Édition du jeudi 28 mai 2020

Coronavirus
Deuxième tour des municipales : le gouvernement « ouvert à des assouplissements »

Alors que, comme prévu, le décret de convocation des électeurs pour le second tour des élections municipales, le 28 juin, a été publié ce matin au Journal officiel, les discussions vont bon train sur l’organisation matérielle de ce second tour et la manière de le rendre le plus sûr possible sur le terrain sanitaire. 

Dépôt des candidatures dès demain
À la sortie du Conseil des ministres, hier, lors duquel le décret de convocation des électeurs a été présenté, le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, en a détaillé le contenu. 
Le ministre a commencé par rendre hommage aux équipes sortantes et souhaiter « bon vent » aux nouveaux élus. Il les a assurés que « l’État serait totalement engagé à leurs côtés dans la gestion de la crise comme, demain, pour mettre en œuvre le projet sur lequel ils ont été élus ». 
Il a ensuite donné des éléments de calendrier. Comme Maire info l’annonçait dès lundi dernier, il a confirmé que le dépôt des candidatures pour le second tour débutera demain, vendredi 29 mai, pour s’achever mardi 2 juin. La campagne électorale commencera le lundi 15 juin. Un second décret convoque les électeurs de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie, également pour le 28 juin.
« Cette décision est un choix prudent, a expliqué Christophe Castaner. Si d’ici 15 jours le Conseil scientifique estimait que la situation ne permettait plus l’organisation du scrutin (…), le second tour serait annulé et les élections reportées. » Cette éventualité a été préparée par la présentation de deux projets de loi permettant un éventuel report : le premier permet l’annulation du premier et du second tour, dans les 5 000 communes où le premier tour n’a pas été conclusif, et de fixer « au plus tard » à janvier 2021 l’organisation du premier et du second tour (lire article ci-dessous). Le deuxième projet de loi reporterait d’un an les élections sénatoriales prévues en septembre 2020. 

Organisation du scrutin
Sur l’organisation de la campagne et du scrutin, « des règles claires vont être adoptées » dans les semaines qui viennent : « Nous avons un mois pour réinventer notre manière de faire campagne et pour préparer les opérations de vote », a déclaré Christophe Castaner. 
Deux pistes se dessinent pour mieux sécuriser les opérations de vote (lire Maire info du 26 mai) : s’appuyer davantage sur le vote par procuration ; et envisager une possibilité de vote par correspondance. Interrogé sur ce dernier sujet, le ministre a répondu : « Le vote par correspondance a existé dans notre pays jusqu’en 1975. Certaines associations d’élus nous ont demandé d’examiner la possibilité de (rétablir) le vote par correspondance. C’est lourd et difficile, cela implique une modification législative, mais rien n’est impossible. Il faut avoir en tête le coût, la faisabilité, les délais assez courts. (…) Mais je ne souhaite rien exclure. » Il a évoqué la « lourdeur » de la procédure pour les communes : le vote par correspondance supposer d’intégrer dans l’urne les enveloppes reçues par voie postale, en ayant émargé pour chacune d’entre elles, ce qui suppose « deux à trois heures de travail supplémentaire pour les membres du bureau, avant le scrutin », soit des opérations qui pourraient débuter à « 5 h ou 6 h du matin ». 
Le ministre a également évoqué la possibilité d’ouvrir tous les bureaux de vote jusqu’à 20 h, afin de pouvoir lisser la fréquentation des électeurs. Une instruction sera donnée aux préfets d’autoriser l’ouverture jusqu’à 20 h lorsqu’elle sera « demandée par les maires ». 

