Édition du lundi 27 mars 2023

Justice
Violences dans les manifestations : le gouvernement durcit le ton
Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, vient de publier une instruction relative au traitement judiciaire des infractions commises à l'occasion des manifestations ou des regroupements en lien avec les contestations contre la réforme des retraites. Il appelle à une fermeté particulière dans le cas des violences contre les élus. 

Après une semaine marquée par la multiplication des affrontements entre manifestants violents et forces de l’ordre, dans le cadre du mouvement de protestation contre la réforme des retraites, la journée de samedi a été le théâtre de scènes de chaos à Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres, où avait lieu une nouvelle manifestation contre les « méga-bassines ». Cette manifestation, interdite par la préfecture, a très rapidement dégénéré et s’est soldée par plusieurs heures d’affrontements extrêmement violents entre certains manifestants et les quelque 3000 policiers et gendarmes présents sur le terrain. Bilan, des dizaines de blessés tant chez les manifestants que chez les gendarmes, certains très gravement. Selon le procureur de Niort,  47 gendarmes ont été sérieusement blessés, dont deux très grièvement. 200 manifestants auraient été blessés, dont au moins un, apparemment atteint à la tête par une grenade de désencerclement, est encore ce matin entre la vie et la mort. 

Versions opposées

Deux jours après ces événements, les versions des deux camps s’opposent. Côté gouvernement, on dénonce la présence de quelque 1500 manifestants radicaux et, selon les mots du ministre Christophe Béchu ce matin, « un déferlement de violence inouï ». « Il faut arrêter avec la fable des gens qui sont allés faire une petite balade bucolique », s’irrite le ministre, qui parle d’un véritable « arsenal » saisi chez certains manifestants, évoquant notamment les mortiers et les cocktails Molotov dont ceux-ci ont fait usage contre les forces de l’ordre.

Côté manifestants et élus de gauche, la version est radicalement différente, évoquant une attitude « provocatrice » des forces de l’ordre et un usage « disproportionné » de la force. Des questions se posent notamment sur l’usage de quelque 4000 grenades lacrymogènes en moins de deux heures, et surtout sur celui des grenades de désencerclement, qui ne doivent en théorie qu’être lancées au ras du sol, et auraient, samedi, été lancées à hauteur d’homme, ce qui aurait occasionné de graves blessures. 

Réquisitions

Dans ce contexte plus que tendu, et à la veille d’une nouvelle manifestation contre la réforme des retraites, le garde des Sceaux rappelle, dans une instruction, que « le droit de manifester et la liberté d’expression doivent être garantis et assurés », mais que « leur exercice ne saurait donner lieu à la commission de troubles graves à l’ordre public, à des atteintes aux personnes et aux biens et à des actes d’intimidation et des menaces contre les élus ». 

Adressée aux procureurs, cette instruction vise à rappeler à ceux-ci les outils dont ils disposent pour prévenir et traiter ce type d’infractions. Il est en particulier rappelé que la loi permet désormais aux procureurs de délivrer des réquisitions afin d’autoriser les forces de l’ordre à fouiller  les véhicules et les bagages aux abords des manifestations. 

Le ministre insiste également – alors que les critiques fusent sur les arrestations nombreuses qui ont émaillé des manifestations récentes, le plus souvent sans suite – sur l’obligation de rédiger en cas d’interpellation « une fiche de mise à disposition destinée à assurer l’information immédiate de l’officier de police judiciaire sur les éléments ayant justifié lesdites interpellations et de permettre l’identification des agents interpellateurs et témoins éventuels ». 

Éric Dupond-Moretti demande également aux procureurs, dans les départements les plus concernés, de mettre en place « une permanence dédiée au traitement des infractions commises en marge des mouvements de contestation ».

Infractions contre les élus

Alors que plusieurs députés de la majorité font état de menaces écrites – parfois particulièrement violentes – et que les dégradations contre les permanences parlementaires se multiplient, le garde des Sceaux appelle les procureurs à « attacher une attention particulière aux infractions qui seraient commises contre des élus ». Il leur demande d’apprécier, chaque fois que nécessaire, « la possibilité de retenir les qualifications prévues par l’article 433-3 alinéa 6 du code pénal, qui dispose qu’est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende le fait d’user de menaces, de violences ou de commettre tout autre acte d’intimidation pour obtenir d’une personne investie d’un mandat électif public ». En cas de violences avérées contre des élus ou des membres des forces de l’ordre, le ministre demande des défèrements immédiats. 

