Édition du lundi 22 novembre 2021

Crise sanitaire
Cinquième vague « fulgurante » : ce qu'il faut retenir
L'épidémie de covid-19 repart en force en France, dans la foulée de ce qu'il se passe dans d'autres pays d'Europe. Sans toutefois - grâce à la vaccination - que le système de santé soit en voie de saturation, pour l'instant du moins.

Le rouge foncé fait son retour sur la carte de France mise à jour quotidiennement par le site Covid tracker : ce qui signifie que certains départements ont déjà dépassé le taux d’incidence de 250 cas pour 100 000 habitants. Il n’y a désormais plus un seul département, à l’exception de Mayotte, qui soit sous les 150 cas pour 100 000 habitants, et les taux s’envolent dans plusieurs départements : 358 en Ardèche, 326 en Haute-Corse, entre 260 et 265 dans les Landes, les Bouches-du-Rhône et le Bas-Rhin.

Doublement des cas

La cinquième vague de l’épidémie est bien d’une rapidité « fulgurante », comme l’a déclaré hier le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal : le nombre de cas a presque doublé en une semaine, avec 91 % d’augmentation en sept jours : la moyenne de cas quotidiens a été cette semaine de 16 442. 

On se représente la rapidité de cette évolution en se rappelant qu’il y a à peine 15 jours, chacun se réjouissait des mesures annoncées par le Premier ministre concernant les stations de ski : pas de pass sanitaire exigé aux remontées mécaniques, sauf si le taux d’incidence devait dépasser les 200 cas par jour à l’échelle nationale. Il était alors de 62 (le 8 novembre), et les gestionnaires de stations envisageaient l’avenir avec optimisme. Quatorze jours plus tard, le taux d’incidence national est de 171 cas par jour, et vu la vitesse de propagation de l’épidémie, la barre des 200 devrait être franchie d’ici la fin de la semaine. Selon le statisticien Guillaume Rozier, qui anime le site Covid tracker, la tendance est à un doublement des cas tous les dix jours, ce qui devrait amener à un nombre de cas supérieur à 30 000 par jour le 1er décembre. 

La tranche d’âge la plus touchée par cette nouvelle vague est celle des 30-39 ans, avec un taux d’incidence qui a déjà dépassé les 200 dans cette tranche. 

Moins de tests

Le nombre de personnes hospitalisées, en réanimation et décédées du covid-19 augmente également, mais reste relativement bas par rapport à ce qui a été connu lors des précédentes vagues : + 30 % d’admissions en soins critiques et + 35 % de décès la semaine dernière. Il y a eu en moyenne 46 décès à l’hôpital par jour la semaine dernière, ce qu’il faut comparer aux plus de 500 morts quotidiens au pic de la première vague et 400 lors de la deuxième. Même constat pour les admissions en soins critiques, qui avaient culminé à 7 000 lors de la première vague et à 6 000 lors de la deuxième. Depuis, la vaccination massive est passée par là, et le nombre d’admissions en réanimation n’a pas dépassé les 2 500 lors de la vague de cet été, et se maintient pour l’instant à 1 300, soit un taux d’occupation des lits de réanimation de 26 %.

Les chiffres montrent cependant que les chiffres actuels d’hospitalisation sont plus élevés que lors de précédentes vagues à nombre de cas positifs égal. Il ne faut pas en conclure pour autant que l’immunité due au vaccin diminue ou que des formes plus graves circulent : l’explication vient du fait que le nombre de tests a beaucoup diminué, en particulier du fait de la fin de la gratuité des tests : il y avait presque 800 000 tests quotidiens effectués début septembre, il n’y en a plus que 320 000 aujourd’hui. Mécaniquement, moins de tests signifie moins de cas positifs identifiés… mais pas moins de formes graves. Le taux d’incidence réel est donc probablement bien plus élevé que ce que montrent les chiffres, établis à partir des seuls tests. 

Renforcement des contrôles

Face à cette situation, le gouvernement n’envisage pas, pour le moment, de durcissement des mesures sanitaires – alors que certains pays européens, comme l’Autriche, viennent de décider d’un nouveau confinement. Le gouvernement français n’a décidé pour l’instant que d’un renforcement des contrôles du pass sanitaire, après constatation d’un « relâchement dans certains établissements recevant du public ». Les contrôles ont augmenté la semaine dernière de plus de 100 %, a annoncé Gabriel Attal, avec « près de 70 000 contrôles de personnes et plus de 4 300 contrôles d'établissements » en quatre jours. 