Comment transformer une proposition de loi en une autre
Sur les procurations, Christophe Castaner a rappelé l’état du droit : « Aujourd’hui il est possible d’avoir une procuration d’une personne résidant dans la même commune que vous et une procuration d’une personne résidant à l’étranger. » Le ministre s’est dit « ouvert à étudier certains assouplissements » proposés par des parlementaires, comme le fait de pouvoir disposer de deux procurations, ou de pouvoir recevoir une procuration d’un membre de sa famille n’habitant pas la même commune. En revanche, « aller au-delà de deux nous poserait un problème informatique ». 
Ces « assouplissements » figurent en effet dans plusieurs propositions de loi issues du Sénat, que Maire info décrivait avant-hier. À ce propos, un étonnant épisode s’est déroulé en commission des lois du Sénat, hier. 
Rappelons que trois textes avaient été déposés sur ce sujet, dont un du sénateur Cédric Perrin (LR, Territoire de Belfort) et un du président de la commission des lois, Philippe Bas (LR, Manche). Pour des raisons de délais, la proposition de Philippe Bas n’a pu être inscrite à l’ordre du jour de la commission des lois, et seule celle de Cédric Perrin l’a été. 
En commission, hier, la mesure essentielle du texte de Cédric Perrin a été supprimée. Il s’agissait de permettre aux membres des bureaux de vote de contrôler la régularité des procurations. La commission des lois a rappelé que ce rôle ne pouvait incomber qu’aux maires et au juge de l’élection ; l’article a été supprimé. 
En revanche, par amendement, la commission a ajouté au texte… toutes les dispositions de la proposition de loi de Philippe Bas. Jusque dans son titre, le texte de Cédric Perrin a été remanié pour devenir une nouvelle mouture de la proposition de loi de Philippe Bas qui, sortie par la porte, revient donc par la fenêtre.
Ce texte sera examiné en séance publique dès lundi 2 juin. Dans la mesure où le projet de loi présenté hier par le gouvernement ne contient aucune mesure relative à l’organisation du scrutin, il se pourrait bien que la proposition de loi Perrin-Bas devienne le véhicule législatif par lequel le gouvernement va faire passer ses décisions sur l’organisation du scrutin. Il reste donc à attendre les amendements gouvernementaux à ce texte. Réponse le 2 juin.

Franck Lemarc

Télécharger le texte de la commission de la proposition de loi Perrin-Bas.

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Coronavirus
Ce qui se passerait si le deuxième tour était à nouveau reporté

Le gouvernement a donc, comme prévu, présenté hier et déposé aussitôt à l’Assemblée nationale un texte « conservatoire » permettant, si nécessaire, l’annulation du deuxième tour des élections municipales et leur report. Ce texte ne sera activé que si le Conseil scientifique considérait, en raison d’une reprise de l’épidémie, que le scrutin du 28 juin ne pourrait se tenir dans des conditions de sécurité sanitaire suffisante.
Que prévoit, dans ce cas, le gouvernement ?

Sanctuarisation des élus du 15 mars dans les communes de moins de 1000 habitants
Le projet de loi présenté hier dispose à l’article 1er que « l’organisation du second tour (…) est annulée ». Dans ce cas, il faudrait réorganiser les deux tours de l’élection. Ces deux tours se tiendraient « lorsque la situation sanitaire le permet[tra] et au plus tard au mois de janvier 2021 ». Plus question, donc, de fusionner l’organisation des municipales avec celles des départementales et des régionales qui vont avoir lieu en mars 2021, comme cela a été évoqué un moment.
La principale information à retenir est que le dispositif serait bien différent dans les communes de plus et de moins de 1000 habitants. 
Dans les premières (plus de 1 000 habitants, scrutin de liste), y compris dans les secteurs de Paris, Lyon et Marseille et dans les circonscriptions de la métropole de Lyon, là où le premier tour du 15 mars n’a pas été décisif, celui-ci serait annulé. Les deux tours seraient entièrement rejoués, à une date fixée par décret après avis du Conseil scientifique. Le décret devrait être publié au plus tard six semaines avant l’élection. 
Dans les communes de moins de 1000 habitants qui n’ont pas élu leur conseil municipal complet (elles sont au nombre de 3 224), en revanche, les sièges pourvus le 15 mars ne seraient pas remis en cause. Un nouveau scrutin à deux tours serait organisé, à la même date, mais portant uniquement « sur les sièges vacants », « pour quelque cause que ce soit », précise le projet de loi. Il s’agirait donc de pourvoir aussi bien les sièges restés vacants après le premier tour que ceux qui le seraient devenus entretemps, pour démission, décès, etc. 
Néanmoins, les conseillers municipaux élus le 15 mars dans ces communes, s’ils verraient bien leur élection confirmée, n’entreraient pas en fonction avant la nouvelle élection à deux tours – soit en janvier prochain au plus tard. 
Dans toutes les communes concernées, de moins ou de plus de 1000 habitants, les équipes sortantes verraient donc leur mandat prolongé jusqu’à ces nouvelles élections. 

