Édition du mercredi 20 décembre 2023

Gouvernement
L'adoption de la loi immigration aggrave encore la crise politique
Après la large adoption par l'Assemblée nationale du projet de loi immigration et intégration, hier soir, la seule conséquence concrète à cette heure est la démission du ministre de la Santé, Aurélien Rousseau. Mais cette séquence laissera des traces, même si l'exécutif s'efforce de déminer. 

« J’ai le sentiment du devoir accompli. (….) Il n’y a pas de crise de la majorité ». Élisabeth Borne, ce matin sur France inter, a voulu jouer l’apaisement. Mais au bout de plusieurs semaines d’extrême tension politique, l’adoption d’un texte qu’Olivier Marleix, président du groupe LR à l’Assemblée nationale, n’a pas hésité à qualifier hier soir dans l’Hémicycle de « texte des LR » et que la patronne du RN a désigné comme « une victoire idéologique » va, fatalement, redistribuer les cartes. 

Le « piège »

Les heures qui ont précédé le vote de l’Assemblée nationale ont été marquées par de multiples annonces et coups de pression. La réunion de la CMP elle-même s’est déroulée d’une façon assez inhabituelle, sous la surveillance constante du président Macron qui, selon des sources élyséennes, en a suivi les travaux « article par article ». 

Puis est venue la fumée blanche de la CMP et l’annonce d’un compromis trouvé, et le coup politique de Marine Le Pen : à rebours des déclarations de tous les ténors de son parti, elle a annoncé que les députés RN voteraient ce texte à l’Assemblée nationale – alors que le président du parti, Jordan Bardella venait d’affirmer le contraire. « Le dernier ressort du piège posé par le Rassemblement national se referme sur nous », constatait, amer, le député Renaissance de Paris Gilles Le Gendre : ce texte, impulsé et voulu par le président de la République depuis le début de son second mandat, trouvait le plein soutien du parti de l’adversaire d’Emmanuel Macron au second tour de l’élection présidentielle. Emmanuel Macron qui déclarait, au soir du second tour, le 24 avril 2022 : « Je sais que nombre de nos compatriotes ont voté ce jour pour moi non pour soutenir les idées que je porte mais pour faire barrage à celles de l'extrême droite. Je veux (…) leur dire que j'ai conscience que ce vote m'oblige pour les années à venir. » 

Parade

Pour tenter de sortir de ce piège, le chef de l’État a dégainé, quelques minutes avant le vote, une arme originale : il a fait savoir que si le texte était adopté grâce aux voix du Rassemblement national, il n’accepterait pas le résultat et demanderait alors une « nouvelle délibération ». Il s’agit d’un droit constitutionnel : l’article 10 de la Constitution dispose qu’un texte adopté définitivement par le Parlement doit être promulgué par le chef de l’État sous quinze jours, sauf s’il demande, « avant l’expiration de ce délai, une nouvelle délibération de la loi ou de certains de ces articles ». La Constitution précise que « cette nouvelle délibération ne peut être refusée ». 

Mais faire usage de cette disposition au seul motif qu’un texte a été adopté grâce aux voix d’un groupe politique paraissait plus que risqué. Certains ténors de la droite, comme François-Xavier Bellamy, déclaraient hier soir que si le chef de l’État prenait cette décision, ils ouvriraient une procédure devant la Cour européenne des droits de l’homme. 

Cela ne sera finalement pas nécessaire. Le décompte des votes à l’Assemblée nationale permet en effet au gouvernement de dire que le texte a été adopté « sans les voix du Rassemblement national ». 

Le texte a recueilli 349 voix pour et 186 contre, tandis que 38 députés se sont abstenus. Même en retirant les 88 voix du Rassemblement national, le texte aurait donc encore obtenu 261 voix pour, et aurait donc été largement adopté. 

Les 62 députés LR ont voté pour le texte, et la totalité des députés Nupes (PCF, LFI, PS et écologistes) ont voté contre. 

C’est au sein des groupes liés au gouvernement que des fractures sont, en revanche, apparues. Au sein du groupe Renaissance, 20 députés ont voté contre le texte (dont le président de la commission des lois, Sacha Houlié) et 17 se sont abstenus ; au MoDem, 5 voix contre et 15 abstentions ; dans le groupe Horizons, 2 voix contre. Soit un total de 59 députés de la majorité qui n’ont pas accepté de voter le texte. 