Il rappelle enfin que des mesures complémentaires peuvent être prises « pour éviter la réitération des faits », telles que les peines d’interdiction de séjour pour les ressortissants étrangers, les peines « d’interdiction de paraître en certains lieux », ainsi que les « interdictions de participer à des manifestations sur la voie publique ». 

Ce durcissement du ton de l’exécutif s’est traduit rapidement dans les faits : vendredi, un manifestant qui avait agressé jeudi un policier en lui portant un coup avec une planche de skate-board s’est vu condamner, en comparution immédiate, à une peine de trois ans de prison ferme, et a été immédiatement incarcéré. 




Outre-mer
Antilles : la Défenseure des droits critique un accès « entravé » aux services publics
Parmi ses nombreuses préconisations, la Défenseure des droits recommande d'annuler les factures d'eau quand le service n'a pas été rendu et encourage les communes à mettre en place un service de restauration dans tous les établissements scolaires primaires dont elles ont la charge, « à un tarif abordable ».

Des usagers victimes de coupures d'eau récurrentes, des élèves qui perdent des dizaines de jours d'écoles, des habitants qui renoncent à se soigner faute de pouvoir se rendre dans l'Hexagone, un accès au numérique réduit par des « pratiques tarifaires élevées »... Dans un rapport, publié la semaine passée, la Défenseure des droits (DDD), Claire Hédon, critique sévèrement l’accès aux services publics dans les Antilles et met en lumière toute une série de difficultés rencontrées « quotidiennement » par les ultramarins dans l’exercice de leurs droits.

Selon elle, « la capacité effective donnée aux habitants de ces territoires à vivre dans des conditions décentes et dans un environnement sain, à apprendre et se former, à se déplacer et travailler, à accéder aux soins, à vieillir dans de bonnes conditions et, plus largement, à réaliser leurs démarches administratives et à faire valoir leurs droits, […] est réduite du fait des insuffisances des services publics ».

« On ne croit plus au service public »

Constatées depuis plusieurs décennies, ces défaillances dans le fonctionnement des services publics est d’ailleurs « à l’origine d’un climat de défiance caractérisé envers les institutions dans ces territoires et d’un sentiment prononcé d’abandon ». Une population antillaise qui « ne croit plus au service public », selon les propos recueillis sur place par la délégation du Défenseur des droits dans le cadre de ses auditions, réalisées en fin d’année 2022.

D’autant que les situations les plus critiques sont largement « connues » aux Antilles. Celles-ci vont de « la distribution et l’assainissement de l’eau en Guadeloupe », à « la rareté des transports publics », en passant par « les délais d’attente pour accéder à un médecin spécialiste », « les difficultés à liquider les pensions de retraite en Martinique », « le manque d’agents dans les préfectures et dans les juridictions, qui retarde l’accès aux droits », ou encore « les difficultés liées à la dématérialisation des démarches administratives, accrues pour des populations où le taux d’illettrisme est plus important et où la fracture numérique est encore plus marquée ».

En 2022, « la très grande majorité » des saisines de la DDD a ainsi concerné « le fonctionnement des services publics », à hauteur de 95 % en Guadeloupe et 96 % en Martinique. 

Un constat sévère qui ne « met nullement en cause le travail réalisé par les agents publics qui souvent, souffrent eux-mêmes de difficultés structurelles ne leur permettant pas de répondre comme ils le souhaiteraient aux attentes des usagers », tient, toutefois, à souligner Claire Hédon.

Distribution et accès à l’eau potable dégradés

Concrètement, les « défaillances » des services publics et les difficultés des Antillais à y accéder se matérialisent par une série d’« entraves ». L’une des plus connues reste l’accès à l’eau potable.

