Édition du jeudi 18 novembre 2021

Congrès des Maires de France
David Lisnard, nouveau président de l'AMF
Fin du suspense hier vers 15h30 : David Lisnard a été élu président de l'AMF face à Philippe Laurent, avec une avance assez confortable (62,3 % des voix). Il formera un ticket avec le maire d'Issoudun, André Laignel, qu'il s'est d'ores et déjà « engagé » hier à reconduire comme premier vice-président délégué.

David Lisnard, 52 ans, maire de Cannes, sera donc le président de l’AMF pour les trois années à venir. Il a recueilli les suffrages de 6 913 maires, contre 4 176 à son concurrent, Philippe Laurent, le maire de Sceaux. 

Plus de 11 000 votants

Le scrutin se déroulait, pour la première fois, de manière entièrement dématérialisée, et n’était donc pas seulement ouvert aux congressistes mais à tous les adhérents à jour de leur cotisation. Sur 34 155 élus inscrits, 11 577 ont pris part au vote, soit un taux de participation de 33,9 %. 
Il y a deux manières d’analyser ce chiffre, selon le vieux principe du verre à moitié plein ou à moitié vide. D’un point de vue positif, ce chiffre est en très nette augmentation par rapport aux précédents scrutins et semble même être le plus élevé jamais constaté dans une élection à la présidence de l’AMF. Pour mémoire, en 2017, seulement 3 131 élus avaient participé au vote. Leur nombre a donc presque quadruplé, ce qui le rend « historique », comme l'a relevé le nouveau président.

On peut néanmoins dire aussi, à l’inverse, que le taux d’abstention a été de plus de 66 %, c’est-à-dire qu’un tiers seulement des maires ont participé à l’élection du président de leur association, alors même que l’accès au vote était très simple, puisqu’il était possible de voter depuis son smartphone ou sa tablette. 

« Revitaliser nos communes »

Dès la proclamation des résultats par le président de la commission électorale, Guy Geoffroy, dans le grand auditorium, David Lisnard est monté sur la scène pour une courte déclaration, exprimant sa « reconnaissance » aux maires qui lui ont fait largement confiance ainsi qu’à François Baroin et Jacques Pélissard pour leur soutien. Le maire de Cannes a assuré aux maires « qui ont fait un choix différent » qu’il serait naturellement « aussi à leur service ». « Notre association est bien celle de tous les maires de France et je serai le garant de cette représentativité comme de l’indépendance de l’AMF. C’est là que résident notre légitimité et notre crédibilité. » 

Quelques minutes plus tard, le nouveau président a participé à une conférence de presse en compagnie d’André Laignel. Il a notamment déclaré que « la ligne choisie (par les maires) est claire : c’est la ligne l’indépendance de l’AMF, du respect de sa vocation même : défendre les intérêts des communes en transcendant les clivages politiques, géographiques, économiques et démographiques. » Le maire de Cannes s’est engagé à rassembler « les représentants des deux équipes pour que nous n’en fassions qu’une : l’équipe de l’AMF ». 

David Lisnard a ensuite appelé à se mettre « immédiatement au travail », sur les bases de son programme électoral : « Comment revitaliser nos communes ? Comment retrouver de la simplicité dans l’organisation des pouvoirs publics ? Comment faire en sorte que nous ne soyons dans une position de quémandeur par rapport à l’État mais de partenaires ? ». 

Interrogé lors de cette conférence de presse sur la position à venir de l’AMF, dans le débat présidentiel, sur la réforme de la taxe d’habitation, David Lisnard, sans préjuger de ce que décideront les instances de l’AMF, a rappelé la sienne : celle d’une « remise à plat profonde de la fiscalité locale », avec un seul impôt par strate, « avec pour les communes une fiscalité de résidence ». « Ces principes-là doivent être retrouvés, et je pense que nous proposerons des axes de travail clairs en la matière. » 

Philippe Laurent « disponible »

Dans le même temps, le concurrent de David Lisnard, Philippe Laurent, a publié un bref communiqué de presse pour féliciter son adversaire et l’assurer de sa « disponibilité pour travailler dans l’intérêt des communes de France » et « dans un esprit de rassemblement ». Le maire de Sceaux conclut son communiqué en assurant : « Vous pouvez compter sur notre engagement pour veiller au respect des valeurs de notre maison commune ». 




