Édition du jeudi 14 décembre 2023

Statut de l'élu
Les sénateurs proposent une réforme des autorisations d'absence pour l'exercice d'un mandat local
La Délégation aux collectivités territoriales du Sénat examine aujourd'hui deux rapports sur le statut de l'élu. Le premier présente des propositions pour « améliorer et sécuriser » l'exercice du mandat et la conciliation de celui-ci avec la vie personnelle et professionnelle.

Le Sénat poursuit ses travaux sur l’amélioration des conditions d’exercice du mandat. Sa délégation aux collectivités territoriales a missionné plusieurs sénateurs pour réaliser une série de rapport sur les différents aspects de cette problématique. Le premier a été rendu mi-novembre, et traitait des questions liées au régime indemnitaire des élus (lire Maire info du 17 novembre). Le deuxième et le troisième rapport sont présentés aujourd’hui à la délégation. 

Sobrement intitulé Faciliter l’exercice du mandat local, le deuxième volet de ces travaux a été réalisé par Nadine Bellurot, (Indre, LR), Pascal Martin (Seine-Maritime, UC) et Guylène Pantel (Lozère, RDSE). 

Les rapporteurs partent du constat unanimement partagé selon lequel « les conditions d’exercice des mandats se sont largement dégradées », ce qui entraîne le découragement et parfois la démission d’un nombre toujours croissant de maires, et un risque aggravé de crise des vocations pour les élections de 2026. 

Autorisations d’absence

Parmi les difficultés identifiées, « la difficile conciliation du mandat d’élu local avec la vie professionnelle et personnelle ». 

Alors que les maires consacrent de plus en plus de temps à leur mandat (« multiplication des dossiers, attentes des citoyens, complexité intercommunale, inflation des dispositifs, accroissement des appels à projets… »), il reste difficile pour ceux-ci de bénéficier des dispositifs d’absences légales de leur emploi, même si la loi Engagement et proximité de 2019 a augmenté le crédit d’heures dont ils peuvent disposer. 

En particulier, l’usage des autorisations d’absence peut amener à des pertes importantes de salaire, l’employeur n’étant pas obligé de payer les heures pendant lesquelles un élu s’absente pour une réunion liée à son mandat. 

Les sénateurs ne vont pas jusqu’à proposer le paiement obligatoire des autorisations d’absence. Et ils n’ont pas suivi non plus les demandes des associations d’élus de relever le volume du crédit d’heure – pour ne pas pénaliser les employeurs. Ils proposent en revanche trois « mesures pratiques ». D’abord, permettre aux maires de déroger à l’obligation de déclarer une absence à l’avance, lorsque l’autorisation d’absence concerne une « situation de crise » (catastrophe naturelle, attentat, etc.) Deuxièmement, ils proposent d’élargir ces autorisations aux cérémonies publiques et aux « réunions décisionnelles organisées au niveau intercommunal ». Enfin, ils demandent que le temps passé en autorisation d’absence de tous les élus locaux soit assimilé à du temps de travail effectif pour tous les avantages sociaux (13e mois, tickets restaurants, RTT...) et pas seulement, comme c’est le cas aujourd’hui, pour le calcul des congés payés, de l’ancienneté et des prestations sociales. 

Pour ce qui concerne la rémunération des autorisations d’absence, les sénateurs proposent de réfléchir à une prise en charge « partielle » par l’État - un jour par mois qui serait obligatoirement rémunéré, par exemple.

Responsabilité pénale

La mission s’est ensuite penchée sur les questions de conflits d’intérêt. Elle estime qu’en la matière, un certain nombre de dispositions deviennent « absurdes ou paralysantes ». Ce sont notamment les fameuses règles sur la prise illégale d’intérêt introduites par la loi 3DS qui sont dans le viseur : « complexes à mettre en œuvre », difficiles à interpréter, menant même à des « dérives », ces dispositions, selon la mission, doivent être « expertisées » afin d’être « simplifiées et sécurisées ».

