Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 28 juin 2013
Aménagement du territoire

La commission Duron enterre l'essentiel du Snit

Le rapport de la commission Duron, rendu hier au ministre délégué chargé des Transports, enterre la plupart des projets prévus dans le Schéma national d’infrastructures de transport (Snit) de 2011. Notamment, la quasi-totalité des projets de nouvelles lignes TGV est abandonnée ou remise à des échéances si lointaines que cela revient au même.
La commission Duron, du nom de son président, le député-maire de Caen Philippe Duron, avait été mandatée le 17 octobre 2012 par le ministre délégué chargé des Transports, Frédéric Cuvillier, pour « faire évoluer »  le Snit. Ce schéma, élaboré par le précédent gouvernement, représentait un coût de 245 milliards d’euros sur 25 ans – coût que Frédéric Cuvillier, dans sa lettre de mission à Philippe Duron, définissait déjà comme « non soutenable financièrement ». La mission de la commission Duron était donc, clairement, de tailler dans les projets et de les « hiérarchiser »  en fonction des possibilités des finances publiques.
Rappelons que le Snit comprenait 63 projets – 28 ferroviaires, 11 portuaires, 3 projets de canaux et 28 projets routiers. Certains de ces projets étaient attendus avec une impatience particulière par les élus locaux, notamment certaines LGV (lignes à grande vitesse) jugées indispensable pour désenclaver leurs territoires – LGV Paris-Clermont-Ferrand, LGV Sud-Ouest – ou pour compléter un maillage déjà entamé – dernières branches de la LGV Rhin-Rhône.
Dans son rapport, la commission retourne en grande partie la philosophie de ce schéma de transport, qui faisait la part belle aux LGV. Constatant d’emblée que « le réseau d’infrastructures de transport de la France est bien développé », à l’échelle nationale, la commission estime toutefois que les territoires ruraux et périurbains restent les parents pauvres du transport : « Les systèmes de transport des campagnes et des espaces périurbains méritent mieux que la médiocrité », note sèchement le rapport. Elle estime également que la route, très décriée ces dernières années, ne doit pas être oubliée, car elle est « souvent la seule réponse pratique pour la desserte des territoires en milieux peu denses ». Sur le ferroviaire, la commission défend clairement l’idée que le maillage TGV est aujourd’hui suffisant, ou qu’en tout cas son développement n’est pas prioritaire. La priorité doit être, selon elle, la résolution des problèmes posés par l’engorgement des grands nœuds ferroviaires, et les actuels Trains d’équilibre du territoire (TET), « entre TER et TGV », qu’il faudrait impérativement moderniser. La commission prône en particulier de « renouveler dès que possible par du matériel neuf et performant les trains de Paris-Clermont-Ferrand, Paris-Orléans-Limoges-Toulouse, Paris-Caen-Cherbourg et Bordeaux-Marseille-Nice ». Une sorte de lot de consolation pour ces territoires dont les élus militaient depuis des années pour la construction d’une LGV.
Au final, le Snit à 245 milliards revu et corrigé par la commission Duron fond comme neige au soleil : la commission propose deux scénarios, en fonction de possibilités financières de l’État dans les années à venir. Le premier (scénario 1) est réellement a minima : « 8 à 10 milliards »  d’ici 2030 ; le second, le scénario 2, propose des investissements à hauteur de 28 à 30 milliards – soit environ 10 fois moins que le Snit le prévoyait.
Le scénario 1 ne garde que 9 projets sur 63 : une seule et unique LGV (Roissy-Picardie), amélioration de la desserte des ports de Marseille et du Havre, traitement des nœuds ferroviaires de Paris, Lyon et Marseille... Le scénario 2 conserve vingt projets en « première priorité » : les mêmes que le scénario 1, plus le traitement du nœud ferroviaire de Nice, une demi-douzaine de projets routiers et autoroutiers, et la constitution d’une « réserve »  pour « d’éventuels »  premiers travaux sur les LGV Paris-Clermont-Ferrand-Lyon ou Bordeaux-Hendaye. Mais le peu d’enthousiasme de la commission est plus que palpable : « La commission considère qu’elle ne peut pas être entièrement affirmative sur le moment à partir duquel il sera pertinent d’engager les travaux de ces projets ».
Tous ces avis ne sont certes, pour l’instant, que des propositions, sur lesquelles le gouvernement et le Parlement devront se prononcer. Mais on peut noter que le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, avait déjà donné hier matin son accord aux conclusions de la commission Duron avant même que celle-ci les eût officiellement rendues. Il y a donc fort peu de chances que ces conclusions soient remises en question, à un moment où toute l’attention de l’exécutif est braquée sur la réduction des dépenses publiques (lire ci-dessus).
Notons enfin – la chose est inhabituelle – que deux membres de la commission Duron (André Chassaigne, député PCF du Puy-de-Dôme, et Eva Sas, députée EELV de l’Essonne) ont tenu à ajouter une « contribution personnelle »  à la fin du rapport pour se démarquer en partie de ses conclusions, les jugeant, selon André Chassaigne, « source de frustrations, voire de colère pour les populations et les acteurs économiques laissés pour compte ».
F.L.

Télécharger le rapport de la commission Duron.

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