Il paraît donc assez hardi de la part de la Première ministre de déclarer qu’il n’y a pas de « crise de la majorité ». D’autant plus lorsque l’on entend, ce matin, la présidente de l’Assemblée nationale elle-même, Yaël Braun-Pivet, déclarer – même si elle a voté pour le texte – que certains aspects de celui-ci la « gênent terriblement ». Ce matin, un premier député de la majorité, Jean-Charles Larsonneur (Horizons) a annoncé qu’il quittait son groupe, déclarant que « (sa) colonne vertébrale n’a pas changé depuis 2017 ». Il reste à voir si cette décision en appellera d’autres. 

Ministres vrais-faux démissionnaires

Autre coup de pression mis dans la soirée d’hier : celui de plusieurs ministres venus de la gauche, dont la presse a rapporté leur intention de démissionner si le texte était adopté. Parmi eux, le ministre des Transports (Clément Beaune), de la Santé (Aurélien Rousseau), de la Culture (Rima Abdul Malak) ou encore du Logement (Patrice Vergriete). Cette annonce n’a pas eu le moindre effet sur la Première ministre, qui n’a pas modifié pour autant ses consignes de vote au groupe Renaissance. 

Le seul à avoir mis sa menace à exécution, à cette heure, est Aurélien Rousseau, qui a remis une lettre de démission à la Première ministre, indiquant à la presse : « [Ce texte] touche aux murs porteurs. Je ne donne de leçons (…) à personne. Je constate cliniquement que ce n’est pas possible pour moi d’expliquer ce texte. » La démission du ministre de la Santé a été actée ce matin, et il a été remplacé, « par interim », par Agnès Firmin-Le Bodo. Quant aux autres membres du gouvernement qui auraient menacé de démissionner si le texte était adopté, ils font preuve, à l’heure où nous écrivons, d’un silence prudent. 

Les contrecoups de cette séquence – entre tensions au sein même du gouvernement et dans la majorité et déplacement du centre de gravité à l’Assemblée nationale vers le Rassemblement national – se feront immanquablement sentir dans les semaines et les mois qui viennent. D’autant que le gouvernement a accepté de relancer la machine dès la rentrée, avec la présentation promise d’un texte sur l’aide médicale d’État qui provoquera les mêmes débats. 

Cet épisode a montré une fois de plus l'extrême difficulté qu'il y a à gouvernener sans majorité absolue à l'Assemblée nationale. Dès lors que la motion de rejet a été votée la semaine dernière, il n'existait plus de bonne solution pour le gouvernement, qui avait le choix entre un abandon pur et simple du texte – démontrant alors son impuissance – ou une CMP où la majorité se trouvait obligée de beaucoup céder à l'opposition de droite. Les LR, pourtant très minoritaires à l'Assemblée, ont ainsi pu forcer la majorité à venir sur leurs positions. 

Il reste à savoir ce que l'opinion retiendra de cette séquence. Si le gouvernement, comme la droite et le RN, ont beaucoup argué pendant les débats de ce que ces mesures de durcissement étaient « très attendues des Français », il faudra attendre les futures enquêtes d'opinion, maintenant que le texte est adopté, pour connaître le sentiment de ces derniers. 




Immigration
Loi immigration : ce que contient le texte adopté hier
Le projet de loi du gouvernement sur l'immigration a été définitivement adopté par le Parlement hier, dans une version beaucoup plus dure que le texte initial. Sous réserve d'éventuelles censures de certains articles par le Conseil constitutionnel, c'est donc ce texte qui sera promulgué. Tour d'horizon des principales mesures.

Après une interminable commission mixte paritaire et des jours de tractations, le projet de loi « Immigration et intégration » a été adopté hier par le Sénat puis, en fin de soirée, par l’Assemblée nationale. Ce texte, qui est à l’origine d’une crise politique profonde (lire article ci-contre), marque un durcissement de la politique migratoire de la France – c'est le plus dur sur ce sujet depuis les lois Pasqua de 1986 et 1993.

