Édition du mercredi 5 octobre 2022

Budget de l'état
« Contrats de confiance » : le projet de loi de programmation des finances publiques rejeté en commission
Avant le rejet de ce texte, la commission avait adopté un amendement vidant en partie de sa substance le nouveau dispositif de modération des dépenses locales. La suite du marathon budgétaire s'annonce compliqué pour l'exécutif.

Après le rejet du projet de loi de règlement du budget 2021, cet été, nouveau revers et nouvel avertissement pour le gouvernement sur l’un de ses textes budgétaires. La commission des finances de l'Assemblée nationale a rejeté, hier, par 36 voix contre 30, le projet de loi de programmation des finances publiques (PLPFP) présenté par l’exécutif pour les années 2023 à 2027. 

Une déconvenue qui fait figure de bonne nouvelle pour les collectivités puisque c’est dans ce texte qu’est intégré le nouveau dispositif qui pourrait succéder aux contrats de Cahors – nommés cette fois « contrats de confiance » – et dont l’objectif est de « maîtriser la progression » des dépenses réelles de fonctionnement des collectivités, qui devront « évoluer à un rythme inférieur de 0,5 point au taux d’inflation » durant les cinq prochaines années

Environ 500 collectivités concernées

D’ores et déjà rebaptisé « contrats de méfiance » par le président du Comité des finances locales (CFL), André Laignel, particulièrement remonté contre les textes budgétaires présentés par le gouvernement, ils prévoient une trajectoire limitant les dépenses de fonctionnement des collectivités à 3,8 % (soit 0,5 point de moins que l’inflation prévue de 4,3 %) dès l’an prochain, puis à 2,5 % en 2024, 1,6 % en 2025 et 1,3 % en 2026 et 2027. 

Cette mesure imposerait aux collectivités d’économiser, sur la période, un total cumulé estimé dans un amendement de l'opposition à 15 milliards d’euros, et aggraverait sensiblement le précédent dispositif de Cahors puisqu’il augmente le nombre de collectivités concernées et alourdit les sanctions. 

En effet, ce nouveau dispositif toucherait « les collectivités ayant un budget supérieur à 40 millions d’euros, soit au global environ 500 collectivités » (contre 322 pour les contrats de Cahors), a annoncé le ministre chargé des Comptes publics, Gabriel Attal, bien qu’à ses yeux cet objectif doive « guider et embarquer tout le monde ».

En cas de non-respect, les 500 collectivités se verraient privées « d’accès à toute dotation de l’État (Dsil, DETR, fonds vert…) ». Puis, si la situation perdure, elles pourraient être frappées de reprises financières. Les collectivités qui ne respecteraient pas la règle devraient même mener, « avec le représentant de l’État », une « analyse des structures de la dépense de fonctionnement (…), puis un travail pour un retour à une trajectoire financière de maîtrise des dépenses de fonctionnement ».

« Affaiblir le premier investisseur du pays »

« En pleine crise énergétique, demander aux collectivités de réduire leurs dépenses de fonctionnement, ce n’est franchement pas la chose à faire », a d’emblée attaqué (vidéo des débats à partir de 2 h15) le député du Nord David Guiraud (LFI) en rappelant que « les dépenses de fonctionnement c’est ce qui permet aux collectivités de fonctionner, c’est-à-dire de payer notamment l’électricité, le chauffage, les cantines… » Une telle mesure ne conduirait, selon lui, qu’à « affaiblir le premier investisseur du pays » en contraignant les collectivités « à prendre » sur « leurs dépenses d’investissements » alors que les collectivités subissent déjà l’explosion des prix.

Une mesure d’autant mal vécue que celles-ci « doivent présenter un budget à l’équilibre » et « ne participent jamais à la dérive de nos finances publiques, contrairement à l’État », a rappelé le député de Moselle Fabien Di Filippo (LR). 

