Édition du vendredi 31 mars 2023

Politique de l'eau
Plan eau : les mesures qui concernent les collectivités
Le président de la République a donné hier les premières informations sur le très attendu Plan Eau visant à lutter contre l'augmentation du risque sécheresse. Des précisions ont été données ce matin par le ministre Christophe Béchu. Les collectivités locales seront très concernées par ce plan. 

De bonnes nouvelles, et un certain nombre d’interrogations. C’est ce que les élus retiendront de l’annonce du Plan Eau, d’abord par Emmanuel Macron, hier, dans les Hautes-Alpes, puis par le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, ce matin. Un dossier de presse a également été diffusé par le ministère, listant les 53 mesures du plan. 

Fin du plafond pour les Agences de l’eau

L’intervention du chef de l’État a été axée presque uniquement sur la gestion quantitative de l’eau, avec la mise en avant de la « sobriété », de la lutte contre les fuites et de la réutilisation des eaux usées traitées (Reut). Mais le plan en lui-même, dévoilé plus tard dans la journée, ne laisse pas de côté la gestion qualitative de l’eau, puisqu’un chapitre est consacré à « la préservation de la qualité de l’eau » et « la restauration d’écosystèmes sains et fonctionnels ». 

Première remarque : le gouvernement semble décidé à mettre des moyens supplémentaires relativement importants dans la gestion de l’eau. Il est indiqué, d’une part, que « les moyens des Agences de l’eau seront réhaussés de 475 millions d’euros par an » pour mener à bien ce plan, et que « le plafond de dépenses » de celles-ci sera « supprimé ». 

Ces annonces appellent plusieurs questions. Rappelons que depuis plusieurs années, le gouvernement a mis en place un système très vivement critiqué par les associations d’élus et les acteurs de l’eau, à savoir un prélèvement sur les recettes des Agences de l’eau : en résumé, tout ce que les Agences de l’eau perçoivent comme recettes au-delà d’une certaine somme (2,105 milliards d’euros en 2019 par exemple) est prélevé et reversé au budget de l’État. Il s’agit donc, pour être précis, d’un plafonnement des recettes et non des dépenses. Quand le gouvernement parle dans son dossier de presse de « supprimer le plafond de dépenses » des Agences de l’eau, on peut supposer qu’il s’agit de la suppression de ce système. Christophe Béchu l’a d’ailleurs confirmé ce matin, en conférence de presse, parlant à ce sujet de « petite révolution ». Cette mesure satisfait une demande constante de l’AMF depuis des années. 

Deuxième question : que veut dire le gouvernement lorsqu’il évoque « le réhaussement des moyens des Agences de l’eau » de 475 millions d’euros ? Il faut rappeler que le budget des Agences de l’eau n’est pas abondé par l’État, mais par les consommateurs, puisque celles-ci sont financées par la redevance. D’où viendront ces 475 millions ? D’une nouvelle taxe, d’une nouvelle redevance ? Des deux ? La question reste posée aujourd’hui, le ministre n’y ayant pas répondu ce matin. 

Enfin, troisième question : il est assez difficile, dans le document fourni par le ministère, de chiffrer précisément le budget qui sera alloué aux collectivités pour les aider à financer les mesures du Plan Eau, faute d’une synthèse claire. Le document est parsemé de chiffres – 30 millions d’euros ici, 10 millions là –, et on ignore si la somme des 475 millions (mesure 38) pour les Agences de l’eau est la synthèse de toutes ces aides, ou si elle vient en plus. De même, il apparaît que certaines mesures seront financées dans le cadre du Fonds vert, ce qui veut dire qu’elles ne se traduiront pas par des financements supplémentaires de la part de l’État. Là aussi, des détails et un chiffrage clair seront bienvenus. 

Quatre axes

Le Plan du gouvernement s’organise en quatre axes : sobriété, disponibilité de la ressource, qualité de l’eau, moyens.

