aussi un délitement de l’éducation de nos jeunes », explique ce matin Philippe Laurent qui observe comme d’autres maires une « démission parentale dans certaines familles », ce qui pousse notamment certaines communes à instaurer des couvre-feu, comme c’est le cas à Nîmes où un couvre-feu pour les moins de 16 ans est entré en vigueur ce lundi. Pour Philippe Laurent, le couvre-feu peut être un outil pour « protéger les mineurs des influences du trafic de drogue ».
Selon les chiffres de la Mildeca, 61% des condamnés pour infractions liées aux drogues étaient âgés de 15 à 25 ans en 2024.
L’action préventive des maires
S’il faut rappeler que la lutte contre le trafic de drogue ne fait pas partie des prérogatives des maires, ces derniers jouent un rôle de prévention important. La commission sécurité et prévention de la délinquance de l’AMF travaille en partenariat avec la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca) qui mène des projets à l’attention des maires. Ils sont cependant très mal connus de certains élus ruraux alors que ces outils et formations à destination des maires peuvent s’avérer très utiles. Rappelons que la Mildeca a réalisé avec l'AMF un guide pratique sur Le maire face aux conduites addictives. La Mildeca a d'ailleurs annoncé la semaine dernière le renforcement de son programme "LIMITS" de prévention des mineurs face au narcotrafic, avec l'extension à 15 nouvelles collectivités, portant à 33 le nombre total de territoires impliqués dans le dispositif.
Rappelons que la loi visant à lutter contre le narcotrafic a été promulguée le mois dernier. Si cette dernière constitue une première étape notamment pour apporter une réponse pénale plus sévère, Philippe Laurent appelle à réfléchir notamment sur la question des consommateurs et à mener « une réflexion plus approfondie sur les peines courtes ». Le procureur de la République de Béziers, Raphaël Balland, était hier sur la même ligne, dans les médias, expliquant que la seule manière de mettre fin aux trafics serait « d'assécher » le marché en diminuant le nombre de consommateurs : « Pas de consommateurs, pas de marché », a-t-il déclaré, en demandant aux consommateurs de réfléchir aux conséquences de leurs actes sur la vie sociale.
Il est clair, par ailleurs, que ces troubles ont éclaté dans des quartiers « majoritairement marqués par la grande pauvreté », comme le souligne le maire de Limoges, Émile-Roger Lombertie.
« On ne peut s’en sortir sans la participation de l’ensemble des acteurs », a conclu le vice-président de l’AMF. Des dispositifs pour lutter contre l’insécurité comme les instances locales de prévention de la délinquance ou encore les référents sûreté de la gendarmerie peuvent être particulièrement bénéfiques pour mettre en place un travail concerté en mettant tous les acteurs autour de la table.
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Agriculture
Pétition sur la loi Duplomb : démêler le vrai du faux
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Déposée par une jeune étudiante de 23 ans sur le site dédié de l'Assemblée nationale, la pétition « Non à la loi Duplomb » a recueilli en quelques jours 1,3 million de signatures. Mais ce résultat, pour exceptionnel qu'il soit, ne peut à lui seul conduire à abroger la loi ou à la faire revoter au Parlement.
« La loi Duplomb est une aberration scientifique, éthique, environnementale et sanitaire. Elle représente une attaque frontale contre la santé publique, la biodiversité, la cohérence des politiques climatiques, la sécurité alimentaire, et le bon sens. » C’est par ces mots qu’Éléonore Pattery, étudiante « en master Qualité sécurité environnement », introduit la pétition qu’elle a déposée le 10 juillet sur le site de l’Assemblée nationale. Au fil des jours, cette pétition, largement relayée sur les réseaux sociaux, a rencontré de plus en plus de succès : elle a passé le cap des 500 000 signatures samedi 19 juillet, ce qui l’a encore davantage fait connaître et a conduit à faire plus que doubler le nombre de signatures au cours du week-end. Ce matin, à l’heure où nous écrivons, elle en est à presque 1,3 million de signatures.
Loi Duplomb : un rappel
Pour mémoire, la loi dite Duplomb s’appelle en réalité « loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur ». Elle a été adoptée définitivement le mardi 8 juillet après un parcours assez chaotique au Parlement.