Face aux oppositions qui ont estimé que le gouvernement en « demand[ait] trop aux collectivités » et que ce nouveau dispositif entraînerait bien des « baisses réelles » (puisque « les hausses [prévues des dépenses] sont inférieures à l’inflation »), le rapporteur général du budget Jean-René Cazeneuve (Renaissance), au point de vue diamétralement opposé, a contesté cette vision en assurant ne pas voir de réduction des dépenses mais « une moindre hausse ». Et Gabriel Attal d’évaluer à « 31 milliards d’euros de plus » les dépenses des collectivités « dans les années qui viennent ». 

« Quand on contraint un tout petit peu les dépenses de fonctionnement, on augmente sa capacité d’autofinancement et donc sa capacité à investir », a ajouté le député du Gers, assurant même qu’« il y a donc un rapport évidemment positif » dans cette mesure. Sans dire, comme l'a récemment rappelé l'AMF, que la diminution forcée des dépenses de fonctionnement pousse les élus à réévaluer leurs investissements à la baisse, puisque tout investissement conduit à des dépenses de fonctionnement nouvelles. 

Reconnaissant que l’année 2023 allait être « difficile » pour les collectivités - mais « aussi pour l’État français, les entreprises, pour tout le monde » – il a toutefois jugé qu’elles « sont prêtes à le faire » et « en ont la possibilité » au regard de leur capacité d’autofinancement « record » l’an passé, allant jusqu’à déclarer que « toutes les associations » d’élus locaux disent « oui, on veut participer à l’effort de guerre ». Une dernière affirmation qualifiée pudiquement d’« un peu téméraire » par le président de la commission des finances, Éric Coquerel, tant celle-ci est éloignée de la réalité.

À noter que les députés écologistes ont fait adopter un amendement visant à vider de sa substance l’article 23, consacré notamment aux sanctions contre les collectivités qui ne respecteraient pas la règle.

Risque d’« amputation des fonds européens »

Gabriel Attal a mis en garde les députés quant au risque de « non-adoption » de ce projet de loi de programmation budgétaire. « La non-adoption de ce texte pourrait entraîner un retard, un délai, voire une amputation des fonds européens qui nous sont versés dans le cadre du plan de relance », a affirmé le ministre des Comptes publics, rappelant qu’« un certain nombre de fonds sont conditionnés à l'adoption d'une loi de programmation des finances publiques ».

Jean-René Cazeneuve (Renaissance) a, lui, appelé à « ne pas se priver du thermomètre » de la loi de programmation : « Ce serait demander à la France de rouler dans un tunnel sans phares ».

Nettement plus nuancé, le député de la Marne Charles de Courson (LIOT) a estimé pour sa part qu'un rejet de la loi de programmation ne « changerait rien » juridiquement et, a-t-il ajouté, « de toute façon, dès la deuxième année, ces lois de programmation ne sont jamais respectées ».

L’exécutif défendra donc, à nouveau, ce texte, en séance publique, à partir du 10 octobre, et devra encore composer avec l'absence de majorité absolue. Un avertissement pour la majorité présidentielle qui augure de débats difficiles pour la suite, alors que se profilent dans les jours à venir l’examen du projet de loi de finances pour 2023 et celui du financement de la Sécurité sociale. « À confirmer en séance, mais ce vote est un bon signe » avant le marathon budgétaire de l'automne, s'est d’ailleurs réjoui le président de la commission Éric Coquerel.




Santé publique
Santé : « Les solutions sont dans les territoires », affirme le ministre
Le ministre de la Santé, François Braun, a présidé lundi la première réunion du « CNR Santé », au Mans. En insistant fortement sur le rôle « central » des territoires et des élus locaux dans la question de l'accès aux soins. Retour sur cette réunion avec Claire Peigné, maire de Morancé (Rhône), qui y représentait l'AMF. 

« Les problèmes sont dans les territoires, les solutions aussi. » Cette déclaration de François Braun, dans son discours d’ouverture du Conseil national de la refondation (CNR) Santé, va dans le sens de la conviction de l’AMF, à savoir que les élus locaux, et en particulier les maires, ont un rôle prépondérant à jouer sur la question de l’accès à la santé. 

