Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du mercredi 7 octobre 2020
Budget

Recentralisation des ressources des collectivités : l'AMF demande la « réécriture des principales dispositions » du PLF 2021

Le projet de loi de finances (PLF) pour 2021 « poursuit et amplifie la mise sous tutelle financière des communes et de leurs intercommunalités », estime l’AMF qui pointe la réforme de la taxe d’habitation, la baisse des impôts dits de production et la nationalisation de la taxe sur la consommation finale d’électricité. Des mesures « à rebours des déclarations du gouvernement sur le renforcement des libertés locales », selon l’association qui a réuni hier son bureau. 

Une neutralité des réformes « inexacte » 
Elle demande ainsi « la réécriture des principales dispositions recentralisant les ressources des collectivités »  inscrites dans le projet de budget, « la poursuite de la recentralisation des ressources constitu(ant) la preuve d’un changement de nature de la décentralisation ».
Dans ce contexte, l’AMF réclame un « discours de vérité »  car, « depuis 2017, le gouvernement communique sur la neutralité de ses réformes, ce qui est malheureusement inexact ». Le PLF pour 2021 poursuivrait ainsi, selon elle, « le travail de sape de la décentralisation »  commencé il y a trois ans avec la suppression de 23 milliards d’euros de recettes de taxe d’habitation, dont le produit sera désormais « en partie à la main de l'État, qui pourra unilatéralement en faire varier le montant chaque année ». 
À cela s’ajoute la suppression annoncée de 3,4 milliards d’euros de taxes foncières pour les entreprises à partir de l’an prochain. Or, selon l’AMF et contrairement à ce qui est répété par le gouvernement, « l’État ne compensera pas la totalité de la perte »  puisque « le montant compensé sera calculé avec des taux gelés en 2020 et l’évolution des bases sera ralentie ». 
La controverse autour de la baisse des impôts dits de production a d’ailleurs fait l’objet d’une longue discussion hier à l’Assemblée, lors de l’examen par la commission des finances du PLF pour 2021. Plusieurs députés ont critiqué l’absence de simulations concernant cette disposition et la teneur des compensations aux collectivités : « Bien entendu que tous les gouvernements nous expliquent que la compensation se fait à l’euro tout le temps. Mais au bout des années, l’addition est lourde. C’est des milliards d’euros qui ne sont plus compensés aux collectivités », a rappelé le député du Val-d’Oise François Pupponi (Libertés et territoires), qui a dénoncé une réforme faite « à l’aveugle ».
Enfin, le projet de budget prévoit également la nationalisation de 2,3 milliards d’euros, dont 906 millions d’euros pour le bloc communal, de taxe sur la consommation finale d’électricité. « D’ici à 2023, les collectivités ne pourront plus délibérer sur le montant du produit à percevoir », regrette l’AMF qui redoute « l’impact pour les ménages d’une tarification locale de l’électricité portée au maximum ».

« Sous-traitants de l’administration centrale » 
Et le secrétaire général de l’association, Philippe Laurent, de présager que « dans quelques années, les impôts locaux auront disparu (...) remplacés par des dotations »  qui sont « de plus en plus souvent fléchées vers les dépenses que les préfets estiment souhaitables ». Ainsi, « les budgets locaux deviennent des budgets annexes de celui de l’Etat, et les maires deviennent de simples sous-traitants de l’administration centrale », estime le maire de Sceaux dans une tribune qu'il a signée hier dans La Gazette des communes
Face à ce qu’il considère comme « la fin des impôts locaux »  - entraînant « la disparition de la responsabilité fiscale, donc politique, des assemblées locales élues au suffrage universel direct »  - , le secrétaire général de l'AMF s’indigne : « S’il s’agit d’appliquer partout, et dans tous les domaines, la politique définie « en haut », autant supprimer l’élection et nommer des exécutants. C’était le cas sous l’Empire... » 

Affaiblissement des investissements
Au-delà de ces remplacements d'impôts locaux par des dotations, l’AMF déplore que le gouvernement fasse reposer son plan de relance sur « le seul renforcement des dotations d'investissement (Dsil), lesquelles relèvent du seul préfet », et que « rien (ne soit) prévu pour compenser au bloc communal les pertes tarifaires et les dépenses nouvelles induites par la crise sanitaire ». « C'est la capacité d'autofinancement et donc la capacité pour les communes et les intercommunalités de participer au plan de relance qui est durablement affectée », explique l’association qui s’inquiète qu’« une part de l’autofinancement risque d’être affectée à une épargne de précaution pour faire face aux aléas, affaiblissant ainsi le financement des investissements ».

A.W.

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