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Édition du vendredi 22 octobre 2021
Social

« L'indemnité inflation » sera versée en janvier aux agents de la fonction publique

Le Premier ministre, Jean Castex, a annoncé hier soir le versement d'une « indemnité inflation » de 100 euros à tous les Français gagnant moins de 2 000 euros net par mois. Les salariés du privé la recevront en décembre, les agents publics en janvier. Premiers éléments d'explication et réactions.

Par Franck Lemarc

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© TF1

Après le « bouclier énergie », « l’indemnité inflation ». Sur TF1 hier, le Premier ministre a annoncé les mesures très attendues décidées par le gouvernement pour tenter de faire face à l’envolée des prix, en particulier ceux de l’énergie. 

C’est une question qui monte depuis la rentrée, au point que, selon un récent sondage, le pouvoir d’achat serait aujourd’hui la préoccupation numéro un des électeurs, à moins de six mois de l’élection présidentielle : hausse des prix de l’énergie (gaz, électricité, fioul, carburants), mais aussi hausse beaucoup plus générale liée à une pénurie des matières premières et des emballages, qui renchérit le prix y compris de nombreuses denrées de première nécessité. Selon un cabinet d’études, le prix du blé a grimpé de 14,6 % sur le marché mondial depuis le début 2021, celui du sucre de 29,5 %, du café, de 62 %. Le prix de la pâte à papier a grimpé de presque 50 %. Toutes ces hausses se répercutent ou vont se répercuter sur les produits du quotidien : selon le même cabinet d’étude (NielsenQ), le prix des pâtes alimentaires devrait augmenter dans les semaines qui viennent de 5 à 12 %, celui de l’huile de 7 à 16 %, du beurre de 2 à 9 %... 

Même si la hausse des prix de l’énergie est sans commune mesure (+ 60 % sur le tarif réglementé du gaz depuis le début de l’année), ces augmentations de prix se font de plus en plus sentir pour les ménages.
Ces hausses de prix ne concernent d’ailleurs pas que les ménages : pour les collectivités, par exemple, la hausse des prix dans l’alimentaire va mécaniquement avoir un impact sur l’activités des cantines scolaires. Et un dossier extrêmement sensible, en ce moment, est celui du coût des matières premières qui s’envolent et pèsent fortement sur les chantiers de travaux publics. 

« Indemnité classes moyennes » 

Bien qu’il explique, depuis des semaines, que malgré les apparences le pouvoir d’achat des Français ne cesse d’augmenter, le gouvernement a finalement décidé de prendre des mesures. Plusieurs solutions étaient possibles, allant d’une subvention directe à une baisse des taxes sur l’énergie ou sur les carburants. Finalement, le gouvernement a tranché : ce sera une indemnité de 100 euros versée à tous ceux qui gagnent « moins de 2 000 euros net », qu’ils soient salariés, chômeurs ou retraités. 

« C’est une indemnité classes moyennes », a développé Jean Castex hier soir – un élément de langage un peu surprenant, dans la mesure où les personnes au smic, voire au RSA, les retraités pauvres, etc., toucheront heureusement cette indemnité, qui ne concernera donc pas que les « classes moyennes ». 

Il s’agit bien d’une indemnité individuelle, et non calculée sur les revenus d’un ménage. Il n’y aura aucune démarche à faire : l’aide sera versée directement par les employeurs, pour les salariés, par l’Urssaf pour les indépendants, par les caisses de retraites pour les retraités et par Pôle emploi pour les chômeurs. 

Il reste maintenant à connaître les modalités pratiques du dispositif, ce qui n’est pas de moindre importance pour les employeurs territoriaux : la fonction publique territoriale est, des trois versants de la fonction publique, celle qui comprend le plus d’agents de catégorie C, donc directement concernés par la mesure. Ils vont devoir, si l’on comprend bien les propos du Premier ministre, « avancer »  cette indemnité de 100 euros, sur la paye du mois de janvier. Quand et comment l’État va-t-il les rembourser ? Il n’y a pas encore de réponse à cette question pour l’instant, et l’on peut espérer que la DGCL va y pourvoir rapidement.

Blocage du prix du gaz

Le Premier ministre a également annoncé hier que le prix du gaz, qui devait être « gelé »  jusqu’au mois d’avril, sera finalement bloqué jusqu’à la fin de l’année 2022. Selon quel dispositif, là encore ? Le 30 septembre dernier, Jean Castex avait annoncé que ce gel serait ensuite « rattrapé »  par une moindre diminution du prix du gaz, lorsque les prix sur le marché mondial baisseraient. Et le fait que le gouvernement bloque les prix à un niveau extrêmement élevé ne résout pas, loin de là, tous les problèmes. 

Réactions globalement négatives

Les réactions n’ont d’ailleurs pas été très enthousiastes, depuis hier soir, dans les milieux politiques comme associatifs. En dehors de ceux de la majorité, les commentaires sont globalement très critiques, notamment sur le fait que cette indemnité est distribuée à tous, et ne vise pas spécifiquement les personnes qui ont un usage important de la voiture, en particulier dans les campagnes. 

Les mots « d’aumône »  et de « charité »  reviennent en force depuis hier soir sur les réseaux sociaux. Philippe Bas, pour les LR, demande « une réforme, pas une aumône ». « Aurons-nous assez de sens civique pour nous indigner du chèque inflation, (…) un cadeau payé par l’aggravation du déficit et de la dette ? », s’interroge le sénateur de la Manche. Le maire LR du Touquet, Daniel Fasquelle, demande : « 38 millions de Français vont recevoir 100 euros, qu’ils aient ou non une voiture, qu’ils aient ou non accès aux transports en commun, qu’ils aient ou non des km à faire chaque jour pour se rendre au travail. Une mesure juste, monsieur le Premier ministre ? » 

À gauche, la maire de Paris Anne Hidalgo estime que les annonces de Jean Castex « relèvent de l’improvisation et ne sont pas à la hauteur pour les Français qui peinent à boucler leurs fins de mois. »  Pour la candidate à l’élection présidentielle : « À situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle : une baisse massive et temporaire de la fiscalité sur l’essence. »  Le socialiste David Assouline dénonce « un chèque élection plutôt qu’un chèque inflation », tandis qu’Europe écologie Les Verts fustige « des mesures d’urgence qui ne s’attaquent pas au cœur du problème ». La France insoumise ironise sur « une indemnité de la trouille »  et demande « le blocage des prix du carburant ». 

Côté associations de consommateurs enfin, l’enthousiasme n’est pas non plus partout de mise : « Une mesure pas immédiate, pas équitable, pas ciblée », pour l’UFC Que Choisir. Une indemnité « qui ne tient pas compte du tout des inégalités territoriales, (car) dans les territoires ruraux, il n’y a pas d’alternative à la voiture individuelle », estime Familles rurales. Seule l’association CLCV se montre un peu moins critique, saluant « un amortisseur tangible, (…) une bonne chose qui va permettre assez rapidement de toucher l’aide sans faire de démarche administrative ». 

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