Dans les intercommunalités
Les mandats de conseillers communautaires seraient prorogés dans les mêmes conditions. Mais le projet de loi prévoit une évolution majeure dans les conseils communautaires.
On se rappelle que les textes pris depuis le début de l’état d’urgence sanitaire prévoient que les exécutifs des conseils communautaires restent en fonction, même si ses membres n’ont plus de mandat – qu’ils aient été battus ou qu’ils ne se soient pas représentés. Il existe donc à ce jour des conseils communautaires dans lesquels des vice-présidents, voire le président, n’ont plus de mandat – situation qui ne pourrait naturellement perdurer trop longtemps si le deuxième tour devait être annulé. 
Le gouvernement a donc prévu une solution de repli : en cas d’annulation du second tour, une élection « provisoire » d’un nouvel exécutif aurait lieu dans les conseils communautaires – provisoire « jusqu’à ce que l’ensemble des conseils municipaux des communes membres de l’EPCI soit renouvelé ». Cette élection (président, vice-présidents et autres membres du bureau) devrait avoir lieu « au plus tard trois semaines » après la date d’entrée en vigueur de la loi annulant le second tour. 
Après l’éventuelle élection en janvier 2021 au plus tard, si ce scrutin n’a pas fait évoluer la composition du conseil communautaire, cette élection de l’exécutif deviendrait définitive. Sinon, une nouvelle élection aurait lieu. 

Dispositions diverses
Le projet de loi prévoit aussi, toujours dans le cas où le second tour serait annulé, des dispositions relatives au remboursement des dépenses de campagne. Il est notamment à retenir que les dépenses déjà engagées en vue d’un second tour, avant l’annonce d’un report, seraient remboursables. 
Un autre projet de loi, organique, a lui été déposé au Sénat. Il prévoit que si le second tour devait être annulé, les élections sénatoriales prévues en septembre prochain seraient reportées d’un an. Il s’agit du renouvellement des sénateurs des départements de la série 2 (178 sièges, de l’Ain à l’Indre ; du Bas-Rhin à l’Yonne sauf la Seine-et-Marne ; Guyane, Polynésie française, Saint-Barthélemy, Saint-Martin, Wallis-et-Futuna, Français hors de France). 
Ce texte, si nécessaire, serait examiné au Sénat le 17 juin.

F.L.

Télécharger le projet de loi et le projet de loi organique.

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Déconfinement
StopCovid : le Parlement donne son feu vert à l'application controversée de traçage numérique

Les deux assemblées ont approuvé, hier, l’activation de l'application de traçage numérique StopCovid pour lutter contre une potentielle deuxième vague de l’épidémie de covid-19, alors que la phase 2 du déconfinement s'ouvre le 2 juin (338 députés ont voté pour à l'Assemblée nationale, contre 215 et 21 abstentions, 186 voix pour au Sénat, contre 127 et 29 abstentions). Téléchargeable « dès ce week-end », dixit le secrétaire d’État au Numérique Cédric O, elle doit permettre, en complément des « brigades sanitaires » et sur la base du volontariat, de détecter par bluetooth les malades et les cas contacts croisés par les citoyens dans les lieux publics afin de « casser » d’éventuelles nouvelles « chaînes de contamination » (lire Maire info du 21 avril). 
Ainsi, précise en résumé Cédric O, « l’application enregistrera sur votre téléphone portable la liste des personnes croisées pendant plus de quinze minutes à moins d’un mètre - du moins celles qui l’ont également installée –, sans que vous ne connaissiez jamais leur identité. Si vous êtes testé positif, StopCovid vous donnera la possibilité de notifier volontairement et instantanément ces mêmes personnes qu’elles ont été en contact avec une personne contaminée au covid-19 afin qu’elles puissent s’isoler, prévenir un médecin et, si nécessaire, être testées ».