Les sénateurs demandent aussi qu’une réflexion soit lancée sur les règles de déport, qui posent une multitude de problèmes pratiques : par exemple, sur la possibilité de supprimer l’obligation de quitter physiquement la salle en cas de déport, ou sur l’articulation entre les règles de déport et celles des quorums – en proposant que les élus qui se déportent ne « viennent pas en déduction du quorum ». 

Conformément à ce que demande l’AMF, les sénateurs proposent que la loi évolue pour « recentrer » la responsabilité pénale du maire « sur les situations d’infraction intentionnelle ».

Vie personnelle et formation

La mission envisage également une série de mesures pour mieux concilier le mandat avec la vie personnelle, ce qui aurait pour conséquence de faciliter l’accès des femmes à des fonctions électives. Parmi celles-ci : permettre la poursuite du mandat pendant les congés maternité ou paternité, et autoriser le cumul des indemnités de fonction et des indemnités journalières, « élargir la possibilité de prise en charge des frais de garde d’enfants à l’ensemble des activités de l’élu nécessaires à l’exercice du mandat local ». La compensation du paiement de ces frais de garde par l’État, aujourd’hui obligatoire seulement dans les communes de moins de 3 500 habitants, pourrait l’être selon le Sénat dans les communes de moins de 10 000 habitants. 

Enfin, les sénateurs souhaitent que les élus puissent davantage faire usage de leur droit à la formation, en commençant par simplifier la plateforme numérique du DIFE. Les rapporteurs proposent également d’inciter « les collectivités de rattachement de l’élu à s’impliquer plus avant dans la formation de leurs élus en abondant leurs comptes DIFE », et d’étendre les possibilités de report des crédits formation non consommés au budget formation de l’exercice suivant, en cas de création d’une commune nouvelle. 

Toutes ces pistes, on peut l’espérer, viendront nourrir la réflexion du gouvernement pour son projet de loi sur le statut de l’élu, prévu pour le premier semestre 2024. Au 105e congrès des maires, en novembre dernier, le président du Sénat Gérard Larcher a également annoncé le dépôt d'une proposition de loi dans les prochaines semaines. 




Statut de l'élu
Mieux accompagner la sortie du mandat pour les élus locaux
La fin de mandat est « un angle mort » de la vie politique locale. C'est en partant de ce constat que les sénateurs proposent un certain nombre de pistes de réflexion pour faciliter la « sortie de mandat » et, notamment, le retour à une vie professionnelle normale.

La société fait preuve d’une « indifférence relative à l’égard d’un élu tournant la page de son engagement citoyen », constatent les sénateurs dans le troisième volet de leurs réflexions sur l’exercice du mandat, intitulé Comment être après avoir été ? Cette étape, « jamais anodine dans la vie d’un élu », qu’elle soit due à une défaite électorale ou à la volonté de tourner la page, représente souvent « un saut dans l’inconnu ».

Besoin d’accompagnement

Les sénateurs Agnès Canayer (Seine-Maritime, LR), Thierry Cozic (Sarthe, PS) et Gérard Lahellec (Côtes-d’Armor, PCF), ont donc réfléchi à des pistes permettant de faciliter cette étape, notamment sur la question du retour à l’emploi.

Ils notent d’ailleurs que cette problématique ne fait l’objet d’aucune statistique et d’aucun suivi par le ministère de l’Intérieur et la DGCL, comme si, justement, une fois leur mandat terminé, les élus disparaissaient totalement des écrans radar. La première recommandation des sénateurs est d’ailleurs la production de données chiffrées sur ce sujet. 

Les auditions conduites par les rapporteurs les conduisent à estimer que beaucoup d’anciens élus auraient eu « besoin d’être accompagnés et mêmes conseillés dans le démarrage de leur nouvelle vie ». D’autant que, notent-ils, la fin du cumul des mandats, en contraignant les élus à ne choisir qu’un mandat exécutif, ne laisse aucune porte de sortie élective aux maires qui abandonnent leur siège ou le perdent. 

