Édition du mercredi 1 décembre 2021

Cirques
Loi sur la maltraitance animale : les mesures qui concernent les maires
La loi visant à lutter contre la maltraitance animale a été publiée ce matin au Journal officiel. Cette loi aborde la question des cirques, mais pas seulement : elle impose de nouvelles règles aux maires, notamment sur les fourrières. 

Tout a commencé il y a un peu plus d’un an, en septembre 2020 : la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili, annonçait – de façon inattendue – la fin programmée des cirques avec animaux et des delphinariums (lire Maire info du 29 septembre 2020). « Il n’est pas raisonnable de transporter des animaux de communes en communes. C’est la fin d’une période », déclarait alors la ministre, qui n’avait pas donné, sur ce sujet, de calendrier précis.

Recul du gouvernement

Trois mois plus tard, le 14 décembre 2020, des députés des groupes LaREM, MoDem et Agir ensemble déposaient une proposition de loi sur le sujet, destinée à mettre en musique les annonces de la ministre – selon un usage de plus en plus fréquent consistant à faire passer les annonces du gouvernement par des propositions de loi plutôt que des projets de loi. 

Le texte allait au-delà de la seule question des cirques ou spectacles avec animaux, abordant également celle des fourrières communales, de la possession des animaux, de l’éducation des propriétaires, des trafics ou encore de la « zoopornographie ». Ce texte a été mis à l’agenda de l’Assemblée à une vitesse record, le gouvernement et la majorité estimant que ces questions sont « au cœur des préoccupations des Français ». 

Un article du texte examiné en première lecture par l’Assemblée nationale a fait beaucoup réagir : il prévoyait en effet de rendre obligatoire la stérilisation des chats errants par les communes et à la charge de celles-ci. Le nombre de chats errants se comptant par millions et le prix de l’opération se situant entre 70 et 130 euros, cette proposition a fait bondir un certain nombre de députés – et d’élus – qui ont rapidement calculé que la facture risquait d’être intenable pour de nombreuses communes. Au fil de la navette parlementaire, le gouvernement et la majorité ont fini par reculer sur ce sujet. 

Fourrières et chats errants

Dans la loi publiée ce matin, certaines mesures intéressent directement les maires. C’est le cas de l’article 3, qui dispose que les policiers municipaux et les gardes champêtres peuvent désormais « rechercher et constater » les infractions concernant l’identification des chats et des chiens.

Un long article est consacré à la question des fourrières. Cet article a lui aussi évolué lors de la navette parlementaire, puisqu’au départ, les auteurs du texte proposaient que chaque commune ou EPCI crée obligatoirement une fourrière ou un refuge. La navette parlementaire a permis de parvenir à une rédaction plus raisonnable : chaque commune ou EPCI, s’il en a la compétence, doit certes disposer d’une fourrière, mais il peut s’agir d’une fourrière « mutualisée » avec un autre EPCI ou un syndicat mixte fermé. « La commune compétente peut mettre en place une fourrière communale sur son territoire ou disposer du service d'une fourrière établie sur le territoire d'une autre commune, avec l'accord de cette commune. » 

Concernant la stérilisation des chats errants, elle est évoquée à l’article 11 : plus aucune obligation n’est évoquée pour les maires. Il reste à présent une obligation pour le gouvernement de remettre au Parlement, dans les six prochains mois, un rapport « dressant un diagnostic chiffré sur la question des chats errants » et formulant « des recommandations pérennes » pour répondre à la problématique de la stérilisation et « des modalités de financement par les collectivités territoriales et par l’État », par exemple via « un fonds de concours ou un fonds de dotation ». 

À titre expérimental, pendant cinq ans, « les collectivités territoriales et les EPCI à fiscalité propre volontaires peuvent articuler leurs actions dans le cadre de conventions de gestion des populations de chats errants ». Cette convention sera signée avec les préfets, « afin d'améliorer la gestion et la prise en charge des populations de chats errants ou en divagation et d'articuler les compétences et moyens de chaque signataire dans cet objectif ».

La loi impose enfin « une signalisation apparente » dans les mairies pour présenter « l’intérêt de la stérilisation des animaux domestiques ».

