Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 2 février 2018
Fonction publique

Édouard Philippe et Gérald Darmanin explorent de nouvelles pistes pour réformer la fonction publique

Les commentateurs évoquent « un big bang »  ou « un tapis de bombes », tandis que les syndicats parlent d’une « attaque frontale »  ou d’un « dynamitage ». En dévoilant hier une première batterie de mesures destinées à « assouplir » le statut de la fonction publique, le Premier ministre a reconnu que le
gouvernement entendait « bousculer et modifier »  les règles statutaires « un peu sédimentées »  qui encadrent depuis plusieurs décennies l’action des agents publics. Une voie que le gouvernement entend explorer « sans tabou ni totem » pour atteindre l’objectif fixé par Emmanuel Macron de supprimer 120 000 postes de fonctionnaires d’ici la fin du quinquennat.
Pour Edouard Philippe, qui s’exprimait à l’issue du premier Comité interministériel de la transformation publique qui a réuni une quinzaine de ministres et secrétaires d'Etat, les chantiers lancés au cours des prochains mois viseront à « améliorer le service rendu aux usagers et les conditions de travail des agents »  et à « faire des économies pour permettre au pays de retrouver la maîtrise de ses finances publiques ».
Le premier axe de travail que le gouvernement entend débattre avec les organisations syndicales concerne la « rénovation du dialogue social ». L’Etat souhaite le rendre « plus efficace »  en réduisant le nombre des 22 000 instances réunissant aujourd’hui employeurs publics et représentants des personnels.
La deuxième piste évoquée par Edouard Philippe porte sur la politique de rémunération des fonctionnaires. Le chef de l’exécutif entend « mieux récompenser le mérite individuel, l’implication et les résultats »  des agents en complétant « l’automaticité »  des rémunérations par « des mesures plus
individuelles
 ». « Rien n’interdit qu’on puisse réfléchir à des formes d’intéressement collectif dans les administrations, nous y sommes favorables », a notamment lancé le Premier ministre.
Troisième chantier : la transformation des métiers exercés par les fonctionnaires, notamment par le biais des nouvelles technologies. Une transformation qui devrait induire des « reconversions »  et des « mobilités »  au sein des différents versants de la fonction publique et « parfois des départs vers le secteur privé ».
Pour mettre en œuvre ce volet de la réforme, l’Etat misera sur la formation, un programme de 1,5 milliard d’euros sur cinq ans étant d’ores et déjà prévu.
Le quatrième axe de travail lancé par le gouvernement porte sur la possibilité pour les employeurs publics de recourir plus largement aux contrats « notamment pour les métiers qui ne relèvent pas d’une spécificité propre au service public ».
En marge des annonces faites par le Premier ministre, Gérald Darmanin a annoncé que le gouvernement planchait sur la possibilité de mettre en place « un plan de départs volontaires »  destiné aux agents qui « souhaiteraient quitter la fonction publique ». Ce plan sera à « imaginer avec les agents publics eux-mêmes », a précisé le ministre de l'Action et des comptes publics en indiquant qu’il mènera avec le secrétaire d'État Olivier Dussopt une « grande concertation sur ce dossier avec les syndicats de la fonction publique ». « Nous prendrons le temps du dialogue » , a promis de son côté Edouard Philippe
en précisant que si de nouvelles annonces sont attendues pour le mois d'avril, les discussions s'étaleront sur toute l'année. « Elles devraient aboutir à des textes au début de l'année 2019 », a précisé l’hôte de Matignon.
« Les annonces du gouvernement visent essentiellement la fonction publique d'Etat, remarque Philippe Laurent, secrétaire général de l'AMF et président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT). Dans la territoriale, plus de la moitié des recrutements se font déjà sous forme de contrat. Quant au statut, il constitue en quelque sorte une convention collective qui donne un cadre aux agents tout leur permettant une mobilité au sein des collectivités. Les agents peuvent ainsi mener une carrière et les employeurs territoriaux garder une autonomie d'emploi. Il ne faut pas remettre en question cet équilibre ». S'agissant de la rémunération au mérite, dont le terme lui paraît inadapté, Philippe Laurent souligne qu'elle a déjà cours avec le régime indemnitaire. « Le sujet n'est pas totalement tabou » , insiste-t-il. Au sujet de l'instauration d'un  plan de départs volontaires, le secrétaire général de l'AMF défend l'idée que « les agents doivent avoir le libre choix »  et propose que « des mécanismes de garantie soient prévus comme dans le privé  pour les protéger des pressions ». Philippe Laurent, qui en tant que  président du CSFPT doit réfléchir aux côtés d'Olivier Dussopt, secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics, à la « modernisation de la fonction publique territoriale »,  appelle aussi les employeurs territoriaux à une plus grande responsabilisation dans le cadre de l'évolution du dialogue social. 
Emmanuelle Quémard

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