Le Défenseur des droits rappelle ainsi être « régulièrement saisi » de réclamations relatives à des litiges concernant l’alimentation en eau potable en Guadeloupe (en Martinique, les difficultés existent aussi mais sont « moindres »), le réseau comportant « des infrastructures très dégradées » qui entraînent « des fuites massives par rupture de canalisation » et des coupures d’eau « fréquentes ». « Certaines régions, notamment de Basse-Terre, où se trouve pourtant la ressource, sont ainsi dans une situation gravissime s’agissant de l’accès à un droit élémentaire, créant fatigue et exaspération de populations en grande souffrance », explique la Défenseure des droits. 

Dans ce contexte, « les aléas de la distribution de l’eau entravent fortement le fonctionnement de tous les services publics, et notamment ceux de l’éducation et de la santé », malgré la création en 2021 du syndicat unique de l’eau et de l’assainissement de Guadeloupe (SMGEAG) qui est en proie à de graves difficultés techniques et financières, la structure ayant héritée « d’un lourd passif » dans la gestion de ces deux compétences.

Alors qu’une « partie significative » des usagers n’a pas accès à l’eau ou seulement à de l’eau impropre à la consommation, nombre d’entre eux refusent de payer leurs factures (le taux d’impayés est, en moyenne, de 25 % en Guadeloupe, mais peut frôler les 50 % dans une intercommunalité de la Basse-Terre, alors que la moyenne nationale se situe à 2 %). 

Dans son rapport, la Défenseure des droits préconise ainsi de « prononcer un abandon de créances pour les factures aux particuliers émises avant le 1er janvier 2021 », mais aussi de « mettre en œuvre rapidement les engagements pris sur la remise en état des réseaux d’eau et d’assainissement en Guadeloupe ».

En visite la semaine passée sur l’île, le ministre délégué aux Outre-mer, Jean-François Carenco, a indiqué que la remise en état du réseau d'eau guadeloupéen « démarre enfin ». « On accélère les travaux, on accélère tout », a assuré le ministre, qui a signé mercredi un contrat – annoncé en novembre – de 27 millions d'euros sur trois ans, visant à redresser et assurer le fonctionnement du SMGEAG. 

« Le mois dernier, on réparait deux fuites par jour, aujourd'hui on est à trente. C'est bien que c'est le signe d'un truc qui marche », s’est-il félicité, en annonçant également de « nouveaux dispositifs expérimentaux qui seront déployés rapidement, pour lutter contre les sargasses pour près de 1,5 million d’euros ». La prolifération de ces algues sur leur littoral – qui dégagent des émanations de gaz et provoquent notamment la dégradation par corrosion des appareils électroménagers – entraînent « des atteintes au droit de vivre dans un environnement sain et affectent le fonctionnement de nombreux services publics », selon la DDD. 

Ecoles, cantines, santé, justice…

En outre, du fait des « grèves » ou « des situations de force majeure liées aux conditions climatiques et environnementales », les élèves scolarisés en Guadeloupe et en Martinique reçoivent « un nombre de jours d’enseignement inférieur à la moyenne des élèves de métropole », allant, dans certaines écoles, jusqu’à 20 % de jours de classe perdus, sans être rattrapés, au cours de l’année 2021. Sans compter les « difficultés d’accès physiques » à l’école. 

Il y a ainsi « urgence, dans les deux territoires, à organiser le rattrapage des jours d'école perdus […] et à améliorer le transport scolaire », selon la DDD. 

Cette dernière pointe également « l’insuffisance des services de restauration scolaire ». Alors que de nombreux établissements scolaires n’en disposent pas, le nombre de places offertes au sein des cantines reste « faible » et ne « permet pas de répondre à la demande et d’offrir un repas quotidien à tous les enfants ». Elle encourage donc les communes à mettre en place un service de restauration scolaire au sein de tous les établissements scolaires primaires dont elles ont la charge, « à un tarif abordable » – ce service est, rappelons-le, facultatif.

S’agissant de l’accueil de la petite enfance, les difficultés d’accessibilité et de disponibilité des dispositifs d’accueil des jeunes enfants sont aussi patentes et conduisent à ce que les femmes antillaises soient « directement entravées dans leur vie professionnelle » (40 % des familles sont monoparentales, dont 90 % sont composées de mères élevant seules leurs enfants).