« Rôle central » des territoires

L’objectif de cette réunion était de mettre autour d’une table tous les acteurs de la santé : usagers, professionnels, régulateurs des urgences, élus locaux. Avec la volonté exprimée par le ministre de discuter « non pas des problèmes, on les connaît, mais des solutions ». Déserts médicaux, saturation des urgences, fermetures de services voire d’établissements entiers, difficultés de recrutement et épuisement des personnels, difficultés croissantes, dans certains territoires, de trouver un médecin traitant – sans même parler d’un spécialiste –, les problèmes sont en effet connus. Et le ministre estime que les solutions « ne viendront pas de l’avenue de Ségur » (le siège du ministère de la Santé). 

« Cette journée a eu pour fil conducteur le retour sur les ateliers de concertation qui avaient eu lieu la semaine précédente », explique à Maire info Claire Peigné, maire de Morancé et présidente de l’Association départementale des maires du Rhône, co-présidente de la commission Santé de l’AMF – et elle-même médecin. « Nous avons entendu une série de témoignages de chaque catégorie d’acteurs, ce qui a permis de planter le décor. »  

« Le ministre a beaucoup insisté sur le fait qu’en matière d’accès aux soins et de permanence des soins, les territoires auront un rôle très important à jouer. Nous avons rappelé le rôle primordial qu’ont joué les maires pendant la crise sanitaire, et qu’ils ont donc toute légitimité à prendre leur place dans ce domaine. » La maire de Morancé a également rappelé que les collectivités ont une responsabilité prépondérante dans ce que l’on appelle les « déterminants de santé », c’est-à-dire les facteurs qui influencent l’état de santé de la population : logement, sport, environnement…

« Il est également sorti de cette réunion que les élus locaux doivent fonctionner main dans la main avec les ARS et les préfets – ce que le ministre a appelé un trinôme – pour s’impliquer dans les contrats locaux de santé », poursuit la maire. 

Le ministre a par ailleurs annoncé que les CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé) devraient « mailler tout le territoire » d’ici la fin de l’année prochaine. Seules 300 sont actives aujourd’hui, alors que l’objectif initialement prévu était d’un millier.

La question de la gouvernance de la santé – rappelons que l’AMF demande depuis des années le retour des conseils d’administration présidés par le maire dans les hôpitaux, en lieu et place des actuels conseils de surveillance – n’a en revanche pas été abordée.

Travail en équipe

Sur la question des urgences, il a été annoncé que la réunion d’évaluation des mesures prises avant l’été à la suite de la mission flash menée par François Braun, juste avant sa nomination comme ministre, se tiendra dans une dizaine de jours. Il y a, souligne Claire Peigné, « un besoin de savoir ce qui a marché et ce qui n’a pas marché dans ces mesures, ce qui peut être pérennisé ». Bien que le plan lancé en juillet soit encore « jeune », les résultats de la mission d'évaluation de l'Igas doivent permettre de nourrir une évaluation complète. 

Face au manque de médecins traitants, là encore aucune solution toute faite n’a été évoquée : « Il y a plusieurs niveaux de réponse, explique Claire Peigné, qui vont de la formation à la question de l’attractivité des territoires ». Le ministre a redit lors de la réunion son opposition à la régulation de l’installation des médecins, une solution « qui ne marche pas (parce qu’elle consiste à ) déshabiller Pierre pour habiller Paul ». 

« Nous avons en revanche beaucoup parlé de la notion d’équipe », note Claire Peigné. Les médecins, mais aussi les infirmières, les sage-femmes, expriment de plus en plus le besoin de travailler en équipe, et ce mot est revenu très souvent. Il nous a semblé que c’était une des pistes que le CNR allait explorer. »

« Il reste à attendre la feuille de route qui va sortir de ces concertations, conclut la maire. Nous avons répété la disponibilité des élus locaux sur ces sujets, et le ministre a dit vouloir être ‘’un homme de solutions’’. Il a insisté sur le fait que les solutions venues de territoires seraient écoutées, mises en avant. »

Pour la suite, de telles réunions de concertation vont se multiplier « en métropole et outre-mer de la semaine prochaine jusqu’à la fin de l’année », a indiqué François Braun. Avec une déclinaison très opérationnelle, puisque le ministre a indiqué que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, qui sera examiné dès la semaine prochaine à l’Assemblée nationale, « aura vocation à être enrichi par les propositions du CNR-Santé ». 




