| Édition du mercredi 27 septembre 2023 |
Budget de l'état
Budget 2024 : à rebours du gouvernement, le CFL dénonce une baisse des moyens des collectivités
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Alors que le gouvernement dit « amplifier » son soutien financier aux collectivités et qu'il a confirmé une hausse de 220 millions d'euros de DGF l'an prochain, les membres du CFL jugent ce coup de pouce bien maigre au regard de l'inflation.
« Le supplice du garrot continue. » A rebours des dernières sorties des membres du gouvernement promettant « d'amplifier » leur soutien aux collectivités, le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel, a déploré, hier - au sortir de la présentation par les membres du gouvernement des éléments du projet de loi de finances (PLF) pour 2024 les concernant directement - « une baisse des moyens et une recentralisation » annoncées l’année prochaine. Au moment même où leur horizon financier commencerait à s’obscurcir.
Progression de la DGF jugée insuffisante
Pourtant, le gouvernement ne s’est pas ménagé, depuis quelques jours, pour faire valoir son soutien aux collectivités en 2024 : un nouvel effort de l’Etat de 220 millions d’euros supplémentaires sur la DGF, la réintégration des dépenses d’aménagement de terrains dans le FCTVA pour 250 millions d’euros, une rallonge de 500 millions d’euros au Fonds vert pour la rénovation écologique des écoles...
« Jamais un gouvernement n’a fait autant pour accompagner les collectivités en fonctionnement et en investissement », se félicitait d’ailleurs, il y a quelques jours, le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu. Pas franchement l’avis des élus locaux.
« Les annonces du gouvernement, ça me rappelle les hypermarchés où l’on met en tête de gondole une mesure, et on communique autour de cette mesure », a ironisé le président du CFL. Et, cette année, « l’essentiel de la communication gouvernementale [porte sur les] 220 millions qui viennent abonder la dotation globale de fonctionnement » qui s’établirait ainsi à 27,15 milliards d’euros.
Une progression qui ne représente, in fine, qu’une « augmentation de 0,8 % alors que nous subissons une inflation qui devrait s’établir entre 4,5 et 5 % » pour l’année 2023. Or « la dotation globale de fonctionnement n'est pas une libéralité, c'est un dû aux collectivités [en] compensation d'un certain nombre d'impôts qui ont été supprimés. Et un dû, il est dû en euros constants », a de nouveau rappelé le président du CFL qui réclame toujours l’indexation de la DGF sur l’inflation. Si c’était le cas, « il faudrait 1,3 milliard d’euros » de DGF supplémentaires l’année prochaine pour compenser la hausse des prix.
« Au bas mot, cela représente donc un milliard d’euros de perte due à l’inflation », en intégrant les 220 millions d’euros supplémentaires intégrés au budget 2024 et décidés par le gouvernement. « Nous sommes très loin du compte pour que le pouvoir d'action des collectivités territoriales soit préservé », a déploré celui qui est aussi premier vice-président délégué de l’AMF.
CVAE : une compensation à « 700 millions d’euros » près
Sur l'ensemble des concours financiers destinés aux collectivités, la perte s’établirait même à « 2,2 milliards d’euros », selon le calcul du maire d’Issoudun, alors que le gouvernement vantait, ce matin à l’occasion de la présentation du PLF pour 2024, plutôt... « une progression de 1,15 milliard d'euros par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2023 », hors mesures exceptionnelles (filet de sécurité 2023, Dsil exceptionnelle et, fonds de reconstruction tempête Alex).
Le premier « hold-up » porte sur la compensation de la CVAE, dont la moitié du montant a été supprimée l’an passé et l’autre moitié doit désormais disparaître d’ici la fin du quinquennat (dont déjà un milliard d’euros annoncés l’an prochain sur les 4 milliards restants).
« Il n’y a aucune compensation à l’euro près », a pesté André Laignel qui estime la perte à « 700 millions d’euros » puisque « 11,3 milliards des bases de CVAE auraient dû revenir aux collectivités et que seuls 10,6 milliards ont été compensés ». Et ces 700 millions d’euros sont désormais « perdus pour l’éternité des temps ».