Congrès des Maires de France
Les nouvelles instances dirigeantes de l'AMF
Le scrutin qui s'est déroulé mardi et mercredi n'a pas seulement eu pour objet d'élire le président de l'AMF, mais aussi ses deux instances dirigeantes, le bureau et le comité directeur. Les tendances exprimées ont été les mêmes que pour l'élection du président, mais dans ce cas, les listes ont été élues à la proportionnelle. 

Les instances dirigeantes de l’AMF sont composées d'un bureau de 36 membres et d'un comité directeur de 100 membres. Alors que l’élection du président se fait, en toute logique, au scrutin uninominal, la désignation des instances se fait, elle, à la proportionnelle : chaque liste sera représentée au prorata des voix qu’elle a reçues. 

Les résultats du scrutin

Selon les résultats dévoilés hier par la commission électorale, les maiers et présidents d'intercommunalité ont voté pour les instances de la même manière qu’ils ont voté pour le président : aux deux tiers environ pour les listes présentées par David Lisnard et un tiers pour celles de Philippe Laurent. 

Plus précisément, pour le bureau de 36 membres, 11 177 élus ont pris part au vote. Le nombre de votes blancs est, à une quinzaine de voix près, le même que pour le vote de la présidence. 7 088 suffrages se sont portés sur la liste portée par David Lisnard, contre 4 029 pour celle de Philippe Laurent. À comparer aux 6 913 voix qui se sont portées sur le nom de David Lisnard comme président de l’association : 175 élus n’ont pas voté pour David Lisnard comme président, mais ont voté pour sa liste de bureau. 

Les chiffres sont très similaires pour les membres du comité directeur de 100 membres : la liste de David Lisnard a recueilli 7 041 voix, celle de Philippe Laurent 4 073.

Au final, donc, la répartition des voix dans ces instances se fait de la façon suivante : le bureau sera composé de 23 membres de la liste Lisnard et 13 membres de la liste Laurent. Le comité directeur comptera 63 membres sur 100 issus de la liste Lisnard, et 37 issus de la liste Laurent. 

Le nouveau bureau de l’AMF

Le nouveau bureau de l’association a donc été en grande partie renouvelé : il compte en effet 22 nouveaux membres sur 36. Parmi les anciens membres qui restent membres du bureau, on retrouve naturellement David Lisnard, Philippe Laurent et André Laignel. Deux des anciens responsables de l’association – son ancien président François Baroin et son trésorier, Michel Vergnier – ne sont plus membres du bureau. Parmi les autres « anciens », on retrouve également Caroline Cayeux, maire de Beauvais et présidente de Villes de France, Gaël Perdriau (Saint-Étienne), Gilles Leproust (Allone), Cécile Gallien (Vorey), ou encore Antoine Homé (Wittenheim) ou Frédéric Valletoux (Fontainebleau), par ailleurs président de la Fédération hospitalière de France. 

Parmi les nouveaux membres du bureau, on trouve aussi bien des maires de grandes villes, comme Michaël Delafosse, maire de Montpellier, et présidents de grands EPCI comme Guillaume Guérin, président de la communauté urbaine de Limoges, que de communes rurales comme Bertrand Hauchecorne (Mareau-aux-Prés). Et des édiles de toutes tendances : sans étiquette pour beaucoup d’entre eux mais aussi communistes (Jacqueline Belhomme, Malakoff), EELV (Christian Métairie, Arcueil), proches d’Emmanuel Macron (Karl Olive, Poissy), LR (Joseph Segura, Saint-Laurent-du-Var) ou Alain Chrétien (Vesoul), centristes (Frédéric Leturque, Arras) et socialistes (Frédéric Chéreau, Douai). Guy Geoffroy (Combs-la-Ville), président des Éco-maires et expert des questions environnementales, fait également son entrée au bureau de l’AMF.

On notera enfin que ce bureau est un peu moins féminin que le précédent, puisque qu’il ne compte que 10 femmes contre 12 dans l’ancien bureau. Et ce alors que par exemple, la liste de David Lisnard comportait 14 femmes. Un effet de la répartition des sièges à la proportionnelle, les candidats ayant été retenus dans l’ordre de présentation.