En matière de sobriété, l’objectif gouvernemental est de réduire de 10 % les prélèvements d’ici 2030. Les derniers chiffres du ministère indiquant que 32,8 milliards de mètres cubes sont prélevés chaque année, il s’agirait donc de diminuer ce chiffre d’un peu moins de 3,3 milliards de mètres cubes. Pour mémoire, la moitié des prélèvements sont réalisés pour le refroidissement des centrales nucléaires, et seulement 16 % pour la production d’eau potable. 

Un « plan de sobriété », à l’image de ce qui a été fait en fin d’automne pour l’électricité, va être mis en place pour l’eau dans « toutes les filières ». De façon plus contraignante, des objectifs chiffrés de réduction des prélèvements vont être intégrés dans les Sage (schémas d’aménagement et de gestion de l’eau) et les PTGE (projets de territoire pour la gestion de l’eau). 

Pour améliorer la « disponibilité de la ressource », le gouvernement entend accélérer la lutte contre les fuites, en mettant particulièrement l’accent, d’une part, sur « les 170 collectivités point noir » où le taux de fuite est supérieur à 50 % et, d’autre part, sur les quelque 2 000 communes qui ont connu des « tensions » sur l’approvisionnement en eau potable l’été dernier. Le gouvernement annonce que « 180 millions d’euros » d’aides des Agences de l’eau seront dédiés à ce chantier. Avec, a indiqué ce matin Christophe Béchu, « une surreprésentation des communes isolées » dans ces financements.

Il faudra également porter une attention particulière à ce que signifie la phrase : « Les aides des Agences de l’eau aux collectivités seront conditionnées à des objectifs de performance de gestion de leur patrimoine ». Plus généralement, certains aspects de ce plan laissent craindre une certaine forme de « reprise en main » des Agences de l’eau par l’État, point sur lequel les associations d’élus seront certainement très attentives. 

Réutilisation

Le gouvernement entend « massifier » la réutilisation de l’eau, en particulier les eaux de pluie et les eaux grises (rejetées par les lavabos, éviers, douches, appareils électroménagers, etc.). « 1 000 projets de réutilisation » devront être entrepris d’ici 2027. Point important : le gouvernement promet « la levée des freins réglementaires », mais en évoquant que « l’industrie agro-alimentaire, d’autres secteurs industriels et certains usages domestiques ». Il n’évoque pas les collectivités territoriales, alors que certaines communes sont en attente d’autorisations de l’Anses pour mettre en œuvre la réutilisation des eaux usées traitées pour l’arrosage des espaces verts. 

Le préfet sera désormais le « guichet unique » pour tous les projets de Reut. Par ailleurs, un appel à manifestation d’intérêt spécifique sera lancé « à destination des collectivités littorales pour étudier la faisabilité des projets de Reut ». 

Gestion qualitative

La prévention des pollutions, contrairement à ce qu’ont cru certaines associations environnementales à l’issue du discours du chef de l’État, n’est pas complètement absente du plan, même si ce chapitre contient peu de mesures nouvelles. Première mesure : « Tous les captages seront dotés d’un Plan de gestion de la sécurité sanitaire des eaux ». Les projets agricoles « agro-écologiques » et « bio » seront favorisés. Une « aide à l’acquisition foncière par les collectivités », autour des aires de captage, sera mise en œuvre, « à hauteur de 20 millions d’euros par an ». 

Enfin, les Agences de l’eau consacreront « 50 millions d’euros supplémentaires » à la mise aux normes des stations d’épuration « prioritaires ». Et 100 millions permettront de « financer les projets de renaturation et de désimperméabilisation des collectivités », dans le cadre, cette fois, du Fonds vert. 

Notons que le jour même où ce plan était présenté, le ministre de l'Agriculture, Marc Fesneau, demandait, devant le congrès de la FNSEA, le réexamen par l'Anses d’un pesticide interdit depuis peu et à fort impact sur la qualité des nappes phréatiques. Un message quelque peu contradictoire...

On remarquera  aussi que la question des compétences eau et assainissement, et de leur transfert obligatoire aux intercommunalités, n'est à aucun moment évoquée dans ce plan, malgré l'opposition de très nombreuses communes à ce transfert obligatoire. Si le chef de l'Etat a suscité nombre d'interrogations en déclarant hier que  « le problème, ce sont les communes isolées », cette question n'est nullement abordée dans le plan.