Calendrier sur les cirques

Sur la question des animaux de cirque, la loi est en grande partie revenue aux dispositions du texte initial. La commission mixte paritaire a certes retenu la proposition du Sénat de créer une « commission nationale consultative pour la faune sauvage captive », incluant des représentants des associations d’élus, mais en modifiant le dispositif sur un point surprenant : alors que le Sénat proposait que les représentants du monde circassien – les premiers concernés par ces mesures – soient membres de droit de cette commission, la version finale ne prévoit que de les « inviter », « en fonction de l’ordre du jour ». 

Pour le reste, le texte acte l’interdiction « d’acquérir, de commercialiser et de faire se reproduire en vue de les présenter au public dans des établissements itinérants des animaux appartenant aux espèces non domestiques ». Cette interdiction entrera en vigueur deux ans après la promulgation de la loi, soit le 1er décembre 2023. Quant à l’interdiction de détenir, transporter et présenter au public dans les cirques itinérants ces animaux, elle entrera en vigueur dans sept ans, soit le 1er décembre 2028. Il est toutefois prévu des possibilités de dérogations, dont les modalités seront fixées par décret, au cas où il n’existerait pas de solutions d’accueil favorables au bien-être de ces animaux. 

Les autorisations d’ouverture des cirques itinérants ne seront plus délivrées si ceux-ci envisagent de présenter au public des animaux non domestiques. Tout établissement itinérant « détenant un animal en vue de le présenter au public » devra en outre enregistrer celui-ci dans un fichier national dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi.  

La loi acte, enfin, l’interdiction de détention de cétacés en captivité, sauf exceptions, dans un délai de cinq ans (1er décembre 2026) . Elle interdit la détention « des ours et des loups » en vue de les présenter au public, ainsi que l’élevage des visons et d’autres animaux non domestiques en vue de produire de la fourrure.




Outre-mer
Guadeloupe : les maires demandent l'organisation d'un « Grenelle »
La situation semble bloquée en Guadeloupe malgré la visite du ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, que les élus locaux ont finalement refusé de rencontrer. Les raisons de ce refus, et un point sur les positions - unanimes - des élus locaux guadeloupéens. 

De nombreux barrages sont maintenus, ces dernières heures, en Guadeloupe, et les violences n’ont pas cessé – la mairie de Basse-Terre a même connu un début d’incendie, hier. Le ministre Sébastien Lecornu a quitté hier la Guadeloupe pour la Martinique, où il a rencontré des élus et des représentants de l’intersyndicale. En Guadeloupe, en revanche, les élus ont refusé de le rencontrer. Pourquoi ? Maire info a posé la question à Jocelyn Sapotille, maire de Lamentin et président de l’association des maires de Guadeloupe. 

Préalables « irrecevables »

Les élus avaient pourtant bien demandé le déplacement dans l’île d’une délégation interministérielle. Mais, outre le fait que le ministre soit venu seul, plusieurs de ses prises de position – et attitudes – ont poussé les élus à refuser la rencontre : « Nous avons estimé qu’une telle rencontre ne permettrait pas de calmer la situation, et, parce que nous voulons aussi garder le lien avec la population, nous avons voulu donner un signal fort », raconte Jocelyn Sapotille. Plusieurs préalables mis en avant par le ministre ont en effet été jugés irrecevables : d’abord son exigence de voir « les syndicats condamner les violences comme préalable à toute ouverture du dialogue social ». Ensuite ses déclarations renvoyant la responsabilité de la situation (par exemple sur la question de l’eau) « aux seuls élus ». À son arrivée, Sébastien Lecornu avait en effet déclaré : « Ce qui est compliqué, c'est de se faire engueuler pour des choses dont l'État n'est pas responsable. (…) Il faut que chacun soit à sa place dans ce territoire ». 

Le choix du ministre de rencontrer, en premier, les gendarmes et les policiers a également été mal vécu : « Sur la forme, son attitude a été trop martiale, elle ne marquait pas une volonté d’apaisement mais plutôt un signe de défiance, regrette le maire de Lamentin. Nous sommes des républicains, nous estimons que l’ordre républicain doit être rétabli, mais il faut que des négociations s’ouvrent immédiatement. Il faut le maintien de l’ordre, mais il ne faut pas que le maintien de l’ordre : il faut aussi le dialogue social. » 