Autre point de tension, la perte de « 1,5 milliard d’euros » de soutien exceptionnel aux prix de l’énergie et au point d’indice mis en place cette année, sur lesquels il ne resterait plus que 400 millions d’euros l’an prochain. « Alors, on nous dit que c’était exceptionnel. Peu importe, on les avait en 2023, on ne les aura plus en 2024. C’est une baisse des moyens des collectivités », a fait valoir le maire d’Issoudun.
Arguant de la baisse des prix de l'énergie, le gouvernement a, en effet, décidé de réduire son soutien aux collectivités en supprimant, pour l’heure, le filet de sécurité et l’amortisseur. Seulement, « de nombreuses collectivités ont été obligées de signer des contrats de trois ans au plus mauvais moment, ceux-ci ne répercutant pas la baisse des prix » qui a eu lieu depuis. « On continue donc à nous ponctionner à hauteur de 400 ou 500 % », a souligné l’édile, précisant toutefois que le gouvernement étudierait la possibilité de mettre en place de nouveaux dispositifs de soutien. Mais « ce ne serait qu’au cas par cas et non une mesure générale », selon le président du CFL.
Il a, par ailleurs, regretté « qu’une partie des crédits destinés aux collectivités soient autoritairement fléchés par l’Etat vers la transition écologique », ce qui « va amoindrir les libertés locales ».
FCTVA : 250 millions d’euros « peu probables »
Reste la « vraie bonne nouvelle » qui « va dans le bon sens » : l’abondement du FCTVA sur l’aménagement des terrains. Mais les 250 millions d’euros annoncés sont « peu probables » si ce n’est « fantaisistes », aux yeux du président du CFL, « compte tenu des délais » et du fait que le FCTVA est perçu pour l’essentiel « un an, voire deux ans, après ».
Du côté des augmentations mises en avant par André Laignel, on peut noter que les 220 millions d’euros de DGF supplémentaires seront réparties sur la dotation de solidarité rurale (DSR) pour 100 millions d’euros, sur la dotation de solidarité urbaine (DSU) pour 90 millions d’euros et sur la dotation d’intercommunalité pour les 30 millions d’euros restants. A cette dernière, viendra s’ajouter 60 millions d’euros « qu’on nous ponctionne de manière totalement injustifiée sur les dotations de compensation de la part salaire ».
« Quand on fait la balance, nous arrivons à 2,2 milliards d’euros de perte de ressources pour les collectivités territoriales » en euros constants.
A noter également l'objectif du gouvernement de limiter de manière non coercitive les dépenses de fonctionnement des collectivités à un demi-point de pourcentage sous l'inflation, mesure inscrite dans le projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027 examiné en nouvelle lecture aujourd’hui à l’Assemblée.
« C'est totalement irréaliste. Il ne se passe pas de semaine sans que nous ayons des demandes de l'Etat de financements supplémentaires avec des charges de normes nouvelles qui ont représenté 2,5 milliards d'euros en 2022, […] sans crédits correspondants », a défendu André Laignel, en soulignant que la dette des collectivités ne représente, elle, « que 8 % de la dette publique totale ».
Et l’élu de rappeler : « Depuis 2010, c’est 62 milliards d’euros de ponction sur la DGF en cumulé. Pourtant on n’a pas vu l’effet sur l’expansion du déficit de l’Etat... »
Télécharger le dossier de presse du PLF 2024 présenté ce matin.
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Fiscalité locale
Taxe foncière : les propos d'Emmanuel Macron continuent de faire polémique
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La polémique née de la petite phrase d'Emmanuel Macron sur la hausse de la taxe foncière est remontée jusqu'à l'Assemblée nationale, où le gouvernement a été interpellé hier sur ce sujet. Sans le faire reculer, puisque le ministre des Comptes publics a défendu les propos du chef de l'État.Â
C’est une petite pique qui a passablement agacé les associations d’élus : dans son interview télévisée de dimanche soir, le président de la République a affirmé aux Français : « Quand vous avez votre taxe foncière qui augmente, ce n’est pas le gouvernement, ce sont les communes ». « C’est un scandale quand j’entends des élus qui osent dire que c’est la faute du gouvernement », a-t-il déclaré, visant en particulier la maire de Paris et son augmentation de « plus de 60 % » de la taxe foncière.