Crise énergétique
Coût de l'énergie pour les collectivités : des réponses du gouvernement bien insuffisantes
La question de la facture énergétique qui explose pour les collectivités territoriales a été abordée hier, lors de la séance de questions au gouvernement. La réponse du ministre Christophe Béchu montre que le gouvernement n'entend pas étendre le bouclier tarifaire à toutes les collectivités, comme le demandent les associations d'élus. 

Les mois se suivent et se ressemblent : les associations d’élus, AMF en tête, alertent de façon continue le gouvernement depuis l’automne dernier sur la nécessité d’aider les collectivités à faire face à l’explosion des tarifs de l’énergie. Et le gouvernement répond par des décisions qui sont très loin d’être à la hauteur du problème. 

Vendredi dernier encore (lire Maire info du 3 octobre), toutes les associations du bloc communal ainsi que l’Union nationale des CCAS signaient un courrier commun à la Première ministre pour l’alerter sur le fait que cette fois, « c’est la question du bouclage même des budgets 2023 qui est aujourd’hui posée ». Et ce n’est pas une vue de l’esprit : sur les réseaux sociaux, par exemple, nombreux sont les maires qui expliquent ne pas savoir, à cette heure, comment ils vont réussir à boucler un budget à l’équilibre eu égard à l’augmentation exponentielle de leurs dépenses d’énergie. 

La principale revendication « d’urgence » des associations est la mise en place d’un bouclier tarifaire « plafonnant le prix d’achat de l’électricité des collectivités ». Et, en deuxième lieu, de redonner à toutes les collectivités qui le souhaitent la possibilité de revenir aux tarifs réglementés. 

Sur l’une de ces demandes comme sur l’autre, Christophe Béchu est resté muet. 

Communes « étranglées »

C’est la députée Horizons de la Seine-Maritime Marie-Agnès Poussier-Winsback qui a interpellé le gouvernement dans l’Hémicycle, hier après-midi. Sans contester « la bonne santé financière » des collectivités, la députée a alerté la Première ministre sur « la situation des villes moyennes », qui « supportent des charges de centralité très importantes et exercent pour cette raison sur leurs contribuables une pression fiscale déjà conséquente ». Ces communes, a poursuivi l’ancienne maire de Fécamp, « vont se retrouver face à un mur d’ici la fin de l’année », « étranglées par des charges imprévisibles, étranglées par des factures d’énergie bien supérieures à ce qu’on pouvait prévoir lors des préparations budgétaires, étranglées par l’augmentation importante des coûts de l’alimentation lorsqu’elles disposent de restaurants scolaires, étranglées par une augmentation du point d’indice de leurs agents que nous avons décidée cet été ». 

La députée a par ailleurs pointé la situation guère plus enviable des communes rurales, contraintes « d’ajourner des projets d’investissement », ce qui « inquiète terriblement les entreprises du bâtiment et des travaux publics ». Marie-Agnès Poussier-Winsback, qui appartient à la majorité, a affirmé que de nombreux maires « ne savent pas comment construire leur prochain budget » et a demandé au gouvernement ce qu’il entend faire pour les « aider ». 

Des réponses insuffisantes

Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, a répondu en évoquant les chiffres de la Cour des comptes : « La situation [financière] des collectivités territoriales s’est améliorée au cours du dernier quinquennat ». Il a toutefois reconnu que « la poussée de l’inflation et la progression des prix de l’énergie » changeait la donne. 