Par ailleurs, le gouvernement incite de plus en plus fortement les personnes concernées à recevoir une dose de rappel. Le nombre d’injections d’une dose de rappel a augmenté de 46 % la semaine dernière. À partir du 15 décembre, rappelons-le, le pass sanitaire des personnes de plus de 65 ans n’ayant pas reçu de rappel sera désactivé. 

La crainte du « coup de grâce » à l’hôpital

L’hôpital risque-t-il à nouveau d’être débordé ? La question se pose clairement. Si aujourd’hui ce risque semble assez lointain, il pourrait se rapprocher plus rapidement qu’on ne le croit. C’est ce qu’affirme, notamment, l’infectiologue Gilles Pialloux, chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital Tenon à Paris, qui a déclaré hier que « dans la situation actuelle de l'hôpital public, avec les lits fermés, le problème du personnel, et la circulation des virus hivernaux, on n'aura pas besoin d'une énorme vague pour être submergé ». 

Une note très alarmiste publiée en fin de semaine par la Direction générale de la santé (DGS) va dans le même sens. Intitulé « recommandations relatives a l’anticipation et l’adaptation de la réponse de l’offre de soins aux situations de tensions », ce « DGS urgent » diffusé le 17 novembre appelle à mettre en place des actions immédiates et « d’engager tous les leviers » pour maintenir ouverts les services. En clair, la DGS craint que les services d’urgence soient rapidement débordés si la vague continue de monter, s’ajoutant à une recrudescence de la grippe et de certains virus respiratoires. La DGS préconise donc des mesures incitatives (majoration de 50 % des heures supplémentaires jusqu’en janvier prochain) et plus coercitives, avec des assignations et des réquisitions. Il est également proposé de mobiliser les personnels retraités. 

Les annonces de réquisitions à venir ont fait bondir les organisations représentatives des personnels de santé, dans un contexte déjà tendu par l’obligation vaccinale, l’épuisement et le manque de personnel, déjà endémique avant la crise, mais qui va en s’aggravant : un nombre de plus en plus important de personnels de santé quittent l’hôpital, avec pour conséquence des fermetures de lits : la Fédération hospitalière de France a indiqué, début novembre, que 6 % des lits sont fermés à l’hôpital public, dans la plupart des cas par manque d’infirmières. Le patron de l’Assistance publique - Hôpitaux de Paris, Martin Hirsch, a confirmé la semaine dernière ce constat, en parlant de « 1 200 postes d’infirmières non pourvus » à l’AP-HP.

Pour la CGT Santé, le docteur Christian Prudhomme a déclaré ce matin : « La réquisition, un certain nombre de personnels risquent de s'y soustraire en disparaissant de la circulation. Ça fait deux ans qu'on a été obligé de reporter, d'annuler nos vacances. Personnellement, j'ai un an sur mon compte épargne temps. Je vais les prendre quand ? » Dans un communiqué rageur, un collectif de plusieurs organisations, dont Actions praticiens hôpital, Jeunes médecins et l’Intersyndicale nationale des internes, ne dit pas autre chose, parlant, à propos de cette note de la DGS, d’un « coup de grâce » : « L’hôpital public n’a plus rien à se mettre sur le dos et mendie pour trouver du personnel. (…) Les urgences craquent et ferment. » Le ministère va chercher des médecins jeunes et retraités « pour les mettre comme des pions dans les urgences, en favorisant des horaires de travail qui conduisent inexorablement à l’épuisement professionnel et personnel. (…) La politique de santé menée depuis 30 ans n’a pas réussi à sauver l’hôpital public. Le ministère y apporte maintenant le coup de grâce. »




Outre-mer
Que se passe-t-il en Guadeloupe ?
Depuis plus d'une semaine, l'archipel connaît un mouvement social de grande ampleur contre le pass sanitaire et l'obligation vaccinale des soignants. Une révolte qui prend racine dans un contexte économique et social déjà complexe en Guadeloupe.

