Édition du mercredi 20 mars 2024

Climat
ZFE : seules Paris et Lyon restent dans le dispositif
Le ministère de la Transition écologique a annoncé hier des nouvelles plutôt encourageantes en matière de qualité de l'air dans les grandes agglomérations : il n'y a plus que deux agglomérations qui restent en « dépassement régulier » des seuils réglementaires de dioxyde d'azote. Ce nombre était de 15 en 2016.

D’année en année, la situation s’améliore lentement dans la plupart des grandes agglomérations françaises en matière de qualité de l’air : entre l’année 2000 et aujourd’hui, selon les derniers chiffres publiés par le gouvernement, les émissions nationales d’oxydes d’azote ont diminué de 62 % et celles de particules fines de 55 %. Dans les 43 agglomérations de plus de 150 000 habitants, le taux moyen annuel de présence de NO2 (dioxyde d’azote) dans l’air est passé de 36 µg/m3 en 2016 à 24.  C’est le meilleur chiffre obtenu dans les dernières décennies, à l’exception de l’année 2020 où le même taux avait été atteint grâce au confinement. 

Il est extrêmement difficile de savoir si cette évolution positive est due davantage aux politiques volontaristes des collectivités ou à l’amélioration des performances de moteurs produits par les industriels. Mais les chiffres sont là : aujourd’hui, seules deux agglomérations – Paris et Lyon – dépassent encore les seuils maximums d’émissions de CO2 prévus par les directives européennes. C’est d’ailleurs à ce titre que le Conseil d’État, en novembre dernier encore, a condamné l’État français à une astreinte de plusieurs millions d’euros pour dépassement « significatifs » des seuils à Paris et Lyon. Il faut rappeler qu’en 2016, ces seuils étaient dépassés dans 15 agglomérations (Nîmes, Reims, Clermont-Ferrand, Grenoble, Lyon, Marseille, Montpellier, Nice, Paris, Rennes, Rouen, Saint-Etienne, Strasbourg, Toulon, Toulouse). Ce nombre est tombé à 8 en 2021, à 5 en 2022, et donc à 2 l’an dernier. 

Soutien de l’État 

Selon le ministère de Christophe Béchu, ces résultats sont à mettre au compte de l’action des collectivités et du soutien de l’État, qui s’est matérialisé au fil du temps par plusieurs actions fortes : le Plan covoiturage (150 millions d’euros), le Plan vélo (2 milliards d’euros en 2023) et le Fonds vert, dont les crédits dédiés aux territoires concernés par une Zone à faible émission (ZFE) se sont élevés à 127 millions d’euros en 2023. 

Il faut également rappeler que les émissions de NO2 et de particules fines ne sont pas uniquement dues aux automobiles et camions, mais également aux systèmes de chauffage, notamment les chauffages au bois qui étaient encore la première source d’émission de particules fines en France en 2018. Peu à peu, avec notamment le soutien du fonds « Air bois », ces systèmes de chauffage ont tendance à diminuer et à être remplacés par des systèmes plus performants. 

ZFE et Territoires de vigilance

Ces évolutions ont une influence directe sur les obligations faites aux collectivités en matière de mise en place des ZFE (zones à faibles émissions) prévues par la LOM (loi d’orientation des mobilités) de 2019 et la loi Climat et résilience de 2021. 

Il faut en effet rappeler que, contrairement à une idée reçue, la mise en place des ZFE, qui sera obligatoire au 1er janvier 2025 pour toutes les agglomérations de plus de 150 000 habitants, n’est pas forcément assortie de restrictions de circulation (sauf pour les véhicules les plus anciens, hors classement Crit’Air). La création d’une ZFE dépend d’un seuil de population (150 000 habitants) alors que la mise en place de restrictions de circulation n’est obligatoire qu’à partir du moment où, dans l'agglomération, un dépassement des seuils est constaté « au moins trois années sur les cinq dernières années civiles ». 