La question de l’eau

Jocelyn Sapotille estime que malgré ce rendez-vous manqué, « il n’y a pas de rupture avec l’État. » S’il ne cherche pas à « se défausser » de la responsabilité des élus sur un certain nombre de sujets, dont, en premier lieu, l’eau, il n’accepte pas que le ministre ait déclaré que l’État n’était « pas responsable ». « Chacun doit prendre sa part, et l’État doit prendre la sienne. L’état du réseau d’eau en Guadeloupe doit beaucoup aux manquements de l’État d’avant la décentralisation. Il a aussi joué un rôle – tout comme les syndicats – dans le départ de la Générale des eaux [devenue Veolia - ndlr], qui est partie sans mettre à jour les compteurs financiers. » Dans certaines communes, dont la sienne, les maires se sont battus pour que la Générale des eaux ne parte pas sans payer (Lamentin a reçu une indemnité de « 4 millions d’euros »). 

La situation du réseau d’eau guadeloupéen est catastrophique, et de nombreux habitants n’ont pas l’eau courante en permanence – ce qui est le comble dans une île soumise au climat tropical et qui ne manque pas de précipitations. Selon les estimations de l’Inrae, le rendement du réseau guadeloupéen est de 40 % – ce qui signifie que sur 1000 litres d’eau transportés, 600 partent dans la nature du fait des fuites et n’arrivent pas aux robinets. Le syndicat mixte regroupant toutes les intercommunalités de Guadeloupe et chargé de la gestion de l’eau est « mort-né », juge le maire de Lamentin, et « ne bénéficie même pas du fonds de roulement permettant de gérer le fonctionnement ». La raison en est simple : « il y a tellement de mécontentement » que de nombreux usagers ne payent pas leurs factures, faute de service, et le taux de recouvrement des factures est d’à peine « 60 % », quand il faudrait qu’il soit de 80 ou 90 % pour que le service puisse fonctionner normalement.

Face à cette situation, « l’État doit se mettre autour de la table, même si ce n’est plus sa compétence. Les investissements sur les réseaux et les usines sont tels qu’ils ne pourront se faire sans cofinancements. »

Un « Grenelle », d’urgence

Les élus – Jocelyn Sapotille souligne qu’ils sont « unanimes », qu’il s’agisse de maires, d’élus départementaux ou régionaux – demandent donc l’ouverture « immédiate » de « négociations sérieuses ». « Ce que nous attendons, ce n’est pas le rapport de force, c’est de travailler. Il faut mettre en place une formation efficace, avec cinq ou six ateliers sur les plus gros sujets. Et il faut que toutes les parties prenantes soient là : l’État et les élus, bien sûr, les syndicats, mais aussi le patronat. Les manifestants parlent du coût de la vie et du pouvoir d’achat, cela signifie qu’il faut discuter des salaires, comment le faire si les représentants du patronat ne sont pas autour de la table ? ». Ce que réclament les élus, c’est un véritable « Grenelle », c’est-à-dire une négociation d’ampleur où toutes les parties sont représentées. 

Quant à la question de « l’autonomie », évoquée par le ministre avant même son arrivée sur l’île, Jocelyn Sapotille tient à mettre les choses au point : « Moi, je ne me défausse pas. Cette question de l’autonomie a bien été posée par les maires. Sauf que ce mot ne veut pas dire la même chose chez les uns et les autres : pour beaucoup, ‘autonomie’’, cela veut dire ‘’indépendance’’. Mais nous, les maires, nous ne parlons pas de cela : nous parlons décentralisation renforcée, nous parlons différenciation. Finalement, quand nous évoquons l’autonomie, nous le faisons de la même manière que n’importe quel élu local sur le territoire, y compris sur le territoire hexagonal ! ». Mais quoi qu’il en soit, le maire de Lamentin estime que le « timing » n’est pas le bon, que « ce ne sont pas des questions que l’on discute en pleine crise sociale ».

Hier, les élus de Guadeloupe ont envoyé un courrier au gouvernement pour demander l’ouverture de négociations. Ils ont également contacté les organisations syndicales afin de discuter de leurs revendications et « du format des négociations ». 