Il reste enfin à savoir quand et comment ces mesures seront mises en œuvre. Christophe Béchu a annoncé ce matin que « les trois quarts des dispositions relèvent du règlement », ce qui signifie qu’elles peuvent être mises en œuvre par décret ou arrêté, sans passer par la case Parlement. Les questions financières « devront passer en loi de finances », a poursuivi l’ancien maire d’Angers. Restera la question de la tarification progressive de l’eau (lire article ci-dessous) qui, elle, fera éventuellement l’objet d’une future loi. 




Politique de l'eau
Tarification progressive de l'eau : « généraliser » ou « faciliter » ?
Le chef de l'État a demandé hier que soit « généralisée » la tarification progressive de l'eau. Mais les projets prévus dans le Plan Eau publié depuis sont un peu plus nuancés. Explications. 

Dans son discours d’hier, Emmanuel Macron a annoncé une réflexion sur la tarification de l’eau : il a dit souhaiter que « la tarification progressive et responsable » soit « généralisée » : « Les premiers mètres cubes (seraient) facturés à un prix modeste, proche du prix coûtant, (…) ensuite au-delà d’un certain niveau, le prix du mètre cube (serait) plus élevé, et c’est normal pour les consommations que j’appellerai de confort et pour inciter à la sobriété », a expliqué le chef de l’État. 

Le terme de « généralisation », qui implique un caractère uniforme et obligatoire, a immédiatement fait bondir certains élus. À commencer par David Lisnard, le président de l’AMF, qui a aussitôt twitté sèchement : « La tarification est du ressort des autorités organisatrices de l'eau, c’est-à-dire des collectivités, donc est le fruit de la démocratie locale (…). Elle est pertinente, « responsabilisante » et modèle. Que l'État reste à sa place. »

Réflexion

Le dossier de presse diffusé par le ministère est heureusement plus nuancé, puisqu’il ne parle pas de « généraliser » la mesure : il mentionne uniquement le fait de « faciliter la mise en place par les collectivités d’une politique tarifaire adaptée aux enjeux des territoires ». Et annonce que le Conseil économique, social et environnemental (Cese) va être saisi pour réfléchir aux « évolutions nécessaires pour faire des recommandations sur la tarification progressive de l’eau ». Ce qui, soit dit en passant, peut surprendre, dans la mesure où le Cese est une des seules assemblées consultatives dans lesquelles… les élus locaux ne sont pas représentés. 

Reste que Christophe Béchu, en conférence de presse ce matin, a clairement rejeté l’idée d’un système uniforme pour tout le territoire, expliquant que le président de la République avait seulement « fixé un cap, ce qui est son rôle ». Et ajoutant : « L’eau est une compétence décentralisée. [La fixation d’un tarif unique] serait une insulte à la gestion locale, en plus d’un non-sens, eu égard aux spécificités locales ». 

Sans compter que la tarification progressive se heurte à de nombreux problèmes, en particulier le fait qu’il paraît impossible de fixer une consommation « de base » sans tenir compte de la composition des ménages : une famille nombreuse consomme mécaniquement plus d’eau qu’un célibataire. Il faudra donc en tenir compte. Doit-on également faire varier le prix en fonction des revenus ? Christophe Béchu n’y est pas opposé, déclarant ce matin que pour lui, « la tarification sociale n’est pas un gros mot ». Celle-ci existe d’ailleurs, depuis la loi du 15 avril 2013 qui a rendu possible son expérimentation dans les collectivités territoriales volontaires. Mais, a souligné Christophe Béchu, « il y a aujourd’hui assez peu de cas ». 

Le ministre a soulevé de nombreuses autres questions : à qui appliquer la tarification progressive ? « On ne peut pas traiter de la même façon les particuliers, un hôpital et les pompiers. » « Tout cela n’est pas simple, a conclu le ministre, d’où l’étape intermédiaire de réflexion qui va être demandée au Cese ». 