Ce texte comprend à la fois des mesures concernant les cultures et l’élevage. Le point qui a le plus focalisé l’attention est la réintroduction, à titre exceptionnel, d’un pesticide néonicotinoïde, l’acétamipride, dans certaines filières comme la culture des noisettes et des betteraves. Cette substance était interdite en France depuis 2020, mais elle est autorisée par l’Union européenne jusqu’en 2033. La ré-autorisation de cette substance est prévue sous bon nombre de conditions et de façon provisoire, mais cette décision a consterné tant les défenseurs de l’environnement qu’un certain nombre de scientifiques, compte tenu de la dangerosité de cette molécule notamment pour les insectes pollinisateurs… et pour les humains, cette substance étant potentiellement cancérogène. Selon la Ligue contre le cancer notamment, qui a qualifié le 9 juillet l’adoption de cette loi de « camouflet contre le principe de précaution », il y a une « présomption forte » que l’exposition à ces pesticides puisse provoquer des cancers du système lymphatique, du sang et de la prostate.
Cette loi, par ailleurs, modifie les procédures environnementales pour la construction des grands bâtiments d’élevage et qualifie de droit les « méga-bassines » de projets d’intérêt général majeur. (Pour en savoir plus sur le contenu de ce texte, voir le résumé établi par le site Vie-publique.fr).
Le Conseil constitutionnel saisi
Aussitôt le texte adopté, des députés et des sénateurs de gauche ont saisi le Conseil constitutionnel, ce qui a pour effet de bloquer la promulgation du texte par le président de la République.
Trois saisines différentes ont été déposées au Conseil constitutionnel. Elles attaquent le texte autant sur ses conditions d’adoption que sur le fond.
Sur la forme, députés et sénateurs reprochent aux partisans de ce texte d’avoir « détourné » la procédure parlementaire, en faisant adopter, le 26 mai, à l’Assemblée nationale, une motion de rejet préalable, ce qui a eu pour effet d’empêcher tout débat sur le texte au Palais-Bourbon et d’envoyer celui-ci directement en commission mixte paritaire. Si cette façon d’agir peut faire débat, il est peu probable que les Sages la censurent, le Conseil constitutionnel ayant constamment refusé de se prononcer sur le respect ou le non-respect du règlement de l'Assemblée nationale, rappelant que celui-ci n'a pas de valeur constitutionnelle et est donc en dehors de son champ de compétences.
Reste le fond : les requérants estiment que les dispositions de cette loi contreviennent à la Charte de l’environnement, qui a valeur constitutionnelle. Cette charte dispose notamment, à l’article 2, que « toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l’amélioration de l’environnement ». Pour les requérants, la réintroduction de pesticides potentiellement dangereux contrevient à ce principe. Ils jugent également que le texte « méconnaît les principes constitutionnels de prévention et de précaution ».
Le Conseil constitutionnel a un mois pour rendre son avis à compter de la date de dépôt de la saisine. La première ayant été déposée le 11 juillet, les Sages devront donc rendre une première décision au plus tard le 11 août.
Les pétitions à l’Assemblée nationale
Mais en quoi consistent les pétitions déposées sur le site de l’Assemblée nationale ? Ce dispositif, pas forcément très connu, voit ses règles fixées par les articles 147 à 151 du Règlement de l’Assemblée nationale. Tout citoyen peut déposer une pétition, par voie électronique, adressée à président de l’Assemblée nationale. Une fois enregistrée, une pétition, si elle remplit un certain nombre de conditions de recevabilité, est attribuée à l’une des huit commissions permanentes de l’Assemblée, qui peut décider ou de la classer, ou de l’examiner.
Un certain nombre d’étapes sont prévues par le règlement de l’Assemblée nationale : au-delà de 100 000 signatures, les pétitions sont mises en ligne sur le site officiel de l’Assemblée. À partir de 500 000 signatures, la pétition « peut » faire l’objet d’un débat en séance publique, si la Conférence des présidents en décide.
Une certaine confusion règne dans les déclarations des députés hostiles à cette loi depuis samedi : certains laissent entendre que l’atteinte des 500 000 signatures conduit au réexamen du texte en séance. Ce n’est pas le cas : si la Conférence des présidents en décide, ce n’est pas le texte de loi qui sera débattu en séance, mais la pétition elle-même. Ce débat aura probablement lieu – c’est en tout cas la volonté exprimée ce week-end par la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet.
Le règlement de l’Assemblée est clair : le débat s’engage par « l’audition du rapporteur de la commission », se poursuit avec l’intervention des députés qui ont demandé la parole, avec prise de parole possible du gouvernement. Une fois que le dernier député inscrit a pris la parole, « la présidente passe à la suite de l’ordre du jour ».