Le problème est que ce n’est pas exact : plus de 80 % des communes ayant fait le choix de ne pas augmenter leur taux, cette année, l’augmentation de la taxe foncière constatée par les Français est due, dans la majorité des cas, à la seule augmentation des bases, décidée, elle, par le gouvernement et le Parlement. Il faut rappeler en effet, que le niveau de la taxe foncière dépend de deux facteurs : les taux, qui sont décidés par les conseils municipaux ; et les bases fiscales, qui sont fixées par la loi, et indexées sur l’inflation. Le taux d’inflation très élevé cette année a conduit le Parlement à augmenter les bases de 7,1 %. C’est donc bien l’inflation qui explique, dans la plupart des cas, la hausse de la taxe foncière.
Naturellement, l’indexation des bases fiscales sur l’inflation n’est aucunement remise en cause par les associations d’élus : rappelons qu’en 2019, le gouvernement avait manifesté son intention de supprimer l’indexation des bases locatives sur l’inflation, provoquant la colère des associations d’élus, qu’une telle mesure aurait privé de plusieurs centaines de millions d’euros.
Il n’en reste pas moins que prétendre que seules « les communes » sont responsables de la hausse de la taxe foncière est une contrevérité, et qu’en l’espèce « Emmanuel Macron confond les taux et les bases », comme l’a asséné hier à l’Assemblée le député Pierre Cordier, qui a conseillé au gouvernement de « prendre des cours » sur la fiscalité locale.
La déclaration du chef de l’État a immédiatement fait réagir un bon nombre d’élus, à titre personnel (lire Maire info du 25 septembre), avant que plusieurs associations d’élus s’expriment à leur tour.
Réaction des associations d’élus
Lundi, c’est Villes de France qui a dégainé en premier, en dénonçant « un faux procès intenté aux élus locaux ». « Cette déclaration est infondée, écrit l’association, et marque une méconnaissance du système fiscal et même une défiance envers les élus locaux qui, au quotidien, sont mobilisés pour préserver la qualité de vie de nos concitoyens. » Les propos du chef de l’État sont jugés « d’autant moins acceptables que les transferts de charges de l’Etat à destination des collectivités locales sont de moins en moins bien compensés, et de plus en plus réguliers (passeports biométriques, missions de police, augmentation du nombre de places de crèches…), ce qui aboutit dans les faits à diminuer les marges de manœuvre des communes et à dénaturer la libre administration des collectivités locales ».
L’AMF a également publié lundi soir un communiqué pour dénoncer « l’injuste polémique » lancée par Emmanuel Macron. L’association point l’hypocrisie qu’il y a à pointer du doigt des maires qui augmenteraient la taxe foncière, alors que c’est la décision de supprimer la taxe d’habitation qui « a profondément déstabilisé la fiscalité locale en la concentrant sur la seule taxe foncière. » L’AMF rappelle que les communes réussissent à maintenir leur épargne et à limiter leur endettement, alors que « depuis 2010 elles ont perdu 62 milliards d’euros de dotations et que la DGF n’est plus indexée ». Et de conclure : « Les maires assument leurs responsabilités, et souvent aussi celles que l’Etat n’est plus en capacité d’exercer sur le terrain. (…) Ils attendent d’être respectés en toute circonstance. »
« Géométrie variable » au RN
Lors de la séance de questions au gouvernement, hier, un député a dénoncé « le culot monstre » du président de la République, « car la hausse de la taxe foncière est bel et bien due au gouvernement dans les 30 000 communes qui n’ont pas touché à leur taux ». La prise de position de ce député (Kevin Pfeffer, du Rassemblement national), était au moins aussi problématique que les propos du chef de l’État, puisque le RN dénonce l’indexation des bases sur l’inflation, et demande, sinon sa suppression, du moins « le plafonnement à 2 % de l’augmentation des valeurs locatives ». Le député RN a également fustigé les maires qui ont procédé à des hausses, qu’il a accusés de mener « une guerre fiscale » aux Français.