Hier soir, la secrétaire générale du syndicat UGTG, Maïté Hubert M’Toumo, a déclaré sur la chaîne Guadeloupe la 1ère que les syndicats étaient d’accord avec les élus sur le principe de l’ouverture rapide de discussions. Une date devrait être proposée dès aujourd’hui, les syndicats souhaitant déjà « écouter ce que les élus ont à (leur) dire ». La syndicaliste a néanmoins déclaré, elle aussi, que « les points les plus urgents » dépendaient de l’État et non des élus. « Nous ne souhaitons pas segmenter les négociations, élus d’un côté, État de l’autre : l’État est pleinement concerné par toutes nos revendications. » 




Numérique
La CNIL publie un guide du délégué à la protection des données
La Commission nationale informatique et libertés (CNIL) fait un zoom sur le métier de délégué à la protection des données (DPD) à travers un guide. Son objectif : accompagner d'un côté les organismes, dont les collectivités, dans la mise en place de la fonction de DPD, et de l'autre, accompagner ces délégués dans l'exercice de leur profession.

Depuis le 25 mai 2018, le Règlement général sur la protection des données (RGPD) est entré en vigueur. A suivi, le 20 juin 2018, la publication au JO de la loi relative à la protection des données personnelles qui adapte le RGPD à la loi française.

Une des grandes nouveautés du RGPD par rapport à la loi « Informatique et Libertés » : la responsabilisation des acteurs qui traitent les données à caractère personnel. Ces derniers doivent en effet prendre toutes les mesures en matière de protection des données personnelles et démontrer leur conformité.

En conséquence, le RGPD impose « à toute collectivité territoriale, quelle que soit sa taille, de désigner un délégué à la protection des données qui sera le pilote de sa mise en conformité », comme l’explique l’Agence publique de gestion locale sur son site internet. 

Le métier de délégué à la protection des données (DPD ou DPO, selon l’acronyme anglais utilisé par la CNIL) est devenu essentiel et incontournable au sein des collectivités. Actuellement, environ 80 000 organismes ont déjà désigné un DPD.

Un guide de bonnes pratiques 

C’est dans ce cadre que la CNIL publie ce guide, après trois ans d’accompagnement sur le terrain de ces professionnels. Son objectif : fournir les clés pour tirer au mieux parti de la présence d’un délégué et mieux connaître les missions professionnelles de ce dernier. Un contenu tout aussi utile pour les DPD que pour les collectivités. 

Avec l’aide de nombreuses associations professionnelles, la CNIL a réparti les principales connaissances utiles sur le DPD en quatre parties : rôle, désignation, exercice de la fonction et accompagnement par la Cnil. 

Contrôler l’effectivité des règles, savoir renseigner la collectivité sur les sujets de RGPD, assurer la documentation des traitements de données… Le guide rappelle d’abord la nature du travail du DPO. Sous la forme d’une Foire aux questions (FAQ), la CNIL recense aussi les interrogations les plus fréquentes autour de ce sujet encore nouveau pour beaucoup. 

Trouver des réponses à ses interrogations 

On peut lire, par exemple, la question suivante : « Un élu politique peut-il être DPO ? ». Réponse de la CNIL dans son guide : « Un élu ne peut pas exercer les fonctions de délégué pour la collectivité dont il est élu en raison d’un conflit d’intérêts. En effet, ce dernier participe à la prise des décisions sur les traitements de données mis en œuvre par la collectivité. » 

La CNIL confirme en revanche qu’un secrétaire de mairie dans une petite collectivité peut être DPD mais le maire « doit bien s’assurer que le DPO pressenti ne prend pas part aux décisions concernant les fichiers exploités par la collectivité ».

Des solutions face au problème de recrutement 

En juillet 2019, nos confrères de la Gazette des communes confirmaient que 11 818 communes ont nommé un DPD, 250 communautés de communes sur 1 000, 53 communautés d’agglomération sur 222, 22 métropoles sur 22, 89 départements sur 101 et 12 régions sur 13.

Ce retard dans le recrutement est naturellement surtout prégnant dans les plus petites communes, qui n’ont pas les moyens de recruter un DPD. Le guide présente d’ailleurs des solutions sur ce sujet, comme l’externalisation ou la mutualisation.

Un répertoire à outils 

La CNIL accompagne les DPD en mettant à leur disposition différents outils qui sont à retrouver dans le guide. Ateliers, webinaires, formations en ligne (MOOC), ressources numériques… Le guide oriente par exemple les DPD vers un modèle de registre réutilisable, en format ouvert, comprenant une fiche tutorielle, une fiche de liste de traitements, un modèle de fiche à remplir et une fiche d’exemple.

