Édition du lundi 25 septembre 2023

Sénat
Sénat : une trentaine de maires en exercice élus hier, dont cinq présidents d'associations départementales
Les élections sénatoriales se sont conclues hier sans grand bouleversement, en dehors d'un recul marqué pour le parti présidentiel. La droite reste largement majoritaire au Sénat. Une trentaine de maires, dont cinq présidents d'associations départementales de maires, ont été élus et devront être remplacés à la tête de leur exécutif local.  

Au lendemain des élections sénatoriales qui ont conduit au renouvellement de la moitié du Sénat (170 sièges), les grands équilibres ne sont pas bouleversés : la droite reste largement majoritaire à la chambre haute, comme elle l’a toujours été depuis le début de la Ve République, à l’exception d’une brève parenthèse sous le quinquennat de François Hollande. 

Grands équilibres

Bien que les résultats définitifs ne soient pas encore publiés à l'heure où nous écrivons, les enseignements de ce scrutin sont établis. 

Si la droite reste majoritaire, le curseur se déplace légèrement en son sein vers le centre :  Les Républicains perdent en effet plusieurs sièges par rapport à la précédente mandature, où ils en avaient 148, notamment du fait de la présence de listes dissidentes, par exemple dans les Yvelines ou en Meurthe-et-Moselle. Le centre droit est en revanche en légère progression et pourrait dépasser les 60 sièges, ce qui réjouit naturellement le président du groupe centriste Hervé Marseille (UDI), qui a plaidé pendant toute la campagne pour un « recentrage » au sein de la droite. 

Côté majorité présidentielle, le bilan est plutôt négatif pour le parti présidentiel Renaissance : selon Public Sénat, le nombre de sièges détenu par le parti pourrait tomber de 23 à 16. La seule membre du gouvernement qui se présentait, Sonia Backès (secrétaire d’État chargée de la Citoyenneté) a été battue par un candidat indépendantiste de Nouvelle-Calédonie, Robert Xowie, le maire de Lifou. À Paris, Renaissance a perdu son unique siège, celui de Julien Bargeton. 

On notera en revanche la légère progression, dans le camp présidentiel, du parti Horizons d’Édouard Philippe, qui a fait élire quatre nouveaux sénateurs. 

À gauche, c’est là aussi la stabilité : selon Public Sénat, le nombre de sénateurs socialistes resterait stable (autour de 65 sièges), tandis qu’écologistes et communistes gagneraient chacun entre deux et trois sièges. La France insoumise, exclue des listes d’union de la gauche, reste absente du Sénat. 

Le Rassemblement national enfin, qui avait disparu du Sénat depuis que son unique sénateur, le marseillais Stéphane Ravier, a rejoint le parti d’Éric Zemmour, y refait son entrée avec trois sièges, dans le Pas-de-Calais, le Nord et la Seine-et-Marne. 

Une trentaine de maires devront rendre leur écharpe

Beaucoup des nouveaux sénateurs élus hier sont des maires, qui devront donc, non-cumul des mandats oblige, rendre leur écharpe. 

Parmi eux, il faut noter la présence de six présidents d’associations départementales (PAD) de maires – ce qui va parfois obliger à désigner de nouveaux présidents dans les « AD » de l’AMF. Ont été élus  Hervé Reynaud, président des maires de la Loire et maire de Saint-Chamond, Daniel Fargeot, maire d’Andilly et président de l’Union des maires du Val-d’Oise, Jean-Marc Vayssouze-Faure, maire de Cahors et président de l’AD du Lot, par ailleurs président de la commission culture de l’AMF, Pauline Martin, maire de Meung-sur-Loire et « PAD » du Loiret, et enfin Anne-Marie Nédélec, présidente des maires de la Haute-Marne. 

Notons également que l’ancien président des maires de La Réunion, Stéphane Fouassin, maire de Salazie, a également été élu sénateur, tout comme l’ancien président des maires de Mayotte, Saïd Omar Oili. 