Le suivi médical est, lui aussi, « entravé » par « un turn-over important de médecins, particulièrement dans le secteur public », et « des difficultés à recruter de nouveaux professionnels, en dépit des dispositifs qui existent pour encourager le maintien en fonction et l’installation de nouveaux médecins ». La population subit ainsi « un accès aux soins limité » et « n’obtient des rendez-vous médicaux que dans des délais particulièrement longs, susceptibles d’entraîner des pertes de chance en santé ».

Claire Hédon relève, par ailleurs, des inégalités d’accès à Internet. « Outre les difficultés dans les usages numériques et celles, structurelles, liées à l’accès à Internet sur le territoire, du fait de la persistance de nombreuses zones peu ou pas couvertes par le haut débit, l’accès matériel au numérique est entravé par le coût des équipements et des abonnements » et des « pratiques tarifaires élevées des opérateurs » (54 euros en moyenne contre environ 30 euros dans l’hexagone). « Aucun opérateur n’a, par ailleurs, été désigné par les pouvoirs publics pour fournir le service universel « à tarif abordable », tel que prévu par les textes, pour les utilisateurs ayant de faibles revenus ou ayant des besoins sociaux particuliers », ajoute-t-elle en proposant notamment de « poursuivre le déploiement des espaces France services sur les territoires antillais ».

Enfin, « comme pour l’ensemble des services publics, l’accès à la justice est inégal aux Antilles et l’accessibilité des tribunaux est entravée par les difficultés des habitants à se déplacer sur le territoire. Les îles guadeloupéennes des Saintes, de la Désirade et de Marie-Galante n’ont ainsi aucun accès direct régulier à la justice », constate la Défenseure des droits.

Télécharger le rapport.




Élections
Élections sénatoriales : de nouvelles règles pour le scrutin à venir
L'organisation des élections sénatoriales qui auront lieu en septembre se met peu à peu en place. Un décret paru ce week-end modifie,  à la marge, les règles concernant les délégués des conseils municipaux. Rappel du fonctionnement de cette élection pas comme les autres. 

L’année 2023 n’est pas, comme on l’entend souvent, une année sans élection : comme tous les trois ans, la moitié du Sénat va être renouvelée, dans le seul scrutin national qui ne se déroule pas au suffrage universel direct. 

Les sièges renouvelés cette année sont ceux qui ont été élus en 2017, c’est-à-dire la série 1. Soit tous les départements de 37 (Indre-et-Loire) à 66 (Pyrénées-Orientales), ainsi que tous les départements d’Île-de-France, la Guadeloupe, la Martinique, La Réunion, Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon et la Nouvelle-Calédonie et les sièges des six sénateurs des Français de l'étranger. 

Élection des délégués

Rappelons que le corps électoral est composé à 95 % de représentants des conseils municipaux. Les sénateurs ne sont pas, comme on l’entend souvent, « élus par les maires », mais élus (outre par les députés, les sénateurs, les conseillers départementaux et régionaux) par des délégués élus dans les conseils municipaux. Selon leur taille, les conseils municipaux doivent élire entre un et 15 délégués (1). Dans les communes de 9 000 à 30 000 habitants, tous les conseillers municipaux participent au vote. 

Enfin, dans les villes de plus de 30 000 habitants, des délégués supplémentaires sont désignés, à raison d’un délégué par tranche de 800 habitants, obligatoirement inscrits sur la liste électorale de la commune concernée. 

Rappelons qu’aux sénatoriales, le vote est obligatoire. Un délégué qui ne prend pas part au vote, s’il n’a pas de justification valable, encourt une amende de 100 euros. 

Les conseils municipaux des communes de moins de 9 000 habitants vont donc devoir élire leurs délégués. La date de ce scrutin sera déterminée par décret – en général le même décret qui fixe la date des élections sénatoriales elles-mêmes. Attention, la date fixée par l’État pour élire les délégués est absolument impérative : le maire est dans l’obligation de convoquer un conseil municipal ce jour-là, ni avant ni après, et procéder, à bulletins secrets, à l’élection des délégués. 

Maire info reviendra sur les spécificités de l’organisation de ce vote dès la parution du décret de convocation. 

Scrutin majoritaire ou proportionnel ?