Il n’y a donc aucune chance que cette pétition, quel que soit le nombre de signatures qu’elle récolte, aboutisse directement au réexamen du texte.
Et maintenant ?
En revanche, deux éléments peuvent retarder, voire empêcher la promulgation du texte. D’abord, une censure du Conseil constitutionnel. Si les Sages décident que le texte est contraire à la Constitution, il ne peut évidemment pas être promulgué – ou, du moins, si les Sages ne censurent que certains articles du texte, il sera promulgué après suppression des articles inconstitutionnels.
Si ce n’est pas le cas, la décision finale revient au président de la République. La Constitution dispose en effet que ce dernier doit promulguer un texte 15 jours après son adoption définitive (ou après sa validation par le Conseil constitutionnel) mais qu’il peut, « avant l’expiration de ce délai, demander au Parlement une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ses articles ». Le Parlement ne peut refuser cette demande.
C’est là que le succès considérable de cette pétition (qui, entre 7 heures et 11 heures ce matin, a recueilli plus de 80 000 signatures supplémentaires !) peut entrer en ligne de compte : Emmanuel Macron pourra estimer, au vu de ce succès, qu’il est politiquement préférable de demander que le texte soit à nouveau examiné par le Parlement.
Les défenseurs de ce texte, ce matin, mettent en avant le fait que même un million de signatures ne représentent qu’une petite minorité de l’opinion publique. C’est exact d’un point de vue arithmétique, sans doute un peu moins d’un point de vue politique. Aucune pétition déposée sur le site de l’Assemblée nationale n’a jamais recueilli un tel nombre de signatures. On mesure mieux l’ampleur du mouvement en consultant la liste des pétitions et en les classant par nombre de soutiens : jusqu’à présent, la pétition ayant eu le plus de succès (une demande de dissolution de la Brav-M en 2023) n'avait recueilli que 263 000 signatures. Aucune pétition n'avait d'ailleurs jusqu'à présent dépassé le seuil des les 500 000 soutiens.
Ce succès indéniable est donc bien le signe d’un mouvement d’opinion, qu’il sera difficile au chef de l’État d’ignorer… tout comme il lui sera difficile d’ignorer la pression des principaux syndicats agricoles pour tenir bon sur ce texte.
Réponse, donc, d’ici la fin août, soit 15 jours au maximum après la décision des Sages.
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Eau et assainissement
Assainissement : le gouvernement hausse le ton vis-à -vis des collectivités hors des clous
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Environ 1 200 agglomérations restent « non conformes » à leurs obligations en matière de traitement des eaux usées. Cette situation expose les collectivités et l'État à de lourdes sanctions financières de la part de l'Europe, ce qui conduit le gouvernement à demander aux préfets d'agir avec fermeté.
Ce sont pas moins de quatre ministres (ceux de l’Écologie, des Outre-mer, de l’Intérieur et de l’Aménagement du territoire) qui ont pris la plume pour signer une instruction publiée en fin de semaine dernière sur Légifrance. Objet de cette instruction : demander aux préfets « d’accompagner » les collectivités de toutes les manières pour leur faire respecter « les dispositions qui leur incombent en matière d’assainissement ».
Une situation qui empire
Alors que la nouvelle directive européenne relative au traitement des eaux résiduaires urbaines (DERU), révisée, a été publiée le 12 décembre dernier, et devra être transposée dans le droit national avant le 31 juillet 2027, un bon nombre de collectivités françaises ne sont toujours pas dans les clous de la précédente directive, celle de 1991, pourtant nettement moins exigeante.
Le gouvernement rappelle, dans son instruction, que 78 agglomérations ont été condamnées pour ce motif par la Cour de justice de l’Union européenne, en octobre dernier. 610 agglomérations « ont été déclarées non conformes au titre de l’année 2022 » par la Commission européenne. Et 1 200 le seraient cette année. D’où ce constat du gouvernement : « Le taux de conformité règlementaire des systèmes d’assainissement ne cesse de diminuer depuis plus d’une dizaine d’années et atteint désormais des niveaux inquiétants. » En cause : « Un manque d’anticipation » de nombreuses collectivités « concernant le développement de leur urbanisation et le vieillissement de leurs installations ».
Déjà en décembre 2000, une instruction avait été adressée aux préfets pour leur demander de faire « résorber les cas problématiques ». Mais « force est de constater que les résultats ne sont pas à la hauteur et qu’une nouvelle mobilisation est indispensable, pour éviter à la France une lourde condamnation financière ».