Le nouveau bureau de l’AMF s’est réuni dès ce matin, et André Laignel a été réélu premier vice-président délégué de l’association. Le bureau, qui se réunira à nouveau le 7 décembre, devra maintenant désigner le secrétaire général et le trésorier, les huit vice-présidents, ainsi qu’un bureau exécutif. Ce bureau exécutif, qui gère les affaires urgentes entre les réunions du bureau, est statutairement composé du président et du premier vice-président délégué, du secrétaire général et du trésorier, plus, éventuellement, un certain nombre de membres du bureau dans la limite d’un quart de son effectif, soit neuf membres au maximum. 




Congrès des Maires de France
Sécurité : les maires ont-ils les moyens d'agir ?
Un Forum s'est tenu hier au congrès de l'AMF sur le rôle du maire en matière de sécurité publique. Le sujet a attiré les élus en nombre et les témoignages ont été nourris.

Pour mémoire, le rapport « d'un continuum de sécurité vers une sécurité globale » publié le 11 septembre 2018 par les députés Fauvergue et Thourot, a inspiré l’élaboration du Livre blanc sur la sécurité intérieure de 2019 et posé les fondements de la loi du 25 mai 2021 pour une sécurité globale préservant les libertés. Cette dernière, dont plusieurs dispositions majeures ont été invalidées par le Conseil Constitutionnel, consacrait une part importante aux polices municipales et leur doctrine d’emploi. Elle réaffirmait notamment la place du maire comme acteur majeur de la tranquillité publique, mais également de la sécurité publique. Le rôle du maire en matière de sécurité avait également été mis en exergue par le rapport du Sénat consacré à l’ancrage territorial de la Sécurité Intérieure, rendu public en janvier dernier, et à l’occasion du « Beauvau de la Sécurité » qui s’est tenu de février à septembre, où quatre maires représentaient l’AMF dans le collège des élus consultés sur les propositions formulées par le ministère de l’Intérieur.

Voilà pour la théorie. Dans la pratique, les choses ne sont pourtant pas forcément très claires, comme l’ont rappelé d’entrée de jeu les deux élus présidant cet échange : Nathalie Koenders, première adjointe à la ville de Dijon et Frédéric Masquelier, maire de Saint-Raphaël, tous deux co-présidents de la commission Sécurité et prévention de la délinquance de l’AMF. « En tant que maire, on est partout dans le continuum de sécurité, et en même temps, on peut se sentir nulle part et se poser la question de sa légitimité à agir » a observé Frédéric Masquelier. Nathalie Koenders a fait état d’une « frontière parfois ténue entre ce qui relève de la compétence régalienne de l’État et de celle du maire », « d’un glissement de certaines missions » …

Épisodes « choquants »

À la tribune et dans la salle, beaucoup d’élus se sont interrogés par exemple sur le statut d’officier de police judiciaire du maire, exprimant le sentiment « qu’il n’est pas tout à fait un OPJ comme les autres ». En clair : un OPJ « moins respecté ». Certains élus ont relaté de choquants épisodes vécus, parfois sans qu’il y ait eu de poursuites des auteurs. Beaucoup de questions ont été soulevées sur les moyens du maire, sur les carences en effectifs des polices municipales et les difficultés à recruter, sur les relations des maires avec les forces de la police nationale et de la gendarmerie, ainsi qu’avec la justice, sur l’importance des volets « prévention » et « médiation »… A été aussi évoqué tout un ensemble d’outils, leurs avantages et leurs limites. Les conventions de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l’Etat, par exemple : au-delà de l’obligation légale qu’elles constituent parfois, elles sont l’occasion de poser les fondamentaux du partenariat, de construire le « comment travailler ensemble ». 

Il apparait clairement qu’il y a encore besoin de gagner en « connaissance réciproque », comme l’a pointé Céline Berthon, directrice centrale de la Sécurité publique, qui a mentionné diverses actions allant dans ce sens, comme des formations proposées par la Police nationale à destination des élus. Christian Rodriguez, directeur général de la gendarmerie, a cité l’existence d’outils comme la fiche « réflexe » mise au point avec l’AMF, évoqué l’opération « Présents pour les élus » qui vient d’être lancée (avec comme objectif de mieux répondre à leurs attentes et préoccupations dans les territoires) et la mise en œuvre de nouvelles modalités opérationnelles en matière de relations entre la gendarmerie nationale et les élus. Dans le même esprit, Jean-Philippe Vicentini, procureur de la République à Valenciennes, a présenté un dispositif original mis en place sur ce secteur, qui rénove de façon assez radicale la relation entre les élus locaux et l’institution judiciaire.