Secteurs en tension et prestations sociales

Rappelons que le texte initial a d’abord été examiné par le Sénat, qui l’a presque entièrement récrit dans le sens d’un durcissement. Il a été ensuite à nouveau remanié par la commission des lois de l’Assemblée nationale, qui a fait sauter la plupart des ajouts du Sénat. Arrivé en séance publique, le projet de loi n’a pas été examiné, après l’adoption d’une motion de rejet votée par toutes les oppositions (Nupes, LR et RN). Le gouvernement avait alors le choix de retirer le texte, de relancer une navette parlementaire ou de convoquer une commission mixte paritaire (CMP) députés-sénateurs. C’est ce choix qui a été fait, et la CMP a rétabli, pour l’essentiel, la version du Sénat. 

C’est le cas notamment sur ce qui était, depuis le début, une « ligne rouge » pour LR et le RN : une régularisation de droit des travailleurs sans papiers employés dans les secteurs et les zones géographiques en tension. Le texte final est clair : si une régularisation de ces travailleurs est possible, à titre « exceptionnel » et pour un an, elle n’est plus de droit et ne peut être en aucun cas opposable. Elle sera à la main des préfets, qui décideront cas par cas, en fonction non seulement de la situation professionnelle de ces travailleurs mais aussi de « leur insertion sociale et familiale, leur respect de l’ordre public, leur intégration à la société française et leur adhésion aux modes de vie et aux valeurs de celle-ci ». 

Autre sujet de vives tensions : l’accès aux prestations sociales pour les étrangers. Actuellement une durée de résidence de 6 mois est nécessaire pour pouvoir toucher un certain nombre d’aides sociales (APL, allocations familiales, etc.). Le Sénat avait souhaité faire passer ce délai à cinq ans – y compris pour les étrangers en situation régulière. Cette mesure a été retenue dans le texte final, avec un seul assouplissement : les étrangers pourront prétendre à ces aides s’ils peuvent justifier « d’au moins 30 mois » d’activité professionnelle. Pour la seule APL, cette période de travail est réduite à trois mois. 

Ces mesures sur les prestations sociales, qui s’apparentent à la « préférence nationale » prônée par le FN/RN depuis des décennies, pourraient être retoquées par le Conseil constitutionnel. 

Quotas et délit de séjour irrégulier

Le texte final rétablit également les quotas migratoires voulus par le Sénat : le Parlement devra « déterminer, pour les trois années à venir, le nombre des étrangers admis à s’installer durablement en France ». Il rétablit aussi le délit de séjour irrégulier supprimé en 2012 : un étranger en situation irrégulière sera frappé d’une amende de 3 750 euros avant d’être expulsé, le tout assorti d’une interdiction de séjour de trois ans. 

Droit du sol et déchéance de la nationalité

Autre modification majeure : ce texte marque la fin du droit du sol automatique. Il s’agissait, rappelons-le, d’une constante dans le droit depuis la loi de 1851 : un enfant né en France de parents étrangers acquiert automatiquement la nationalité française à sa majorité, à condition toutefois de résider en France à cette date et d’y avoir eu sa résidence habituelle « pendant une période continue ou discontinue d'au moins cinq ans, depuis l'âge de onze ans » (article 21-7 du Code civil). Le texte adopté hier met fin à l’automaticité, puisque le jeune en question ne pourra acquérir la nationalité que s’il « en exprime la volonté ». Même si cette condition n’est pas très restrictive, il s’agit bien d’une remise en question du droit du sol – qui pourrait, de ce fait, être refusée par le Conseil constitutionnel. 

Le texte adopté hier établit également la déchéance de nationalité pour les personnes ayant acquis la nationalité française et condamnées pour « homicide volontaire sur une personne dépositaire de l’autorité publique ». 

Regroupement familial

La CMP et le Parlement ont rétabli les mesures voulues par le Sénat en matière de durcissement du regroupement familial. Celui-ci ne sera désormais possible que si un étranger a résidé deux ans sur le territoire français (au lieu de 18 mois), s’il dispose de ressources « régulières », s’il est muni d’une assurance maladie. Il est confié aux maires la mission de s’assurer que l’étranger qui fait sa demande satisfait aux conditions de logement et de ressources prévues par la loi. Un décret fixera le délai dont dispose le maire pour donner son avis, qui sera réputé défavorable s’il n’est pas rendu. 

