Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 11 mars 2019
Ruralité

Ruralité : « La France va perdre plusieurs centaines de millions d'euros » du programme européen Leader

« Ce n’est pas acceptable, mais la France va perdre plusieurs millions, voire plusieurs centaines de millions d’euros »  issus du programme européen Leader (Liaison entre actions de développement de l’économie rurale) qui permet de cofinancer des projets publics ou privés, d’investissement ou de fonctionnement, favorisant le développement des zones rurales. Le ministre de l’Agriculture et de l'Alimentation, Didier Guillaume, l’a reconnu, jeudi dernier, en réponse à une question de la sénatrice des Hautes-Pyrénées Maryse Carrère (PRG) qui lui demandait d’être « rassurée ».

Seuls 4 % des 700 millions d’euros prévus auraient été versés
« Je ne vais absolument pas vous rassurer parce que la situation n'est pas rassurante », a lancé le ministre qui a indiqué que la sous-consommation de ces fonds serait à l'origine de cette situation. Seulement 4 % des 700 millions d'euros prévus dans l'enveloppe de ce programme, qui coure sur les années 2014 à 2020, auraient ainsi été versés. D’autant que ce programme, est un « moteur de développement, il apporte un soutien à l’innovation, à la mise en réseau et à la coopération de nos territoires ruraux », a rappelé la sénatrice, qui a pointé le fait que, « derrière ces aides non versées, ce sont des artisans, des commerçants, des acteurs sociaux et culturels de nombreuses communes qui sont fragilisés ».
« Depuis deux ou trois ans, il y a des associations, des collectivités locales qui ont eu des actes d’engagement et qui ne sont toujours pas payés », a également regretté Didier Guillaume, évoquant la trop grande complexité du dispositif, tout comme Maryse Carrère qui a jugé des montages de dossiers « fastidieux »  et un versement des aides qui « s’apparente à un vrai parcours du combattant ». En effet, « pour que ces fonds puissent être attribués, ils doivent passer par les groupes d'action locale (Gal) »  qui sont « en relation avec les collectivités locales, et notamment les intercommunalités, intercommunalités qui sont elles-mêmes en relation avec les régions », en charge de la gestion de ce programme, a indiqué le ministre.
Si « tous les dossiers ont été présentés, très peu de dossiers sont apurés et donc ont pu être payés », a-t-il précisé. Pour cette raison, « dans la future PAC [Politique agricole commune], il faut un décroisement des aides, une simplification, une clarification. Car si nous continuons comme cela, les mêmes causes produiront les mêmes effets et les projets ne seront pas payés », a ajouté le ministre en soulignant qu’il intervient « auprès de l’Europe pour que les choses soient améliorées »  et travaille « avec Régions de France pour voir comment nous pourrions résoudre le problème de manière plus rapide ». Sans « pouvoir rassurer », il a enjoint à faire « en sorte que les actions engagées par les Gal puissent être payées dans le temps impartis ».

28 000 communes concernées
En décembre dernier, une douzaine d’acteurs de la ruralité avaient lancé un appel « pour sauver »  le programme Leader. L’AMF, l’AMRF, Familles rurales, Maisons familiales rurales, Leader France ou encore la Fédération des centres sociaux de France avaient dénoncé, dans une tribune, son « inopérabilité »  alors que celui-ci concerne « 28 000 communes rurales »  (lire Maire info du 13 décembre 2018).
« Aujourd’hui, ce programme est à l’arrêt dans toutes les régions de France en raison de blocages administratifs lors de l’instruction des dossiers de demandes de subvention », affirmaient les signataires de l’appel qui décomptaient, à l’époque, « plus de 7 500 dossiers en attente », et constataient que « la France est désormais le mauvais élève européen »  (la France est, en fait, avant-dernière dans l'utilisation des fonds Leader, devant la Slovénie). Ils avaient déjà averti que « cela pourrait entraîner une perte de plusieurs centaines de millions d’euros de Feader [fonds européen agricole pour le développement rural] destinés aux territoires ruraux dans les prochains mois si la situation ne s’améliore pas ».
Ces derniers avaient pointé les conséquences « multiples »  et « dommageables aux territoires »  avec des « projets abandonnés »  et des « structures en difficulté financière »  notamment.
A.W.

Regarder la question de Maryse Carrère et la réponse de Didier Guillaume.

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