En conclusion de ce forum, un temps d’échange « en prise directe » a eu lieu avec le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti. Faisant office d’invité surprise, très en verve, il a défendu une opération « reconquête de confiance » auprès des élus locaux. « Toute atteinte à un maire est une atteinte à la République », a-t-il tonné. Puis il s’est adressé directement aux élus : « Faites-le moi remonter directement si les choses ne se passent pas comme à Valenciennes, si vous n’avez pas de contact avec le procureur ou son délégué. Dites-le-moi, écrivez-le-moi », a t-il lancé à l’assemblée. Avant de s’employer à promouvoir sa réforme de la justice de proximité, en rappelant les grands axes d’une circulaire relative à la mise en œuvre de cette dernière qu’il a adressé aux procureurs le 15 octobre 2020.




Congrès des Maires de France
Les ruralités de nouveau à la mode, mais menacées d'être mises sous cloche
La ruralité n'a jamais été aussi attractive, ont constaté les participants du débat sur les ruralités ; mais si l'État ne donne pas plus de visibilité et de souplesse aux maires, ceux-ci ne pourront pas assurer le développement de leurs territoires. Les lenteurs au démarrage des CRTE et de l'ANCT ne font que renforcer les craintes des élus ruraux.

Même avant la crise sanitaire, les espaces ruraux gagnaient des habitants, a rappelé le sociologue Éric Charmes en introduction du débat ; mais le « rêve de campagne » porté par les confinements a mis en lumière l’attractivité des territoires peu denses. Cependant, la complexité des mécanismes de subventions et l’objectif de « zéro artificialisation nette » risquent de « mettre sous cloche le développement des territoires ruraux », a-t-il mis en garde.

Les bonnes intentions démontrées par l’État – contractualisation avec les contrats de relance et de transition écologique (CRTE), aide à l’ingénierie avec la création de l’Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) – sont unanimement saluée par les élus, mais la manière dont elles sont exécutées laisse à penser que les moyens ne sont pas à la hauteur des ambitions.

Des services de l’État en surchauffe

Il est vrai, comme l’a rappelé son directeur général, Yves Lebreton, que le lancement de l’ANCT, en janvier 2020, a été fortement perturbé par la crise sanitaire. Mais elle souffre également du manque d’effectifs et de moyens au sein même des préfectures : « Tous les départements n’ont pas désigné leur référent à la ruralité. Je n’ai moi-même compris que très récemment que chez moi, il s’agissait du secrétaire général de la préfecture, quelqu’un de très bien mais un peu surchargé. » « Malheureusement, on paie encore la révision générale des politiques publiques (RGPP) de 2010 : on voit bien que les services de l’État sont aussi saturés de travail que nous. La préfecture nous demande par exemple d’instruire jusqu’au bout notre plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) », a témoigné Karine Gloanec-Maurin, présidente de la communauté de communes des Collines du Perche (41), et co-présidente de la commission Territoires ruraux à l’AMF.

Ce qui explique sans doute que les élus aient du mal à trouver des réponses pour s’orienter dans la jungle des nouveaux dispositifs lancés pendant le quinquennat Macron et portés à présent par l’ANCT. Dans sa commune de La Ferté-Saint-Aubin (45), qui bénéficie, ce qui est loin d’être le cas de toutes les petites communes rurales, d’une opération de revitalisation du territoire (ORT) et du programme Petites villes de demain (PVD), Constance de Pélichy déplore le fait « d’être toujours en train de jongler : on ne sait pas quels dispositifs solliciter sur nos opérations, l’ORT, le PVD ? On peine à avoir des interlocuteurs, des réponses précises ».

Un risque d’accroître les inégalités entre ruralités

Quid alors des toutes petites communes isolées, qui peinent à recruter des secrétaires de mairie, elles-mêmes dépassées par la complexité croissante des procédures, noyées sous les appels à projets qui arrivent « quotidiennement dans les communes, ce qui rend très compliqué le traitement seul de l’information que nous recevons », a souligné Florent Lacarrère, le jeune maire de Labatmale (64).