Lundi 15 novembre, un collectif d'organisations syndicales et citoyennes opposé au pass sanitaire et à la vaccination obligatoire des personnels soignants, a lancé un appel pour une grève générale illimitée.

Depuis, des manifestations ont lieu regroupant des soignants, des enseignants, des professionnels de la restauration, des syndicats, des jeunes... Mais la situation a rapidement dégénéré avec des débordements parfois violents et des émeutes. Des magasins alimentaires ou encore des pharmacies ont été pillées. Des barrages routiers ont aussi étaient érigés devant des établissements scolaires ou devant le CHU de Guadeloupe. Le préfet a d’ailleurs annoncé vendredi dernier l’instauration d’un couvre-feu immédiat entre 18 h et 5 h, jusqu’à mardi, « compte tenu des mouvements sociaux en cours dans le département et des actes de vandalisme ».

Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, a annoncé ce week-end l’envoi d’une cinquantaine de membres des forces d’élite du GIGN et du Raid. Gabriel Attal, porte-parole du gouvernement a dénoncé dimanche matin ces violences commises par « une petite minorité ». « Cette petite minorité qui bloquait par les mots, par les paroles (…), aujourd’hui elle s’est radicalisée et elle essaie de les bloquer, de les intimider par la violence », a-t-il déclaré, évoquant des « soignants menacés », « des pharmacies empêchées d’ouvrir » et « les ambulances bloquées sur les barrages »

Un besoin de dialogue 

« Ce blocage n'est pas seulement dû à cette obligation vaccinale mais aussi à tous les problèmes que nous rencontrons depuis tantôt », explique Ary Chalus, président de la région Guadeloupe, interrogé au micro de France info. « Vous savez qu'avec cette situation sanitaire la Guadeloupe a beaucoup perdu, que ce soit en matière de taxe sur les carburants, sur les transports, les collectivités, et notamment pour la région c'est près de 30 millions que nous avons perdu ». Tout en condamnant la forme que prend actuellement la protestation dans l’archipel, le président souhaite que « l'État puisse entendre les doléances des Guadeloupéens de manière à ce qu'on puisse travailler ensemble, et surtout simplifier les procédures ».

Pour rappel, le ministre de la santé, Olivier Véran, avait annoncé en septembre l’obligation vaccinale pour les personnels de santé sous peine d’être suspendu. D’après les chiffres donnés par le CHU de Guadeloupe, un peu plus de 87% des agents du centre hospitalier possèdent un pass sanitaire, mais certains personnels sont suspendus pour pass non valide. On observe aussi « une vague d’arrêts maladie sur consigne syndicale », selon Cédric Zolezzi, directeur général adjoint du CHU de Guadeloupe. La situation sanitaire est donc complexe et les soignants tentent de s’adapter au mieux pour combler ces absences. 

« Le coupable, c’est celui qui a mis l’obligation vaccinale », dénonce de son côté Sandro Sormain, secrétaire adjoint de l’UTS-UGTG (Union des travailleurs de la santé, section syndicale de l'Union générale des travailleurs de Guadeloupe) : « Le personnel suspendu à 50 %, ça veut dire que (ceux qui restent) font le travail de deux personnes. Donc à un moment on va avoir une rupture par rapport à la charge de travail ».

Une colère qui va au-delà de la gestion de la crise sanitaire

Le président de la région Guadeloupe insiste sur la perte de confiance des habitants en l’État. Il prend un exemple : « À Capesterre-de-Marie-Galante, il y a 300 ou 400 personnes qui ont perdu leur maison, qui habitaient au niveau du littoral. Il n’y a pas d’action, il n’y a pas de mouvement. Les gens n’ont plus confiance (en l’État) ».

Cette défiance n’est pas nouvelle et s’est construite sur l’accumulation de situations insupportables dans le territoire. Par exemple, le réseau d’eau en Guadeloupe dysfonctionne depuis de nombreuses années. Avant la crise sanitaire, plus de 60 % de l'eau produite se perdait déjà dans des fuites dans les réseaux. La crise a amplifié cette grande crise et il a même fallu installer des points de distribution d’eau, par citernes et par bouteilles. Un témoignage illustre ce ras-le-bol dans un article de Ouest-France : « Quand j’avais quinze ans, on réclamait déjà de rénover le réseau d’eau. J’en ai le triple aujourd’hui et rien n’a changé ! ».