Le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave, a repris à son compte les propos du chef de l’État. « Disons-le clairement : la taxe foncière est une taxe à 100 % locale. » Il s’est justifié en expliquant que si les bases augmentent, du fait de l’inflation, il revient « aux élus de choisir d’augmenter, de maintenir ou de baisser les taux. Ils ont le choix. C’est un impôt local. »
Le ministre ne s’est, par ailleurs, pas privé de dénoncer « l’incohérence » des revendications du RN en la matière, qui demande à la fois l’indexation de la DGF sur l’inflation et le plafonnement de la hausse des bases locatives. Ce plafonnement « reviendrait à priver les collectivités territoriales de 1,9 milliard d’euros. (…) Vous avez l’indexation à géométrie variable. »
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Outre-mer
Crise de l'eau à Mayotte : les élus dénoncent « un enfer », le gouvernement intensifie enfin son aide
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La crise de l'eau s'aggrave de jour en jour à Mayotte. Dernière conséquence en date : la fermeture de plusieurs établissements scolaires, faute d'eau potable. Tandis que les élus multiplient les appels à l'aide, le gouvernement tarde à prendre les mesures d'urgence qui s'imposent.
C’est avec une colère froide qu’Estelle Youssouffa, députée de Mayotte, a pris la parole hier lors de la première séance de questions au gouvernement de la rentrée parlementaire : « Demain, Mayotte sera dans la rue pour hurler de soif. Mayotte est en train de basculer en enfer. »
Situation chaotique
Jeudi dernier, ce sont cinq collèges et deux lycées qui ont été fermés après que l’Agence régionale de santé eut déclaré l’eau « impropre à la consommation ». De l’aveu même du ministre délégué chargé des Outre-mer, Philippe Vigier, hier à l’Assemblée, « 31 écoles (communales) n’ont pas d’eau ».
L’eau est à présent coupée la plupart du temps dans les villes : « Nous n’avons l’eau courante que quelques heures tous les deux ou trois jours », a décrit Estelle Youssouffa, et encore, « il faut la faire bouillir avant de la consommer ».
Face à cette pénurie, les Mahorais n’ont d’autre solution que d’acheter de l’eau en bouteille. Pour tenter d’éviter la spéculation, le gouvernement, en juillet, a fait jouer l’article L410-2 du Code du commerce, qui permet de bloquer les prix d’un produit en cas de « situation de crise, de situation exceptionnelle ou de calamité publique ». Depuis le 18 juillet donc, et jusqu’au 15 décembre prochain, il est interdit de vendre de l’eau en bouteille à Mayotte au-dessus du prix qui était en vigueur le 3 juillet. Ce qui n’empêche pas totalement la spéculation : dès le mois d’août, les services de l’État à Mayotte ont annoncé avoir dressé plusieurs contraventions contre des commerçants ne respectant pas le décret.
Le blocage des prix, pour bienvenu qu’il soit, ne résout de toute façon pas le problème, car les prix étaient déjà très élevés au moment où il est intervenu (jusqu’à quatre fois plus qu’en métropole) : comme l’a expliqué la députée mahoraise, « Le pack d’eau se vend entre 5 et 12 euros à Mayotte, et une famille de quatre personnes a besoin au minimum de six bouteilles par jour, soit un budget d’environ 300 euros par mois. » Le gouvernement a certes distribué 600 000 bouteilles d’eau « pour les plus vulnérables » – mais même si le chiffre semble élevé, il est dérisoire, puisque ramené à la population de l’île – estimée à 300 000 habitants en 2023 – il ne représente que deux bouteilles d’eau par personne.
Le manque d’eau, en particulier dans les bidonvilles que compte encore l’île, fait craindre aux autorités sanitaires le retour de la typhoïde et du choléra. L’unique hôpital de l’île « s’effondre », selon Estelle Youssouffa, « une centaine de soignants manquant à l’appel ».
Face à cette situation chaotique, dans un territoire qui, faut-il le rappeler, est un département français, on peut comprendre le cri de colère lancé par la députée : « Sommes-nous, nous, Mahorais, sortis de la République ? »
Les annonces gouvernementales
Cela fait des mois que les élus de l’île demandent à l’État des mesures d’urgence, réellement à la hauteur de cette crise, c’est-à-dire des mesures comparables à ce qui serait déployé en cas de catastrophe majeure. Ainsi, le député Mansour Kamardine demande depuis l’été le déclenchement du plan Orsec sur l’île. Ce qui serait sans doute plus utile que de pointer du doigt les élus locaux, comme l’a fait le ministre Christophe Béchu hier, sur Franceinfo : « Il faut regarder les choses en face, a déclaré le ministre. La compétence [de l'eau] telle qu'elle a été exercée, y compris par les élus locaux sur l'île, n'a pas été à la hauteur des besoins. » Mais que dire de « la compétence » de l’État qui est, entre autres, d’assurer « la prévention et la gestion des menaces sanitaires graves » ?