Le ministre a listé les mesures prises par le gouvernement depuis un an, notamment le relèvement du niveau de l’Arenh (accès régulé à l’électricité nucléaire historique). Il a par ailleurs évoqué une « suppression de la TICFE » qui aurait permis aux collectivités d’économiser « 400 millions d’euros ». On ne voit pas clairement à quoi fait allusion le ministre, la TICFE n’ayant jamais été « supprimée » mais simplement minorée de façon à plafonner la hausse du prix de l’électricité à 4 %. 

Christophe Béchu a rappelé que le projet de loi de finances rectificatives pour 2022 avait accordé au bloc communal un soutien de 430 millions d’euros pour faire face à l’augmentation des prix (lire Maire info du 1er septembre). Il a annoncé au passage que le décret d’application de ce dispositif serait présenté aujourd’hui, mercredi 5 octobre, devant le Comité des finances locales. 

L’ancien maire d’Angers s’est félicité de ce que le gouvernement ait, « pour la première fois depuis 13 ans », décidé d’augmenter la DGF pour 2023 – mais il faut rappeler que cette majoration sera très loin de couvrir l’inflation, et ne répond pas à la demande de l’AMF d’indexation de la dotation globale de fonctionnement sur la hausse des prix. 

Enfin, le ministre a rappelé que le « bouclier tarifaire » s’applique à « 28 000 communes » – chiffre qui est mis en doute par les associations d’élus, la FNCCR et la Banque postale. 

Et les villes moyennes évoquées par la députée de la Seine-Maritime, précisément, ne bénéficient pas de ces tarifs réglementés. Pour elles, comme pour les grandes villes, Christophe Béchu a indiqué que des actions à plus ou moins long terme étaient envisagées par le gouvernement. En particulier, « obtenir une réforme du marché de l’électricité européen pour éviter d’avoir à payer une rente à cause du couplage gaz et électricité ». Ce qui serait certainement bénéfique, mais mettra, au mieux, des mois. 

Le ministre a enfin évoqué le « filet de sécurité » qui devrait être mis en place dans le cadre de la future loi de finances pour 2023 – dont les conditions, là encore, ne satisfont pas les associations d’élus.

En n’en parlant pas, Christophe Béchu a donc rejeté la demande des associations de voir le bouclier tarifaire étendu à toutes les communes et de bénéficier d’un plafonnement des prix d’achat. 




Sports
Coupe du monde de football : pourquoi des maires refusent de retransmettre les matchs dans des fan-zones
Il n'y aura pas de « fan zones » pour la diffusion des matchs de la Coupe du monde dans un certain nombre de grandes villes, qui, les unes après les autres, annoncent leur décision de boycotter l'événement. Paris vient de rejoindre le mouvement.

Après Marseille, Bordeaux, Nancy, Reims, Strasbourg, Lille ou Rodez, c’est la capitale qui a annoncé, hier, sa décision de ne pas retransmettre publiquement les matchs de la Coupe du monde de football qui se déroulera au Qatar entre le 20 novembre et le 18 décembre. Saint-Étienne a fait de même hier. Ces villes annoncent ne pas vouloir être « complices » de ce qu’elles jugent être « une aberration ».  

Ne pas être « complices »

C’est une décision qui transcende, en partie, les clivages politiques : si la majorité des villes qui ont décidé de ce boycott sont à gauche, le maire de Rodez, centriste, Christian Teyssèdre, ou celui, de droite, de Reims, Arnaud Robinet, sont sur la même position. Pour ce dernier, le Mondial à venir est « un des événements les plus controversés de l’histoire du sport ». 

Plusieurs raisons sont évoquées par les maires pour justifier de leur décision. D’abord la sobriété énergétique : pour certains, les écrans géants dans les rues représentent une dépense énergétique difficilement défendable dans le contexte actuel. C’est ce qu’explique Arnaud Robinet dans son communiqué : « À l’heure où les pouvoirs publics demandent à nos concitoyens comme à nos administrations de réduire leur consommation d’énergies, de telles installations susciteraient une incompréhension légitime. » Une raison également invoquée par l’adjoint à la maire de Paris chargé du Sport, Pierre Rabadan, pour qui organiser de tels événements en plein mois de décembre est en contradiction avec les valeurs de la mairie de Paris. 