Le terme de « ZFE » ayant été presque automatiquement associé, dans l’esprit du grand public, à celui de « restrictions de circulation », le ministre Christophe Béchu a décidé, en juillet dernier, de modifier le vocabulaire, afin « qu’on arrête de désigner comme réalité unique des choses qui n’ont rien à voir ». Les agglomérations de plus de 150 000 habitants où les seuils ne sont pas dépassés ne s’appellent plus, désormais, des ZFE mais des « territoires de vigilance ». Le terme de ZFE n’est plus réservé qu’à celle qui sont en dépassement, et devront donc mettre en place des restrictions de circulation le 1er janvier prochain. Elles étaient au nombre de 5 lorsque le ministre a fait cette annonce (Paris, Lyon, Aix-Marseille, Rouen et Strasbourg) ; elles ne sont plus que deux aujourd’hui. 

Les règles à retenir

Quelles sont les règles qui vont s’appliquer à ces différentes agglomérations ? Le ministère l’a rappelé hier. 

D’une part, les ZFE, Paris/Métropole du Grand Paris et Lyon. Elles devront, à compter du 1er janvier prochain, interdire la circulation des véhicules Crit’Air 3 (voitures diesel de plus de 14 ans et voitures essence de plus de 19 ans). Rappelons que la loi n’impose des restrictions que sur les véhicules particuliers, et non sur les deux-roues, les véhicules utilitaires légers et les camions ; et que les collectivités ont la possibilité de mettre en place de dérogations, pour certains types de véhicules ou catégories d’usagers. 

Dans les « territoires de vigilance » (40 agglomérations en dehors de Paris et Lyon), deux cas se posent. Premier cas : celles qui ont déjà créé une ZFE (Rouen, Reims, Strasbourg, Clermont-Ferrand, Saint-Étienne, Grenoble, Aix-Marseille, Montpellier, Nice et Toulouse). Celles-ci ont déjà mis en place les restrictions prévues par la loi (interdiction jusqu’aux Crit’Air 4) et fait diminuer leurs émissions en dessous des seuils légaux. Elles n’ont donc plus aucune obligation de renforcer les restrictions l’année prochaine. Attention, cela ne signifie pas qu’elles ne vont pas le faire – car elles en ont la liberté. Mais la loi ne les y oblige pas. 

Deuxième cas : les 30 agglomérations de plus de 150 000 habitants qui n’ont pas encore mis en place de règles et ne dépassent les seuils légaux (voir carte ci-dessous). Celles-ci n’auront qu’une seule obligation au 1er janvier prochain : interdire la circulation des véhicules les plus anciens, non classés dans le classement Crit’Air (plus de 28 ans pour les voitures, plus de 27 ans pour les véhicules utilitaires légers et plus de 24 ans pour les poids-lourds). 

Selon des chiffres publiés par le Commissariat général au développement durable, le parc de ces véhicules « non classés » immatriculés dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants est relativement modeste : il représentait alors environ 270 000 véhicules. Mécaniquement, trois ans plus tard, au 1er janvier prochain, ce chiffre aura encore assez largement diminué. L’impact pour les usagers de ces interdictions dans une trentaine d’agglomérations sera donc relativement limité. 




Petite enfance
Les jardins d'enfants sauvés in extremis par le Parlement
Adoptée en février dernier à l'Assemblée nationale, la proposition de loi pour pérenniser les jardins d'enfants gérés par une collectivité publique ou bénéficiant de financements publics vient d'être définitivement adopté en première lecture au Sénat, empêchant leur disparition initialement programmée en juin.

La proposition de loi visant à pérenniser les jardins d’enfants gérés par une collectivité publique ou bénéficiant de financements publics a fait l’unanimité autant du côté des députés que des sénateurs. Son adoption définitive au Sénat hier, sans aucune modification, met « un terme définitif aux incertitudes entourant l’avenir de ces structures ». 