L’État semble, néanmoins, commencer à réagir à la hauteur de la crise. Le ministre Philippe Vigier, qui a reconnu hier que la situation est « gravissime » à Mayotte, a annoncé hier plusieurs mesures enfin sérieuses. Le nombre de bouteilles livrées sur l’île va passer de 600 000 à « 5,4 millions ». Des citernes de 1000 litres sont en train d’être acheminées dans les 31 écoles privées d’eau, « afin que les enfants aient accès à de l’eau sanitaire ». En outre, le ministère de l’Intérieur, a annoncé Philippe Vigier, a décidé hier « de mobiliser la sécurité civile » À plus long terme, le gouvernement a engagé « 35 millions d’euros immédiatement » dans un « schéma de connexion d’eau potable » pour tenter de colmater le plus vite possible les fuites dans le réseau d’approvisionnement. Enfin, le ministre a affirmé que les deux usines de dessalement d’eau de mer actuellement en construction « verront le jour fin 2024 ».
Autre signe du fait que le gouvernement semble déterminé à prendre désormais la crise à bras le corps : Philippe Vigier se rend aujourd’hui à Mayotte, accompagné de la Directrice de l’eau et de la biodiversité. L’objectif est « d’être aux côtés » des autorités locales et de faire en sorte que, a expliqué Christophe Béchu hier, « une fois la crise passée on soit capable d’aller entreprendre des travaux massifs ».
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Ecole
Éducation : 90 % des écoles comptent au moins une classe à niveaux multiples
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En France, neuf écoles sur dix comptent au moins une classe regroupant des élèves de différents niveaux d'enseignement. C'est ce que montre une note d'information de la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance qui pointe aussi la prédominance de ce cas de figure en milieu rural.
Dans une note d’information publiée il y a quelques jours, la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) du ministère de l'Éducation nationale relève le « recours très répandu aux classes à niveaux multiples dans les écoles », et surtout dans les territoires ruraux. Ce n'est pas un phénomène nouveau mais il s'accentue, notamment avec la pénurie d'enseignants observée depuis plusieurs années.
« Les classes à niveaux multiples sont principalement composées de deux niveaux d’enseignement qui se suivent », peut-on lire en préambule de l’étude. D’autres cas de figure existent : des élèves jusqu’à huit niveaux d’enseignement différents maximum peuvent se retrouver dans une même classe, « soit l’ensemble des niveaux du premier degré ». Mais comme le montrent les statistiques, dans la majorité des cas « les classes à niveaux multiples regroupent deux niveaux d’enseignement dans neuf cas sur dix et, dans la grande majorité des cas (93,7 %), ces niveaux se suivent ».
Selon les chiffres présentés par la Depp (qui concernent la rentrée 2021), sur l’ensemble des écoles en France, 44,1 % des classes sont à niveaux multiples et 44,9 % des élèves y sont scolarisés, soit près de 3 millions.
Une configuration répandue dans les territoires ruraux
Plus la commune est rurale, plus il y a de chances de retrouver dans son école des classes à niveaux multiples. C’est la principale constatation tirée de cette étude. En effet, les écoles rurales ont plus souvent au moins une classe à niveaux multiples (94,5 %) que les écoles urbaines (86,0 %).
Cette configuration de classes est quasiment incontournable dans les écoles des communes rurales éloignées très peu denses puisque la Depp observe des classes à plusieurs niveaux dans 93,8 % des cas. Pour les communes rurales périphériques peu denses cela concerne 61,4 % des écoles.
Généralement, c'est dans les plus petites écoles que les classes à niveaux multiples se forment. Ainsi, « 80,7 % des petites écoles sont uniquement composées de classes à niveaux multiples, contre 42,7 % pour les écoles de plutôt petite taille, 14,5 % pour les écoles de plutôt grande taille, et 1,2 % pour celles de très grande taille. Cela s’illustre particulièrement dans certains départements du sud et de l’ouest de l’Hexagone : la proportion de classes à niveaux multiples dépasse ainsi 70 % dans l’Aveyron (75,9 %), la Mayenne (74,2 %), l’Ardèche (72,8 %), la Creuse (70,3 %) et l’Ariège (70,2 %) ».