Questions financières

Beaucoup de maires sortants ne connaissent pas leurs droits. Les sénateurs demandent donc qu’une information réelle soit diffusée au début, au milieu et en fin de mandat aux élus, par les préfets, sous forme d’un « guide d’information recensant les droits des élus en fin de mandat ». 

Une telle campagne permettrait par exemple de faire connaitre l’allocation différentielle de fin de mandat (ADFM). Ce dispositif s’adresse en particulier aux élus éligibles qui ont renoncé à leur activité professionnelle pour se consacrer entièrement à leurs fonctions. La perte des indemnités liée à la fin du mandat peut en effet causer des difficultés financières insolubles à un élu qui a, de surcroît, renoncé à son salaire en quittant son emploi. L’ADFM, créée en 2022, permet à un élu dans cette situation de bénéficier d'une somme correspondant à une partie de son indemnité pendant un an après la fin du mandat, sous réserve d'un certain nombre de conditions. Mais selon la DGCL, ce dispositif reste mal connu, avec un taux de recours très faible, « malgré les efforts déployés par l’AMF » pour le faire connaître. 

La mission recommande non seulement de mener une campagne pour faire connaître le dispositif, mais également de l’étendre aux élus des communes de moins de 1000 habitants, « qui (en) sont actuellement injustement écartés ». Les sénateurs plaident également pour l’ouverture du droit à l’ADFM pour les élus démissionnaires en cours de mandat, ce qui est impossible aujourd’hui. 

En matière de retraite, même si des avancées réelles ont été réalisées ces dernières années (rachat de trimestres par exemple), les sénateurs estiment que « le toilettage du régime de retraite des élus locaux n’est pas terminé ». Ils demandent, comme c’est le cas pour les sapeurs-pompiers, qu’une « reconnaissance » à l’égard de ceux qui se consacrent à l’intérêt général se traduise par l’octroi de trimestres supplémentaires.

À l’instar de l’AMF, les sénateurs souhaitent également que le régime Ircantec élu soit rendu « indépendant » des autres régimes, pour éviter par exemple que des élus retraités de leur activité professionnelle ne puissent pas toucher leur pension sous prétexte qu’ils cotisent encore, en tant qu'élus, à l'Ircantec. 

Retour à la vie professionnelle

Reste la question cruciale du retour à l’emploi pour les anciens élus encore en âge d’exercer une activité professionnelle. Sur ce terrain, c’est notamment la possibilité de valoriser l’expérience acquise en tant qu’élu qui devrait, selon les sénateurs, être améliorée. Un levier existe déjà pour cela : c’est la VAE (valorisation des acquis de l’expérience). Les anciens élus locaux peuvent engager une démarche pour obtenir un diplôme lié aux compétences qu’ils ont acquises durant leur mandat, par exemple en administration publique, aménagement du territoire, finances locales, urbanisme, etc. Les frais de cette démarche peuvent même être partiellement couverts par le DIFE. 

Mais les sénateurs constatent que ce dispositif « ne trouve pas son public ». Ils estiment donc nécessaire « une action incitative et informative » sur ce processus.

Ils notent également que des démarches « plus simples et plus légères » peuvent être envisagées. Par exemple, dans un rapport de 2020, l’Inspection générale de l’administration avait proposé la création d’un « certificat de compétences professionnelles » pour les élus locaux – comme cela existe pour les élus du personnel – ou encore un « passeport de compétences », « porte-folio numérique dans lequel les acquis de formation et de l’expérience de l’élu [sont] définis, démontrés et stockés en vue de la reconnaissance par un établissement ». 

Enfin, les sénateurs proposent que soit mis en place un « accompagnement déontologique » pour les élus en fin de mandat, avec notamment la possibilité de leur donner la faculté de saisir le référent déontologue de leur ancienne collectivité pour « être conseillé et mieux se protéger du risque pénal ». 




Transition énergétique
Rénovation énergétique des bâtiments : le chemin de croix des petites villes
L'Agence France locale (AFL) et l'Association des petites villes de France (APVF) publient une étude sur la rénovation énergétique des bâtiments. Les petites communes font face à un « mur d'investissements » et à un certain nombre d'autres difficultés. Cinq recommandations y sont formulées pour les dépasser.