Depuis l'adoption de la loi du 26 juillet 2019 Pour une école de la confiance, les jardins d'enfants sont menacés de disparition (lire Maire info du 5 septembre 2022). L’obligation de scolarisation en école maternelle à l’âge de trois ans a eu pour effet collatéral d’amorcer la disparition des jardins d'enfants, dont certains existent « depuis plus de cent ans ». 

Ainsi, comme l’a indiqué hier en séance publique au Sénat la ministre déléguée chargée de l'Enfance, de la Jeunesse et des Familles, Sarah El Haïry, « une telle évolution a posé la question du devenir des jardins d’enfants » et la loi prévoyait à l’article 18 une période transitoire de cinq années scolaires durant laquelle les jardins d’enfants existants avant l’entrée en vigueur de la loi peuvent continuer à accueillir des enfants de trois à six ans, dans le respect de l’obligation d’instruction. Or ce « moratoire expire à la fin de l’année scolaire », plus précisément en juin prochain. Le temps pressait donc. 

Cette proposition de loi cosignée par des députés de plusieurs groupes politiques (LR, RN, Modem, Liot) prévoit concrètement une « dérogation permanente pour les jardins d’enfants existants » – à condition qu'ils aient été ouverts avant juillet 2019 – pour donner l'instruction obligatoire aux enfants âgés de trois à six ans.

Rappelons que lors des discussions parlementaires, l’AMF avait souligné l’attachement des maires à ces structures qui répondent à des besoins particuliers de familles et leurs inquiétudes sur des possibles fermetures. Elle avait identifié des difficultés très concrètes concernant leur éventuelle transformation portant sur l’adaptation des locaux, la formation des professionnels exerçant dans ces structures, et surtout sur les surcoûts engendrés…

Les jardins d’enfants « sauvés »

La sénatrice Agnès Evren, rapporteure du texte au Sénat, a souligné hier en séance publique l’importance du sujet : « Il y a urgence et c’est un enjeu important ; il s’agit de la dernière chance pour garantir un avenir aux jardins d’enfants ». Elle a rappelé que ces structures sont un « système complémentaire de l’école maternelle qui fonctionne et a fait ses preuves » taclant au passage l’obligation de scolarisation à 3 ans instaurée par la loi de 2019 qui pousse aujourd’hui le Parlement à « détricoter une situation qui fonctionnait parfaitement bien » alors que déjà « 95 % des enfants étaient déjà scolarisés à 3 ans ». 

La sénatrice de Paris a rappelé que les jardins d’enfants sont « des structures d’accueil inclusives » : « À Paris, sur les 588 enfants que les jardins d’enfants accueillent, 105 ont des besoins éducatifs particuliers et 75 % d’entre eux sont en situation de handicap. » Agnès Evren a aussi souligné leur « vocation d’accompagnement à la parentalité », et leur « très forte mixité sociale »

La ministre a pointé hier que les jardins d’enfants sont aussi des « traditions locales installées » : « Au sein de l’académie de Paris, fin 2023, il y avait encore 25 jardins d’enfants dont 20 relevant de la gestion municipale et 5 d’une gestion administrative. Cela concerne 1 200 enfants environ. On compte aussi 13 jardins d’enfants en Alsace dont la moitié sont municipaux. Ce sont des territoires spécifiques avec des traditions locales spécifiques ».

Pour le sénateur Max Brisson, « la pérennité des jardins d’enfants n’aurait jamais dû être remise en cause ». Pour la rapporteure, « c’est un soulagement de sauver les jardins d’enfants, en sursis depuis 5 ans, au terme d’un long combat transpartisan ». L’année dernière, au moins trois propositions de loi avaient été déposées pour pérenniser les jardins d’enfants existants dont l’une émanait du groupe LR, une autre du groupe Écologie-Les Verts et une autre du PS. Au total hier au Sénat, sur 43 votants, 38 ont voté pour et 4 contre.