La note pointe en parallèle une baisse généralisée, depuis les années 1970, de la proportion d’écoles à classes uniques. En effet, « cette baisse s’explique par l’érosion des effectifs d’élèves en milieu rural et par le développement des regroupements pédagogiques intercommunaux (RPI) ». Pour rappel, pour les écoles en RPI les communes peuvent faire le choix de répartir différents niveaux d’enseignement entre elles au sein d’une entité commune.
Éducation prioritaire : moins de classes à niveaux multiples
À rebours des constatations faites à propos du milieu rural, dans les réseaux d’éducation prioritaire (REP), seules 7,4 % des écoles en REP et 2,2 % de celles en REP+ sont composées uniquement de classes à niveaux multiples. Dans les REP « constitués d’écoles publiques implantées essentiellement en milieu urbain », 81,9 % des écoles de Rep et 77,8 % de celles de REP+ ont au moins une classe à niveaux multiples.
Selon la Depp, « la moindre présence des classes à niveaux multiples en EP s’explique notamment par le dédoublement des classes de grande section, CP et CE1. » Il faut souligner que dans les écoles de l’EP, « la proportion de classes à niveaux multiples baisse fortement sous l’effet de ces dédoublements progressifs » notamment « à partir de la rentrée 2017 : elle passe de 25,8 % en 2016 à 14,9 % en 2019. Cette diminution s’opère surtout dans les niveaux dédoublés, mais s’observe également aux autres niveaux ».
Répartition
La Depp explique que les classes à niveaux multiples permettent d’équilibrer les effectifs des classes. En effet, il faut savoir que « la configuration des classes dans une école répond en partie à des contraintes liées au nombre d’élèves par niveau d’enseignement » et que « pour l’ensemble des niveaux du premier degré, le seuil de création d’une classe est de 12 élèves d’un même niveau d’enseignement dans une école. En dessous de ce seuil, la quasi-totalité des élèves est donc affectée en classe à niveaux multiples ».
Enfin, « à partir de 12 élèves d’un même niveau, l’effectif devient suffisant et la part des élèves affectés dans une classe à niveaux multiples diminue alors drastiquement à mesure que le nombre d’élèves dans le niveau augmente. À partir de 25 élèves, la proportion d’élèves en classe à niveaux multiples augmente à nouveau, jusqu’aux alentours de 33 élèves d’un même niveau dans l’école. Les effectifs du niveau sont alors trop faibles pour créer deux classes simples, mais trop importants pour n’en créer qu’une seule. Ils conduisent donc à la formation d’une classe à niveaux multiples ».
Mais comment sont répartis les élèves au sein des écoles pour former ces classes multiples ? Les niveaux se suivent, certes, lorsqu’il est possible pour un niveau d’enseignement donné d’affecter un élève, soit dans une classe simple soit dans une classe double, différentes stratégies s’opèrent. En maternelle, ceux nés au cours du premier trimestre de l’année, soit les plus âgés de leur classe d’âge, sont plus souvent affectés au niveau inférieur d’une classe à niveaux multiples. À partir du CE1 c’est un autre facteur qui entre en jeu : « Dans les écoles ayant au moins une classe de CE1 simple et une classe de CE1 double, les élèves de CE1 affectés dans les classes doubles présentent en moyenne moins de difficultés ou de fragilités pour lire un texte à voix haute ou résoudre un problème ».
Télécharger la note de la Depp.
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Economie
Carburants : après l'échec de la vente à perte, l'exécutif obtient des opérations à prix coûtant des distributeurs
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A défaut de les convaincre de vendre à perte, le gouvernement a réussi à obtenir mardi des distributeurs de carburant qu'ils les vendent « à prix coûtant » lors de « près de 120.000 opérations » dans 4.000 stations jusqu'à la fin de l'année, une mesure dont l'effet devrait toutefois rester limité.
Les enseignes Carrefour et Leclerc se sont engagées à réaliser de telles opérations tous les jours, Casino, Cora et Intermarché en réaliseront deux week-ends par mois, Système U et Auchan au moins un week-end par mois, a détaillé Matignon.
Le niveau exact des réductions consenties à la pompe n'a pas été précisé et dépendra de chaque distributeur. Matignon a estimé avoir « fait bouger les lignes », quelques jours après que le président Emmanuel Macron a acté l'abandon de la vente à perte, initialement souhaitée par le gouvernement, mais face à laquelle les distributeurs avaient opposé une fin de non-recevoir.