Répondre au défi de la rénovation énergétique des bâtiments communaux ne requiert pas les mêmes efforts à mettre en œuvre pour une commune de plus de 100 000 habitants que pour une petite ville comprenant entre 2 500 et 25 000 habitants. Si l’ambition environnementale est partagée et que les enjeux sont similaires, les petites communes doivent faire face à des obstacles qui leur sont propres. 

Comme l’explique Christophe Bouillon, maire de Barentin et président de l’APVF, « de nombreux maires s’estiment souvent démunis face aux contraintes techniques et plus encore financières auxquelles ils doivent faire face. » Il rappelle pourtant une fois encore que « la transition écologique ne pourra être menée à bien sans les communes ».

Ainsi, la publication d’une étude réalisée par l’Agence France locale (AFL) et l’Association des petites villes de France (APVF) participe à décrypter « les défis multiples que les petites villes doivent surmonter pour mener à bien la rénovation énergétique de leurs bâtiments ».

Connaître son patrimoine 

« Le préalable à tout engagement de moyens (notamment financiers) est une connaissance fine de son patrimoine – avec la consommation énergétique induite – de manière à prioriser objectivement les investissements les plus urgents tout en permettant de se projeter sur le moyen et long terme ». Si cet argument peut sembler logique à première vue, l’étude révèle qu’en réalité plus la commune compte d’habitants et plus elle dispose de données précises sur son patrimoine bâti. Les entretiens menés auprès des membres de l’APVF le confirment : pour les petites villes ayant entre 2 500 et 5 000 habitants, un peu plus de 50 % des communes ont une connaissance fine de leur patrimoine ; pour les petites villes comptant 15 000 à 20 000 habitants la part monte cette fois à plus de 60 %.  

Cette difficulté de recensement propre aux petites villes s’explique par la diversité du patrimoine. En effet, « que ce soit en nombre de bâtiments, comme en matière de performance énergétique, le patrimoine communal est très hétérogène. Ce constat est avant tout le fruit de l’histoire, de choix politiques, des charges de centralité qui pèsent sur la collectivité... Face au défi de la rénovation thermique des bâtiments, ces différences affectent significativement et durablement les petites villes ».

Décret tertiaire : source d’inquiétudes 

La crise énergétique a « affecté significativement les budgets locaux » des petites villes. En plus de cette difficulté conjoncturelle, le décret du 23 juillet 2019 relatif aux obligations d’actions de réduction de la consommation d’énergie finale dans des bâtiments à usage tertiaire oblige les collectivités à réduire leur « consommation d’énergie finale dans les bâtiments tertiaires […] d’au moins 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010 ».

Ce calendrier, comme le rappelle l’étude, a été décidé unilatéralement par l’État, et est perçu par 45 % des petites villes comme une « source d’inquiétudes ». Les communes qui ont déjà réalisé des investissements lourds s’inquiètent car elles vont devoir « redoubler d’efforts dans les prochaines années pour parvenir à respecter les nouvelles exigences comparées à des collectivités qui n’auraient pas entamé ces travaux ». Une autre partie devra faire face à un mur d’investissements, ce qui poussera les élus de ces communes à faire « des arbitrages dans les budgets d’investissement pour répondre aux objectifs du décret tertiaire », selon 70 % des élus sondés. 

D’ailleurs, 37 % des petites villes sondées identifient le manque de moyens financiers comme le principal frein à la rénovation thermique des bâtiments. Au-delà de cet obstacle financier, d’autres contraintes pèsent sur ces communes notamment le manque de moyens en ingénierie, l’insécurité juridique ou encore « l’apparente absence de l’administration centrale sur ces questions d’accompagnement » comme le dénoncent l’APVF et l'AFL dans l’étude.

Cinq recommandations 

Malgré la complexité de la démarche, les élus des petites villes « semblent tous avoir pris la pleine mesure des enjeux ». À partir de ces constats, et afin de réussir ce défi, l’APVF et l’AFL formulent cinq recommandations. 