La loi sera promulguée sous 15 jours 

Le texte voté sans modification vise donc à permettre aux jardins d’enfants associatifs ou ceux gérés, financés ou conventionnés par une collectivité publique, d’accueillir des enfants âgés de trois à six ans dans le cadre de leur instruction obligatoire (lire Maire info du 31 janvier)

L’article 2 du texte prévoit que cette dérogation permanente ne puisse s’appliquer « qu’aux jardins d’enfants existants à la date d’entrée en vigueur de la loi pour une école de la confiance, soit à l’été 2019 ». Aussi, « seuls les jardins d’enfants gérés ou financés par une collectivité publique seront concernés par la dérogation. Concrètement, cela concernera les jardins d’enfants gérés par une commune ainsi que les jardins d’enfants associatifs financés par une commune ou par la CAF ».

La loi devrait être promulguée dans un délai maximum de 15 jours par le Président de la République, sauf si le Conseil constitutionnel est saisi sur ce texte.




Risques
Digues domaniales : l'état des lieux post-transfert
Deux mois après le chaotique transfert des digues domaniales, l'AMF a organisé un nouveau webinaire réunissant élus locaux et services du ministère de la Transition écologique pour dresser un bilan et soulever les interrogations persistantes des élus locaux.

Le 19 mars, l’AMF a organisé en partenariat avec France Digues et l’Association nationale des élus des bassins (Aneb) un nouvel échange sur les digues domaniales entre les représentants des autorités gémapiennes et ceux de l’État. Après le transfert de ces digues, le 29 janvier, une multitude de questions restent en suspens. Il s’agissait de faire le point sur ce dossier qui met en jeu la sécurité des populations. 

La Direction générale de la prévention des risques (DGPR) du ministère de la Transition écologique a présenté un état des lieux chiffré du transfert. Il y avait 204 digues transférables, soit 750 km. La gestion de 169 d’entre elles, soit 706 km, est passée entre les mains des collectivités gémapiennes, dans le cadre de 49 conventions de mise à disposition signées. La différence entre « transférables » et « transférées » correspond à 35 ouvrages, pour lesquels les gémapiens ont acté, avant la date limite, qu’ils ne représentaient pas d’intérêt pour leurs futurs systèmes d’endiguement : ils seront neutralisés par et à la charge de l’État. 

La DGPR précise que le montant de l’accompagnement financier de l’État aux travaux à réaliser sur ces digues d’ici à 2027 (c’est-à-dire le montant des subventions à 80 % du Fonds Barnier, plus celui des soultes aux territoires qui en bénéficient) est estimé à 363 millions d’euros. Un total qui intègre 25 millions d’€ de dépenses directes de l’État pour l’achèvement de marchés de travaux déjà en cours (lesquels demeureront exécutés par l’État).

En tout état de cause, la DGPR a convenu que cette enveloppe prévisionnelle sera « à affiner », compte tenu du manque de connaissance sur l’état de certaines digues, et donc sur les montants en jeu, au moment de signer les conventions. Elle n’a toutefois apporté aucune précision sur la marge de manœuvre de ces ajustements de montants subventionnables. Les formulations des conventions sur ces aspects sont extrêmement hétérogènes d’un territoire à un autre. De très rares collectivités gémapiennes ont obtenu, par exemple, une mention explicite de prise en compte de l’impact de l’inflation dans la convention.

Autre élément du bilan : aucun transfert par voie d’arrêté préfectoral n’a eu lieu. Rappelons que les décrets du 21 novembre 2023 prévoyaient un mécanisme automatique (transfert acté au 29 janvier par arrêté préfectoral), en l’absence de signature par le gémapien de la convention avec l’Etat avant le 28 janvier. Selon la DGPR, tous les EPCI concernés ont signé. 