Cette nouvelle ressource va dans le sens d’une facilitation du travail des DPD et invite plus largement à la formation, aux échanges et surtout à la sensibilisation des organismes –dont les collectivités- aux enjeux du numérique. 




Démographie
La population française devrait baisser à partir de 2044, selon l'Insee
À rebours de ce que prévoyait l'Insee en 2016, la population française pourrait finir par décliner et atteindre 68 millions d'habitants en 2070, selon les dernières projections. En cause, un solde migratoire qui ne suffirait plus, à compter de 2044, à compenser l'excédent de décès par rapport aux naissances.

Huit millions d’habitants en moins en 2070 qu’initialement prévu. La correction est considérable. Dans une étude parue hier, l’Insee revoit sa copie et remanie nettement ses précédentes projections, réalisées en 2016. Si l’Institut pressentait, il y a cinq ans, que la population française culminerait à 76,5 millions d’habitants en 2070, il table désormais sur un déclin à compter de 2044 qui conduirait à une population hexagonale d’un peu plus de 68 millions d’habitants.

En cause, les hypothèses de fécondité et de mortalité sur lesquelles se basait l’Institut en 2016 ont été « fortement révisées » et réduites. 

Plus de décès que de naissances, dès 2036 

Résultat, dans 50 ans, la population française serait à peine plus nombreuse qu’aujourd’hui avec seulement 700 000 habitants supplémentaires, selon les nouvelles projections de l’Institut, dont les tendances ont été analysées « hors effet de la pandémie depuis 2020 ».

Si les tendances démographiques récentes se prolongeaient, la population de la France augmenterait ainsi jusqu’en 2044 pour atteindre 69,3 millions d’habitants, avant de diminuer et s’établir à 68,1 millions d’habitants en 2070 (contre 67,4 millions cette année).

Dans le détail, les auteurs de l’étude prévoient que jusqu’en 2035, la population continuerait d’augmenter de 116 000 personnes en moyenne par an, pour atteindre les 69 millions d’habitants, « du fait d’un solde naturel positif qui s’ajouterait à l’excédent migratoire ». Une croissance qui correspondrait à « un rythme de + 0,2 % par an, nettement inférieur à celui connu depuis 50 ans (+ 0,5 % en moyenne depuis 1970) ». 

À compter de 2035, une première évolution apparaîtrait : les décès seraient plus nombreux que les naissances et le solde naturel deviendrait négatif. Cependant, jusqu’en 2044, le solde migratoire permettrait de compenser ce déficit naturel et la population continuerait d’augmenter légèrement pour plafonner donc à 69,3 millions d’habitants. 

« À partir de 2044, cela ne serait plus le cas et la population diminuerait à un rythme moyen de 45 000 personnes par an, soit - 0,1 % par an, pour atteindre 68,1 millions d’habitants en 2070 », envisagent désormais les auteurs de l’étude dans leur scénario dit « central » qui se fonde sur une fécondité stabilisée à 1,8 enfant par femme et un solde migratoire de 70 000 habitants en plus par an.

Moins de 65 millions d’habitants en 2121 ?

En extrapolant ces projections jusqu’en 2121 (dans une étude annexe), la population française pourrait même plonger en deçà des 65 millions d’habitants, soit son niveau de 2011. L’Institut met toutefois en garde : « L’incertitude est déjà très forte d’ici 2070 […], l’évolution est encore plus incertaine entre 2070 et 2121 ».

À noter que des scénarios dits « alternatifs » – fondés sur des hypothèses « haute » et « basse » – sont également évoqués. Ainsi, « si toutes les évolutions défavorables à la croissance de la population (fécondité, espérance de vie et solde migratoire plus faibles) se conjuguaient (scénario de « population basse »), la population diminuerait dès 2027 et serait de 58 millions d’habitants en 2070, soit son niveau de 1990. Au contraire, si toutes les évolutions favorables se combinaient (scénario de « population haute »), la population augmenterait à un rythme soutenu sur toute la période et atteindrait 79,1 millions en 2070 », détaille l’Insee.

Une population vieillissante

Reste qu’il faut s’attendre à une structure par âge très différente à l’horizon 2070, avec une inversion de la pyramide des âges. On compterait ainsi 5,7 millions de seniors de plus de 75 ans de plus qu'aujourd'hui, et à l'inverse 5 millions de moins de 60 ans de moins, selon le scénario central.