La méfiance envers le vaccin et la colère des habitants s’explique aussi avec la mise en parallèle d’un autre scandale d’État : l’affaire du chlordécone. Cet insecticide utilisé notamment pour la monoculture de la banane pollue les sols de l’île depuis 1972 et se trouve toujours dans le sang de plus de 90 % des Guadeloupéens et Martiniquais. Ce perturbateur endocrinien aurait des incidences sur la santé favorisant notamment le développement de cellules cancéreuses. Un passé qui explique en partie la grande colère des habitants et la réticence de certains face à la vaccination. 

« La crise n'a fait que révéler les inégalités entre les territoires »

« Nous Guadeloupéens, naissons et grandissons au milieu de dysfonctionnements graves et jamais résolus », a déclaré Gaby Clavier, délégué syndical de l'UTS UGTG au CHU interrogé par Ouest-France. Brigitte Chane-Hime, présidente de la Conférence régionale de santé et de l'autonomie (CRSA) s’est exprimé sur le sujet au Sénat dans le cadre d’un rapport d'information déposé le 18 novembre 2021 intitulé « Vague épidémique en outre-mer : territorialiser les réponses, amplifier le soutien ».

 « (…) Les moyens dans les outre-mer sont éloignés de la moyenne métropolitaine, a-t-elle rappelé. De ce fait, lorsqu'une épidémie comme le covid apparaît, cela tourne à la catastrophe. Ces dernières années, des réductions des moyens humains et financiers dans les hôpitaux publics ont eu lieu, alors que nous étions déjà sous-dotés. La crise n'a fait que révéler les inégalités entre les territoires. Le taux d'équipement des îles est toujours au-dessous de la moyenne en métropole en hôpitaux ou en équipements sanitaires et médico-sociaux, notamment pour les adultes en situation de handicap lourd et les personnes âgées. Le taux de chômage des jeunes est élevé, avec une forte précarité. »

Le premier ministre Jean Castex recevra ce lundi soir des élus guadeloupéens, en compagnie de plusieurs ministres alors que la contestation gagne, ce matin, la Martinique voisine. « Cette réunion, organisée à la demande des élus de la Guadeloupe, sera l’occasion pour eux d’exposer leur analyse de la situation sur place. La réunion permettra également un dialogue sur les conséquences de l’obligation de vaccination pour les soignants et les pompiers », indique un communiqué du gouvernement. Maire info reviendra demain sur les conclusions de cette rencontre.
 




Finances locales
Taxe foncière : Christine Pires Beaune dénonce « un transfert de richesse fiscale de la ruralité vers les zones urbaines »
La députée du Puy-de-Dôme critique un « effet collatéral » de la réforme de la taxe d'habitation sur la taxe foncière, qui serait lié au mécanisme de compensation. « Les territoires les moins favorisés ne peuvent compenser l'annulation de TH aux habitants des beaux quartiers », s'indigne-t-elle.

C’est un « scandale », un « hold-up à bas bruit » à en croire la députée socialiste du Puy-de-Dôme, Christine Pires Beaune. Depuis plusieurs semaines, l’élue auvergnate ne cesse de dénoncer les « effets collatéraux » du mécanisme de compensation de recettes aux communes institué dans le cadre de la réforme de la taxe d’habitation. 

Celui-ci créerait une « solidarité à l’envers » et entraînerait « un transfert de fiscalité des départements les moins peuplés aux revenus les moins élevés vers les départements les plus peuplés aux revenus les plus élevés ».

Des transferts depuis le Puy-de-Dôme, la Creuse, le Gers...

« Nous sommes en train d’organiser à l’échelle nationale un transfert de richesse fiscale de la ruralité vers les zones urbaines », estime-t-elle en s’appuyant sur une étude de l’Institut des politiques publiques paru l’an passé et qui annonçait déjà ces transferts « vers des communes en moyenne plus urbaines où le pouvoir d’achat des résidents est plus important ».