Témoignages 

Au cours du webinaire, de nouveaux témoignages sont cependant venus étayer le caractère totalement précipité des discussions avec les services de l’État et les conditions acrobatiques de la signature dans les derniers jours du mois de janvier. Ainsi, les représentants d’un syndicat ont fait savoir qu’ils n’ont pas obtenu de soulte alors que, de l’aveu même de leurs interlocuteurs au sein des services préfectoraux « ils y auraient eu droit, mais le temps manquait pour en discuter ». Dans un autre territoire, une convention de transfert ne prévoit pas de travaux (donc n’aura pas le soutien bonifié à 80 % du Fond Barnier) sur une digue qui s’avère, à peine deux mois plus tard, après étude, nécessiter une remise en état significative. Les exemples de ratés de ce type risquent de se multiplier, la question du « bon état » des ouvrages transférés, qui était inscrite dans la loi Maptam mais n’est pas du tout au rendez-vous, est clairement le cœur de la problématique. 

C’est d’ailleurs précisément la raison pour laquelle l’AMF a demandé une clause de revoyure à six mois du transfert. Interpellés de nouveau sur le sujet, les représentants de la DGPR ont rappelé un principe qu’ils avaient déjà mis en avant lors du webinaire organisé par l’AMF en décembre : après le 29 janvier 2024, l’État est « dans l’impossibilité » de prendre de nouveaux engagements. Ils ont toutefois évoqué de petites souplesses potentielles, « au cas par cas », « si des difficultés particulières nouvelles apparaissent par rapport aux dispositions de la convention », atteignant vite leurs limites car relevant « de l’ordre de l’ajustement, par rapport à ces dispositions contractuelles ». Des réponses trop vagues par rapport aux attentes des gémapiens. Même chose sur d’autres questions clés que l’AMF a soulevé,  financements après 2027, limites de la taxe Gemapi, obligations de provisions ou amortissements sur ces digues transférées, enjeux de responsabilités pour les autorités gémapiennes et les maires… La DGPR avait préparé des réponses qui se sont révélées très convenues et ne résolvent pas du tout les problèmes vécus sur le terrain. En particulier, une nouvelle fois, les collectivités ont pointé l’incapacité de la taxe Gemapi à répondre aux enjeux. En rappelant, témoignages concrets à l’appui, cette impossible équation : sur un territoire où le linéaire de digues est conséquent, même avec la taxe fixée à son plafond, s’il y a peu d’habitants pour la payer, elle ne peut en aucun cas lever les fonds nécessaires.




Logement
Concilier ZAN et mal-logement : les solutions de la Fondation Abbé-Pierre à destination des collectivités
Afin de limiter l'étalement urbain tout en résorbant le mal-logement, les fondations Abbé-Pierre et Pour la Nature et l'Homme proposent de rendre progressive la fiscalité des logements vacants, de repenser le parcours résidentiel des seniors et de renforcer l'offre de logement social.

« Comment créer 400 000 nouveaux logements chaque année pendant 10 ans alors qu’il ne reste qu’environ 100 000 hectares disponibles pour répondre à l’ensemble des besoins de construction du pays d’ici à 2031 ? » C’est la question difficile à laquelle ont tenté de répondre la fondation Abbé-Pierre et la Fondation pour la Nature et l'Homme, dans un rapport publié hier et dans lequel elles assurent « démontrer » que l’objectif Zéro artificialisation nette (ZAN) offre « l’opportunité de lutter contre l’artificialisation et le mal-logement ». En même temps.

Menée auprès de réseaux d’élus locaux, d’urbanistes, de chercheurs, mais aussi de 16 communes et intercommunalités engagées dans des « démarches pilotes » de mise en œuvre du ZAN, cette étude présente 40 recommandations qui permettraient de répondre à la crise du logement tout en limitant l’empiétement de la ville sur les espaces naturels.