Pas de transformation de l’État en « État policier »
Clivante, l’application pose, en toile de fond, la question de l’utilisation des données personnelles de ses utilisateurs. Le gouvernement, par la voix de la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, assure avoir obtenu toutes les « garanties pour le respect de notre vie privée et la sauvegarde des libertés individuelles ». L’application « n’est pas un prétexte pour que l’État se transforme en État policier contrôlant les faits et gestes de nos concitoyens » : elle respecterait, toujours selon la ministre, les principes de « limitation des finalités », de « proportionnalité » et de « licéité ». Autrement dit, les données seront « utilisées pour atteindre un objectif précis et déterminé d’avance » et seules celles jugées « pertinentes et strictement nécessaires au regard de la finalité poursuivie par le traitement » seront traitées, fait valoir la garde des Sceaux. 
Qui insiste sur le « libre consentement des individus » : « Aucune conséquence négative n’est attachée au choix de ne pas recourir à l’application ou à certaines de ses fonctionnalités. » Ceux qui la refuseraient devraient pourtant, selon le lien établi par Cédric O, « accepter le risque conséquent et, pour le dire plus crûment, les contaminations supplémentaires, les malades supplémentaires, les morts supplémentaires et le risque de reconfinement supplémentaire ».

« Un risque politique »
Derrière cette application, Jean-Luc Mélenchon (Bouches-du-Rhône, La France insoumise) voit un « risque politique », à savoir « la tendance des pouvoirs dans ces moments de l’histoire de transformer ce qui est volontaire en obligatoire ». Et le leader des Insoumis d’imaginer : « Après avoir jugulé un danger, le virus du covid-19, on pourrait en juguler d’autres par une connaissance mutuelle plus approfondie. Êtes-vous mauvais payeur au moment où vous rentrerez dans le magasin ? Le téléphone dira ''cet homme est déjà dans le rouge, ne lui donnez plus rien !'' », s’exclame-t-il, avant de se lancer dans une critique du « modèle des big data ». Charles de Courson (Marne, Libertés et territoires) défend un raisonnement similaire : « Si vous nous assurez, madame la garde des Sceaux et monsieur le secrétaire d’État, vouloir déployer l’application dans le respect des principes qui encadrent la protection des données personnelles, rien ne nous garantit que, demain, un autre exécutif s’inspirant de Big Brother ne s’appuiera pas sur ce précédent – le premier précédent – pour rogner davantage les libertés publiques. »

« Un symbole d'un projet à contre-courant »
Au nom des Républicains, Damien Abad (Ain) réduit, quant à lui, cette application à un « symbole d’un projet à contre-courant et désormais largement dépassé ». « C’est donc une application mort-née, qui arrive trop tard, un peu comme la cavalerie qui arrive toujours après la bataille dans les bandes dessinées de Lucky Luke. Elle sera davantage un gadget qu’un outil efficace de lutte contre la pandémie (…) Combien de Français iront sur Google Play ou l’App Store pour télécharger l’application ? Bien trop peu pour que vous ayez un quelconque résultat probant », critique encore le chef de file des Républicains à l’Assemblée, qui a voté contre la mise en service de l’application contrairement à la majorité de ses homologues du Sénat. « Un peu vaut mieux que rien du tout, surtout lorsqu’il faut briser les reins de cette épidémie », harangue Bruno Retailleau, président du groupe LR, pour qui « n’écarter aucune solution » sonne comme un « devoir ».
« Cette application est-elle adaptée ? » à la fracture numérique et aux modes de vie de chaque territoire, s’interroge encore la députée Cécile Untermaier (PS, Saône-et-Loire). « En milieu urbain, sans doute, dans les secteurs d’affluence, mais beaucoup moins en milieu rural où elle se heurterait à l’identification quasi certaine des personnes contaminées par le coronavirus. Son adaptation est donc limitée à une catégorie de territoire, à la nature des réunions, mais aussi à un type de population éloignée du numérique ».