Rien de nouveau en somme, si ce n'est que cette prévision devient réalité pour de nombreux élus qui observent les effets du fameux « co-co » (coefficient correcteur) sur leur territoire. « Concrètement, cela veut dire, par exemple, que 35 millions d’euros de la taxe foncière payée par les entreprises et les ménages du Puy-de-Dôme vont partir ailleurs. Cela veut dire que 11 millions d’euros de taxe foncière en Lozère, 9,5 millions payés en Creuse, 24 millions payés en Corrèze, 28 millions payés dans le Tarn-et-Garonne [ou encore] 23 millions dans le Gers vont profiter à des communes d’autres départements plus riches », a réprouvé l’élue, la semaine dernière, lors des questions au gouvernement.

« Qui en profite ? Eh bien, par exemple, les communes de la métropole lyonnaise : le département du Rhône va percevoir à titre de compensation 180 millions d’euros et cerise sur le gâteau les communes des Hauts-de-Seine vont percevoir 351 millions d’euros ! », s’est étranglée la députée du Puy-de-Dôme. « Les territoires les moins favorisés ne peuvent compenser l’annulation de TH aux habitants des beaux quartiers. Neuilly-sur-Seine va être compensée à hauteur de 8 millions d’euros, quand Montauban va transférer 9 millions. C’est un véritable hold-up ! », a-t-elle estimé.

Un phénomène qui pourrait s’aggraver

D’autant que les conséquences de ce dispositif ne devraient « pas s'arranger » puisque la taxe d’habitation doit encore être supprimée aux 20 % des habitants aux revenus les plus élevés, ces derniers résidant « dans les métropoles », a-t-elle expliqué, lors de sa visite au Congrès des maires. 

Dans son étude, l’Institut des politiques publiques estimait ainsi que, « en agrégé, ces transferts et contributions représentent 9 % du produit total de TFPB et impliquent une baisse non négligeable de la territorialité de cet impôt ».

Un phénomène « pas très vertueux pour la territorialisation de nos finances », a également regretté le président de l’Association des maires de Tarn-et-Garonne et maire de La Salvetat-Belmontet (Tarn-et-Garonne), Bernard Pezous, à l’occasion du débat sur les finances locales du Congrès des maires. 

« Pas de faille majeure », selon Joël Giraud

Si le ministre des Comptes publics, Olivier Dussopt, a assuré que ce système de compensation est « juste et dynamique », lors des questions au gouvernement, le secrétaire d'État à la Ruralité, Joël Giraud, a été plus disert, il y a un mois, à l’occasion de son interpellation - toujours par Christine Pires Beaune – lors de l’examen du projet de loi de finances (PLF) pour 2022.

A ses yeux, « il est un peu trop schématique de prétendre que ce système amène des communes rurales pauvres à transférer des recettes de TFPB à de grandes communes riches », rappelant que « des villes comme Toulouse, Le Mans, Nancy ou Courbevoie en reversent chaque année ». Il a également rappelé que « près de 6 800 communes, dont 96 % comptent moins de 1 000 habitants », bénéficient du dispositif visant à ne mettre en place aucun prélèvement lorsque le transfert de TFPB ne dépasse pas 10 000 euros. Enfin, dans les départements ruraux ayant historiquement adopté des taux élevés de TFPB pour compenser la faiblesse de leurs bases fiscales, « le conseil départemental reçoit un montant de TVA par habitant plus élevé que dans les départements où les taux étaient plus bas ».

« La solidarité nationale joue dès lors dans les deux sens et bénéficie également aux territoires ruraux », a assuré Joël Giraud, ne discernant donc « pas de faille majeure dans le dispositif élaboré en 2020 ». 
 




Congrès des Maires de France
Les collectivités territoriales au coeur de la transition numérique
Cybersécurité, accompagnement des usages, déploiement des réseaux dans les territoires… De grands enjeux autour du numérique ont été évoqués lors d'un forum consacré, jeudi, dernier jour du congrès des maires. Bilan.

Les collectivités territoriales sont les principales concernées par les problématiques que soulève la transition numérique. Ce constat est amplifié par la recrudescence des cyberattaques subies par les collectivités ou encore par les initiatives gouvernementales mises en place pour accompagner la transition numérique.