Logements vacants : rendre progressive la fiscalité

Mais pour y parvenir, les deux fondations estiment qu’il faut changer notre « modèle d’aménagement des territoires, aujourd’hui basé sur l’extension urbaine et l’artificialisation des sols » et qui est « source de problèmes écologiques et sociaux […] sans pour autant répondre au mal-logement qui s’aggrave de façon alarmante ».

Sans compter que l’extension des espaces urbains coûte particulièrement « cher aux collectivités territoriales », rappellent les auteurs du rapport, en pointant l’entretien onéreux des voiries et des réseaux (électricité, eau, assainissement, etc.). En outre, « le développement de quartiers étalés et peu denses rend très difficile voire impossible le développement de services de transports en commun, faute d’un nombre d’usagers suffisants pour les rentabiliser ».

Ils soulignent ainsi « l’importance de soutenir plus fortement » les acteurs du logement social et insistent sur « la nécessité de renforcer les outils de maîtrise des prix du foncier et des loyers, ainsi que les moyens des collectivités les plus démunies en matière d’ingénierie territoriale ».

L’une des voies à suivre serait, d’abord, de « créer des logements sans construire » en s’attaquant, par exemple, aux 3,1 millions de logements vacants (8,2 % du parc de logements) et aux plus de 3,5 millions de résidences secondaires (près de 10 % du parc) qui n’ont cessé de progresser ces dernières années.

Pour cela, ils proposent de « fusionner » la taxe sur les logements vacants (TLV) et la taxe d'habitation sur les logements vacants (THLV) pour en faire « une taxe obligatoire dans toutes les communes » qui serait « progressive » en fonction du nombre de biens vacants détenus par un même propriétaire. Même chose pour la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) tandis que le régime fiscal des meublés de tourisme devrait, lui, être aligné sur celui des locations nues.

Dans les zones tendues, les deux fondations recommandent également de fixer un taux maximal de résidences secondaires, « variable en fonction des caractéristiques des territoires » et créer « une servitude de résidence principale » dans les PLU(i), sur le modèle de la servitude de logement social. 

« Sous-occupation » des seniors : une solution « prometteuse »

Plus rarement évoquée jusqu'à présent, la sous-occupation présenterait « un potentiel plus important encore que la réduction de la vacance et du nombre de résidences secondaires » puisqu’elle concernerait pas moins de 8,5 millions de logements. Pour l’essentiel le fait des personnes âgées. Ce sont, en effet, 84 % des 65 à 74 ans et 85 % des 75 ans et plus qui sont en situation de sous-occupation de leur logement.

Les fondations demandent ainsi de réfléchir au parcours résidentiel des seniors qui est « l’une des clés de la transition écologique et sociale », afin de proposer à ces derniers de passer de maisons de famille où ils sont souvent seuls à des solutions de type « béguinage ou habitats partagés, participatifs ou intergénérationnels portés par un groupe de résidents et un acteur de l’économie sociale et solidaire ».

A ce titre, la mise en place d’un programme d’expérimentation dédié permettrait d’aider les collectivités à « aller au bout de la réalisation de projets pilotes pour proposer une offre de logements qui soit séduisante, convaincante et abordable pour des séniors légitimement attachés à leurs biens ». 

Renforcer l’offre de logement social

Les deux fondations préconisent également de « construire en artificialisant moins ». Des solutions visent à proposer « des logements pas ou peu consommateurs d’espaces naturels, agricoles ou forestiers (Enaf) en mobilisant les interstices de quartiers peu denses », en s'appuyant sur « le renouvellement urbain et le recyclage des friches tout en améliorant l’accès aux espaces verts et aux trames écologiques » ou encore en « renforçant l’offre de logement social, peu consommateurs d’espaces ».