De nombreux autres maires vont faire leur entrée au Sénat.

Chez Les Républicains, c’est le cas de Jocelyne Antoine (Senon, Meuse), Damien Michallet (Satolas-et-Bonce, Isère), Yves Bleunven (Grand-Champs, Morbihan), Pierre-Jean Rochette (Boën-sur-Lignon, Loire), Sylvie Valente Le Hir (Tracy-le-Mont, Oise), Marie-Claude Lermytte (Brouckerque, Nord) et Marie-Carole Ciuntu (Sucy-en-Brie, Val-de-Marne).

Chez les centristes, ont été élus Franck Dhersin (Téteghem-Coudekerque-Village, Nord), Bernard Pillefer (Fréteval, Loir-et-Cher), Cédric Chevalier (Saint-Léonard, Marne), Jean-Luc Brault (Le Controis-en-Sologne,  Loir-et-Cher), Guislain Cambier (Potelle, Nord), Anne-Sophie Romagny (Bazancourt, Marne), Vincent Louault (Cigogne, Indre-et-Loire), et Louis Vogel (Melun, Seine-et-Marne, également membre du Comité directeur de l’AMF). 

Au Parti socialiste, sept maires en exercice ont été élus, en plus de Jean-Marc Vayssouze-Faure : Pierre-Alain Roiron (Langeais, Indre-et-Loire, membre du Comité directeur de l’AMF), Christophe Chaillou (Saint-Jean-de-la-Ruelle, Loiret), David Ros (Orsay, Essonne), Raphaël Daubet (Martel, Lot), Michaël Weber (Woelfling-lès-Sarreguemines, Moselle, maire référent de l’AMF sur les énergies renouvelables), et Frédéric Buval (Trinité, Martinique) et Michel Masset (Damazon, Lot-et-Garonne). 

Enfin, le maire communiste de Fosses (Val-d’Oise), Pierre Barros, fera également son entrée au Sénat. 

La chambre haute ainsi renouvelée fera sa rentrée parlementaire la semaine prochaine, le lundi 2 octobre, une semaine après l’Assemblée nationale dont les travaux reprennent aujourd’hui en séance publique. Dès lundi prochain, le président du Sénat sera élu – sans que le moindre doute subsiste sur la réélection de Gérard Larcher. Toute la semaine prochaine sera consacrée à la désignation des vice-présidents, questeurs et secrétaires, à celle des groupes, du bureau et des commissions permanentes. 

Le travail législatif proprement dit du Sénat reprendra le mardi 10 octobre. 




Société
Immigration, inflation, écologie : ce qu'il faut retenir de l'interview d'Emmanuel Macron
Le président de la République Emmanuel Macron a évoqué de nombreux sujets hier soir dans les journaux de 20 heures de TF1 et France 2. De la crise migratoire à la crise inflationniste, le président s'est exprimé sur le plan d'actions qui va être mis en place par le gouvernement à la veille de la rentrée de l'Assemblée nationale.

Visite d’État du roi Charles III et de la reine Camilla en France, messe géante du pape François au stade Vélodrome de Marseille, matchs de la Coupe du monde de rugby : la semaine dernière était une semaine chargée pour le président de la République. Malgré cet agenda particulièrement chargé, Emmanuel Macron s’est prêté au jeu de l’interview hier soir à 20 heures pour les JT de TF1 et France 2... au moment même où tombaient les résultats des élections sénatoriales, ce qui avait un aspect quelque peu surréaliste.  

Car si le chef de l’État a souligné que « peu de pays aujourd’hui au monde peuvent relever des défis concomitants de cette nature » en évoquant ces visites d’invités de marque, d’autres défis qui touchent davantage la vie des citoyens et des élus restent à relever. Ainsi, Emmanuel Macron a balayé plusieurs thématiques qui préoccupent actuellement fortement le pays. 