Durcissement également pour l’acquisition de la nationalité française par mariage avec un ressortissant français : celle-ci ne sera accordée que si l’étranger réside en France depuis au moins 5 ans (au lieu de 3 actuellement), et le texte a ajouté des conditions de maîtrise de la langue française par l’époux ou l’épouse.

Caution étudiante

Autre nouveauté qui suscite une certaine stupéfaction dans le monde universitaire : la loi subordonne la délivrance d’un titre de séjour étudiant au versement d’une « caution », qui ne sera rendue à l’étudiant que lorsqu’il quittera le pays. Le ministre de l’Enseignement supérieur pourra, « à titre exceptionnel », exonérer un étudiant du paiement de cette caution en raison de la « modicité de ses revenus » ou de « l’excellence de son parcours ». Le montant de la caution sera fixé par décret. 

L’association France universités, qui regroupe les présidents des principales universités du pays, a publié hier un communiqué très dur contre cette mesure, la qualifiant « d’insulte aux Lumières » et de « contraire aux valeurs de la République et à la tradition multiséculaire d’ouverture au monde de l’université française ». 

Quelques assouplissements

Le texte contient de nombreuses autres mesures qu’on ne peut entièrement détailler ici : exclusion de l’hébergement d’urgence pour les personnes visées par une obligation de quitter le territoire, nouvelle condition de « respect des principes de la République » pour obtenir un titre de séjour, réforme de la Cour nationale du droit d’asile, suppression des protections contre l’expulsion de certains étrangers (dont l’expulsion automatique des étrangers condamnés pour agression d’élu), systématisation des OQTF pour les étrangers déboutés du droit d’asile. 

En revanche, par rapport au texte du Sénat, quelques assouplissements ont été validés par la CMP. C’est le cas notamment sur l’aide médicale d’État (AME), que le Sénat avait prévu de supprimer. Elle est maintenue dans le texte final… pour l’instant, car l’accord des LR à cette modification n’a été obtenu qu’en échange de la promesse écrite, par la Première ministre, de présenter un projet de loi de réforme de l’AME dès le début de l’année prochaine. Celle-ci a cependant affirmé, ce matin, sur France inter, qu’il ne serait « pas question » de supprimer l’AME. 

Le texte, enfin, propose au titre de la « protection des étrangers » un certain nombre de mesures contre les passeurs et les marchands de sommeil, et permet notamment l’attribution d’un titre de séjour d’un an pour les sans-papiers victimes des marchands de sommeil… mais ayant déposé plainte, ce qui paraît relativement compliqué pour des personnes en situation irrégulière. Il interdit également le placement en centre de rétention des mineurs de moins de 18 ans. Ces mesures de « protection » font dire à Gérald Darmanin, qui a porté ce texte depuis le début des débats, que celui-ci est « équilibré », puisqu'il « prévoit des mesures très fortes d'intégration, de régularisation de travailleurs sans papiers, mais aussi d'expulsion des étrangers délinquants ». 

Il reste maintenant à savoir si certaines dispositions de ce texte seront censurées par le Conseil constitutionnel, qui sera saisi à la fois par les partis de gauche et par le président de la République lui-même. La Première ministre, ce matin, a estimé que certaines mesures du texte ne « semblent pas conformes à la Constitution »




Santé publique
La baisse du nombre de lits s'accélère dans les hôpitaux, l'ambulatoire progresse
Ce sont plus de 6 700 lits qui ont fermé en 2022 dans les hôpitaux français, selon la Drees. Une diminution plus importante qu'avant la crise sanitaire, alors même que le gouvernement a annoncé vouloir rouvrir des lits d'ici la fin de l'année 2023.

La tendance des dernières années se poursuit. Il y a toujours de moins en moins de lits disponibles dans les cliniques et les hôpitaux français pour accueillir des patients. C’est le constat fait par la Direction des études et statistiques (Drees) dans une étude publiée ce matin.