Car, contrairement aux idées reçues, le logement social est « un véritable levier de sobriété foncière ». D’abord parce qu’il est « faiblement consommateur d’espaces », à la différence de l’habitat individuel. « Entre 2006 et 2014, l’habitat collectif était responsable de 3 % de la consommation d’Enaf, contre 47 % pour l’habitat individuel », rappelle ainsi le rapport qui indique que 84 % des logements sociaux sont de l’habitat collectif. De plus, le logement social est majoritairement construit sur des sols artificialisés, il ne se transforme pas en résidences secondaires et la vacance et la sous-occupation y sont plus faibles.

Les deux fondations suggèrent donc de « réserver des hectares » pour la production de logements sociaux dans le cadre de la répartition des quotas d’artificialisation au niveau des schémas de cohérence territoriale (SCoT).

A rebours des dernières annonces du gouvernement, elles recommandent même de rehausser les quotas de production de logements sociaux à « 30 % dans les zones très tendues » et de systématiser les arrêtés de carence pour les communes qui ne respecteraient pas les objectifs SRU.

Par ailleurs, elles proposent de permettre à toutes les communes de zones tendues qui le souhaitent de mettre en place l’encadrement des loyers afin de mieux maîtriser les prix de l’immobilier et du foncier.

Augmenter le Fonds vert 

Pour financer leurs propositions, les deux fondations demandent d’accroître les financements disponibles en matière d’ingénierie territoriale pour les collectivités en « favorisant celles disposant du moins de moyens ». Et cela, en augmentant les crédits du Fonds vert. À rebours donc, là aussi, des coupes budgétaires annoncées récemment par le gouvernement. 

Elles réclament ainsi à l’exécutif de « revenir sur la baisse des crédits annoncée pour 2024, et accroître substantiellement l’enveloppe pour les années suivantes, avec une trajectoire de hausse jusqu’à 2027 au moins », mais aussi de « créer dans chaque région des dispositifs de financement de l’ingénierie des collectivités qui permettent de compléter les financements du Fonds vert ».

Plus globalement, la question du financement des collectivités territoriales est d’autant plus « cruciale », aux yeux des deux fondations, que c’est celle qui doit permettre à « toutes les collectivités, en particulier les plus fragiles, de disposer de leviers pour inciter à la réduction de l’artificialisation et dégager des marges de manœuvre financières, afin de mener des politiques de sobriété foncière ambitieuses et justes ».

Elles notent ainsi, en paraphrasant la Cour des comptes, que ce système est toujours jugé « complexe et à bout de souffle » bien qu’il fasse « actuellement l’objet de nombreux travaux ». De la part du Comité des finances locales, notamment, à qui le président de la République a confié la tâche – sans le saisir officiellement pour l’heure – de réformer la DGF.

Consulter le rapport.
 




Sécurité
Fonds interministériel de prévention de la délinquance : les priorités pour 2024
Le ministre de l'Intérieur a adressé, avant-hier, une instruction aux préfets relatives aux « orientations stratégiques » du FIPD (Fonds interministériel de prévention de la délinquance). Priorité est donnée, une fois encore, au développement de la vidéo-protection, et à la protection des lieux de culte.

Les crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) sont en hausse de plus de 6 % cette année, avec un total de 87,4 millions d’euros (contre 82 millions l’an dernier). C’est ce qui ressort de l’instruction signée par Gérald Darmanin le 13 mars, non encore rendue publique mais publiée hier par nos confrères de la Gazette des communes

Vidéo-protection

Les Jeux olympiques et paralympiques sont naturellement au cœur des priorités du ministère en matière de sécurité, dans la mesure où ils représentent « une élévation du niveau de menace » et exigeront « une sécurité renforcée », conforme à l’engagement de la France envers le Comité international olympique de garantir « une sécurité totale » pour les athlètes comme pour le public. Un important soutien aux collectivités territoriales reste donc nécessaire pour les aider à « se doter de nouveaux moyens de vidéo-protection en temps utiles ». Les préfets sont donc appelés à flécher « en priorité » les crédits de vidéo-protection « vers les projets associés aux JOP 2024 non finalisés en 2023 ». 