Immigration 

C’est le discours du pape François qui a inspiré la première question posée hier au président de la République. Depuis la cité phocéenne, ce dernier a appelé à lutter contre l’indifférence au sujet de l’immigration – phénomène qui a fait 28 000 morts en Méditerranée depuis dix ans. 

Il y a quelques semaines, 12 000 migrants sont arrivés clandestinement sur l’île de Lampedusa en Italie. Sur cette question, Emmanuel Macron a estimé que l’Italie jouait « son rôle de premier port sûr (1) » et que par conséquent l’Europe doit « jouer [son] rôle et aider les Italiens ». Il a détaillé cette aide en trois points. D’abord Emmanuel Macron explique qu’il faut « mieux conditionner les aides publiques en développement à une politique responsable en matière d’immigration en Afrique Sub-saharienne ». Ensuite, un travail doit être fait avec les pays de transit et notamment en Tunisie avec le port de Sfax où il faut « proposer d’embarquer des experts pour démanteler les passeurs » comme cela a été fait à Calais où des experts britanniques travaillent à « mieux protéger les frontières ». Enfin, selon le président, l’Europe doit davantage aider à enregistrer les arrivées et les situations des migrants. 

Le projet de loi immigration – qui divise au sein même de la majorité –, va, selon le chef de l’État, « mettre le système français au diapason des autres pays européens ». « Le cœur du texte est d’accélérer les procédures » pour avoir « une politique plus efficace pour mieux instruire les situations et renvoyer plus efficacement dans leurs pays les femmes et les hommes qui n’ont pas vocation à rester ». 

La régularisation des travailleurs clandestins qui sont déjà en France sur des métiers en tension va bel et bien être une mesure soutenue dans le texte. Cependant, pour trouver un compromis avec la droite qui y est fermement opposée, le chef de l’État rappelle que la priorité est que, sur ces métiers, se soient « nos concitoyens » qui sont au chômage qui puissent occuper ces emplois. Le projet de loi Plein Emploi le prend en compte. Il rappelle enfin qu’il n’y aura « pas de droit inconditionnel à la régularisation et qu’il faudra lutter contre les réseaux clandestins ; pénaliser les employeurs qui utilisent ces réseaux ; mais prendre en compte les situations et ne pas les laisser en précarité administrative » ces femmes et ces hommes. Le chef de l’État a fini par réaffirmer, reprenant la célèbre formule de Michel Rocard : « On ne peut pas accueillir toute la misère du monde ». 

Inflation 

Face à la crise inflationniste, le gouvernement va œuvrer sur trois axes principaux : création d’emplois, travail avec les branches qui ont un salaire minimum sous le smic légal à l’occasion d’une conférence sociale (début octobre) et négociations des salaires par le dialogue social plutôt que par l’indexation de ces derniers. 

Alors que les prix de l’alimentation ont augmenté de 20 % en deux ans, Emmanuel Macron a annoncé que mercredi, en Conseil des ministres, « un texte arrive qui va nous permettre de rouvrir les négociations commerciales avec les grands industriels » notamment « les 60 plus gros industriels de l’agroalimentaire » afin de « mettre en place un accord sur la modération des marges dans tout le secteur ».

Sur l’essence, le président avoue ne pas avoir de « solution miracle ». « On paye notre dépendance », a regretté le chef de l’État. « Depuis le début de l’année 2023 le prix du baril a augmenté d’un tiers environ » et la raison de l’augmentation n’est « pas les taxes [mais] la géopolitique internationale », selon le président. C’est pour cela qu’il a « demandé au gouvernement de continuer à accompagner les Français qui travaillent et ont besoin de rouler », ainsi « 50 % des travailleurs les plus modestes » pourront bénéficier d’une aide qui « ne dépassera pas les 100 euros ». L’indemnité carburant va donc être renouvelée mais on ne sait pour le moment pas quand ni sous quelles conditions. 