Les capacités d’accueil des 2 976 établissements de santé (1 338 hôpitaux publics, 658 établissements privés à but non lucratif et 980 cliniques privées), « dont le nombre de sites géographiques continue de diminuer lentement », continuent donc de se réduire. Celle-ci s’accélérant même.

Près de 40 000 lits en moins depuis 2013

Selon les données de la Drees, le nombre de lits disponibles a ainsi chuté de 1,8 % en 2022, davantage que l’année précédente qui les avaient vus baisser de 1,4 %. Des diminutions qui sont même plus importantes que ce qui était observé avant la crise sanitaire (- 0,9 % par an en moyenne entre 2013 et 2019). 

Sur les quelque 374 000 lits recensés, ce sont ainsi 6 713 lits dans les hôpitaux et les cliniques qui ont été perdus en 2022. Ils étaient encore près de 413 000 en 2013.

Résultat, depuis fin 2013, la baisse cumulée atteint « 39 000 lits d’hospitalisation complète », soit une chute de 9,4 % en neuf ans. Si « toutes les disciplines sont concernées », on peut noter qu’une « part importante » de la baisse de 1,7 % de lits en psychiatrie « provient du secteur public (- 1 000 lits, soit - 3,1 %) et principalement des centres hospitaliers spécialisés (- 800 lits, soit - 4 %) ».

« Ce repli poursuit une tendance observée depuis plusieurs années, qui reflète la volonté de réorganiser l’offre de soins hospitaliers dans un contexte de "virage ambulatoire", mais aussi de contraintes de personnel, ne permettant pas de maintenir les lits », expliquent les autrices de l’étude.

« Virage ambulatoire » confirmé

En effet, dans le même temps, le nombre de patients accueillis en ambulatoire a, lui, augmenté de près de 2 600 places supplémentaires. Ainsi, « le nombre de places continue de progresser (+ 3,1 %), à un rythme plus soutenu qu’avant-crise (+ 2,5 % par an) », portant leur nombre à quelque 85 000 places. 

Bien que la crise sanitaire ait freiné cette dynamique, très temporairement, le nombre de places en hospitalisation partielle a progressé, entre fin 2013 et fin 2022, de 17 400 places, soit une hausse de 25,8 % en neuf ans.

« La hausse continue d’être plus élevée en moyen séjour (+ 5,8 %) qu’en court séjour (+ 4,2 %) », mais demeure « faible » en psychiatre (+ 0,3 %).

En parallèle, l’hospitalisation a domicile (HAD) a progressé de 1,6 % en 2022, après les bonds de 10,5 % et 6,8 % durant les deux années précédentes, en pleine crise sanitaire. « Fin 2022, 23 000 patients peuvent être pris en charge simultanément en HAD sur le territoire (19 000 pouvaient l’être en 2019 avant la crise sanitaire), ce qui représente 7,9 % des capacités totales de prise en charge en hospitalisation complète en court et moyen séjour (hors psychiatrie) », indique l’étude.

Plus globalement, le nombre d’entités géographiques de statut public ou privé a reculé l’an passé avec 11 établissements en moins, soit une baisse de 0,4 %, « sous l’effet des réorganisations et des restructurations ».

Si, depuis 2013, la baisse est plus marquée pour les hôpitaux publics (- 5,8 %) – leur nombre est passé de 1 420 entités géographiques fin 2013 à 1 338 fin 2022 – principalement en raison de « la forte diminution du nombre de centres hospitaliers, ex-hôpitaux locaux », le nombre de cliniques privées est aussi en recul, mais de manière moins prononcée (- 3,8 %), passant de 1 019 entités à 980 fin 2022. Avec une baisse similaire, le secteur privé à but non lucratif a vu le nombre de ses entités géographiques passer de 683, fin 2013, à 658 en fin d’année 2022.

Au moins « 3 000 lits » rouverts d’ici fin 2023

Cette baisse continuelle du nombre de lits va-t-elle s’inverser cette année, pour la première fois depuis longtemps, alors que le ministre de la Santé – démissionnaire depuis hier soir – a annoncé fin novembre la réouverture de « 3 000 à 4 000 lits » d'hôpital d'ici la fin de l'année ? 