Ludovic Rochette, maire de Brognon (21) et second co-président de la commission Territoires ruraux, craint que tous ces nouveaux dispositifs ne ratent leur cible. « Est-ce qu’on va bien taper là où il faut ? Moi je suis maire d’une commune périurbaine, pour moi c’est très facile de trouver un volontaire territorial en administration [VTA, nouveau dispositif de l’ANCT finançant le recrutement d’un jeune diplômé à même de « chasser les subventions » et conduire des projets, ndlr], un conseiller numérique, je suis très content de les avoir, mais est-ce que c’est juste ? Il faut une pluralité des politiques rurales pour aider surtout les territoires les plus fragiles, ceux qui regardent passer les trains. »

Et donc prendre peut-être le problème à l’envers. Le système ne marche-t-il pas sur la tête en engendrant toujours plus de complexité ? C’est la question posée par Thibault Guignard, maire de Ploeuc-l’Hermitage (22) : « D’abord on met en place des procédures compliquées – les demandes de paiement sont parfois aussi complexes que les demandes de subvention -, ensuite on finance des postes d’ingénierie pour y répondre. Il faudrait sans doute commencer par simplifier les procédures et après donner des moyens aux collectivités », a-t-il suggéré, fortement applaudi par la salle.

Un maire de Meurthe-et-Moselle, intervenant depuis les tribunes, a ainsi pris l’exemple du fonds d’aide aux communes rurales qui a connu un grand succès dans la région Grand Est en 2016 : « Un formulaire simple, des justificatifs demandés au fil de l’eau, sans date butoir, un règlement d’attribution simple, un référent dans chaque maison de la région, et 3 000 communes sur les 5 000 de la région y ont répondu. C’est possible de faire simple ! », a témoigné Jean-François Guillaume, maire de Ville-en-Vermois.

La menace du « zéro artificialisation nette »

Mais la complexité du montage des dossiers n’est pas le seul problème qui menace le développement des territoires ruraux. Les nouvelles règles qui s’imposent chaque année aux maires, alors qu’on leur demande de travailler sur le temps long, en co-construction avec les habitants, en découragent plus d’un, à commencer par le nouvel objectif de « zéro artificialisation nette », porté par la loi Climat et résilience, qui n’est pas encore clairement défini par décret mais bloque déjà un grand nombre de projet.

L’exemple du maire d’Avranches, dont la communauté d’agglomération s’est vu annuler un PLUI après avoir investi un million d’euros dans sa préparation, a marqué la salle. « La préfecture nous a dit que nous étions trop consommateurs d’espaces agricoles, alors que seulement 3 % du territoire est artificialisé », a rapporté David Nicolas, également référent Patrimoine à l’AMF.

Plusieurs élus présents dans le public ont fait état des difficultés, en raison du blocage par les préfectures, à dégager du foncier pour construire des zones d’activité, des logements pour accueillir les nouveaux habitants qui sont toujours plus nombreux dans les territoires ruraux.

« La ruralité ne doit pas être seulement un endroit de préservation et de conservation, mais bien une terre d’expérimentation ; il faut que l’État nous regarde comme des territoires d’avenir ! » a lancé Karine Gloanec-Maurin, avant de rappeler que « la question primordiale reste la dotation : de manière générale, nous n’avons pas les moyens de fonctionner et de nous préparer à accueillir des populations nouvelles. » Mais cet afflux et ce changement de vision déjà acté sur les ruralités lui donne un espoir : « La ruralité ne se situe plus dans le même dialogue avec l’État. Elle est positive et force de proposition. »




Vie publique
Encadrement du lobbying : les propositions de la HATVP visant les collectivités
La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) réalise un bilan du dispositif d'encadrement des lobbies et formule quatre propositions d'amélioration en vue de son extension au 1er juillet 2022 aux collectivités locales.

Rehaussement des seuils de population des collectivités, simplification de la liste des personnes publiques, possibilité de restreindre les décisions publiques concernées… La Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) a publié un rapport, hier, dans lequel elle présente un premier bilan du dispositif d’encadrement du lobbying et soutient plusieurs propositions sur l’extension prochaine du répertoire aux collectivités territoriales. 

L’objectif est de rendre le dispositif d’encadrement de la représentation d’intérêts « plus pertinent et adapté à l’échelon local ».

Dispositif « trop complexe »

Si le dispositif comporte des « avancées notables » et ouvre des « perspectives prometteuses », il est encore constitué de failles, selon les auteurs du rapport. Son cadre législatif et réglementaire est ainsi jugé « trop complexe », notamment pour les représentants d’intérêts eux-mêmes.