La Cnil et la CNCDH en arbitres
Souvent citée par les intervenants, qu’ils soient des défenseurs ou des détracteurs de l’application, la Cnil a estimé « que l’application peut être légalement déployée dès lors qu’elle apparaît être un instrument complémentaire du dispositif d’enquêtes sanitaires manuelles et qu’elle permet des alertes plus rapides en cas de contact avec une personne contaminée, y compris pour des contacts inconnus ». Mais a aussi formulé plusieurs recommandations nouvelles, telles que « l’amélioration de l’information fournie aux utilisateurs, en particulier s’agissant des conditions d’utilisation de l’application et des modalités d’effacement des données personnelles », « la nécessité de délivrer une information spécifique pour les mineurs et les parents des mineurs », « la confirmation dans le décret à venir d’un droit d’opposition et d’un droit à l’effacement des données pseudonymisées enregistrées » ou encore « le libre accès à l’intégralité du code source de l’application mobile et du serveur » (une recommandation à laquelle le gouvernement a souscrit). 
La Commission nationale consultative des droits de l’homme, elle, se montre bien plus réticente à l’activation de l’application. « Le volontariat et l’anonymat mis en avant par les pouvoirs publics n’excluent pas ces dangers. En suscitant des réactions d’anxiété, de stigmatisation et de discriminations à l’égard des personnes contaminantes ou contaminées ou de celles qui refuseront d’installer l’application, les pouvoirs publics fragilisent la cohésion sociale, s’inquiétait-elle le 26 mai. L’application StopCovid, d’efficacité incertaine, porte, dans ses modalités d’accès et d’utilisation, une atteinte manifestement disproportionnée aux droits et libertés de l’ensemble des citoyens. »

Ludovic Galtier

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Santé publique
« Ségur de la santé » : les maires déterminés à se faire entendre

Replacer les Agences régionales de santé à l'échelle départementale, sous contrôle du préfet, redonner du pouvoir aux maires à la tête des hôpitaux. Voilà deux premiers messages forts qui devraient figurer dans la contribution des maires de France au « Ségur de la santé ». Lancée lundi 25 mai par le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, cette consultation va durer un mois. Elle fait suite à l'annonce du président de la République fin mars d'un plan massif d'investissement et de revalorisation des carrières de l'hôpital. Elle arrive surtout à l'issue du pic de la crise du covid-19, lors de laquelle le système hospitalier n’est pas passé loin de l’asphyxie.
Devant les hôpitaux, les professionnels de santé et les syndicats ont repris leurs manifestations hebdomadaires, tous les mardis matin, et une manifestation nationale à l'appel de 12 organisations syndicales est annoncée pour le 16 juin, pour réclamer plus de moyens pour l'hôpital, un moratoire sur les restructurations hospitalières, la revalorisation des salaires, une révision de la gouvernance des établissements.  

Concertation d'un mois

Le champ de ce « Ségur » (du nom de l'avenue où est situé le ministère de la Santé à Paris), a été élargi au-delà du seul hôpital. L'objectif fixé par le gouvernement est de « bâtir les fondations d’un système de santé encore plus moderne, plus résilient, plus innovant, plus souple et plus à l’écoute de ses professionnels, des usagers et des territoires, avec des solutions fortes et concrètes ». 
Pour la méthode, plus de 300 professionnels de santé, élus, syndicats, usagers, institutionnels ont été réunis lundi pour son lancement. Mardi, le Comité Ségur national a été installé – mais sans les professionnels des centres de santé. Un premier couac dont « s'étonnent » la Fédération nationale des centres de santé (FNCS) et l'Union syndicale des médecins de centres de santé (USMCS) dans un courrier envoyé hier au Premier ministre hier. 
Le pilotage du Comité Ségur national a été confié à Nicole Notat, l'ancienne secrétaire générale de la CFDT. Ses conclusions sont attendues pour la mi-juillet. Le gouvernement dit qu'il prendra également en compte les résultats de la concertation citoyenne lancée il y a quelques jours par le Conseil économique, social et environnemental (CESE). Celle-ci se clôturera le 25 juin.

La contribution des maires

Les maires sont dans les starting-block. Représentés par François Baroin, le président de l’AMF, au lancement du Ségur, le relais a été repris mardi par Isabelle Maincion, maire de La Ville-aux-Clercs (41). Rapporteure de la commission santé de l'AMF, celle-ci a réuni avec Bernard Vauriac, maire de Saint-Jory-de-Chalais (24) et président de la commission, une quarantaine de maires et d'adjoints à la santé mercredi 27 mai par visioconférence. « S'il faut renverser la table, nous le ferons », a-t-elle prévenu, donnant ainsi le ton à la contribution que les maires comptent rapidement apporter. 
Bien que n'ayant pas de compétence obligatoire sur la santé, les maires sont en ligne directe sur les questions de l'offre et de l'accès aux soins, et la crise liée au covid-19 n'a fait que renforcer leur rôle, jusqu'à pallier certains manques de l’État. « Sans nous, des infirmières à domicile n'avaient pas de gel hydroalcoolique », explique un maire. La crise ravive la valeur de la « proximité ». « Sans nous, c'est l'hôpital local et le SSIAD qui en dépend qui étaient totalement oubliés du groupement hospitalier de territoire pour la fourniture de masques », évoque un autre. Le temps du « big is beautiful » est révolu, espère une élue. 
Les maires défendent une offre de soins plus territorialisée, avec une organisation du système de santé à l’échelon départemental, en renforçant le niveau départemental des ARS. Les critiques sur les dysfonctionnements de ces dernières sont récurrentes. « Nous avons découvert que notre ARS ne fonctionnait qu'avec très peu d'agents et aucun chargé de la communication », cherche toutefois à temporiser un élu. L'illustration d'un système en équilibre précaire.