La France devrait donc vieillir, avec une pyramide plus équilibrée entre hommes et femmes (50,8 % de femmes, contre 51,7 % en 2021), en raison d’un écart d’espérance de vie qui se réduirait.

À un horizon plus proche, en 2040, les projections de l’Insee dessinent un scénario similaire mais cette fois-ci « inéluctable » : celui d'une « poursuite du vieillissement de la population […] quasi certaine » et dont « l’ampleur est connue ».

En effet, celle-ci « dépend surtout du passé, c'est-à-dire de l'augmentation de l'espérance de vie qui s'est déjà produite, ainsi que de l'avancée en âge des générations déjà nées, notamment celles du baby-boom », soulignent les auteurs de l'étude. 

Ainsi, quelles que soient les hypothèses retenues, le « rapport de dépendance démographique » (le ratio entre les plus de 65 ans, majoritairement retraités, et les 20-64 ans, majoritairement actifs), va être nettement bouleversé d'ici à 2040. Dans le scénario central, l'Hexagone compterait 51 personnes de 65 ans ou plus (entre 48 et 53, selon les autres scénarios) pour 100 individus de 20 à 64 ans, contre 37 actuellement.

Entre 2040 et 2070, l’évolution du rapport de dépendance démographique est « beaucoup plus incertaine » : « Il pourrait croître un peu selon le scénario central (rapport de 57 en 2070), à un rythme plus soutenu selon le scénario de "population âgée" (70) ou diminuer légèrement selon le scénario de "population jeune (46)" », envisagent les auteurs de l’étude.


 




Transition écologique
« Transition(s) 2050 » : ce que l'Ademe imagine pour atteindre la neutralité carbone
Une nouvelle étude de l'Agence de la transition écologique (Ademe) - « Transition(s) 2050. Choisir maintenant. Agir pour le climat » a été publiée ce mardi 30 novembre 2021. Cette dernière tente d'apporter des éléments de réponse en proposant 4 scénarios pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Synthèse.

Des pistes pour un futur meilleur. « 4 scénarios ont été imaginés par l’Ademe, déclare Arnaud Leroy, président-directeur général de l’agence lors de la présentation de l’étude. Ces perspectives qui sont des pistes de réflexion doivent permettre à la France d'atteindre la neutralité carbone d'ici trente ans. »

Ce travail est le résultat de plus de deux ans de recherches mobilisant plus d’une centaine d’experts de l’Ademe ainsi que des partenaires extérieurs de différents milieux professionnels et académiques, mais également un comité scientifique, constitué de membres du conseil scientifique de l’Agence et complété de personnalités qualifiées.

« Génération frugale », « Coopérations territoriales », « Technologies vertes », « Pari réparateur » :  des chemins prônant d’un côté une sobriété totale et de l’autre une technologie à la pointe pour changer les modes de vie ou encore réparer le mal fait à l’environnement… Voilà ce que propose cette étude perspective inédite en la matière. 

« Ce sont des chemins pour atteindre la neutralité carbone en 2050, qui, au-delà du slogan, doit être mise en œuvre », continue le président-directeur général. Il rappelle au passage que l’ambition de la Stratégie Nationale Bas-Carbone qui définit la trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de serre jusqu'à la neutralité carbone à l'horizon 2050, va être révisée prochainement. « Cette étude pourra être utilisée dans ce cadre », ajoute-t-il. 

Deux scénarios de gouvernance locale 

« Moins ça suffit et c’est bien ! » Voilà le slogan du premier scénario, où la sobriété est reine. Intitulé Génération frugale (S1), il décrit une société en recherche de sens, qui agit sur ses modes de vie et consommations pour atteindre la neutralité carbone. Tout est repensé : la consommation de viande diminue, l’alimentation est plus locale, les Français mangent bio à 70%... Et surtout l’habitat est tourné vers la proximité, c’est-à-dire qu’il y a une véritable optimisation du bâti existant avec l’utilisation des logements vacants et résidences secondaires.

Dans cette hypothèse, les collectivités territoriales ont une place de choix : « Ce renversement des valeurs s’est construit sur la durée, sous l’impulsion des collectivités territoriales qui, notamment pour des raisons économiques et d’inclusion sociale, ont misé sur la sobriété et sur les solutions d’adaptation fondées sur la nature », peut-on lire dans la version intégrale du rapport. Bien évidemment, dans ce cas de figure, les collectivités territoriales seraient « légitimées et dotées de nouveaux moyens ».

