Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du lundi 4 octobre 2021
Finances

Le recours au financement participatif désormais possible pour presque tous les projets des collectivités locales

À partir de janvier 2022, les collectivités locales pourront avoir recours au financement participatif pour tous leurs projets. À titre expérimental, et pour une durée de trois ans, elles pourront aussi bénéficier du financement participatif obligataire. Explications.

Par Lucile Bonnin

La semaine dernière, le Parlement a définitivement adopté le projet de loi « portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne dans le domaine des transports, de l’environnement, de l’économie et des finances ». L’article 41 de cette loi permet ainsi l’élargissement de la possibilité de recourir au financement participatif par les collectivités territoriales pour leurs projets. Les avantages de cette mesure ? Diversifier les sources de financement pour les communes et impliquer les citoyens autour de projets divers.  

Aussi connu sous le nom de crowdfunding, le financement participatif est, comme l’explique Financement Participatif France (FPF), « un outil de collecte de fonds opéré via une plateforme internet permettant à un ensemble de contributeurs de choisir collectivement de financer directement et de manière traçable des projets identifiés. » 

Davantage de projets éligibles au financement participatif 

« C’est le résultat d’une demande assez ancienne des maires de France, explique à Maire info Hervé Maurey, sénateur de l’Eure et rapporteur de la commission des finances. Ce recours n’existait auparavant que pour les services publics culturels, éducatifs, sociaux ou solidaires. Il était dommage que les projets environnementaux, par exemple, ne puissent pas bénéficier du financement participatif. » 

Hervé Maurey se réjouit donc de l’assouplissement des conditions d’accès des collectivités territoriales à cette source de financement et de l’élargissement du champ des projets éligibles désormais à tous les services publics, hormis aux missions de police et de maintien de l’ordre public. 

Cet article prévoit également la possibilité pour les personnes morales d’octroyer des prêts aux collectivités territoriales dans la limite d’un prêt par projet. Le taux conventionnel applicable à ces crédits est de nature fixe.

Un dispositif prévu à titre expérimental 

Une nouveauté non négligeable va aussi être testée : la loi va autoriser les collectivités territoriales à émettre des obligations dans le cadre de projets de financement participatif. Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement ? L’obligation s’apparente à un prêt financier. L’émetteur d’une obligation doit payer à ses investisseurs des intérêts dont le taux est fixé à l’avance. La date de remboursement total du prêt est également décidée en amont. Jusqu’ici réservé aux sociétés par action, ce mode de financement devient possible pour les collectivités locales, à titre expérimental pendant trois ans. 

Elles « devront à cette fin se porter candidates auprès des ministres chargés des Comptes publics et des Relations avec les collectivités territoriales, lesquels se prononceront en fonction du coût de financement, de la nature des projets et de leur éventuel impact écologique, à partir de critères d’éligibilité qui seront fixés par arrêté », précise Aude Bono-Vandorme, rapporteure de la commission mixte paritaire, lors de la séance du 28 septembre à l’Assemblée nationale. 

Des dispositifs de prévention sont également prévus pour sécuriser les élus face au risque de prise illégale d’intérêts et pour éviter certaines dérives. « Le financement participatif ne doit pas être détourné de son objectif principal qui est d’offrir aux élus un nouveau mode de financement qui fédère la population autour de projets d’intérêt général », ajoute le sénateur. 

Un compromis satisfaisant 

Au départ, Hervé Maurey le rappelle, « le gouvernement était très réticent à l’idée que les communes puissent émettre des obligations. La mesure a été rejetée par l’Assemblée en première lecture mais nous avons pu, en échangeant avec le cabinet de Bruno Le Maire, obtenir une expérimentation qui permettra de voir si les inquiétudes de Bercy sont fondées ou non. Bercy avait peur par exemple qu’un maire, pour être agréable à sa population, lance un financement participatif avec des taux d’intérêts qui seraient supérieurs à ceux du marché. »  Un exemple de plus de la confiance plutôt limitée que Bercy porte aux élus locaux…

Aude Bono-Vandorme avançait également à l’Assemblée nationale lors de l’examen du projet de loi que « pour une collectivité, le financement participatif tend à mobiliser les administrés sur un projet précis, qui les concerne et qui a du sens localement. Prêts et dons peuvent suffire dans ce cas, même si le plafond, situé à 1 million d’euros, limite à ce jour l’ampleur des projets. »  Le gouvernement considérait alors que les obligations n’avaient pas leur place dans ce type de financement. 

« Cette expérimentation de trois ans, obtenue grâce aux échanges avec l’Assemblée nationale et avec l’accord de Bercy, va nous permettre de voir si les communes sont vraiment intéressées par ce mode de financement, d’évaluer les demandes et d’identifier les potentiels inconvénients », précise Hervé Maurey.  

L’AMF « salue »  la mesure

Ces améliorations sont saluées par l’AMF et l’association Financement Participatif France. Elles se déclarent satisfaites de l’avancée constituée par l’expérimentation du financement participatif obligataire, rappelant qu’elles « appelaient ces mesures de leurs vœux afin de donner un souffle nouveau aux collectivités en leur permettant de disposer d’une source de financement complémentaire, diversifiée et innovante ». Les deux associations demandent que le périmètre de ces outils de financement soit « élargi »  et « ne soit pas restreint exclusivement à des prêts à taux fixe ». 
Elles se disent, pour l’avenir, « attentives à la réponse de la Commission Européenne sur l’intégration du financement participatif public au nouveau cadre européen. » 
 

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