Quant à l'éphémère idée lancée par la Première ministre, la semaine dernière, de permettre aux distributeurs de carburant de vendre à perte – qui aurait nécessité un changement de la loi – elle a été aussitôt enterrée par le chef de l'État, qui a dû se rendre à l'évidence devant le refus unanime des distributeurs. Emmanuel Macron leur a demandé, hier, de bien vouloir vendre le carburant « à prix coûtant », mais il semble que les distributeurs n'y soient guère plus disposés. 

Pied de nez aux élus

Le président en a profité pour rappeler que les taxes servent, pour la moitié d’entre elles, « à financer la transition écologique et la rénovation des bâtiments », pour un quart à financer la Sécurité sociale et pour l’autre à financer les régions. Le président a profité de l’occasion pour lancer quelques piques aux présidents de régions : « Quand j’entends des présidents des régions dire qu’il faut baisser les taxes sur le carburant… faites-moi une proposition pour baisser vos budgets ! Je n’ai pas le sentiment qu’ils me fassent une proposition là-dessus ». 

Certains élus ont également été visés lorsque le président a évoqué la taxe foncière. Il a affirmé que la taxe foncière qui augmente n’est pas du fait du gouvernement mais bien « de la commune ». « C’est un scandale quand j’entends des élus qui osent dire que c’est la faute du gouvernement, a-t-il lancé. Il y a beaucoup de maires qui ont décidé de ne pas augmenter la taxe foncière et c’est dur parfois pour leurs finances et à côté de ça nous n’avons pas baissé les dotations des collectivités. Quand je vois des communes comme Tourcoing ou Angers […] qui n’ont pas augmenté d’un centime leur taxe foncière et que Paris l’a augmenté de plus de 60 %, c’est la responsabilité des élus ». On imagine que le chef de l'État n'a pas choisi par hasard les communes naguère dirigées par ses ministres de l'Intérieur et de la Transition écologique.Et l'on suppose que le président doit également juger « scandaleuse » l'étude de la DGFiP, publiée début septembre, qui explique précisément que cette augmentation « n'est, dans une grande majorité de cas, pas vraiment le fait des communes, ni des EPCI » et que, pour beaucoup, les hausses sont limitées voire inexistantes (lire Maire info du 5 septembre)

Il faut en effet rappeler que c'est bien le gouvernement et le législateur qui ont décidé d'une hausse des bases de 7,1 %, que les communes ont bien été obligées de répercuter. Beaucoup d'élus ont d'ailleurs vigoureusement réagi à cette attaque, dont on peut se demander pourquoi elle a occupé tant de temps dans une interview d'une trentaine de minutes. « C'est absolument faux, mensonger, tacle Nicolas Soret sur X (Twitter). À Joigny, la taxe foncière a augmenté de 7%, du seul fait de la décision du gouvernement, votée par le Parlement. » Anne Vignot, maire de Besançon, rappelle : « Ici, nous n’avons pas augmenté la taxe foncière, vous l’avez augmentée  de 7,1 % dans toutes les communes : Vous, pas nous. » Pour Thomas Hennequin, maire de Montcornet : « Que le gouvernement assume d’avoir augmenté les impôts ! ». David Lisnard, maire de Cannes et président de l'AMF, a quant à lui déclaré que les maires « n'ont pas de leçon de gestion à recevoir de l'État surdépensier et surpréleveur ». 

Transition écologique

Emmanuel Macron a enfin évoqué son idée de « l’écologie à la française » et a réaffirmé son objectif d’atteindre en 2030 une réduction de 50 % des émissions de gaz à effet de serre. « On a fait la moitié du chemin ces 5 dernières années, s’est félicité le président. Maintenant il faut faire l’autre moitié du chemin mais deux fois plus vite ». 