Selon la HATVP, une évolution du dispositif apparaît ainsi indispensable pour « assurer sa pérennité et son efficacité », notamment dans le cadre de son extension aux collectivités territoriales prévue pour l’été prochain. « Une évolution d’une telle ampleur ne peut se réaliser à droit constant sans le mettre durablement en péril ». En effet, « les difficultés juridiques inhérentes au répertoire seront également appliquées à l’échelon local et les spécificités de l’action publique territoriale seront de nature à accroître largement les difficultés identifiées ». 

La Haute Autorité formule ainsi quatre propositions d’évolutions. À l’occasion de la présentation, en juin, de son rapport d’activité 2020, le président de l’institution, Didier Migaud, avait d’ailleurs assuré ressentir « une approche positive au niveau des élus car ils sont eux-mêmes très sollicités par des représentants d'intérêts, notamment dans des secteurs comme la politique de la gestion de l’eau, des transports, tout ce qui touche au BTP… pour lesquels il peut y avoir des actions pressantes ».

Seuils de population relevés à 100 000 habitants 

Pour pallier les failles du dispositif, la HATVP préconise, d'abord, un rehaussement des seuils de population des communes et EPCI à 100 000 habitants au lieu de 20 000 habitants comme fixé actuellement. Seuls 42 communes et 127 EPCI seraient ainsi concernés, contre 468 communes et 1011 EPCI avec les règles actuelles. « En revanche, par souci de simplification, ce seuil de 100 000 habitants gagnerait à être unique, sans modulation pour l’application aux adjoints au maire, aux vice-présidents de l’EPCI bénéficiaires d’une délégation de fonction ou de signature ou encore aux directeurs généraux des services. Dans un même objectif, le seuil du montant des recettes budgétaires retenu actuellement pour les EPCI serait supprimé », recommande la HATVP.

Cette mesure serait couplée à une expérimentation, pour cinq ans, de l’application du dispositif aux communes et EPCI à fiscalité propre de taille inférieure au seuil de 100 000 habitants (« d’une part entre 20 000 et 50 000 habitants, et d’autre part entre 50 000 et 100 000 habitants »), afin d'évaluer la diversité des situations locales.

Les auteurs du rapport préconisent également de simplifier la liste des personnes publiques concernées en la restreignant aux responsables et agents publics « susceptibles d’être visés par des actions de représentation d’intérêts » (la liste actuelle vise les responsables et agents publics assujettis à une obligation de déclaration de patrimoine). Cette réécriture « énonce directement et explicitement les collectivités territoriales et EPCI concernés (communes et EPCI à fiscalité propre au-dessus du seuil de 100 000 habitants, départements, régions et collectivités à statut particulier) en y ajoutant les groupements de collectivités territoriales dont au moins une de ces collectivités ou un de ces EPCI est membre ». Elle énumère également les fonctions exécutives et délibérantes concernées.

Enfin, la HATVP souhaite « pouvoir limiter les actions à déclarer à l’échelle locale » en « prévoyant que l’obligation de déclaration ne s’impose qu’à certaines décisions publiques locales » (il pourrait ainsi être envisagé de prendre en considération les seules décisions qui présentent un caractère normatif) et en « levant les incertitudes juridiques actuelles ».

En 2022, 8 000 responsables supplémentaires concernés

Pour rappel, la loi Sapin II de 2016 (relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique) a prévu que les représentants d'intérêts s’inscrivent à un répertoire numérique géré par la HATVP pour rencontrer les ministres et leur cabinet, les parlementaires et leurs collaborateurs, certains hauts fonctionnaires, sous peine de sanction pénale. L'objectif est de mesurer l'empreinte des lobbies sur la loi et les normes. Ce sont ainsi près de 2 400 entités qui sont ainsi désormais inscrites sur le répertoire et près de 40 000 activités de lobbying qui ont été déclarées.

Après deux reports successifs, le répertoire doit être étendu, le 1er juillet 2022, aux actions auprès des maires, des présidents d'intercommunalités et notamment des directeurs de services dans les collectivités de plus de 20 000 habitants. Le nombre de responsables concernés passera alors de 11 000 à 19 000 et sera l’un des « plus étendus au monde ».

Initialement prévue au 1er juillet 2018, l'extension du répertoire a été reportée afin de répondre à plusieurs risques : « Une lisibilité moindre des informations déclarées sur le registre, des obligations parfois disproportionnées qui pèseront sur certaines entités, des moyens humains et financiers à l’heure actuelle insuffisants pour permettre à la Haute Autorité de réaliser des contrôles effectifs ».
 

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