Notons qu’en la matière, la préoccupation du gouvernement n’est pas entièrement désintéressée : comme on peut le lire dans les annexes accompagnant cette instruction, depuis la loi Notre de 2015, les collectivités territoriales et l’État « partagent la responsabilité financière » en cas de condamnations pécuniaires prononcées par la Cour européenne de justice, lorsque l’obligation dont le manquement est constaté relève des compétences des collectivités. Autrement dit : l’État aura à payer une partie des amendes.
Les auteurs de l’instruction rappellent que l’Italie, au mois de mars dernier, a été condamnée sur ce motif à 10 millions d’euros d’amende et une astreinte de 14 millions d’euros par semestre.
Sévérité accrue
Il est donc demandé aux préfets de prendre « toutes les mesures pertinentes » pour conduire les collectivités à « respecter la réglementation en vigueur ». Et si l’objet de l’instruction évoque un « accompagnement », les moyens listés par le gouvernement relèvent davantage d’une sévérité accrue : « Mise en demeure, consignation de fonds, sanctions financières, contrôle de légalité relatif aux documents et autorisations d’urbanisme, police judiciaire ».
Il est demandé aux préfets de veiller, dans le cadre du contrôle de légalité, à ce que les collectivités « adoptent un budget assainissement à la hauteur de leurs besoins ». Par ailleurs, les préfets sont appelés à « s’opposer à toute extension de l’urbanisation dans les communes où les systèmes d’assainissement sont défaillants ou ne présentent pas la capacité suffisante ».
Une fois encore, on notera que le même gouvernement qui ne cesse de répéter que les collectivités « dépensent trop » leur demande, en l’espèce, de dépenser beaucoup et vite, quitte à empêcher leur développement si elles ne font pas diligence.
Moyens supplémentaires
Sur un ton moins comminatoire, l’instruction liste les possibilités de soutien financier dont peuvent bénéficier les collectivités pour atteindre les objectifs : 50 millions d’euros ont été prévus dans ce but dans le Plan eau de mars 2023, et les préfets sont encouragés à flécher la DETR et la Dsil pour aider les communes « à réaliser les travaux de mise en conformité ».
En sens inverse, la nouvelle redevance « performance des systèmes d’assainissement » est entrée en vigueur cette année. Elle est « d’autant moins élevée que les installations de collecte et de traitement des eaux usées satisfont à la réglementation », rappelle le gouvernement, ce qui devrait motiver les collectivités à davantage respecter leurs obligations.
Enfin, il est rappelé que la Banque des territoires « met à disposition des collectivités une nouvelle génération d’aqua-prêts à taux bonifiés à hauteur de 2 milliards d’euros ».
Les ministres, au passage, redonnent un petit tour d’écrou sur la question de l’intercommunalité – alors que le gouvernement a fini par renoncer à imposer l’intercommunalisation forcée de l’eau et de l’assainissement en 2026. Vu « la technicité et les moyens financiers à déployer », écrivent les ministres, « l’échelle intercommunale apparaît comme la plus à même de porter une politique ambitieuse ». Il est donc demandé aux préfets de « veiller à inciter à la mise en place, dans les meilleurs délais, d’une maîtrise d’ouvrage à l’échelle la plus adaptée ». Ce qui revient à dire, en lisant entre les lignes, que les communes qui ont décidé de conserver la compétence assainissement n’ont que peu de chance de voir leur dossier passer sur le haut de la pile.
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Outre-mer
Outre-mer : la vie chère devient la « priorité absolue » des préfets
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Dans une circulaire, le gouvernement demande aux préfets d'élargir les négociations autour des prix aux « services téléphoniques, bancaires et d'entretien automobile », ainsi que la mise en place d'un « plan de contrôle massif ». Des mesures qui arrivent alors que le budget consacré aux Outre-mer pourrait baisser de 200 millions d'euros en 2026.
« Il nous faut un plan de bataille complet et structurel qui s'attaque, méthodiquement, à tous les facteurs expliquant la cherté de la vie. » C’est le mot d’ordre de l’exécutif lancé dans une circulaire, publiée jeudi, à l’attention des préfets de Guadeloupe, de Martinique, de Guyane, de La Réunion, de Mayotte, de Saint-Pierre et Miquelon, de Saint-Martin et Saint-Barthélemy (l’administrateur supérieur des îles Wallis et Futuna est également concerné).
