Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 18 janvier 2024
JOP 2024

Jeux de 2024 : des associations redoutent l'annulation d'événements festifs et culturels

Élus, représentants des festivités populaires et culturelles et syndicats s'inquiètent face à une recrudescence des interdictions par certains préfets, d'événements festifs et culturels programmés entre juin et septembre 2024.

Par Lucile Bonnin

Ce ne sont pas moins de 32 associations d’élus (dont l'AMF), de défense de la culture et des festivités populaires et syndicats qui ont dénoncé hier par la voie d’un communiqué commun la remise en cause, voire l’interdiction totale, dans certains territoires, de la tenue d’évènements estivaux durant la période des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024.

« Sans que cette énumération soit exhaustive, de telles décisions d’annulations sont déjà recensées dans l'Ain, l'Indre-et-Loire, le Gard, l'Ardèche, l'Aude, la Moselle, le Bas-Rhin », peut-on lire dans le communiqué. La raison invoquée pour justifier ces annulations est le risque de manque de forces de police et de gendarmerie pendant l’été. D'ailleurs le gouvernement n'a pas, pour le moment, donné de précisions sur la situation géographique des brigades qui seront mobilisées à Paris et manqueront donc à l'appel dans leurs départements. On sait simplement que 30 000 policiers et gendarmes seront mobilisés pour les Jeux, et 45 000 pour la cérémonie d'ouverture le 26 juillet.

Cependant, « les évènements populaires visés ne nécessitent pas le recours à des forces de sécurité et concernent aussi bien des villes que des villages de quelques centaines d'habitants » .

Ces décisions surprennent autant qu’elles inquiètent, et les associations espèrent plus de clarté de la part de l’État.  Mais elles demandent surtout le maintien de ces évènements indispensables pour les territoires.

Retournement de situation 

Cette question du maintien ou non des événements festifs pendant les Jeux de Paris 2024 ne date pas d’hier. D’abord, en novembre 2022, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait annoncé au Sénat « le report ou l’annulation de tous les événements en France qui demandent des unités de force mobile ou qui demandent la présence très forte de nombre de policiers »  – et annonçait au passage aux élus qu’il n’y aurait pas de CRS sur les plages en 2024 (lire Maire info du 2 novembre 2022). L’AMF avait alors saisi la Première ministre pour proposer une concertation associant « l’ensemble des parties prenantes pour trouver des solutions qui ne pénalisent pas les autres communes de France ». 

En décembre 2022, une circulaire a été diffusée aux préfets, confirmant que pendant les moments les plus intenses de l’été 2024, « aucun événement culturel, festif et/ou sportif d’ampleur »  ne pourra être envisagé dès lors qu’il mobilise des renforts de forces mobiles (lire Maire info du 14 décembre 2022). Cependant, le circulaire précise que les événements « de moindre ampleur » , c’est-à-dire ceux qui peuvent se dérouler avec le seul recours aux forces de sécurité « locales », « ont vocation à se maintenir », « en dialogue avec les collectivités territoriales ».

Pourtant, le collectif de défense des festivités populaires et culturelles de France observe que des interdictions ont été décidées par les préfets « sans concertation et viennent fragiliser un secteur pourtant essentiel qui risque de nouveau d’être sacrifié ». 

Manque de visibilité 

Arnaud Thenoz, président délégué de la Fédération nationale des comités et organisateurs de festivités (FNCOF), précise ce matin à Maire info qu’une centaine d’arrêtés ont été pris pour des interdictions fixes de certains évènements. C’est pour l’instant « peu » , explique Arnaud Thenoz,, mais les associations  dénoncent avant tout le manque de visibilité quant à la tenue de certains évènements, « ce qui ne rassure pas les maires ». 

« On ne sait pas quantifier la quantité de forces de l’ordre qui seront envoyées par exemple en renfort sur les Jeux et nous n’avons aucune visibilité concernant les secouristes qui sont déjà en difficulté pour trouver des bénévoles, par exemple » . Dans ce contexte, difficile en effet de se projeter.

Arnaud Thenoz s’interroge aussi à propos du 14 juillet – data à laquelle beaucoup de communes organisent des festivités. La période où aucun congé ne sera accordé aux policiers ou aux gendarmes va du 24 juillet au 11 août. Ainsi, il est fort possible que les effectifs soient moindres début juillet. « Comment va-t-on prioriser certains évènements et s’organiser ? » , demande le président délégué, qui a alerté le ministère de l’Intérieur à ce propos. 

De plus, la tenue de tous les évènements repose désormais sur la décision du préfet. « Alors que les fêtes populaires de moins de 1 500 personnes sont soumises à l’autorité du maire, la circulaire de décembre instaure que toute organisation de fête devra passer par la préfecture, même les plus petites. De plus, la préfecture peut décider d’annuler ou non un évènement jusqu’à 24 heures avant » 

Des conséquences déjà observées 

Les associations signataires du communiqué observent que ces premières décisions d’annulation des festivités « engendrent un climat général d'incertitude avec des premiers effets indirects » . Les associations pointent une perte d’engagement des bénévoles qui redoutent que les événements soient finalement annulés ; « une rétention des contrats artistiques jusqu'à ce que les employeurs occasionnels soient certains de pouvoir contractualiser sans risque d’engager inconsidérément leur obligation d'honorer financièrement des contrats signés qui pourraient être remis en question par des annulations préfectorales »  mais aussi un arrêt pur et simple des activités associatives locales notammment par découragement. 

Comme l’a souligné la députée Sarah Legrain à l’occasion d’une question au gouvernement en décembre dernier, certains festivals qui se relèvent difficilement de la crise sanitaire, craignent aussi des décisions préfectorales tardives : « Certains [festivals] ont déjà reçu des avis défavorables de la préfecture, sans aucune justification crédible. D’autres craignent des décisions préfectorales tardives. Si les gros festivals seront probablement maintenus, les plus petits et moins médiatisés craignent de ne pas subir le même traitement. »  La députée a alors demandé à la ministre de la Culture de garantir qu’il n’y aura pas d’annulation au dernier moment par les préfectures des festivals et festivités cet été. 

Concertation 

Perte de lien social dans les communes et perte économique pour les organisateurs : ces potentielles annulations pourraient peser lourd sur beaucoup : « Artificiers, artistes, commerçants, forains… », énumère Arnaud Thenoz. Les associations attendent donc plus d’écoute de la part du gouvernement et souhaitent « la mise en place au plus vite d’une réelle concertation associant l’ensemble des parties prenantes pour trouver des solutions qui ne pénalisent pas les organisateurs de festivités culturelles et populaires et favorisent le rayonnement événementiel estival de notre pays » 

« Les élus et organisateurs attendent aussi plus de visibilité sur les effectifs réels qui seront disponibles localement cet été » , ajoute Arnaud Thenoz. Aussi, « pour ne pas qu’il y ait d’incohérences entre les territoires avec un préfet qui décide de décider au cas par cas et un autre qui se montre plus frileux et annule tout, il faut des informations claires de la part des ministères » . Le président délégué espère aussi de la souplesse et de la confiance de la part des préfets : « Pour une fête de moins de 1 500 personnes, dans une commune de 300 habitants, si le maire dit que c’est faisable, le préfet devrait s’appuyer sur cette décision » 

Les associations espèrent que le gouvernement organisera prochainement une réunion de concertation. Maire info reviendra naturellement sur ces éléments. 

Consulter le communiqué de presse. 

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