Le maire de Marsac-en-Livradois (Puy-de-Dôme), Michel Sauvade, membre du comité directeur de l’AMF, rappelle d’abord, qu’en matière de numérique « il n’y a pas de grandes ou de petites communes ». La transition numérique concerne toutes les collectivités territoriales et tous les élus. 

La cybersécurité : une préoccupation première 

« La cybersécurité est un domaine qui concerne évidemment les collectivités territoriales car les conséquences d’une cyberattaque peuvent être dramatiques pour une commune et son personnel », explique en préambule Guillaume Poupard, directeur de l’Agence Nationale de la Sécurité des systèmes d’Information (ANSSI). Car oui, la cybersécurité est désormais une question incontournable pour les élus et « la menace ne va pas s’arrêter », poursuit le directeur. 

« Il faut que les élus prennent conscience de ce danger et se protègent », insiste le général Marc Boget, commandant de la gendarmerie dans le cyberespace. La cybersécurité peut sembler très loin du cœur de métier des maires, mais en réalité ce n’est pas une problématique technique. La gendarmerie peut d’ailleurs vous aider et de nombreux agents sont formés pour vous accompagner dans la mise en place d’un service de sécurité. »

Il est d’ailleurs possible d’évaluer sa sécurité numérique en 9 questions grâce à un outil développé par le gouvernement en lien avec l’AMF et le dispositif Cybermalveillance.gouv.fr. Ce guide vise à aider les élus dans l’évaluation des faiblesses potentielles de leurs infrastructures numériques. 

Un moment fort de ce forum a été le témoignage de Bernard Baudoux, maire d’Aulnoye-Aymeries. Sa commune a été victime d’une cyberattaque l’année dernière. « Nous étions alors incapables de faire des actes de décès, d’émettre des autorisations d’inhumer… Le personnel était traumatisé. Vingt années de délibérations municipales ont disparu ainsi que tous les fichiers de la médiathèque. Ehpad, cantine scolaire, administration : tout a été arrêté. » Quelques interjections de surprise se font entendre dans la salle. Puis le maire alerte : « Ma commune ayant 10 000 habitants je ne me sentais pas concerné. Mais si les maires ne s’en occupent pas, il y aura beaucoup de dégâts… Faites-le maintenant ! »

En cas de cyberattaque, « il faut déposer plainte immédiatement pour que la gendarmerie puisse vous aider à trouver les auteurs ou à gérer au mieux la crise », ajoute Marc Boget. Signaler le vol des données personnelles à la Cnil est aussi une obligation.

Le mieux étant, et cela a été rappelé à de nombreuses reprises durant les échanges, de se préparer et de se protéger en amont. « Il faut d’abord comprendre la menace et mettre en œuvre des moyens », explique le directeur de l’Anssi. Il rappelle aussi que, dans le cadre du plan France relance, une enveloppe de 60 millions d’euros est dédiée aux collectivités territoriales pour financer des parcours de cybersécurité et le co-financement de projets et le soutien à la création des CSIRT (équipes d’intervention en cas d’incident informatique) régionaux. 370 parcours de sécurité ont déjà été mis en place sur les 500 visés. 

Accompagner les usages du numérique dans les territoires 

Le numérique prend de plus en plus de place dans l’activité des élus mais aussi dans la vie des citoyens. C’est pour cela que la question de l’accompagnement des usages ne pouvait être contournée. Une place particulière a notamment été accordée aux conseillers numériques. 

Patrick Molinoz, co-président de la commission numérique de l’AMF, rappelle les chiffres : « 242 conseillers numériques déjà opérationnels, 3 500 postes ouverts, 1 100 en formation ». Il se réjouit de ce dispositif qu’il qualifie « d’excellente idée » avec un bémol sur la qualité des formations délivrées aux conseillers. « Il nous remonte qu’elles ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux… »

Jean-Denis Olivier, conseiller municipal du Lorrain (Martinique), se dit satisfait de ce dispositif. « Nous avons deux conseillers numériques depuis juillet 2021. L’un est intégré à notre Maison France Services et l’autre à la médiathèque. C’est une réelle opportunité car il y a une dynamique de développement du numérique sur notre territoire depuis 10 ans. » Ces conseillers numériques sont aussi bien utiles pour les seniors, qui peuvent avoir une méconnaissance ou une appréhension du numérique, que pour les plus jeunes. Nombreux sont les élus qui observent un besoin d’éducation numérique parentale ou encore une besoin d’éducation à Internet pour les scolaires. 