Pour ce faire, 40 milliards d’euros vont être investis dès l’année prochaine. Au programme dans un premier temps : la sortie du charbon d’ici à 2027. En France, deux centrales à charbon sont toujours en activité à Cordemais (Loire-Atlantique) et Saint-Avold (Moselle). Ces dernières vont être converties « à la biomasse ». Le gouvernement va redoubler d’efforts en ce qui concerne l’électrification des véhicules en incitant « les ménages à céder les vieux diesels pour aller vers de l’hybride et de plus en plus de l’électrique ». Le gouvernement travaille notamment à la mise en place d’un leasing social pour permettre aux plus modestes d’accéder à une voiture électrique européenne pour 100 euros par mois. Le dispositif devrait être finalisé à la fin de l’année. Enfin, le président a précisé que les « chaudières au gaz » n’allaient pas être interdites afin de ne « pas laisser les citoyens dans les zones rurales » sans solution. Le gouvernement opte plutôt pour « développer les pompes à chaleur ». 

Le chef de l’État n’a malheureusement pas évoqué le sujet de la rénovation écologique des écoles dont l’objectif fixé par le gouvernement est celui de 40 000 écoles primaires rénovées en 10 ans. Pour le moment, le flou demeure sur la méthode de gouvernance pour laquelle l’AMF attend encore davantage de précisions. 

(1) Selon l'Organisation maritime internationale, « Le lieu sûr est un emplacement ou les operations de sauvetage sont cense[e]s prendre fin. C'est aussi un endroit ou la vie des survivants n'est plus menacee et ou l'on peut subvenir a leurs besoins fondamentaux (tels que des vivres, un abri et des soins medicaux). De plus, c'est un endroit a partir duquel peut s'organiser le transport des survivants vers leur prochaine destination ou leur destination finale. »




Finances locales
Finances locales : à deux jours de la présentation du budget, le gouvernement démine le terrain
Augmentation de la principale dotation aux collectivités, « nouvelle méthode » pour trouver des économies: à deux jours de la présentation du projet de budget pour 2024, le gouvernement a multiplié lundi les gestes de bonne volonté envers les élus locaux.

« Le budget 2024 prévoit une augmentation de 220 millions d'euros » de la dotation globale de fonctionnement (DGF) pour les communes et intercommunalités, a annoncé la ministre déléguée aux Collectivités territoriales Dominique Faure dans un entretien à La Gazette des communes. La somme se décomposera en trois blocs: « 100 millions d'euros sur la dotation de solidarité rurale, 90 millions d'euros sur la dotation de solidarité urbaine et 30 millions d'euros sur la dotation d'intercommunalité », a détaillé Dominique Faure.

Après treize ans de gel de cette ressource versée par l'État aux communes, intercommunalités et départements, la DGF croît ainsi pour la deuxième année de suite. En 2023, le gouvernement l'a ainsi rehaussée de 320 millions d'euros, déjà pour faire face à une forte inflation (+ 4,9 % sur un an en août selon l'Insee). « C'est un message fort vers les collectivités », a affirmé le ministre de la Cohésion des territoires Christophe Béchu dans une déclaration écrite à la presse.

« Cette annonce permet de mesurer la sincérité de l'engagement de notre gouvernement aux côtés des collectivités », a-t-il ajouté. Malgré la rallonge de 220 millions d'euros annoncée pour 2024, les associations d'élus locaux pourraient être déçues. Ces dernières semaines, elles ont en effet réclamé une indexation de la DGF, principale dotation dont elles disposent, sur le niveau de l'inflation. « On ne peut pas demander à l'Etat de compenser entièrement l'inflation », leur a répondu lundi Dominique Faure.

L'entourage de la ministre insiste: « L'État lui-même subit » la hausse des prix et « l'inflation fait également augmenter certaines recettes des collectivités ». Alors que les élus locaux demandent à l'État de la visibilité sur plusieurs années quant à leurs ressources, le gouvernement a semblé lundi ouvert à cette idée. « La demande de visibilité et de pluriannualité des élus locaux est légitime », a confié le ministre des Comptes publics Thomas Cazenave, également interviewé par La Gazette des Communes. 