L’objectif est de lutter contre ce « fléau », comme l’avait qualifié François Bayrou, à l’occasion du nouveau Comité interministériel des outre-mer (CIOM) qui s’est réuni il y a une dizaine de jours, qui a entraîné une succession de mouvements sociaux ces dernières années, sans qu’aucune mesure ne puisse réellement l’enrayer.
Renforcer « le bouclier qualité-prix »
Ne souhaitant pas attendre la présentation du projet de loi dédié prévu à la fin du mois (le 30 juillet en Conseil des ministres et à la rentrée au Parlement), le ministre des Outre-mer, Manuel Valls – accompagné de ceux de l'Économie, de l’Agriculture et du Commerce – demande donc aux préfets ultramarins de faire, dès à présent, de la lutte contre la vie chère « une priorité absolue de (leur) action ».
Pour cela, l’exécutif les enjoint, « pour cette année », à « substituer » cette circulaire à « la note d'orientation annuelle sur les accords de modération de prix ou “accords BQP” ». Comprendre le « bouclier qualité-prix » qui fixe depuis 2012 le prix d'un panier de produits de première nécessité dans les départements et régions d'outre-mer (Drom).
Comme l’avait annoncé Manuel Valls il y a dix jours, la circulaire confirme l’adoption de trois décrets dans le but de « renforcer le "bouclier qualité-prix" » (« en donnant de nouveaux objectifs possibles pour les négociations et en fixant un objectif nouveau de modération du différentiel de prix vis- à-vis de l'Hexagone »), mais aussi « les observatoires des prix, des marges et des revenus » (OPMR), ces instances chargées d'analyser le niveau et la structure des prix dans les outre-mer.
Pour ces dernières – qui ont été instituées en 2008 à la suite de mouvements contre la vie chère aux Antilles – , cela entraînera « la nomination d'un président par observatoire » afin de « démultipli(er) et renfor(cer) une capacité d'enquête et de réaction ». Le troisième décret leur permettra, quant à lui, « d'intégrer des enquêtes consommateurs dans leurs avis » et « oblige(ra) l'État à assurer la publication de leur rapport annuel ».
Ces mesures offrent ainsi « un ensemble de leviers » à la disposition des préfets qui doivent dès maintenant « en faciliter l'application le plus rapidement possible », indiquent les signataires de la circulaire.
Modérer les prix sur la téléphonie et l’automobile
Pointant « des niveaux d'aboutissement différents (des actions pour lutter contre la vie chère) en fonction (des) territoires », le gouvernement propose « une feuille de route commune » aux préfets.
Il leur demande ainsi de se concentrer en premier lieu sur le « bouclier qualité-prix ». Alors que celui-ci reste « aujourd'hui limité aux seuls produits de consommation », les préfets devront conduire « une négociation » aussi sur les services « les plus à mêmes de faire l'objet d'une négociation », en particulier les « services téléphoniques, bancaires et d'entretien automobile ». Sur les produits, la négociation devra être élargie, elle aussi, aux « pièces détachées automobiles », tandis que la promotion des productions alimentaires locales devra être encouragée, « notamment sur les fruits et légumes frais ».
Pour lutter contre l'opacité qui entoure la formation des prix, le gouvernement demande ensuite de renforcer le rôle des OPMR et la mise en place d’un « plan de contrôle massif et rigoureux visant à faire appliquer les dispositifs existants et à s'assurer du respect de la loi ». Il enjoint également les préfets à soutenir « dès que possible » les initiatives privées visant à créer des « comparateurs de prix ».
L'exécutif prévoit, en parallèle, l’organisation chaque année d'une « conférence vie chère » dans chaque territoire en y associant notamment les présidents des conseils exécutifs des collectivités, en charge de la compétence économique. Ces conférences auront pour objectif « d'associer au dispositif BQP davantage d'acteurs économiques », de « contribuer à la définition du programme de travail des OPMR », « d'effectuer un bilan général de l'évolution des prix et de la répercussion des mesures » prises et de « faire remonter l'ensemble des idées d'actions portées par les acteurs économiques ».
Enfin, les ministres demandent une mobilisation pour « la transformation économique des territoires et donc le développement des filières productives ». Une mesure « nécessaire » pour « renforcer le pouvoir d'achat », selon eux. Pour cela, les préfets devront « initier des stratégies de développement des filières à fort potentiel à court et moyen termes (...) en lien avec la collectivité qui détient la compétence en matière de développement économique ». Pour le secteur agricole, cela demandera de développer et concilier « l'intégration économique régionale » et « le développement de la production locale ».