Il reste à espérer que ni le gouvernement ni le Cese n’oublieront de consulter, sur ce sujet, les élus locaux, qui restent les premiers concernés. 




Finances locales
Compensation de la CVAE en 2023 : « 650 millions d'euros manquent à l'appel », dénonce l'AMF
« Si certaines collectivités constateront une hausse » de leur CVAE cette année, son montant sera, en fait, « inférieur à ce qui aurait dû être perçu en l'absence de réforme », explique l'association qui critique les modalités de compensation choisies par le gouvernement, jugées « défavorables » aux collectivités.

« L’engagement » du gouvernement à compenser « à l’euro près » la disparition de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) « est loin d’être tenu ». A l’heure de la communication aux élus locaux de leurs montants individuels, l’AMF dénonce le dédommagement insuffisant des communes à la suite de la suppression de cet impôt économique local. En subissant « un arbitrage défavorable », les maires estiment que la promesse initiale du gouvernement n’est « pas respecté[e] ».

Décidée dans le cadre de la loi de finances pour 2023, la suppression complète de la CVAE a été étalée sur deux ans, avec une première moitié cette année et la seconde moitié en 2024. Pour éviter cette perte de recettes pour le bloc communal, le gouvernement s’était donc engagé à la compenser intégralement.

Un mode de calcul critiqué

Or, « si certaines collectivités constateront une hausse du produit perçu entre 2022 et 2023 au titre de la CVAE, il n’en reste pas moins inférieur à ce qui aurait dû être perçu en 2023 en l’absence de réforme », fait valoir l’association, dans un communiqué, publié hier.

Concrètement, ce sont « plus de 650 millions d’euros [qui] manquent à l’appel ». « Sur les deux années d’extinction de la CVAE, c’est donc une perte cumulée de 1,3 milliard d’euros pour les collectivités », avance-t-elle.

« Le gouvernement, qui avait connaissance des montants déclarés par les entreprises, ne pouvait l’ignorer et a choisi d’exclure une compensation fondée sur la dernière année de perception », s’indigne l’AMF qui rappelle avoir exprimé toute une série d’« alertes » depuis « l’automne 2022 » sur ce problème. 

Les maires - comme les sénateurs - reprochaient, en effet, le mode de calcul de cette compensation, basé sur les recettes perçues par les communes, les intercommunalités et les départements durant les années 2020, 2021, 2022 et 2023. « Le choix du gouvernement de calculer la compensation socle sur la moyenne des années 2020-2023 pénalise clairement les communes et leur intercommunalité », soulignent-ils.

« En intégrant la baisse de la CVAE 2021 (qui est assise sur la valeur ajoutée des entreprises en 2020) induite par la crise sanitaire dans les calculs, l’Etat baisse d’autant le montant de la compensation qu’il est censé assurer, au détriment des collectivités », expliquait, en octobre dernier, le président de l’association, David Lisnard, dans un courrier au gouvernement, dans lequel il signalait sa préférence pour la mise en place d’un dégrèvement en 2023 et 2024, comme d’ailleurs les sénateurs LR qui avaient tenté de l’intégrer lors des débats budgétaires. 

Dans un rapport publié à la suite du vote du budget 2023, la chambre haute estimait que, « au vu des enjeux majeurs de définition des critères de répartition de la dynamique, la mise en place du nouveau système semble prématurée sous peine d’engendrer d’importants effets de bords sur les ressources des communes et des EPCI, eux-mêmes déjà fragilisés par la conjoncture actuelle ». 

Notifications : un retard de trois mois « préjudiciable »

L’AMF demande donc que « le montant de référence de la répartition » soit « celui de la CVAE qui aurait dû être touchée par les collectivités locales en 2023 ». « A défaut, 650 millions d’euros manqueront chaque année à l’appel », prévient-elle. 

En outre, elle maintient que « la répartition de la compensation doit être calculée sur plusieurs années pour lisser les écarts » et que « l’année 2021, qui a enregistré une baisse exceptionnelle de la CVAE en raison de la crise sanitaire, doit être exclue de ce calcul ». 