Méfiance

« La loi de programmation des finances publiques offre déjà une visibilité sur la trajectoire des concours financiers (versés par l'Etat aux collectivités, NDLR), et sur la croissance et l'inflation. On peut probablement aller plus loin », a reconnu l'ancien président de la délégation aux collectivités territoriales de l'Assemblée nationale. Thomas Cazenave s'est au passage dit « favorable à ce que le gouvernement présente une stratégie pluriannuelle des financements de la transition écologique », publics et privés.

Surtout, le ministre des Comptes publics a proposé lundi une « nouvelle méthode » aux élus locaux pour maîtriser la croissance des dépenses dans les collectivités. La première étape consistera selon lui à « échanger de manière très précise avec toutes les associations d'élus pour nous mettre d'accord sur des revues de dépenses ». In fine, l'objectif est que les dépenses de fonctionnement des collectivités (masse salariale, achats de fournitures...) progressent d'un demi-point de pourcentage de moins que l'inflation. « L'effort pour les collectivités sera bien moins important que celui demandé à l'État », a assuré M. Cazenave, et « les dépenses d'investissement progresseront plus fortement que l'inflation ». 

Et contrairement aux précédents mécanismes de contrôle des dépenses, les collectivités qui manqueront les objectifs fixés par le gouvernement ne seront pas sanctionnées. La « nouvelle méthode » esquissée lundi rappelle furieusement le « pacte de confiance » promis il y a un an par le prédécesseur de Thomas Cazenave à Bercy, Gabriel Attal. Face aux réticences des élus locaux, cette initiative déjà destinée à contenir la progression de la dépense locale avait été enterrée.

Dès dimanche soir, une série de messages sur "X" (ex-Twitter) du président de l'Association des maires de France David Lisnard a souligné la méfiance persistante des élus locaux. « Les comptes des collectivités sont à l'équilibre, contrairement à l'État. Elles n'empruntent que pour investir. Elles n'ont pas de leçon de gestion à recevoir de l'État surdépensier et surpréleveur », a cinglé le maire de Cannes en réaction à des propos d'Emmanuel Macron sur la taxe foncière (lire article ci-dessus sur l'interview d'Emmanuel Macron). 




Urbanisme
Dispense d'autorisation d'urbanisme pour certaines constructions démontables : le gouvernement passe en force
Le gouvernement a publié hier au Journal officiel un décret pérennisant la dispense de formalités d'urbanisme un certain nombre de « constructions démontables ». Bien que les élus y soient totalement opposés, le gouvernement est passé en force. 

Le décret du 22 septembre publié au JO d’hier vise à pérenniser un dispositif mis en place à titre expérimental en juin 2021 et concernant les installations démontables et temporaires. 

Selon le droit commun, de telles installations ne peuvent être dispensées de formalités d’urbanismes que si elles sont implantées pour moins de trois mois. Mais en 2021, le gouvernement a, par décret, porté cette durée à 18 mois pour certaines constructions visant à répondre à des situations d’urgence : résidences universitaires, résidences sociales, centres d'hébergement et de réinsertion sociale, structures d'hébergement d'urgence, etc. Il s’agissait d’une mesure temporaire, qui a pris fin le 31 décembre 2022. 

Le gouvernement a finalement décidé de pérenniser le dispositif, tout en élargissant son champ d’application. Le décret paru hier ajoute aux constructions citées plus haut les installations « de relogement temporaire rendu nécessaire par des opérations d'aménagement urbain réalisées dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain ». Il porte, par ailleurs, la durée maximale d’installation de ces constructions dispensées de formalités d’urbanisme de 18 à 24 mois. 

Seule exception : de telles constructions restent – heureusement – impossibles dans les zones où la construction est interdite du fait d’un plan de prévention des risques naturels, miniers ou technologiques. 

Des constructions qui « échapperont au contrôle » des maires

Présenté deux fois devant le Conseil national d’évaluation des normes (Cnen), ce texte a été deux fois rejeté à l’unanimité des élus, sans que cela fasse fléchir le gouvernement.