Défense des hôpitaux locaux

Autre thème cher aux maires : l'ancrage de l'hôpital sur son territoire. Ils entendent donc profiter de ce « Ségur de la santé » pour obtenir ce qu'une précédente réforme ne leur a pas permis :  restaurer les conseils d'administration des hôpitaux et en prendre la présidence. Ils veulent également stopper les fermetures de services hospitaliers. Des points largement partagés avec d'autres associations d'élus comme celle des petites villes de France (APVF) qui dans un communiqué du 25 mai « (appelle) le gouvernement à mettre un coup d’arrêt aux fermetures des lits en milieu hospitalier dont le chiffre s’élève à plus de 100 000 en moins de 20 ans ».
Sur l'offre de santé en ville, d'autres sujets d'inquiétudes pointent, liés aux conditions de reprise d’activité de certains professionnels de santé – certains pourraient être amenés à fermer leur cabinet. Les maires s’inquiètent également de l'équilibre financier des centres de santé, ouverts justement par des collectivités pour empêcher l'avancée du désert médical.

Emmanuelle Stroesser




Coronavirus
Soutien aux collectivités : Gérald Darmanin confirme qu'il n'y aura pas de baisse des dotations et évoque la « solution » du FCTVA 

Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a estimé, hier, que le Fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pouvait être une « solution » - « avec ses avantages et ses inconvénients » - pour soutenir financièrement les collectivités en pleine crise sanitaire et économique. Il a également confirmé que les dotations aux collectivités ne devraient pas baisser et que d’autres dispositions spécifiques seront « bientôt » dévoilées dans le prochain projet de budget rectificatif.

Trésorerie insuffisante
Afin d'atténuer le choc financier engendré par la crise sanitaire et de satisfaire une revendication des élus locaux, « ne pourrait-on prévoir une récupération de la TVA dès la première année, notamment pour les communes ayant effectué un investissement de plus de 100 000 euros, par exemple ? ». C’est la demande faite, lors des questions au gouvernement, par le sénateur de l’Aveyron, Alain Marc, qui juge « indispensable » de préserver la capacité financière des communes « afin qu'elles continuent d'assurer les services essentiels à la population », mais aussi dans le but de « relancer les investissements indispensables au soutien du tissu économique local ».
« Nombre de communes, faute de trésorerie suffisante, doivent contracter des prêts relais pour financer leurs investissements, et notamment les dépenses de TVA », a mis en avant le sénateur. Une contrainte qui fait l’effet d’un « frein à l'initiative locale » et s’avère, selon lui, « pénalisant(e) dans la mesure où les élus risquent, à long terme, de s’interdire toute volonté de développement des équipements locaux entraînant, ainsi, une dévitalisation, notamment dans les campagnes ».
Le FCTVA est, en effet, versé aux collectivités avec un décalage de deux ans après la réalisation de dépenses d’investissement qui y sont éligibles. Ce décalage est réduit à un an pour les collectivités qui s’étaient engagées à augmenter leurs dépenses d’investissement dans le cadre du plan de relance de l’économie de 2010. Le versement du FCTVA avec un an d’écart concerne d’ailleurs la majorité des bénéficiaires du FCTVA. Les communautés d’agglomération et les communautés de communes font, quant à elles, exception puisqu’elles voient le montant de cette TVA leur être restitué dans l'année.

