Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du jeudi 28 mars 2019
Fonction publique

Parution du décret sur la disponibilité des fonctionnaires, malgré l'opposition des élus locaux

Le décret modifiant les conditions de disponibilité des fonctionnaires est paru ce matin au Journal officiel, en application de la loi Pour la liberté de choisir son avenir professionnel du 5 septembre 2018. Ce décret paraît malgré son rejet par les représentants des élus au Conseil national d’évaluation des normes (Cnen), par deux fois.
Ce sont les articles 108 à 110 de la loi du 5 septembre 2018 qui abordent la question de la disponibilité des fonctionnaires des trois versants de la fonction publique. Le principe consiste à étendre aux fonctionnaires en disponibilité les garanties du déroulement de carrière accordées aux fonctionnaires en activité : un fonctionnaire en disponibilité pour aller travailler dans le secteur privé verrait garantis pendant cinq ans ses droits à l’avancement d’échelon et de grade.

Ce que contient le décret
Le principe de la garantie d’avancement était déjà contenu dans la loi. Le décret précise, d’une part, les activités professionnelles qui entrent dans le champ de cette réforme : un fonctionnaire en disponibilité conserve ses droits à l’avancement pendant cinq ans s’il exerce une « activité professionnelle », ceci étant entendu comme « toute activité lucrative salariée ou indépendante exercée à temps complet ou à temps partiel », dans la limite minimale de 600 heures par an pour une activité salariée. Pour les indépendants, est concernée « une activité qui a généré un revenu soumis à cotisations sociales dont le montant brut annuel est au moins égal au salaire brut annuel permettant de valider quatre trimestres d'assurance vieillesse ». Dans le cas d’une création ou reprise d’entreprise, « aucune condition de revenu n’est exigée ».
Pour conserver ses droits à l’avancement, le fonctionnaire en disponibilité devra transmettre chaque année à son employeur public un certain nombre de pièces, dont la liste sera fixée par arrêté, attestant de l’exercice d’une activité professionnelle.
Enfin, le décret apporte une précision très importante – et c’est celle qui a été le plus vivement désapprouvée par les élus du Cnen. La durée de la disponibilité ne peut excéder cinq ans, mais elle est renouvelable une fois si, à l’issue de la première période de cinq ans, le fonctionnaire est réintégré pendant « au moins 18 mois »  dans la fonction publique.

« Faciliter le pantouflage » 
Cette disposition est très problématique pour les collectivités territoriales. Un fonctionnaire en disponibilité est dorénavant obligé de revenir dans sa commune ou son EPCI d’origine pendant les 18 mois réglementaires avant de repartir pour une nouvelle période de 5 ans. Il faut donc qu’il y existe à ce moment un poste disponible pour lui. Si ce n’est pas le cas, la collectivité devra lui verser une allocation chômage en attendant qu’un poste de son grade se libère. Outre les difficultés induites par ces mouvements d’allers et retours, notamment dans les petites collectivités, il y aura là une charge financière brute pour les collectivités.
Par ailleurs, les élus du Cnen se sont étonnés du fait que ce dispositif, s’il est mis en place pour permettre aux fonctionnaires d’exercer « une activité lucrative », ne soit pas étendu aux fonctionnaires qui se mettent en disponibilité pour l’exercice d’un mandat électif local. Autrement dit, un fonctionnaire qui ira exercer un poste important dans le secteur privé pendant cinq, voire dix ans, conservera ses droits d’avancement d’échelon et de grade, pendant qu’un fonctionnaire qui se mettra en disponibilité pour exercer, par exemple, son mandat de maire, les perdra ((d’où l’intérêt évident pour les élus fonctionnaires de choisir la solution du détachement, lorsque celle-ci leur est ouverte, pour exercer leur(s) mandat(s) à temps plein).
Les élus du Cnen n’ont pas été les seuls à peu apprécier ce dispositif. Lors de l’examen du texte au Parlement, les sénateurs l’avaient vivement critiqué en estimant qu’il ne s’agissait que de « faciliter le pantouflage », et avaient jugé qu’il n’était « pas acceptable »  d’établir ainsi « une équivalence entre le service de l’intérêt public et celui de l’intérêt privé ». Quant au Conseil d’État, il avait également considéré que ces mesures constituaient « une rupture d’égalité ».
Ni le Conseil d’État, ni les sénateurs, ni les représentants des élus au Cnen n’ont donc réussi à fléchir le gouvernement sur ce sujet.
F.L.
Télécharger le décret.


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