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Édition du jeudi 20 juillet 2023
Logement social

Des députés veulent que les locataires « les plus aisés » libèrent les logements sociaux

Dans un rapport publié hier, Charles de Courson et Daniel Labaronne recommandent d'abaisser de 20 % certains seuils de ressources dans les HLM, mais aussi de réserver les soutiens financiers uniquement aux bailleurs qui construisent le plus et de revoir la fiscalité des locations meublées touristiques. Certaines de leurs propositions sont très mal reçues par l'AMF.

Par A.W.

« La politique du logement coûte cher à la France pour des résultats qui, sans être catastrophiques, ne sont pas à la hauteur des investissements consentis. »  C’est l’un des enseignements tirés par les deux corapporteurs de la mission d’information sur « les dépenses fiscales et budgétaires en faveur du logement et de l'accession à la propriété », dont ils ont présenté les conclusions hier.

Les députés d’Indre-et-Loire, Daniel Labaronne (Renaissance), et de la Marne, Charles de Courson (Liot), proposent ainsi de revoir une multitude de dispositifs : que ce soit les APL, les critères d’accès au logement social, la fiscalité des locations meublées ou encore les exonérations d’impôts pour les bailleurs sociaux.

Dans un contexte de « double crise »  du logement en France, à la fois de la demande (« augmentation rapide des taux d’intérêt sans baisse suffisante des prix de l’immobilier » ) et de l’offre (« rareté du foncier, coût élevé de la construction lié à la réglementation et à l’inflation du prix des matériaux » ), ils affirment, au passage, que la « territorialisation »  de la politique du logement leur apparaît « indispensable ».

Une « erreur majeure »  pour l'AMF

Sur le plan social, d’abord, les deux députés veulent obliger les ménages les plus aisés à quitter leur HLM selon de nouveaux critères : en abaissant de 20 % (à 120 % du plafond de ressources PLS, contre 150 % aujourd’hui) le seuil de revenus au-delà duquel un locataire de logement social doit partir. Concrètement, pour une personne seule, « ce seuil passerait de 41 221 euros à 32 977 euros par an »  (hors de l’Île-de-France), selon l’AFP.

Même chose pour le supplément de loyer de solidarité (SLS) qui devrait, selon eux, être déclenché dès qu’un ménage franchit le plafond d’éligibilité au logement, et non, comme actuellement, lorsque qu’il est dépassé de 20 %. Ils proposent, en outre, de supprimer l’exonération du supplément de loyer dans les ZRR.

« C'est un principe d'équité et de justice sociale », a assuré Daniel Labaronne lors de la conférence de presse de présentation du rapport, rappelant que l’objectif est de remettre des logements vacants sur le marché alors qu’entre « 200 000 et 250 000 personnes »  voient leur demande de logement social non satisfaite chaque année.

Au regard de la « tension de plus en plus manifeste [qui] s’exerce sur le logement social et [qui] entrave la fluidité des parcours résidentiels », les deux députés estiment qu'il y a un « risque »  d’assister à « une véritable embolie du secteur HLM avec une fermeture progressive du parc social aux nouveaux entrants ». Selon eux, « le statu quo n’est plus possible », « il est nécessaire d’inciter les ménages du parc locatif social les plus aisés à en sortir ».

Cette position est très vivement critiquée par de nombreux acteurs, dont l'USH. Du côté de l'AMF, on explique ce matin qu'une telle politique serait « une erreur majeure, contraire à toute perspective de mixité sociale, porteuse de communautarisations et qui risquerait de détruire les efforts de requalification des communes et EPCI ». Sans compter, comme le fait remarquer l'USH, les risques qu'une telle politique ferait courir à l'équilibre financier des organismes. L'AMF estime donc que ces propositions représentent un risque « très grave ». Et d'autant plus inquiétant, on peut le noter, que le président de la République lui-même semble favorable à cette approche. 

Soutenir uniquement les bailleurs qui construisent le plus

Ciblant toujours les ménages les plus aisés, ils jugent « contestable »  le fait que « les étudiants, dont les parents ont des revenus confortables et les soutiennent financièrement, bénéficient des APL tout en permettant à leurs parents de bénéficier d’un avantage fiscal (demi-part ou part fiscale) ». Ils proposent donc de « rendre obligatoire le choix entre l’avantage fiscal des parents et le bénéfice des APL pour leurs enfants étudiants ». 

En outre, ils prônent la « territorialisation à l’échelle intercommunale »  les plafonds de loyers des APL.

Autre mesure défendue par les députés : la suppression de l’exonération d’impôt sur les sociétés qui bénéficie aux bailleurs alors que « les deux tiers des organismes ne prendraient pas la part qu’on peut attendre d’eux dans la construction neuve au regard de leur poids dans le parc actuel ».

Charles de Courson et Daniel Labaronne préféreraient ainsi remplacer cet avantage par un soutien uniquement à ceux qui « investissent le plus »  dans la construction de logements via des alternatives, telles que les « subventions », le « crédit d’impôt sur les dépenses d’investissement »  ou les « modulations des cotisations CGLLS ». 

Reprenant une proposition de l’USH, ils réclament aussi l’extension du bénéfice du régime d’exonération de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) de longue durée (25 et 30 ans) aux opérations dites de « seconde vie », qui « permettent de donner un nouveau cycle à des bâtiments de plus de 40 ans en leur redonnant des propriétés équivalentes à celles du neuf ».

Afin de relancer l’accession sociale à la propriété, ils souhaitent, par ailleurs, « harmoniser les dispositifs »  dédiés et « développer le bail réel solidaire en révisant à la hausse les plafonds de ressources ».

Réformer la fiscalité des meublés de tourisme 

S’agissant des meublés touristiques de courte durée qui contribuent à la crise du logement, les deux députés veulent « aligner les avantages fiscaux »  dont ceux-ci bénéficient sur la fiscalité des meublés de longue durée.

Ces avantages, notamment dans les zones tendues et littorales, ne sont « plus acceptables au regard de l’attrition de l’offre de logements dans certains territoires », estiment-ils, jugeant « la réglementation mise en œuvre […] pas suffisante : l’enjeu est d’éviter que les locations de longue durée disparaissent au profit de locations touristiques ». Sur ce point, on peut rappeler que le gouvernement a présenté plusieurs mesures, mardi, visant à réguler ce secteur. 

Les corapporteurs proposent également, « dans le cadre des réflexions visant à réviser les zonages, qui doivent aboutir au plus vite, de permettre aux acteurs locaux d’adapter la cartographie des zonages à leur territoire, à coût budgétaire constant pour l’État ». 

Ils recommandent aussi d’« expérimenter un pouvoir de dérogation des collectivités territoriales relatif aux dispositifs budgétaires et fiscaux de la politique du logement », ainsi que d’« améliorer la transmission des données aux acteurs locaux ».

Télécharger le rapport.
 

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