Guillaume Clédière, directeur du programme France Services à l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), rappelle aussi l’existence des guichets uniques France Services pour accompagner les citoyens dans leurs démarches administratives. 

Le crédo en matière d’usage du numérique est donc l’accessibilité. Ainsi, le forum a été aussi l’occasion de rappeler aux élus le déploiement du programme France Identité Numérique, mandaté en 2018 par le gouvernement en lien avec l’AMF, pour développer une solution d’authentification numérique sécurisée sous la forme d’une application qui sera disponible dans une version test dès le premier trimestre 2022. Siham Labich, adjointe au maire de Saint-Étienne, espère que ce nouveau moyen d’identification en ligne pourra répondre à la problématique des procurations en ligne qui, faute d’authentification numérique, requièrent encore un passage par le commissariat ou la gendarmerie. 

Un point sur le déploiement des réseaux  

Zacharia Alahyane, directeur des programmes France Mobile et France THD à l’ANCT, a dressé un rapide bilan des avancées en matière de couverture mobile sur le territoire. « En France aujourd’hui, ce sont environ 2 pylônes par jour qui sont mis en service. Concernant le Plan France haut débit, d'ici à fin 2022 chaque foyer pourra bénéficier du très haut débit d'au moins 30 Mb/s. L’objectif en 2025 étant la fibre pour tous. Le rôle des maires en cas de mauvaise connexion est de signaler en contactant l’équipe de projet ou en se rapprochant de la préfecture. »

Michel Sauvade appuie cette idée : « On attend des maires qu’ils se manifestent en cas de souci notamment sur la plateforme France Mobile ». Car des problèmes, il en existe bel et bien selon les maires présents. Certaines remarques ont été formulées comme des points faibles sur les réseaux : « Les citoyens disent que ça rame », rapporte le maire d’Héric (Loire-Atlantique). « La fibre est aussi annoncée pour 2024, poursuit-il. C’est trop long et cela pose un vrai problème pour l’activité de certains citoyens… » Si les pylônes de 4G ont été cités comme solution transitoire, les disparités et les problèmes entre les communes sont réels. C’est notamment dans ce cadre que l’AMF a un rôle à jouer, comme le rappelle Michel Sauvade : « L’AMF souhaite porter votre parole sur ces dossiers du numérique »




Congrès des Maires de France
Tourisme post-covid : s'adapter, se réinventer et miser sur la proximité
Lors du 103e Congrès des maires, un forum s'est tenu sur les mutations de l'activité touristique à opérer pour répondre aux aspirations post-Covid, et intégrer le réchauffement climatique. 

Faire de la France « le leader d’un tourisme durable sur le plan social et environnemental » : Emmanuel Macron n’a pas mâché ses mots devant les professionnels du secteur réunis début novembre, pour annoncer un plan de « reconquête et de réinvention du modèle », détaillé en fin de semaine par le Premier ministre. Le forum organisé au Congrès des maires le 17 novembre s’est ainsi fait l’écho d’une actualité brûlante.

Avec ses 2 millions d’emplois non délocalisables, le tourisme représente 8 % du PIB français – soit « autant que l’industrie automobile », a précisé d’emblée Pierre-Alain Roiron, maire de Langeais (Indre-et-Loire), co-président de la commission développement économique, tourisme et commerce de l'AMF. Un poids économique crucial que la crise du Covid a révélé, de même qu’elle a mis en lumière la capacité des professionnels du secteur à se réinventer. Critiques du sur-tourisme, aspirations à un tourisme durable, de proximité, de savoir-faire : les mutations à engager sont devenues urgentes pour la survie du secteur. 