FCTVA : la difficulté du « one shot » 
Le FCTVA « peut être une solution », mais « il y a une petite difficulté : c'est un one shot » [un seul coup], a relativisé le ministre de l’Action et des Comptes publics, prévenant que « si vous avancez tout la première année, se posera la question de la deuxième année ». Sans compter que, selon lui, « la question de l'investissement se posera plus en 2021 encore qu’en 2020 ». Les locataires de Bercy ont estimé, fin avril, devant la commission des finances de l’Assemblée nationale, que si les pertes de recettes fiscales pourraient atteindre les 4 milliards d'euros en 2020, elles pourraient plonger à 10 milliards d’euros en 2021.
Reste que dans un courrier adressé au président de l'AMF début mai, le gouvernement a proposé de mettre en place un « versement anticipé » des attributions de ce fonds. Il a ainsi proposé « un passage du droit commun du reversement deux ans après les dépenses à un reversement l’année suivante ». Ce qui permettrait un versement supplémentaire d’environ « 1,5 milliard d’euros » dès 2021, selon les données de Bercy (lire Maire info du 12 mai). Cette proposition du gouvernement reprend une demande formulée par l’AMF, qui souhaite cependant un dispositif plus large, permettant d’avancer d’un an le versement du FCTVA y compris aux collectivités soumises actuellement au décalage d’un an. En outre, les collectivités peuvent d’ores et déjà demander aux services préfectoraux un acompte exceptionnel de 70 % du montant prévisionnel de FCTVA (lire Maire info du 11 mai
On peut également rappeler qu’un dispositif de préfinancement de ce fonds va être expérimenté, dès septembre, à Mayotte (qui amènerait de 20 à 25 millions d’euros de ressources). Une extension aux autres départements et régions d’outre-mer est envisagée l’an prochain « si les résultats de l’expérimentation mahoraise sont concluants » (lire Maire info du 26 mai).

Dotations : « Ne pas reproduire les erreurs du passé »
D’autres éléments de réponse pourraient également intégrer le troisième projet de loi de finances rectificatif (PLFR 3) qui doit comprendre des « dispositions relatives aux collectivités territoriales », a indiqué Gérald Darmanin. A ce sujet, « le Premier ministre rendra bientôt les derniers arbitrages, une fois reçues les conclusions de la mission » évaluant l’impact de l'épidémie sur les finances locales du président de la délégation aux collectivités de l’Assemblée, Jean-René Cazeneuve (lire Maire info du 30 avril). 
La question des difficultés particulières rencontrées par les collectivités touristiques et ultramarines devrait y être posée. « Les collectivités territoriales ne sont pas logées à la même enseigne : seulement 30 % de leurs recettes sont sensibles à l'activité économique, a souligné Gérald Darmanin. Les communes touristiques ou celles qui perçoivent de l'octroi de mer sont plus touchées (et) ce sera aussi le cas, demain, des départements ».
Reconnaissant que les collectivités territoriales sont « celles qui investissent le plus et soutiennent l'économie sur l'ensemble du territoire », le maire de Tourcoing a assuré que les dotations ne diminueraient pas : « Malgré la crise, il ne faut pas reproduire les erreurs du passé en baissant les dotations. C'est pourquoi le Premier ministre a décidé de ne pas s’engager vers la baisse des dotations et de discuter avec les associations d'élus » et qu’il « réunira, (ce) vendredi, à Matignon les communes, les intercommunalités, les départements et l'outre-mer ».

A.W.

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Journal Officiel du jeudi 28 mai 2020

Ministère du Travail, du Plein emploi et de l'Insertion
Ordonnance n° 2020-638 du 27 mai 2020 portant diverses dispositions sociales pour faire face à l'épidémie de covid-19
Premier ministre
Décret n° 2020-635 du 27 mai 2020 relatif à l'entrée en vigueur immédiate d'un arrêté
Ministère des Outre-mer
Décret n° 2020-644 du 27 mai 2020 fixant la date du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, et portant convocation des électeurs
Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Décret n° 2020-642 du 27 mai 2020 fixant la date du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon, et portant convocation des électeurs
Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer
Décret n° 2020-643 du 27 mai 2020 relatif au report du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon de 2020 et à l'adaptation du décret du 9 juillet 1990 à l'état d'urgence sanitaire
Ministère chargé de la Ville
Arrêté du 18 mai 2020 portant nomination au conseil d'administration de l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS)

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