L'engagement des distributeurs pourrait se prolonger en 2024, a avancé le gouvernement face à la presse. Leclerc et Auchan commenceront leurs opérations dès vendredi. L'impact de prix coûtants risque toutefois, de l'aveu même du secteur, d'être « assez marginal », car la grande distribution ne vend les carburants qu'avec des marges de « quelques centimes », rappelle Patrice Geoffron, professeur à l'université Paris-Dauphine PSL.
Par ailleurs, ces opérations à prix coûtant pourraient avoir des effets pervers sur le réseau des stations indépendantes, qui ne dépendent pas des gros distributeurs français mais d'opérateurs étrangers comme Esso ou BP, qui eux continuent à vendre au prix du marché, a souligné Francis Pousse, président du syndicat professionnel Mobilians. Sur environ 2.400 d'entre eux, « l'écart va se creuser » en termes de prix et donc d'attractivité et « on risque donc de mettre à mal une partie de la profession », a pointé Francis Pousse.
Mission sur les marges
La Première ministre Elisabeth Borne avait accueilli les distributeurs, raffineurs, et fédérations professionnelles à 17H30 pour « veiller à la modération des marges », avait-elle affirmé mardi devant l'Assemblée nationale, où elle avait menacé de « légiférer » sans donner plus de précisions.
Outre les opérations à prix coûtant, le gouvernement a aussi annoncé le lancement d'une mission pour « faire toute la transparence sur les coûts et les marges de l'ensemble de la filière », de la production à la distribution en passant par le raffinage. Les résultats de cette mission seront « rendus début décembre » et les discussions se poursuivront sur les « efforts » supplémentaires que pourraient faire chacun des acteurs « en amont et en aval », a indiqué le gouvernement.
Concernant TotalEnergies, présent sur toute la chaine de valeur, « le sujet d'un effort supplémentaire » à un plafonnement à 1,99 euro du prix du litre de carburant « a été discuté et le sera encore à la lumière des résultats de la mission », a-t-il précisé. Un nouveau point d'étape est prévu en décembre avec les acteurs de la filière.
La baisse de taxe, une « triple aberration »
Cette réunion, au lendemain d'un Conseil de planification écologique, illustre la difficulté de l'exécutif à concilier réduction des émissions polluantes et préservation du pouvoir d'achat. L'idée de vente à perte n'aura donc vécu qu'une semaine après son annonce par la Première ministre, accueillie avec réticence jusqu'au sein de la majorité. Soucieux de faire oublier ce revers, le gouvernement avait misé sur un résultat rapide des discussions.
Emmanuel Macron avait déjà par ailleurs annoncé la reconduction en 2024 de « l'indemnité carburant travailleur ». La mesure devrait coûter environ 500 millions d'euros, alors que le gouvernement présente mercredi un budget d'économies visant à désendetter le pays. Cette aide n'a pas convaincu les oppositions, qui dénoncent une « politique du chèque » et réclament en chœur des baisses de taxes.
Une option écartée catégoriquement par l'exécutif et qu'a qualifiée de « triple aberration » le ministre de l'Économie Bruno Le Maire devant l'Assemblée nationale: « C'est une aberration écologique, car c'est financer le fossile, c'est une aberration budgétaire parce que ça creuse le trou de la dette de l'État, et c'est une aberration géopolitique, parce que l'argent va tout droit dans la poche de M. Poutine ».
« Faire un coup »
« C'est l'État, pas le prix du baril qui est responsable », s'est agacé le député RN Julien Odoul sur franceinfo. Le député Renaissance (ex-LR) Eric Woerth a concédé sur Europe 1 que la majorité « cherchait des idées qui n'impactent pas les finances publiques ». « Nous continuerons à tout faire pour protéger le pouvoir d'achat », a assuré Elisabeth Borne.
Au-delà, l'abandon de la vente à perte sonne aussi comme un dé saveu du président à l'égard de sa Première ministre, avec laquelle il a déjà connu des frictions. Une ministre évoque « un truc monté pour (contrarier) la Première ministre » mais n'exclut pas non plus que l'exécutif ait « voulu faire un coup en allant vite ».
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Journal Officiel du mercredi 27 septembre 2023
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
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Première ministre
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