Autre particularité des élections sénatoriales : certains sénateurs sont élus au scrutin proportionnel et d’autres au scrutin majoritaire.

Dans les départements qui élisent un ou deux sénateurs, l’élection a lieu au scrutin majoritaire à deux tours. Le candidat et son suppléant doivent obligatoirement être de sexe différent. Dans les départements qui élisent trois sénateurs ou plus, l’élection a lieu à la représentation proportionnelle. Les listes doivent respecter l’alternance entre les sexes. 

Quelles nouveautés pour ce scrutin ?

Les modalités de cette élection seront un peu différentes de celles de 2020, dans la mesure où une nouvelle loi a été votée entretemps. La loi du 2 février 2023 concerne notamment les départements où se déroule un vote au scrutin majoritaire à deux tours, ces deux tours se déroulant le même jour – premier tour le matin et second tour l’après-midi. La nouvelle loi remédie à des difficultés rencontrées lors des précédents scrutins, dues au fait que certaines règles du Code électoral s’appliquaient jusqu’alors indifféremment pour toutes les élections, y compris sénatoriales, avec des conséquences absurdes : il est en effet interdit par le Code électoral, en général, de faire campagne le jour du scrutin. Résultat : après le premier tour des sénatoriales, les candidats ne pouvaient faire campagne pour le second tour ayant lieu le même jour ! La loi du 2 février 2023 remédie à cette absurdité en permettant, pour les sénatoriales, de faire de la propagande électorale « entre la proclamation des résultats du premier tour et l’ouverture du second tour ». 

D’autres changements, d’ordre réglementaire ceux-ci, ont été introduits par un décret paru samedi 25 mars au Journal officiel

Ils concernent l’élection des délégués dans les communes, et plus particulièrement la procédure à suivre en cas d’empêchement d’un délégué, c’est-à-dire lorsqu’un cas de force majeure empêche un délégué de participer au scrutin et qu'il doit alors être remplacés par son suppléant. L’article R162 du Code électoral précise que les empêchements « majeurs » sont « une  obligation professionnelle, un handicap, une raison de santé, l'assistance apportée à une personne malade ou infirme, un placement en détention provisoire ou l'exécution d'une peine privative de liberté n'entraînant pas une incapacité électorale ». 

Dans ces cas, précise le décret paru samedi, « le délégué adresse au maire une demande de remplacement motivée et accompagnée des pièces justificatives démontrant la réalité de l'empêchement. Le maire transmet la demande et les pièces au représentant de l'État accompagnées de son avis sur son bien-fondé. Le représentant de l'État examine la demande et, s'il l'accueille, modifie en conséquence la liste des électeurs du département. Le maire, le délégué empêché et son suppléant sont avisés sans délai du sens de la décision du représentant de l'État sur la demande ».


(1)     1 délégué pour les conseils municipaux de 7 et 11 membres, 3 délégués pour les conseils municipaux de 15 membres, 5 délégués pour les conseils municipaux de 19 membres, 7 délégués pour les conseils municipaux de 23 membres, 15 délégués pour les conseils municipaux de 27 et 29 membres. 




Handicap
Paiement des AESH pendant le temps périscolaire : une situation « d'inégalité »
Le gouvernement a récemment répondu à plusieurs questions similaires de parlementaires pointant la situation « inégalitaire » entre établissements scolaires publics et privés en matière d'accompagnement des enfants en situation de handicap. Explications. 

Qui doit payer les AESH (accompagnants d’élèves en situation de handicap) pendant la pause méridienne ou les temps périscolaires ? Cette question, qui paraissait auparavant assez simple, a été largement compliquée par un arrêt du Conseil d’État de 2020. Cet arrêt a généré des situations d’inégalité entre établissements publics et privés sous contrats, ce qu’ont relevé depuis plusieurs sénateurs, qui veulent savoir ce que le gouvernement envisage pour résoudre le problème. Celui-ci a enfin apporté une réponse, la semaine dernière, mais celle-ci devrait décevoir les personnes concernées par le problème. 