L’association critique, au passage, le « retard de trois mois » pris « dans la notification du montant de CVAE compensée », les collectivités concernées étant habituellement notifiées de l’estimation de leur CVAE « en décembre ».

« A l’heure où les collectivités sont appelées à boucler leurs budgets », ce retard « repousse le lancement des programmes d’investissement locaux » et est « d’autant plus préjudiciable que l’inflation pèse durement sur les budgets locaux, et limite déjà les investissements des collectivités ». 

Répartition de la CVAE : le projet de décret pas adopté par le CFL

De son côté, les membres du Comité des finances locales (CFL) ont décidé, la semaine dernière, de ne pas adopter (et se sont « abstenus ») le projet de décret portant sur la répartition de la compensation par l'Etat de la CVAE en 2023, « dans l'attente d'informations complémentaires ».

« Si les modalités de répartition n’ont pas posé problème, à savoir les critères anciens de répartition de la CVAE (1/3 selon les bases de CFE et 2/3 en fonction des effectifs), le montant global mis en répartition a suscité de nombreuses réactions des élus présents », a fait savoir Intercommunalités de France, dans un communiqué publié la semaine passée, dans lequel elle détaille la répartition de la CVAE collectée en 2022 : la part socle de 10 milliards d'euros, complétée par le fonds d’attractivité (608 millions d’euros), le fonds vert (500 millions d’euros) et une contribution au SDIS (150 millions d’euros).

Selon l’association, « il semblerait que le fonds d’attractivité pour 2023, ne soit pas alimenté comme le dit la loi de finances par « une fraction du produit net de la taxe sur la valeur ajoutée, défini comme le produit brut budgétaire de l'année » à hauteur de la croissance de la TVA nationale pour 2023, alors qu’il a été évoqué à plusieurs reprises la contemporanéisation de ce fonds ».

« Cette non-actualisation pèsera sur l’évolution du fonds à l’avenir. D’autant plus s’il devait être considéré que le montant de référence pour calculer la TVA compensatrice en 2024 au titre de la CVAE supprimée serait le montant de la moyenne quadriennale abondée de ce fonds », a indiqué Sébastien Miossec, président délégué de l’association, selon le communiqué.

Autre interrogation, concernant le fonds vert cette fois. Si, en 2023, « il est abondé d’un montant de 500 millions d’euros, qu’en sera-t-il les années suivantes ? », s’interroge Intercommunalités de France. « Difficile d’imaginer que cette alimentation via l’ex-CVAE, demeure. Cela constituerait un manque à gagner important pour les collectivités d’autant qu’une croissance à 20 % [de la CVAE en 2022 par rapport à 2021, NDLR] est loin de se reproduire ».




Numérique
1 062 collectivités ont ouvert leurs données en 2022
Selon les derniers chiffres de l'Observatoire de l'open data, si le nombre de collectivités qui ouvrent leurs données augmente, la généralisation de cette pratique peine à s'imposer dans tous les territoires.

Hier, Maire info dédiait un article au baromètre 2023 de la maturité numérique des territoires. Cette étude pointe notamment des engagements locaux qui restent « souvent insuffisants » en faveur de la production, de la libre circulation et de la valorisation des données du territoire. Selon les chiffres, seulement 18 % des collectivités interrogées ont mis en place une gouvernance ouverte en matière de données avec les acteurs du territoire. 

Pourtant, le nombre de collectivités ayant ouvert leurs données n’a cessé de progresser depuis 2016. C’est en tout cas ce que montre l’observatoire annuel sur l’ouverture des données réalisé par Open Data France et publié cette semaine. Cette publication « a comme objectif de donner des informations précises sur l’avancée de l’ouverture des données dans les collectivités territoriales. »

Des obligations pas toujours respectées

La Cnil le rappelle, « l’ouverture des données (en anglais « open data ») constitue un vecteur de transparence et d’amélioration de l’action publique ainsi qu’un puissant levier pour l’innovation économique. » Encore faut-il que les collectivités se saisissent de cette question. 