D’abord, à l’échelle des petites villes, l’étude conseille d’interroger le syndicat d’énergie du territoire notamment « pour orienter la commune dans la mise en œuvre de son diagnostic bâtimentaire et dans l’objectif de définir une stratégie patrimoniale ». Il apparaît également essentiel de former l’ensemble du personnel communal à ces sujets de transition écologique. « Cela peut aussi permettre une meilleure acceptation des mesures prises pour les agents comme les usagers », est-il précisé dans le document. Enfin, il est conseillé de « concentrer l’ingénierie dont les communes ne peuvent disposer en interne, à l’échelle de l’EPCI ou d’un syndicat ». Cette mutualisation permettra de répondre plus facilement aux enjeux de la transition écologique « notamment pour la recherche de cofinancements, l’amélioration des rendements des équipements de chauffage ou de climatisation, la maîtrise d’ouvrage, l’ingénierie financière et juridique, la gestion des CEE... ».

À « une échelle plus globale », les élus des petites villes appellent à la pérennisation et à la massification du Fonds vert. C’est une priorité puisque « les investissements annuels des collectivités à réaliser pour répondre aux objectifs climatiques sont évalués à 12 milliards d’euros ». 

Enfin, l’étude appelle à une simplification du paysage normatif. Ce changement de paradigme est désiré par de nombreuses associations d’élus dont l’AMF qui dénonçait d’ailleurs, lors de son Congrès en novembre dernier, ces normes « dont la multiplication enlise les énergies et retarde le développement [des] communes ». L’étude abonde en ce sens : « Pour parvenir aux objectifs de la Stratégie nationale bas-carbone, le bloc communal doit être en mesure de multiplier les projets qui s’inscrivent dans cette voie. »

Rappelons que ce matin débute l'examen au Sénat de la proposition de loi relative aux collectivités et à la transition écologique des bâtiments scolaires. Cette dernière vise à limiter le financement des maîtres d'ouvrage à 10% des financements publics en fonction de la situation financière des communes ou intercommunalités.

Télécharger l'étude. 




Logement
Bâtiment : la construction de logements neufs s'effondre
Lors de sa conférence de presse trimestrielle, le 13 décembre, la Fédération française du bâtiment confirme la crise du logement. Conséquences pour ce secteur : des prévisions en berne avec la possible perte de 150 000 emplois (locaux) entre 2023 et 2025. En revanche, la rénovation énergétique donne beaucoup d'espoir.

« La très forte chute [de construction] dans le logement neuf est bien là », confirme le président de la Fédération française du bâtiment, Olivier Salleron, lors de la conférence trimestrielle sur les chiffres de ce secteur qui s’est tenue hier. La production a reculé de 7,8 % en 2023. Le nombre de mises en chantier est tombé à 286 000, un des niveaux les plus bas depuis plus de trente ans (- 22 % en un an). Le nombre de permis de construire délivrés s’est effondré de 24 %. « Tous les territoires, des métropoles aux zones rurales, et tous les types de logements, individuel comme collectif, social comme privé, entrent en crise », alerte la FFB.

Prévisions sombres pour 2024

Les prévisions pour 2024 sont sombres. « Les mises en chantier reculeront encore de 16 % en 2024, alors que les permis perdront 12 %. S’en suivra une chute d’activité de 21 % en volume », prévoit la fédération. Le logement neuf pèse pour 27 % dans l’activité du bâtiment. 3 000 emplois auraient déjà été détruits en 2023. La FFB s’attend à une perte de 150 000 emplois locaux entre 2023 et 2025.

« Après une érosion de son activité [globale] à - 0,6 % en volume en 2023, le bâtiment entrerait véritablement en récession en 2024, à - 5,5 %. L’effondrement du logement neuf (- 21,3 %) et le recul du non résidentiel neuf (- 6,0 %) se cumulant pour déboucher sur une chute globale du neuf (- 14,6 %), qui l’emporterait largement sur la petite hausse (+ 1,6 %) de l’amélioration-entretien », peut-on lire dans la note de conjoncture de la FFB.