La première fois, le 9 mars dernier, les membres élus du Cnen ont fait remarquer que ces dispositions conduisent à ce que « un nombre potentiellement important d’opérations échappe au contrôle a priori de l’autorité locale, compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme ». Ils craignent que cet assouplissement « donne le signe d’un relâchement », alors que la plupart des infractions au Code de l’urbanisme ne font déjà pas l’objet de poursuites. 

D’autant que, comme l’a avoué le gouvernement lui-même, il n’y aura même pas de dispositif d’information du maire ! Une telle obligation d’information aurait en effet, a expliqué le ministère, « conduit à créer une nouvelle procédure non prévue par la loi », donc une modification législative. Le ministère s’est certes dit « conscient des difficultés » que pourra provoquer cette nouvelle dispense, mais cela n’a apparemment pas suffi pour le faire y renoncer. 

Les élus se sont également inquiétés « de ce qui pourrait advenir des constructions temporaires en zones agricoles, naturelles ou forestières », ces zones n’étant même pas évoquées dans le projet de décret. 

Le gouvernement a présenté une deuxième fois ce texte devant le Cnen du 6 avril dernier, sans en changer une ligne. Même punition : les élus, constatant « l’absence de modification du texte » depuis la précédente séance, ont à nouveau émis un avis défavorable unanime. De surcroît, ils ont posé la question de l’assujettissement de ces constructions temporaires à la TFPB (taxe foncière sur les propriétés bâties), dans la mesure où elles ne sont plus soumises à autorisation d’urbanisme. 

Le ministère a affirmé que ces constructions seront bien soumises à la TFPB, celle-ci étant « éligible sur les caractéristiques propres des bâtiments et non en raison de leur soumissions, ou pas, à une autorisation d’urbanisme ». 




Métropoles
France urbaine demande à la fois plus d'État et plus de décentralisation
À l'issue de son congrès, qui s'est tenu jeudi et vendredi dernier à Angers, France urbaine a mis l'accent sur cinq axes majeurs pour les grandes villes et les métropoles. Le ministre Christophe Béchu a clôturé les travaux avec plusieurs annonces. 

« Nous sommes pour un État fort, un État stratège, mais la France a besoin de rallumer la flamme de la décentralisation. L’État doit nous faire confiance. Nous l’avons prouvé pendant le covid : nos collectivités sont réactives et opérationnelles. Nous le prouvons encore en jouant un rôle déterminant d’amortisseur face à la précarité. » C’est par ces mots que Johanna Rolland, maire de Nantes et présidente de France urbaine, a conclu les travaux du congrès de l’association, vendredi à Angers. 

Tout au long de ces deux journées, les élus des grandes villes et des métropoles ont rappelé « l’exposition » de celles-ci aux grands enjeux sociaux et environnementaux : crise du logement, désertification médicale, insécurité, financement de la transition énergétique. 

Deux tiers du Fonds vert pour les grandes villes ?

Sur chacun de ces sujets, l’association a appelé en même temps à la mobilisation de l’État et à davantage de liberté laissée aux élus pour agir. C’est le cas, en particulier, sur le logement : France urbaine appelle l’État à « un effort massif pour la construction de logement social et très social », tout en affirmant « la nécessité de faire davantage confiance aux territoires en engageant des expérimentations, notamment sur les zonages, les meublés de tourisme et la maîtrise du foncier, mais aussi en leur délégant les crédits destinés aux aides à la rénovation énergétique ». France urbaine demande une large décentralisation de la politique de l’habitat et la création d’un rôle d’autorités organisatrices de l’habitat pour les intercommunalités. 

Sur le financement de la rénovation énergétique, les grandes villes sont claires : puisqu’elles concentrent « les deux tiers des émissions de gaz à effet de serre », elle réclament « les deux tiers des financements », c’est-à-dire les deux tiers du Fonds vert. 