Sur le terrain écologique toujours, ce sont les conditions même de l’organisation de la compétition qui rebutent de nombreux maires, qui rappellent qu’à l’heure où la planète entière vit sous la double menace du réchauffement climatique et de la crise énergétique, les stades construits au Qatar, en pleine zone désertique, seront… climatisés. « Un non-sens au regard de l’environnement », pour la maire de Lille, Martine Aubry. « Une catastrophe environnementale » pour le maire de Marseille, Benoît Payan. « Face à l’urgence climatique, l’inconséquence n’est pas une option », a déclaré la maire de Strasbourg, Jeanne Barseghian. Dans un communiqué, la ville de Nancy a également dénoncé « le décalage entre l’usage de stades climatisés et les enjeux de la transition écologique ». À Bordeaux, le maire Pierre Hurmic a déclaré : « Ceux qui ont attribué en 2010 la Coupe du monde au Qatar étaient à des années-lumière de ce qu'était une sobriété énergétique. (…) J’aurais vraiment l'impression, si Bordeaux accueillait ces fans zones, d'être complice de cette manifestation sportive qui représente toutes les aberrations humanitaires, écologiques et sportives. » 

« Catastrophe humaine »

L’écologie n’est en effet pas la seule raison qui pousse les maires à refuser de diffuser l’événement. Les conditions de travail désastreuses qui ont été révélées sur les chantiers de construction des stades ou du nouveau métro construit pour l’occasion – parfois assimilables à du semi-esclavage – constituent une autre raison. Rappelons que si le bilan officiel livré par le Qatar est de trois morts sur les chantiers, une enquête menée par le quotidien britannique The Guardian a évoqué le chiffre de 6500 morts depuis 2010. Et les témoignages ne sont pas rares d’ouvriers obligés de travailler 14 heures par jour sous une chaleur atteignant 45 ° C, sans parler de la privation du passeport par les employeurs pour empêcher les travailleurs de partir – une pratique appelée « Kafala » (mise sous tutelle), il est vrai officiellement abolie par le Qatar en septembre 2020. 

Pour un certain nombre de maires, ces pratiques justifient elles aussi le boycott par leur ville du Mondial. « Impossible pour nous de ne pas entendre les nombreuses alertes des ONG qui dénoncent les abus et l’exploitation des travailleurs immigrés. Strasbourg, siège de la Cour européenne des Droits de l’Homme, ne peut décemment cautionner ces maltraitances », a par exemple déclaré Jeanne Barseghian. 

Il est probable que d’autres grandes villes vont prendre des décisions similaires dans les jours à venir – Lyon, entre autres, est en train de trancher.

Pour autant, les maires n’appellent pas forcément au « boycott » de la compétition. C’est le message qu’a voulu délivrer Arnaud Robinet, le maire de Reims : « Jamais je n’empêcherai les Français de soutenir notre équipe, qui n’est pas responsable de l’organisation de la Coupe du monde. Je dis aux Rémoises et aux Rémois : rendez-vous dans nos restaurants, cafés et bars. Ces moments doivent bénéficier, en premier lieu, à nos commerces de proximité. »

Certains maires de grandes villes se dirigent vers un autre choix, ou, du moins, estiment qu'il est trop tôt pour trancher. « Je vous propose de me reposer la question si la France est en finale ou en demi-finale », a par exemple déclaré le maire de Nice, Christian Estrosi, à Nice-matin. Même position chez David Lisnard, à la mairie de Cannes : « Nous avons la volonté de soutenir l'équipe de France jusqu'au bout. Pour l'heure, on ne se prononce pas sur un boycott. Nous allons voir comment le tournoi évolue mais rien n'est acté. »

Rappelons que les fan zones ont été mises en place, lors des dernières compétitions, essentiellement pour des raisons de sécurité. Elles sont apparues en France lors de la Coupe d'Europe de 2016, un an après les attentats de 2015, pour gérer le risque terroriste, et elles permettent de canaliser des rassemblements qui, en cas de liesse populaire, ont lieu de toute façon. 