Coût du foncier

Parmi les explications avancées, le sous-investissement des ménages, essentiellement en raison du contexte économique actuel (inflation, taux d’intérêt…), mais aussi les premiers effets du zéro artificialisation nette (ZAN). « Les maires ne savent pas comment s’y prendre, déplore Olivier Salleron. Ils n’ont pas tout compris des décrets, nous non plus d’ailleurs ! C’est très compliqué. Nous aurons des estimations chiffrées dans six à huit mois ».

Une chose est sûre, le ZAN contribue à renchérir le foncier dont le coût constitue un réel problème aujourd’hui (le premier avancé lors du Conseil national de la refondation - logement), mais sur lequel « personne ne travaille aujourd’hui », selon la FFB. Des dispositifs comme le bail réel solidaire (BRS), sont certes intéressants, mais « ils ne suffiront pas » à relancer la construction de logements. La fédération attend davantage du futur projet de loi sur le logement. Elle a « des propositions à faire notamment sur la régionalisation ». 

Conséquences collatérales de diverses mesures

Autres effets à prendre en compte pour 2024, la limitation annoncée du prêt à taux zéro et la fin du dispositif Pinel, si elles étaient confirmées dans le projet de loi de finances 2024. Et puis les conséquences collatérales de diverses mesures comme MaPrimeRenov’ conditionnée à la réalisation de travaux d’ensemble et au changement du dispositif de chauffage (selon la FFB, les ménages seront réticents à s’engager dans de tels travaux importants), le dispositif MonAccompagnateurRénov’ (2 500 annoncés en 2024, mais seulement 300 recrutés aujourd’hui), etc.

Effet positif de la rénovation énergétique

En revanche, la FFB fonde beaucoup d’espoir sur la rénovation (notamment des bâtiments administratifs et des écoles publiques). L’activité dite « d’amélioration-entretien », qui représente 54 % de l’activité du bâtiment,  augmente de « près de 3 % en volume, notamment grâce à la rénovation énergétique », même si elle devrait se tasser en 2024 (+1,6 %).

La FFB mise d’ailleurs sur cela pour 2024 et les années à venir, notamment grâce au secteur public « pour les 30 ou 40 ans à venir. Le plan de rénovation des écoles, notamment primaires, est très positif ». À noter que la construction du neuf non résidentiel est tirée par les bâtiments administratifs (seules les surfaces autorisées pour la construction de ces bâtiments sont en hausse de + 5,6%). 

Une REP qui ne fonctionne pas

Autre point noir à l’horizon pour 2024 : la filière REP de récupération des déchets du bâtiment ne fonctionne toujours pas. « Les déchets ne sont pas repris sur les chantiers et en entreprise ; les tarifs 2024 ne sont pas encore connus alors que nous demandions à les avoir au moins neuf mois avant l’entrée en vigueur de la filière, mais l’éco-contribution est bien collectée depuis le 1er mai 2023 », tonne Olivier Salleron qui alerte sur « la grogne qui monte » chez les artisans et dans les entreprises du secteur. On peut cependant noter que dans les autres filières, les délais de publication des tarifs sont peu ou prou les mêmes, sans que cela empêche les filières de fonctionner.




Mobilité durable
Prime maintenue en 2024, aires et voies réservées : le plan co-voiturage se poursuit
Le gouvernement a mis en place un plan de 150 millions d'euros pour développer le covoiturage, renouvelé en 2024, et comportant plusieurs dispositifs.

Dans le cadre de la planification écologique, pour réduire d’ici 2030 les émissions de gaz à effet de serre du secteur des transports, le gouvernement français table sur une explosion du covoiturage, en plus du passage aux voitures hybrides et électriques.

L’objectif, très ambitieux, du « plan covoiturage» (lire Maire info du 14 décembre 2022), est d’atteindre trois millions de trajets quotidiens à horizon 2027, contre 900 000 actuellement. C’est dans ce plan qu’a été introduite une prime de 100 euros « offerte aux conducteurs qui se lancent dans le covoiturage ». 