Les chiffres clés 2022 de l’open data des territoires montrent que, l’année passée, déjà 1 062 collectivités ont ouvert leurs données, soit 16 % de collectivités soumises à des obligations légales. En effet, depuis l’entrée en vigueur de la loi pour une République numérique du 7 octobre 2016, les collectivités sont soumises à de nouvelles obligations de diffusion des données. Les collectivités territoriales de plus de 3 500 habitants et employant plus de 50 agents (en équivalent temps plein) sont tenues de mettre en ligne un certain nombre de données et documents. 

L’observatoire montre que « 84 % des collectivités concernées n’ouvrent pas leurs données et n’entrent donc pas dans une démarche de transformation ou de transition. » Pour Open data France, la croissance du nombre de collectivités engagées est réelle mais l’impact est encore limité sur le pourcentage global. 

Un écosystème territorial à développer 

Grâce à la carte interactive également produite par Open data France il est possible de « connaître et comprendre l’avancement de l’ouverture des données publiques dans les territoires. » On peut identifier des dynamiques intéressantes en Bretagne par exemple où 226 organisations (dont la plupart sont des communes) se sont lancées, en Nouvelle-Aquitaine ou encore en Provence-Alpes-Côte-D’azur. 

Plus précisément, l’écosystème entier des acteurs de l’open data est composé de 50 % de communes, 25 % de structures « supra-communales » et 25 % d’acteurs parapublics (la Poste, la SNCF, la RATP, EDF, etc.). Ainsi, les auteurs de l’étude statuent sur l’idée que « l’accompagnement et l’effort d’ouverture doivent légitimement porter sur les compétences municipales (1er rang) puis intercommunales (2e rang). »

Presque la moitié (43,8 %) de ces communes déjà investies dans la démarche d’ouverture des données comptent entre 80 000 et 100 000 habitants. Les auteurs de l’étude expliquent que « les petites collectivités sont en difficulté pour ouvrir leurs données : manque de moyens humains, de système d’information structuré et impact des priorités liées aux services publics de grande proximité. »

Il est indiqué dans cet observatoire que « 72 % des collectivités choisissent de publier les données sur une plateforme qui leur est propre ou sur une plateforme d’une collectivité en proximité (commune et Intercommunalité ou portail départemental par exemple) ». Au total, un quart des plateformes de publication de données sont mutualisées. 

La qualité de la donnée publiée 

Pour ce qui concerne les données publiées par les collectivités, cinq thématiques principales émergent, et ce depuis plusieurs années : équipement, administratif, transport, citoyenneté et environnement. Les auteurs de l’étude expliquent que « ces thématiques récurrentes tiennent au fait d'une demande publique insistante (transparence), de lois encadrant prioritairement tel ou tel domaine (observatoire de la commande publique, transport) et des grands programmes nationaux d'accélération de l'ouverture des données (boîte aux lettres électronique, transport, urbanisme). »

Enfin, il est à noter qu’à ce jour 20 schémas de données ont été publiés sur le site schema.gouv.fr mais Open data France pointe le « peu de respect des standards de données même lorsqu’elles y sont soumises. » L’association regrette « l’absence d’un référentiel thématique unique » et le nombre de standards qui sont peu nombreux notamment pour les données prioritaires (SCDL). Du côté des élus, le manque de formation ou d'information sur le sujet semble aussi être un point à prendre en considération pour réussir la généralisation du partage de la donnée en France. 

Télécharger l'observatoire. 
 




Risques
Gestion des risques et des crises : l'AMF se dote d'une feuille de route
Le bureau de l'AMF a validé, le 28 mars, le lancement de plusieurs actions destinées à sensibiliser les élus à la gestion des évènements exceptionnels. Un « kit de sensibilisation » sera disponible d'ici septembre et cinq sites pilotes départementaux permettront d'informer, de former et d'impliquer les élus dans la gestion des crises, avant une généralisation du dispositif en 2024.