Souhaitant lancer « un signal positif », Aurélien Rousseau assurait, il y a moins d’un mois, que son « combat, c'est de recruter et de fidéliser » du personnel dans tous les hôpitaux.

Pour faire face à la « pénurie » de personnel, la Première ministre Élisabeth Borne avait d’ailleurs annoncé, l’été dernier, la revalorisation de 25 % du travail de nuit des infirmiers et des aides-soignants, mais aussi « la revalorisation du travail le samedi et le dimanche ». Ce « sujet de salaire » était donc considéré comme « en partie comblé », selon le ministre. 

Télécharger l’étude.
 




Aménagement numérique du territoire
Subventions des technologies alternatives à la fibre : la fausse bonne idée qui pénalise les collectivités et les abonnés
Les subventions annoncées dimanche dernier pour aider les foyers n'ayant pas la fibre ont du mal à convaincre du côté des collectivités. In fine, ces nouvelles aides publiques profitent avant tout aux opérateurs.

Dimanche, le ministre chargé du Numérique Jean-Noël Barrot a annoncé que les foyers les plus modestes n'ayant pas encore accès à la fibre pourront obtenir une subvention allant de 300 à 600 euros (lire Maire info du 18 décembre). 

Pour rappel, le gouvernement a décidé d’étendre le dispositif qui concernait jusqu’ici toutes les communes de la zone d'initiative publique à l’ensemble du pays. Ainsi, trois niveaux de soutien ont été débloqués pour tous les foyers n’ayant pas la fibre : un montant de 150 euros dans les territoires ultra-marins pour du Bon haut débit, une aide de 300 euros en France métropolitaine pour du Très haut débit, et jusqu'à 600 euros pour les foyers modestes, notamment les bénéficiaires du RSA.

Si le ministre a présenté cette nouvelle mesure comme étant « un pas de plus vers le très haut débit pour tous », les associations d’élus ne l’entendent pas de cette oreille. Dans un communiqué de presse commun diffusé hier, l’Avicca, la FNCCR et Départements de France dénoncent « le revirement opéré par l’État ».

Financement des aides sur fonds publics

La première chose que contestent les associations d’élus réside dans le fait que « l’État a décidé, de façon unilatérale, d’étendre à la zone d’initiative privée les aides publiques pour des solutions palliatives à l’absence de fibre optique. » Les associations dénoncent le fait que ce financement des aides se fasse sur fonds publics, « fonds de surcroît dévolu aux projets numériques des collectivités ». 

De surcroît, la demande de longue date des associations d’élus de mettre en place un fonds de péréquation a été « une énième fois » rejetée par l’État dans le cadre du projet de loi de finances 2024. « Ce fonds devait permettre de favoriser l’égalité entre les collectivités territoriales au niveau des ressources, de réduire, dans un esprit de solidarité, le fossé entre les territoires les plus rentables et ceux qui le sont moins pour un accès équitable à Internet, partout en France »

En juillet dernier, l'État avait ouvert une consultation publique en vue de prolonger le dispositif de cohésion numérique jusqu'en décembre 2025, avec quelques modifications. Les trois associations demandaient à l’État « d’encadrer les mesures palliatives par les technologies alternatives envisagées, qui s’avèrent hélas utiles, d’une façon plus stricte notamment en veillant à ne pas « détourner l’argent public nécessaire à la cohésion des territoires ». Cette aide nouvellement annoncée va « à l’encontre de toutes les demandes faites par les collectivités et leurs représentants », en plus d’être une surprise. 

« Un cadeau » aux opérateurs 

D’abord, les associations d’élus rappellent que cette extension du bénéfice des aides de l’État aux solutions alternatives était, déjà en 2019, « un terrible aveu d’échec de l’encadrement de l’initiative privée pour le déploiement du très haut débit ».

Aujourd’hui que le dispositif s’applique partout, l’État semble jouer le jeu des opérateurs au détriment des collectivités. En effet, du point de vue des représentants des collectivités, « l’État préfère subventionner les conséquences des défaillances des opérateurs privés plutôt qu’aider les collectivités porteuses de réseaux publics à assurer la viabilité économique de leur service public ».