En dehors de ces projets, les crédits vidéo-protection doivent principalement aller vers « le déport d’image vers les forces de sécurité, les centres de supervision urbains mutualisés pour les collectivités, le soutien aux dispositifs des contrats de sécurité intégrée, et l'extension du soutien aux lieux de régulation des flux de transport ». Il est rappelé que la règle, pour ces projets, est le co-financement (50 % collectivités, 50 % FIPD), en dehors des projets de déport d’image vers la police et la gendarmerie nationales, qui peuvent « être financés à 100 % ». 

Lieux de culte

Autre priorité : la sécurisation des lieux de culte. Le ministre parle d’une action « tous cultes confondus », mais met néanmoins l’accent sur « la très forte hausse des actes antisémites » constatée depuis le 7 octobre dernier. Il convient donc de faire preuve d’une « vigilance renforcée à l’égard des sites de la communauté juive ». Mais les actes antimusulmans progressent également, souligne le ministre, bien que « plus faiblement », là encore particulièrement en novembre et décembre. 

Il est demandé aux préfets d’accélérer le financement de la sécurisation des sites « particulièrement fréquentés ou sensibles », et « de veiller à l'équilibre territorial des projets remontés afin d'éviter la concentration des crédits sur une partie seulement des départements concernés ». 

Lutte contre les violences

La prévention de la délinquance – dont la prévention « des infractions visant les élus » – reste également « un objectif prioritaire ». Les préfets sont invités à adopter une approche « réactive et ancrée dans les territoires ».

Concernant la prévention de la délinquance des mineurs et des violences collectivités, « les actions visant à rapprocher les jeunes des forces de sécurité, y compris les polices municipales et les services de secours, seront soutenues notamment par le biais de collaborations avec des associations telles que les centres de loisirs jeunes de la police nationale, les associations départementales de cadets de la gendarmerie, ainsi que d'autres associations novatrices ». 

Autre action prioritaire : celle contre les violences intrafamiliales. Il est indispensable, pour Gérald Darmanin, de compléter le déploiement des intervenants sociaux en commissariat et gendarmerie (ISCG), avec une minimum de « deux intervenants par départements » et un objectif de « 600 postes créés d’ici 2027 », soit six par département. Les nouveaux postes d’ISCG seront financés par le FIPD à hauteur de 80 % la première année, 50 % la deuxième et 33 % la troisième. « Une réserve budgétaire centrale sera dédiée pour soutenir les préfectures si les fonds déconcentrés se révèlent insuffisants pour ces deux types de postes », qui peuvent par ailleurs être cofinancés par les collectivités territoriales. 

Radicalisation

Enfin, le ministre de l’Intérieur met l’accent sur la nécessité de ne pas baisser la garde sur la lutte contre la radicalisation et les dérives sectaires. « La lutte contre le séparatisme islamique demeure une priorité gouvernementale », et le FIPD peut permettre de financer des actions « de contrôle de la sphère séparatiste ». Les « communautés ou groupes antiautoritaires » doivent également être suivis de près « dès lors que des menaces à l’ordre public sont détectées ». 

Les préfets devront également mobiliser des fonds du FIPD pour soutenir, en lien avec la Miviludes, « les projets des associations visant à la prévention ou à la lutte contre les dérives sectaires ». 






Journal Officiel du mercredi 20 mars 2024

Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Décret n° 2024-239 du 19 mars 2024 modifiant le décret n° 2023-1243 du 22 décembre 2023 portant application de l'article L. 211-11-1 du code de la sécurité intérieure au relais de la flamme olympique et au relais de la flamme paralympique
Ministère de l'Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Décret n° 2024-235 du 18 mars 2024 portant création d'un service à compétence nationale dénommé « Office national anti-fraude »
Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités
Arrêté du 14 mars 2024 modifiant la liste des spécialités pharmaceutiques agréées à l'usage des collectivités et divers services publics

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