Un budget réduit de 200 millions d’euros en 2026
On peut rappeler que Manuel Valls a fait savoir, à la sortie du Comité interministériel, qu’il publiera prochainement une circulaire visant à « améliorer les délais de paiement public dans les outre-mer » pour les entreprises et lancera un travail d’adaptation des normes européennes pour mieux tenir compte « des réalités des territoires ultramarins ».
L’exécutif avait, par ailleurs, annoncé que des comités interministériels locaux seraient aussi organisés, à partir de septembre, dans chaque territoire ultramarin afin d'impliquer davantage les élus locaux.
« Ils permettront, selon une logique de démétropolisation et d’adaptation, de dégager des actions qui pourront être mises directement à l’échelle du territoire », selon lui. Plusieurs thématiques ont été retenues, comme l'adaptation au changement climatique (considérée comme « le grand défi de ces territoires ultramarins » ), la coopération et le rayonnement régional (« ces territoires doivent mieux se développer dans leur espace régional » ), la lutte contre les violences intrafamiliales ou encore l'autonomie alimentaire.
Reste que ces annonces arrivent au moment même où François Bayrou vient de dévoiler, dans son plan pour l’an prochain, une baisse de 200 millions d'euros sur le budget consacré à la mission « Outre-mer ». Si rien ne bougeait d’ici là, l'enveloppe allouée aux territoires ultramarins passerait ainsi de près de 3 milliards d'euros en 2025 à 2,8 milliards en 2026. De quoi relativiser les annonces gouvernementales.
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Transition écologique
La ministre de la Transition écologique soutient l'Ademe, « opérateur ultra compétent »Â
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Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, a défendu jeudi en Alsace l'action de l'Ademe, l'agence de la transition écologique, remise en cause ces derniers mois par plusieurs personnalités politiques pour réduire la dépense publique.
L'Ademe « apporte des solutions concrètes aux exploitations agricoles, aux entreprises, aux collectivités locales pour mettre en place du chauffage bas carbone compétitif ou qui permet de produire du bio-méthane », a souligné la ministre en déplacement sur une ferme laitière à Willgottheim (Bas-Rhin) qui a diversifié ses revenus en installant une unité de méthanisation avec le soutien de l'agence.
« Caricatures »
Défendant un « opérateur ultra compétent », elle a brocardé les « caricatures qu'on entend à Paris entre une extrême droite qui voudrait qu'on arrête tout et qui nous mette dans les mains des producteurs (d'énergies) fossiles russes, du Moyen-Orient, d'Algérie ou des Etats-Unis et une extrême gauche qui voudrait qu'on interdise toute activité économique sur notre territoire ».
Elle a mis en avant les « solutions » développées par l'Ademe, « bonnes pour le revenu, bonnes pour le pouvoir d'achat », rappelant que « 5 millions de logements aujourd'hui bénéficient d'un accès à des réseaux de chaleur » financés avec le soutien de l'agence.
Ces réseaux de chaleur, ce sont des « factures qui ne flambent pas lorsque le prix du pétrole ou le prix du gaz flambe à l'étranger », a-t-elle insisté.
Créée en 1992, l’Ademe est issue de la fusion de l'Agence pour la qualité de l’air, de l'Agence française pour la maîtrise de l'énergie et de l'Agence nationale pour la récupération et l'élimination des déchets. Elle a été décriée ces derniers mois par des personnalités de droite, comme la présidente LR du conseil régional d'Ile-de-France, Valérie Pécresse, et le président LR du Sénat Gérard Larcher.
Selon l'Inspection générale des Finances, l'Ademe « est le premier opérateur de la transition écologique des entreprises en termes de financements publics », avec 114 dispositifs d'aides représentant un montant total de 1,2 milliard d'euros en 2022.
Selon son rapport annuel, l'Ademe a accompagné « directement, financièrement et techniquement, 5 000 entreprises et 2 000 collectivités en 2024 ».
« Concrètement, 92% des sommes que l'État nous confie, on les investit aux côtés des porteurs de projets, que ce soit des chefs d'entreprise ou des élus de territoire », a assuré à l'AFP Sylvain Waserman, président de l'Ademe, ancien député MoDem et ex-maire de Quatzenheim (Bas-Rhin). « Parce que la transition écologique, c'est sur les territoires que ça se passe ».
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Journal Officiel du dimanche 20 juillet 2025
Ministère de l'Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Ministère de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation
Journal Officiel du samedi 19 juillet 2025
Lois
Ministère de l'Intérieur
Ministère de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation
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