Prime reconduite

Cette prime au covoiturage de 100 euros sera reconduite en 2024, mais se concentrera désormais sur les trajets courts, pour faire décoller le covoiturage du quotidien, a annoncé le gouvernement mercredi. La prime 2024 va cibler davantage les trajets vers le travail, l’école ou les loisirs, soit les trajets de moins de 80 kilomètres, a indiqué le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu.

Une somme de 25 euros est versée au conducteur après le premier trajet de covoiturage enregistré sur une des plateformes en ligne, comme Ecov, Klaxit, La roue verte ou Blablacar Daily. Un second versement de 75 euros est prévu après le dixième trajet.

En entreprise

Le gouvernement encourage les entreprises à signer une « charte d’engagement », à travers laquelle elles s’engagent à favoriser le co-voiturage de leurs salariés, sensibiliser leurs collaborateurs à cette question et mettre des solutions à leur disposition. 33 entreprises se sont engagées à favoriser le covoiturage, en mettant une plateforme à disposition de leurs salariés, par exemple. Des géants comme La Poste, Carrefour ou Les Mousquetaires se sont déjà engagés, représentant au total un million de salariés.

Le covoiturage est également intégré au Forfait mobilités durables (FMD): les déplacements domicile-travail effectués en covoiturage peuvent être en partie pris en charge par l’employeur, qui est exonéré de charges sociales dans la limite de 800 euros par an.

Voies réservées

Les voies réservées au covoiturage se sont également multipliées ces derniers mois aux abords des métropoles comme Lille ou Marseille, avec environ 115 kilomètres de voies fin 2023. 

Paris envisage d’y consacrer une voie de son périphérique en pérennisant à l’issue des Jeux olympiques 2024 la voie réservée aux participants, soit la voie de gauche.

Pour que les automobilistes les respectent, des équipements de constatation des infractions, semblables à des radars, seront installés sur ces voies à travers la France en 2024. Un nouveau panneau de signalisation (losange blanc sur fond bleu) a également fait son apparition, pour indiquer les voies réservées au co-voiturage.

Initiatives locales

Enfin, les collectivités sont encouragées à multiplier les lignes ou les aires de covoiturage ainsi que des dispositifs incitatifs. 200 projets ont été soutenus en 2023 par l’État, qui souhaite accélérer en 2024.

Le gouvernement soutient également les collectivités qui mettent en place des primes locales pour inciter à covoiturer, à hauteur d’un euro pour chaque euro investi.

En Ile-de-France, par exemple, le covoiturage est gratuit pour le passager avec le pass Navigo, et le conducteur reçoit 2,25 euros jusqu’à 15 kilomètres, puis 0,15 euro/km. Dans l’aire grenobloise ou dans les Pays de la Loire, le conducteur reçoit 2 euros jusqu’à 20 km et 0,1 euro/km au-delà.

Les initiatives se sont également multipliées lors d’évènements sportifs ou culturels comme le festival Solidays ou la Coupe du monde de rugby, pendant laquelle 30 000 covoiturages ont été comptabilisés.

Le gouvernement souhaite aussi mieux mesurer le covoiturage informel (deux collègues qui ne passent pas par une plateforme, par exemple) et va lancer une enquête sur le sujet avant la fin de l’année.






Journal Officiel du jeudi 14 décembre 2023

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Arrêté du 12 décembre 2023 modifiant l'arrêté du 23 janvier 2023 définissant les critères d'éligibilité des collectivités territoriales ainsi que les modalités de mise en œuvre de l'expérimentation prévue au II de l'article 48 de la loi n° 2021-1308 du 8 octobre 2021 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine des transports, de l'environnement, de l'économie et des finances
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Décret n° 2023-1174 du 12 décembre 2023 définissant les modalités d'exercice du droit de préemption dans les espaces naturels sensibles à l'intérieur des zones mentionnées à l'article L. 215-4-1 du code de l'urbanisme

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