Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 8 février 2019
Grand débat national

À Autun, les maires répètent à Emmanuel Macron leur besoin de « liberté »

« J’ai à cœur de rencontrer les élus de la République qui peuvent être des facilitateurs du Grand débat national ». Cet exercice auquel le Président de la République se livre depuis plusieurs semaines l’a conduit hier matin, à Autun, accompagné de plusieurs ministres, à la rencontre des maires des chef-lieux de cantons de Saône-et-Loire – un format resserré, dont les maires des petites communes ont donc été exclus. Une heure trente sur le papier pour au final près de deux heures d’échanges directs, durant lesquelles les élus ont tour à tour pu librement s’exprimer, questionner, et interpeller le chef de l’État.

Normes « budgétivores » 
« Détricotage de la commune par le transfert de compétences aux communautés de communes », « étranglement des petites communes » … Une fois encore, la loi Notre a été pointée du doigt par plusieurs maires. « Il faut être lucide, cette loi n’est pas passée », a reconnu Emmanuel Macron qui souhaite « reprendre la chose »  sans pour autant « tout détricoter ». « Tout n’est pas mauvais dans l’intercommunalité »  a-t-il notamment affirmé, tout en partageant le questionnement des élus sur les relations et l’articulation entre les communes et les communautés de communes.
Jean-Patrick Courtois, maire de Mâcon, a quant à lui alerté le président sur le problème des normes « extrêmement budgétivores ». « Quand une norme sort, il faut que deux au moins soient supprimées », a-t-il demandé. « On a beaucoup simplifié depuis le début du quinquennat, s’est défendu Emmanuel Macron, mais il faut poursuivre le travail ». Quant à la question des services publics de proximité, le président a admis qu’il « fallait arriver à redéployer de la présence sur le terrain, aidé par le numérique ». Interrogé sur la réforme, très mal vécue par les maires, de la délivrance des cartes d’identité, Emmanuel Macron a évoqué la possibilité de permettre à nouveau aux citoyens de récupérer leur nouvelle carte d’identité dans leur mairie. Ce qui ne résoudrait pas le problème des démarches à faire pour établir le document, dans des mairies parfois fort éloignées des lieux de résidence.

Réforme de la fiscalité locale, mais quand ?
« La taxe d’habitation est un revenu sur lequel nous avions un levier, que nous pouvions actionner à notre discrétion. L’État a promis qu’il la compenserait. Mais cette compensation sera-telle évolutive et pérenne ? ». Face à cette inquiétude exprimée par le maire de Charolles, Pierre Berthier, Emmanuel Macron s’est voulu rassurant, rappelant avoir voulu supprimer cette taxe « parce qu’elle était injuste et pesait sur les classes moyennes ». « Sur les trois ans, on va l’exonérer à l’euro l’euro, donc vous allez être totalement remboursés. Mais il faut trouver un impôt de substitution : on peut baisser le foncier au niveau de la commune et avoir un morceau de la CSG par exemple. »  Le chef de l’État a répété sa volonté « d’enclencher un mécanisme de modernisation de notre fiscalité locale ». Mais quand ? Les réflexions sur la réforme de la fiscalité locale qui, rappelons-le, devaient débuter « mi-décembre »  selon les annonces faites lors du congrès de l’AMF, n’ont pour l’instant pas trouvé le plus petit début de commencement.
On peut en revanche douter de la volonté réelle du président de négocier sur des bases sereines lorsqu’il se livre – ce qui semble devenu une habitude – à des attaques ad hominem et plus que discutables contre certains responsables des associations d’élus. Si la DGF est illisible et ses variations incompréhensibles, la faute en est, selon Emmanuel Macron… à André Laignel. « Il y a eu une très bonne réforme de la DGF proposée par la députée Pires Beaune qui rééquilibrait les choses vers les communes rurales. Les élus du CFL n’en ont pas voulu. Les quarante critères, incompréhensibles, de la DGF, ont été décidés par les élus eux-mêmes (...) Je vous invite à aller voir le vice-président de l’AMF, grand spécialiste du sujet, président du CFL qui est le principal responsable de cet état de fait. Allez voir notre ami André, il vous l’expliquera. »  Le même André Laignel qui, déjà confronté à ce type de déclarations, a déjà eu l’occasion de rappeler que la DGF se décide « en loi de finances », c’est-à-dire au Parlement, et certainement pas au CFL.

Grande diversité des sujets
De la crise agricole, qui impacte fortement ce territoire de Bourgogne-Franche-Comté, à la problématique de l’embauche, des retraités en difficulté financière en passant par la question de la santé… les sujets n’ont pas manqué. David Marti, le maire du Creusot, a salué à l’issue de la réunion « l’écoute »  du président : « Même s’il ne répond pas toujours dans le sens que l’on souhaite, il écoute et entend. Mais j’aurais préféré qu’il entende avant, lorsqu’on l’a alerté lors de nos échanges avec les associations d’élus. On aurait pu s’épargner cela. » 
Le président de la République est reparti avec un courrier des maires du département reprenant les cinq points les plus importants à leurs yeux : DGF, taxe d’habitation, problématique de l’accès aux services publics, problématique des incivilités en milieu rural et urbain, complexité des normes. « Il y a déjà eu un certain nombre d’engagements du président, souligne Marie-Claude Jarrot, maire de Montceau-les-Mines et présidente de l’association des maires de Saône-et-Loire. Charge à nous de poursuivre les choses. » 
Estelle Chevassu et Franck Lemarc

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