Tourisme durable

Le tourisme national peut-il remplacer le tourisme international ? C’est l’un des enjeux essentiels pour les acteurs publics et privés du secteur, « les touristes étrangers n’ayant pas le même pouvoir d’achat que les nationaux », a relevé Pierre-Alain Roiron. Sauf que le secteur est responsable de 11 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde : le tourisme durable, de proximité, centré sur le patrimoine exceptionnel du pays n’est plus une option. En ce sens, « les dynamiques territoriales doivent évoluer », estime Florent Guitard, chargés de projets à la Mission des offices de tourisme Nouvelle-Aquitaine (Mona). À ce titre, Laurent Peyrondet, maire de Lacanau (Gironde) souhaite qu’un bilan soit fait de la loi Notre, qui a permis aux collectivités d’intervenir dans ce champ de façon mutualisée. Sur son territoire, il a fallu mutualiser les offices du tourisme sur 14 communes. Un succès, non sans mal. Parfois, la querelle de clocher se joue sur le territoire inclus dans le schéma de développement touristique, mais aussi le nom ou la « marque » de l’office du tourisme, a témoigné Jean-Pierre Rougeaux, le maire de Valloire (Haute-Savoie) présent dans la salle, qui s’est fixé sur le schéma et la dénomination « Savoie Mont-Blanc » à partir d’un sourcing de terrain.

Les quatre saisons

Premières impactées par la crise et le dérèglement climatique, les stations de ski sont aussi les premières à devoir se réinventer. Intervenant des débats, le maire de Touillon-et-Loutelet (Doubs), Sébastien Populaire, a rappelé l’urgence de sortir de la saisonnalité été/hiver. « À partir de 2035-2040, il n’y aura plus assez de neige pour conserver un modèle économique centré sur le ski alpin ». Le maire a déjà engagé la mutation dans station de moyenne montagne, en essayant de « lisser les flux de touristes sur les quatre saisons », et en misant sur la communication avec les professionnels.

Étaler les flux sur quatre saisons, c’est aussi ce que les communes très touristiques ont intérêt à promouvoir. Pierre Gonzalvez, maire de L’Isle-sur-la-Sorgue (Vaucluse), a évoqué les effets des vagues de confinement et de déconfinement sur sa commune, un afflux de touristes ayant déferlé sur des pôles déjà particulièrement fréquentés. « Quand le tourisme n’est pas maîtrisé, les collectivités peuvent se retrouver en difficulté, et le secteur peut être déséquilibré ». C’est aussi ce qu’a constaté Maider Arosteguy, maire de Biarritz (Pyrénées-Atlantiques), pour qui 2021 a été « l’année du siècle ». Avec des effets délétères sur les habitants, en termes de nuisances et d’incivilités, mais aussi sur l’environnement, avec l’augmentation des voitures et des déchets des touristes. La maire plaide en ce sens pour la mise en place d’une charte du visiteur pour le tourisme durable. Autre conséquence de l’attraction touristique déplorée par Maider Arosteguy : les prix de l’immobilier flambent, les habitants ne peuvent plus se loger, tandis que des complexes touristiques continuent de sortir de terre. 

Le bonheur est dans le près

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d‘État chargé du tourisme, a clos les débats en insistant sur la valeur de référence du tourisme en France, et sur son avenir résolument optimiste. « Des destinations qui n’en sont pas sur la carte touristique vont sortir de terre », a t-il promis, l’objectif étant de miser sur un tourisme centré sur les atouts intrinsèques du pays (culturels, patrimoniaux, naturels, etc.), pour que les visiteurs restent plus longtemps et dépensent plus sur le territoire. L’État a répondu présent lors de la crise, a t-il rappelé, en soutenant les professionnels du secteur et en investissant via le plan de relance. Le secrétaire d’État a dévoilé quelques pistes du « plan de reconquête et de réinvention du modèle touristique », qui s’étalera sur 5 ans, et qui doit être détaillé par Jean Castex demain. Au menu : un « sujet formation », qui sera dédié aux métiers en tension (les saisonniers, essentiellement), un « sujet digital », avec la mise à disposition d’un outil développé par la Banque des territoires, « Alentours », pour « mieux valoriser l’offre existante », mais un « sujet vélo », etc. Les événements sportifs en 2023 et les Jeux olympiques de 2024 devraient « remettre la France sur la carte des destinations mondiales », s’est-il enthousiasmé. Avec une empreinte carbone certaine. 

Maire info reviendra, dans son édition de demain, sur les mesures annoncées par le Premier ministre ce week-end en matière de développement touristique.







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