Elles pourraient, par exemple, mettre en place « des systèmes de covoiturage financés (…) de manière un peu dispersée sur le territoire, soutenus tantôt par les régions, les intercommunalités ou les métropoles. »

Par rapport aux chiffres de 2015, la consommation finale d'énergie passe de 1 772 TWh à 790 TWh, et la demande en électricité s’établit à 400 TWh.

Deuxième scénario où le local est au centre des enjeux : Coopérations territoriales (S2). Ici, « on est dans une gouvernance partagée où les institutions publiques, les ONG, la société civile et le secteur privé réussissent à se concerter pour trouver des solutions, explique Valérie Quiniou, directrice exécutive Prospective & Recherche. La consommation devient plus mesurée, plus responsable et le partage se généralise. » Consommation de viande réduite par deux, circuits de proximité accompagnés par les politiques publiques pour une alimentation locale… L’Ademe met aussi en avant la mutualisation d’équipements comme l’électroménager pour les particuliers.

Les collectivités, dans ce cadre, redéveloppent par exemple des cuisines centrales en régie, un système d’approvisionnement qui se fait de plus en plus rare depuis une quinzaine d’années. Dans ce scénario, la consommation finale d’énergie est là encore divisée par deux par rapport à 2015, passant de 1 772 TWh à 829 TWh, pour une demande en électricité autour de 520 TWh.

Ainsi, S1 et S2 misent sur une grande sobriété pour les individus comme pour les entreprises et les collectivités. Dans ces deux cas, c’est avec « efficacité et sobriété de manière concertée que l’on atteint de manière soutenue la neutralité carbone. »

« Technologies vertes » et « Pari réparateur »

Plutôt que de faire appel à des changements directement visibles sur les territoires ou dans les vies des habitants, le troisième scénario s’appuie sur les technologies. « Technologies vertes » inclut une alimentation modifiée mais surtout des filières agroalimentaires qui sont de plus en plus performantes. Usage de la biomasse très important, usage de la forêt pour les énergies, augmentation des cultures énergétiques pour la méthanisation… Pour l’habitat, « on décide de déconstruire et construire à la façon haussmannienne pour disposer d’une rénovation énergétique forte ». La consommation finale d’énergie est réduite par rapport à 2015, passant de 1 772 TWh à 1,062 TWh.

Ultime scénario : nos modes de vie se poursuivent et ne changent pas « mais le foisonnement de biens fait que l’on doit consommer énormément d’énergie et les impacts sont plus forts, raconte Valérie Quiniou. On commence à avoir des viandes de synthèse ou des insectes, la biomasse est fortement exploitée. On mise aussi sur l’innovation technique dans l’habitat où on industrialise la rénovation. L’usage de la domotique réduit l’impact environnemental. On circule davantage et le numérique nous permet d’optimiser cela avec, par exemple, les voitures connectées. » La consommation finale d’énergie est relativement élevée, à 1 287 TWh ainsi que la demande en électricité (800 TWh) c’est-à-dire environ -23 % par rapport à 2015. 

Territorialisation et dialogue

Quels enseignements peut-on tirer de cette étude notamment pour les territoires et collectivités ? Bien que ces prospectives puissent sembler compliquées à suivre la lettre et sans concession, ces différents chemins -qui sont tout de même des récits cohérents et scientifiques- rappellent que la neutralité carbone concerne tous les secteurs : bâtiment, mobilité, transport de marchandises, alimentation, agriculture, industrie, services énergétiques, etc. 

Il est souligné aussi dans le rapport que l’étude est avant tout « utile pour nourrir les réflexions et débats collectifs sur le « projet de société » ». Par exemple, la question de « la régionalisation des enjeux de transition, et plus particulièrement de la forte reterritorialisation, doit être approfondie pour permettre un passage à l’action cohérent avec les contraintes inhérentes à chaque territoire. » 

En conclusion de ces scénarios détaillés, l’Ademe insiste sur le fait que, sur le sujet de la neutralité carbone, il existe un « véritable enjeu de gouvernance et un besoin de favoriser le dialogue et l’articulation des décisions de tous les acteurs, publics et privés, pour parvenir à réaliser une transition réussie. » 







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