Le sentiment d’injustice exprimé dans le communiqué s’explique aussi car « la position des opérateurs privés va à l’encontre de toute logique d’aide publique ». « Ces derniers craignent le risque de devoir surdimensionner le réseau et ainsi de devoir consentir des investissements supplémentaires » et veulent donc « bien de la subvention publique, mais ne veulent pas engager d’investissements en contrepartie. La subvention devient dès lors sans objet ».

Concrètement, l’État se place avant tout du côté des opérateurs. 

Des solutions moins confortables que la fibre 

Et le consommateur dans tout ça ? Toujours selon les associations, cette aide menace aussi les citoyens qui attendent toujours la fibre. Ces subventions « risquent d’inciter les opérateurs privés à ne jamais déployer la fibre sur les communes qu’ils se sont réservés puisque des technologies alternatives sont possibles ». Il faudra donc définitivement dire adieu à la fibre.

De plus, comme Maire info l’expliquait lundi, la fermeture du réseau cuivre pourrait se faire même sans le 100 % fibre et « l’opérateur Orange peut y trouver une des conditions fixées par le cadre réglementaire pour fermer le réseau ». 

Sans fibre et sans ADSL, les abonnés n’auront d’autres choix que de se tourner vers les solutions alternatives qui peuvent s'appuyer sur la boucle locale radio, la 4G fixe ou encore le satellite. Si l’on s’intéresse de plus près à ces technologies alternatives, on remarque très vite que ces dernières sont loin de rivaliser avec la fibre optique. 

Du côté de la boucle locale radio par exemple, le principe est le suivant : le signal arrive par voie hertzienne, depuis une antenne émettrice qui peut être située à plusieurs kilomètres du logement. Comme l’indique l’UFC-Que choisir, pour en bénéficier, il faut que la zone soit couverte par un réseau Wimax (développé généralement à l’initiative des collectivités locales), ce qui n’est pas le cas partout, et « le débit peut varier en fonction de la météo ». Pour la box 4G, de nombreuses zones géographiques ne peuvent pas en profiter notamment en milieu rural. De plus, selon l’association de défense des consommateurs, « il ne faut pas être trop exigeant, d’une part parce qu’elle ne permet pas de recevoir la télé et d’autre part parce que le débit réel varie en fonction du nombre d’utilisateurs simultanés de la 4G dans le quartier ».

Enfin, concernant l’offre satellite – offre la plus plébiscitée –, elle nécessite l’installation d’une antenne parabolique qui peut être assez coûteuse même si certaines collectivités locales prennent en charge une partie de la facture. Les tarifs des abonnements sont aussi conséquents. Selon un article de 01net.com, « Orange demande 49,99 € par mois à ses clients (…). Il faut également prendre en compte les coûts annexes. Orange facture 8 euros par mois pour la location de la parabole. Il est aussi possible de l’acheter pour la somme de 299 euros. On y ajoute 50 euros de frais d’activation et éventuellement 299 euros si vous souhaitez qu’un professionnel vienne installer l’antenne chez vous à votre place ». Notons aussi que le décodeur TV n’est pas compris dans cette offre. 

Starlink évincé du dispositif 

Le dispositif de subventions du gouvernement s’appuie sur les offres d’opérateurs préalablement labellisées par l’État. D’ailleurs, la liste des opérateurs labellisés est disponible sur le site de l'ANCT. Starlink, la solution par satellite de SpaceX, n'est pas concerné par ces aides. Fin 2022, le fournisseur d’accès à Internet comptait pourtant déjà 10 000 clients français. 

Pour faire concurrence à cette offre, Orange a également lancé une offre satellite qui, elle, est éligible aux subventions. Mais comme le souligne 01net, l’offre Starlink est moins chère sur une année (620 euros) que l’offre d’Orange (745 euros) mais elle offre surtout une connexion plus performante avec un temps de latence plus court : « Orange annonce une latence élevée de 700 ms, contre seulement 40 à 60 ms de ping pour Starlink. » Privés d’accès à la fibre qu'on leur avait pourtant promis, les abonnés vont devoir se contenter d’une offre plus chère (même si remboursée en partie) et devront faire une croix sur la plus efficace sur le marché à ce jour… 
 




Transports
Plan à 100 milliards : le gouvernement distribue les premiers crédits pour les transports de demain
La fin de l'année coïncide avec une distribution de crédits conséquents pour les transports régionaux, présentée par le gouvernement comme une première traduction du plan à 100 milliards d'euros pour le ferroviaire, que certains élus peinent toujours à discerner.