Une « évolution regrettable de la jurisprudence »

Jusqu’en 2020, les choses étaient simples : la loi du 30 avril 2003 avait confié à l’État la charge d’assurer l’intégration des enfants en situation de handicap « y compris en dehors du temps scolaire ». En conséquence, l’État devait rémunérer lui-même les AESH par exemple pendant le temps de repas de l’enfant à la cantine. 

Mais en novembre 2020, le Conseil d’État en a décidé autrement : en effet, comme l’a expliqué par exemple la députée de la Seine-Maritime Agnès Canayer dans une question écrite au gouvernement, le Conseil d’État a jugé que en dehors du temps scolaire, « la rémunération des AESH, agents publics de l'État, incombe à la structure organisatrice de l'activité pendant laquelle ils accompagnent les enfants ». Dans le cas d’un élève scolarisé dans un établissement public, la restauration est organisée par la collectivité territoriale – la décision du Conseil d’État a donc « transféré la charge de la rémunération des AESH de l'État à cette collectivité territoriale ». 

Cette situation n’est déjà pas satisfaisante et « pose des difficultés dans de nombreux territoires », note la sénatrice du Doubs Annick Jacquemet. Mais dans les établissements privés sous contrat, les choses sont encore plus compliquées. En effet, cette dépense ne peut être financée « ni par le forfait, ni par la contribution des familles ; l’un et l’autre étant strictement encadrés dans leur utilisation ». Le forfait (contribution payée par l’État ou les collectivités), est uniquement destiné à assurer la gratuité de l’externat simple ; quant à la contribution des familles, sa destination est elle aussi strictement encadrée (amortissement des bâtiments, acquisition de matériel scientifique, scolaire ou sportif, etc.). Conséquence : le paiement des AESH dans ces établissements, pour la pause méridienne, ne peut être payé que par une contribution supplémentaire des familles. Soit, conclut Agnès Canayer, « des traitements inégalitaires des enfants en situation de handicap selon le type d'établissement qu'ils fréquentent ». 

« Ce sont les familles des enfants concernés qui subissent au quotidien les conséquences de cette évolution regrettable de la jurisprudence », ajoute Annick Jacquemet, qui demande au gouvernement « d’assurer la continuité du financement des accompagnants de ces élèves pendant le temps de pause méridienne, sans aucune distinction selon l'école choisie par les familles ». 

Pas de solution du côté de l’État 

Le ministère de l’Éducation nationale a fait une réponse commune, écrite, à toutes les questions de ces parlementaires. Il confirme l’interprétation  faite par les sénateurs de la décision du Conseil d’État : « Il n’appartient pas à l’État mais aux collectivités territoriales – lorsque celles-ci organisent un service de restauration scolaire ou des activités complémentaires aux activités d'enseignement et de formation pendant les heures d'ouverture des écoles et établissements scolaires, ou encore des activités périscolaires – de s'assurer que les enfants en situation de handicap y aient effectivement accès et par conséquent de prendre en charge un éventuel accompagnement humain. » 

Le ministère se dit « conscient des difficultés que l'application de la décision du Conseil d'État est susceptible d'engendrer »… mais il ne répond pas clairement à la question posée à propos de l’enseignement privé sous contrat. Le gouvernement « œuvre à harmoniser les pratiques et à garantir la continuité de l'accompagnement des enfants concernés ». Dans cet objectif, « des échanges se tiennent au niveau local entre les services du ministère, les collectivités et les établissements concernés », notamment pour assurer que « ce soit le même AESH qui accompagne l'élève pendant les temps pédagogiques et au moment du déjeuner ». Lorsqu’une collectivité le demande, « il est possible pour un établissement de mobiliser un AESH de l'Éducation nationale sur le temps de la pause méridienne (…) au travers d'un contrat unique contre remboursement à l'Éducation nationale des heures effectuées ». Cette possibilité, ajoute le ministère, a été récemment rappelée aux services déconcentrés dans une « note de service ». 

Ce qui ne résout nullement la question du financement : là où ce ne sont pas les collectivités qui payeront la facture, ce seront donc les familles. Le gouvernement, apparemment, n’envisage pas de remédier à cette situation. 

Rappelons que l'attribution des AESH est décidée par les MDPH (Maisons départementales pour les personnes handicapées), qui prescrivent...mais ne payent pas la prise en charge de ces assistants. 