Elles souhaitent que la planification écologique s’appuie sur les CRTE (Contrats de relance et de transition écologique), dans la mesure où ces outils ont le mérite de déjà exister (même si « ils n’ont pas produit jusqu’ici beaucoup de proposition concrètes », a regretté le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc). France urbaine demande que le CRTE soient abondés « par des enveloppes pluriannuelles fongibles ». 

Par ailleurs, elles appellent à « des décisions rapides » sur le sujet des transports collectifs, estimant que « le modèle de financement actuel est à bout de souffle » et demandant que soit mis fin à la différence de traitement entre l’Île-de-France et les autres réseaux : « Deux poids deux mesures serait inacceptable ». Il s’agit d’une allusion au versement mobilité (VM), qui est actuellement plafonné à 2 % de la masse salariale dans toutes les autorités organisatrices, sauf l’Île-de-France, où le plafond est à 2,9 %. France urbaine demande un déplafonnement du VM dans tout le pays. 

Premières réponses gouvernementales

Le ministre Christophe Béchu, venu clôturer le congrès, a apporté quelques réponses à ces demandes. Sur les CRTE en particulier, il ne s’est pas montré fermé à la proposition de France urbaine : il juge envisageable que « les CRTE fassent l'objet de financements qui permettent de crédibiliser les engagements avec deux principes, la prévisibilité et la pluriannualité ». L’ancien maire d’Angers a rappelé la volonté du gouvernement de « territorialiser la planification écologique », notamment à travers l’organisation de ces encore mystérieuses « COP régionales » évoquées par Élisabeth Borne la semaine dernière (lire Maire info du 20 septembre). 

Le ministre n'a, en revanche, pas paru emballé par la demande de France urbaine de récupérer les deux tiers du Fonds vert, rappelant que ce fonds n'a pas seulement pour objectif de lutter contre les émissions de gaz à effet de serre, mais également de financer d'autres actions (eau, renaturation, recul du trait de côte, etc.).

Si Christophe Béchu n’a pas donné sa position sur l’éventualité d’un déplafonnement du VM, il s’est en revanche montré ouvert sur une démarche de décentralisation de la politique du logement, et a laissé entendre que des décisions seraient annoncées à l’occasion du congrès HLM, qui se tiendra à Nantes du 3 au 5 octobre. L’occasion, selon le ministre, de « passer à l’acte » : « Personne ne peut croire que c'est depuis Paris qu'on est capables d'arrêter les zonages. Le sujet des meublés de tourisme ou de l'évolution des loyers, la question des attributions de logements sociaux - on est passés de trop d'opacité à trop d'automaticité. Ce sont autant de sujets qui sont un territoire de décentralisation ». 

Les premières réponses viendront donc, peut-être, dès la semaine prochaine lors du congrès de l’USH.






Journal Officiel du dimanche 24 septembre 2023

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Décret n° 2023-894 du 22 septembre 2023 portant adaptation du régime de dispense de formalités d'urbanisme applicable à certaines constructions démontables
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Arrêté du 21 septembre 2023 modifiant l'arrêté du 27 février 2018 relatif à la réduction de loyer de solidarité
Journal Officiel du samedi 23 septembre 2023

Ministère de l'Éducation nationale et de la Jeunesse
Arrêté du 20 septembre 2023 fixant les taux des aides au fonds de soutien au développement des activités périscolaires au titre de l'année scolaire 2023-2024
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Décret n° 2023-891 du 21 septembre 2023 relatif à l'indemnité compensatrice temporaire des routes attribuée à certains agents du ministère en charge des transports affectés au sein des services concernés par la mise en œuvre de la loi n° 2022-217 du 21 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale
Première ministre
Arrêté du 29 août 2023 relatif à l'approbation du cahier des charges de l'appel à projets « Communs numériques pour l'intelligence artificielle générative »

Copyright 2020 AMF - www.maire-info.com - Tous droits réservés