Depuis la mi-novembre, le ministre délégué aux Transports Clément Beaune sillonne le territoire pour signer les volets mobilité des contrats de plan État-région (CPER). Ces contrats, qui portent sur la période 2023-2027, doivent permettre de financer des « projets structurants » de transport collectif, des routes ou bien encore des infrastructures destinées au vélo. Le dernier CPER en date, qui doit être signé mercredi avec la région Ile-de-France, est plus important. Il prévoit 8,3 milliards d'euros d'investissements sur quatre ans, dont 3 milliards abondés par l'État.

Parmi les plus gros projets financés figurent « l'amélioration et la modernisation des RER et Transilien » pour 1,1 milliard d'euros et le prolongement du RER E à l'Ouest de Paris, pour 1,7 milliard d'euros. Le ministère des Transports insiste : les montants alloués dans le cadre de ces CPER dépassent de 50 % ceux de la génération précédente et seront à 70 % dédiés aux transports collectifs, tandis que les crédits routiers ont diminué de moitié.

Priorité au ferroviaire

Avec l'Ile-de-France, six régions sur 13 auront signé un accord, pour un montant total de 12,9 milliards d'euros de crédits partagés entre l'Etat, les régions et les collectivités locales. Ces subsides font partie des « premières briques » du « plan d'avenir pour les transports », a déclaré le ministre délégué aux Transports Clément Beaune, lors d'une rencontre avec des journalistes fin octobre.

Plus que les 100 milliards d'euros d'investissement d'ici 2040, le ministre se concentre sur « les 25 à 30 milliards d'euros » d'ici la fin du quinquennat. « Honnêtement, nous avons eu un CPER négocié au maximum de ce que l'État pouvait faire », a reconnu auprès de l'AFP Christophe Coulon, vice-président chargé des mobilités à la région Hauts-de-France.

L'État a promis à sa région près de 700 millions d'euros d'investissements, pour un total de 2 milliards si l'on ajoute les contributions de la région, des départements et des métropoles de Lille et Amiens. Malgré cela, « on court après l'urgence », déplore l'élu. « On est dans des investissements de survie, pas de maintenance régulière » d'un réseau ferroviaire ancien et défaillant, insiste-t-il.

La priorité du gouvernement donnée aux transports collectifs, et au ferroviaire en particulier, est malgré tout saluée par certains élus comme Roch Brancour, vice-président Transports et Mobilité au conseil régional des Pays de la Loire. « Il y a une priorité très clairement mise sur le ferroviaire, donc ça c'est une bonne chose. On estime que l'Etat est au rendez-vous », affirme Roch Brancour, qui préfère voir le verre à moitié plein.

Loin du compte

Grâce aux crédits débloqués, sa région va pouvoir rouvrir une ligne jusqu'ici fermée entre Cholet et Les Herbiers et permettre une desserte ferroviaire du parc d'attraction du Puy du Fou. Mais en Occitanie, l'une des sept régions à n'avoir toujours pas signé son CPER, « nous sommes encore en attente de réponses du gouvernement », affirme Jean-Luc Gibelin, le vice-président Mobilités. « Nous souhaitons un engagement de haut niveau sur le ferroviaire parce qu'il y a besoin sur des infrastructures qui sont très vieillissantes », constate-t-il. « Nous avons besoin d'engagements sur les services express régionaux métropolitains (SERM, autrement dit les RER métropolitains) à Toulouse, Montpellier mais aussi sur le grand Avignon - avec la région PACA - et sur un projet qui est le Tarbes-Lourdes-Pau - avec la région Nouvelle-Aquitaine », détaille-t-il. 

À ce stade, « les sommes annoncées sont du niveau des pré-études, on est vraiment sur des choses symboliques », déplore Jean-Luc Gibelin. « Il y a eu un début d'effort qui est réel, mais là aujourd'hui, il n'y aura pas les 100 milliards de plus. Nous sommes très, très loin du compte », souligne l'élu.







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