« Sensibiliser les non-initiés » et « répondre aux besoins des élus expérimentés » dans la gestion des risques et des crises : tels sont les objectifs de la « feuille de route » adoptée, le 28 mars, par le bureau de l’AMF. Élaborée par le groupe de travail créé sur le sujet au sein de l’association, à l’été 2022, à la demande de son président David Lisnard, et coprésidé par Éric Menassi, maire de Trèbes (11) et Sébastien Leroy, maire de Mandelieu-la-Napoule (06), cette feuille de route veut « promouvoir une approche non pas théorique mais pragmatique et opérationnelle des risques, a souligné Sébastien Leroy devant le bureau de l’AMF. Car la plupart de nos collègues n’ont pas très bien conscience des risques menaçant leur commune, de leurs rôle et responsabilités dans la gestion d’une crise ». Pour Éric Menassi, qui a dû gérer en 2018 dans sa commune un attentat terroriste et des inondations, « le maire est en première ligne et il est urgent de faire partager notre expérience à tous les maires de France ».

Concrètement, le groupe de travail va élaborer, d’ici à septembre prochain, « un kit de sensibilisation à destination des élus » composé d’une « plaquette d’information générale (connaître son territoire et son exposition, se préparer à la gestion de crise et anticiper les prochaines crises), de témoignages de maires éprouvés, d’un argumentaire juridique sur les responsabilités encourues par les maires, de la trame d’un plan communal de sauvegarde (PCS) de base, de contacts locaux ». Ce kit sera mis en ligne dans un espace dédié sur le site Internet de l’AMF. L’Association créera une adresse mail « pour apporter une aide de 1er niveau à la gestion de crise (partage d’expériences et d’outils clés en mains type modèles d’arrêté d’évacuation, de fermeture de voies d’accès…) ». Le président de l’AMF adressera un courrier à tous les maires de France pour leur rappeler leurs responsabilités. 

D’ici à l’été, le groupe de travail de l’AMF va identifier cinq sites pilotes, en lien avec les associations départementales de maires, au sein desquels seront désignés des « maires référents » et créé un « pool de ressources pour accompagner les élus à la prise de conscience de l’exposition de leur territoire ». Dans ces sites pilotes, les élus se verront proposer des séances de sensibilisation collective à la gestion des risques, « un accompagnement à l’utilisation de Géorisques » pour comprendre l’exposition de leur territoire, une cartographie des organismes ressources présents sur le département et des formations. Les services de l’État et les associations seront notamment associés à ces actions. 

Les cinq sites pilotes permettront pendant un an de « tester la démarche avant son déploiement » dans l’ensemble des départements, à partir de la mi-2024, a indiqué Sébastien Leroy. « Une sensibilisation à grande échelle des maires aux risques et à la gestion de crise » sera organisée dans le cadre du 106è congrès de l’AMF en 2024. « Quand une commune subit une crise majeure, seul le maire est décisionnaire dans les premiers jours. Au-delà du rappel de leurs obligations légales, nous devons donc aider les élus à gérer la pression, y compris la pression médiatique, à acquérir de la méthode, à connaître les procédures et les acteurs clés », affirme David Lisnard.

Enfin, l’AMF « lancera une analyse de fond sur d’éventuelles contradictions législatives et complexités administratives et réfléchira à des pistes de financement pour une politique de prévention plus ambitieuse et efficiente au regard de la vulnérabilité du territoire ».

 






Journal Officiel du vendredi 31 mars 2023

Lois et décrets
LOI n° 2023-222 du 30 mars 2023 visant à ouvrir le tiers financement à l'Etat, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique (1)
Ministère de la Justice
Décret n° 2023-227 du 30 mars 2023 relatif à la contravention d'outrage sexiste et sexuel
Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Décret n° 2023-225 du 30 mars 2023 portant création de l'agence des communications mobiles opérationnelles de sécurité et de secours
Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Décret n° 2023-230 du 29 mars 2023 fixant la valeur du seuil mentionné au 2° du IV de l'article R. 302-14 du code de la construction et de l'habitation pour la période triennale 2023-2025
Ministère de la Transition énergétique
Décret n° 2023-231 du 30 mars 2023 relatif au report des dates limites de demande du chèque énergie pour les ménages chauffés au fioul domestique et du chèque énergie pour les ménages chauffés au bois

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