Risques
Les acquéreurs et locataires doivent maintenant être informés d'un risque naturel ou technologique dès l'annonce immobilière
Un décret paru ce matin met en musique la nouvelle obligation d'information des locataires et des acheteurs en matière de risques. À compter du 1er janvier prochain, ceux-ci devront être informés d'un éventuel risque naturel ou technologique « à chaque étape de la vente ou de location », et ce « dès l'annonce immobilière ». 

Il s’agit d’un décret de la loi Climat et résilience, et plus précisément de son article 236. L’une des modifications les plus importantes introduites par cet article est l’obligation de faire figurer dans « toute annonce, quel que soit son support de diffusion, relative à la vente » ou la « mise en location » d'un bien immobilier, les risques technologiques ou naturels éventuels. L’état des risques devra désormais être annexé à la promesse de vente et à l’acte authentique de vente, ou au contrat de location. Ces dispositions vont modifier les délais de rétractation, lors d’un acte de vente : « Lorsque l'état des risques n'est pas remis à l'acquéreur au plus tard à la date de signature de la promesse de vente ou du contrat préliminaire, le délai de rétractation (…) ne court qu'à compter du lendemain de la communication de ce document à l'acquéreur ».

Champ d’application

Le décret paru ce matin précise le champ de ces obligations. Elles s’appliqueront, à compter du 1er janvier prochain, à tout bien mis en vente ou en location situé : dans le périmètre d’un PPRN (plan de prévention des risques naturels) ; dans un zone exposée au risque minier ; « dans le périmètre mis à l'étude dans le cadre de l'élaboration d'un plan de prévention des risques technologiques » ; dans une zone de sismicité ; dans une zone « à potentiel radon significatif » ; et enfin « dans une zone exposée au recul du trait de côte », cette exposition devant figurer dans un document d’urbanisme. 

Le décret détaille le contenu de cet état des risques, qui doit indiquer clairement la parcelle concernée, « un extrait de document graphique situant ce bien par rapport au zonage réglementaire et l'extrait du règlement le concernant, ainsi qu'une information indiquant si des travaux sont prescrits par ce règlement pour ce bien et s'ils sont été réalisés ». 

Pour ce qui concerne les zones concernées par le recul du trait de côte, l’état doit indiquer « l'indication de l'horizon temporel d'exposition au recul du trait de côte identifié et le rappel des prescriptions applicables à cette zone ». 

Autre point nouveau et important : l’état des risques devra mentionner « la liste des arrêtés de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle qui ont affecté le bien concerné » et qui ont donné lieu au versement d’une indemnité. 

Cet état des risques devra être remis « lors de la première visite » du bien par l’éventuel acquéreur ou locataire.

Enfin, lorsqu’un bien est soumis à ces obligations, il faudra désormais faire figurer dans l’annonce de vente ou de location la formule : « Les informations sur les risques auxquels ce bien est exposé sont disponibles sur le site Géorisques : www.georisques.gouv.fr ». 

Signalons que l'AMF ou l'Anel (Association nationale des élus du littoral) n'ont pas été consultés par le gouvernement lors de la rédaction de ce décret, et que le Conseil national n'évaluation des normes n'a pas été saisi, alors que les élus sont également concernés, dans le cadre des opérations de préemption des biens concernés par le recul du trait de côte.






Journal Officiel du mercredi 5 octobre 2022

Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires
Décret n° 2022-1289 du 1er octobre 2022 relatif à l'information des acquéreurs et des locataires sur les risques
Première ministre
Décret n° 2022-1286 du 4 octobre 2022 modifiant le décret n° 2022-802 du 12 mai 2022 portant création d'une aide à la trésorerie pour les entreprises de pêche dans le cadre du plan de résilience économique et sociale

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