Santé publique
CNR Santé : un dispositif en passe d'être pérennisé dans les territoires
Une instruction a été publiée la semaine dernière concernant l'avenir du Conseil national de la refondation en matière de santé. Les concertations territoriales vont être poursuivies et les projets territoriaux innovants vont être d'autant plus encouragés.

C’était une promesse de campagne d’Emmanuel Macron : une grande conférence sur le système de soins s’est tenue au mois d’octobre dernier associant soignants, élus locaux et patients (lire Maire info du 19 septembre). Pour rappel, le CNR Santé se décline au niveau national et territorial. 

Pour ce qui concerne le volet territorial, « des réunions de co-construction territoriales animées par les agences régionales de santé (ARS), en lien étroit avec les préfectures et les élus et en association avec le réseau de l’Assurance maladie » ont été mises en œuvre entre octobre et décembre 2022. 

Si l’on en croit le gouvernement, ces premières consultations territoriales ont été un succès. Une instruction publiée la semaine dernière concernant le CNR Santé salue l’organisation de « plus de 250 réunions territoriales » et l’émergence de « centaines d’idées innovantes, de projets et de modes de fonctionnement collectifs nouveaux. »

Cette instruction « relative à la pérennisation du Conseil national de la refondation en santé (CNR Santé) dans les territoires » vient préciser ce que va être la « deuxième phase de consolidation des CNR territoriaux santé ». Le but du CNR Santé : « mobiliser toutes les énergies dans les territoires pour construire une réponse adaptée et efficace aux besoins de santé au plus près du terrain. »

Consolider le volet territorial 

Dans cette instruction, les préfets sont appelés à pérenniser « des collectifs durables du CNR Santé à une maille départementale ou infra-départementale ». Si cette dynamique collective a été impulsée dans la première phase de déploiement de ces CNR, les objectifs de cette coopération sont désormais clairement pointés. 

Ces CNR doivent contribuer au partage de « l’état des lieux des territoires et de leurs défis pour répondre aux besoins de santé ». Des axes d’actions prioritaires doivent être identifiées (accès aux soins, démarches de prévention, attractivité, etc) notamment pour nourrir des projets régionaux de santé (PRS) qui doivent être finalisés d’ici novembre 2023.

Il est aussi indiqué dans l’instruction que ces CNR Santé doivent permettre d’organiser « en lien avec toutes les parties prenantes et auprès de la population, l’information sur l’offre de santé et de prévention, et la meilleure façon d’y accéder ».

Déploiement de projets 

Au-delà de ce rôle de recensement et de priorisation des besoins du territoire, les CNR Santé doivent remplir un « rôle d’organisation et de coordination de la mise en œuvre des réponses ». Concrètement, ces concertations territoriales doivent servir à la co-construction de solutions en réponse aux besoins du territoire respectant le PRS.

Ces CNR doivent aussi servir à identifier « les ressources nécessaires à la mise en œuvre des solutions/projets et identifient les leviers de financement via les outils financiers existants (FIR, accords conventionnels interprofessionnels [ACI], contrats de relance et de transition écologique [CRTE], etc.) » 

La réalisation d’une feuille de route est également au programme de ces concertations afin notamment de permettre aux acteurs du territoire de « contractualiser leurs engagements pour (..) dans le cadre des outils de contractualisation existants (CTS, CLS, ACI, contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens [CPOM], CRTE, etc.) ».

Un focus est fait dans l’instruction sur l’importance de miser sur la communication et la valorisation des initiatives. Les ARS qui pilotent la communication relative aux CNR doivent davantage mettre en valeur les résultats concrets obtenus en lien avec la tenue de ces concertations, et surtout de mettre en valeur les « projets locaux innovants issus du CNR Santé, accompagnés financièrement (pas forcément exclusivement) par l’ARS. Une lumière particulière pourrait être mise sur des projets éventuellement réplicables dans d’autres territoires partageant des problématiques similaires, afin d’en inspirer d’autres. »

Un CNR Santé national sera organisé dans les prochaines semaines afin d’expliquer l’intention de cette instruction et de la déployer rapidement sur l’ensemble du territoire. 
 







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