Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux
Édition du jeudi 16 avril 2020
Coronavirus

Ouverture des marchés : les blocages persistent

Alors que dans la plupart des départements, des communes ont obtenu des dérogations pour les marchés, la Fédération nationale des marchés de France (FNMF) dénonce le « blocage »  et le manque de souplesse et de transparence des préfectures. En effet en deux semaines, seulement mille marchés supplémentaires ont pu rouvrir leurs étals – soit plus de 3 500 marchés ouverts sur un total de 10 500, selon le ministère de l’Intérieur.
La position du gouvernement reste ambiguë et le nouvel appel du ministre de l’Agriculture à « l’ouverture de tous les marchés en plein air », dimanche dernier sur France 3, ne semble pas avoir eu beaucoup d’écho. Didier Guillaume, favorable à leur maintien depuis le début du confinement, a ainsi appelé « les maires et préfets à inciter à rouvrir les marchés (…) à condition qu’il y ait le respect des normes sanitaires ».
Mais dans de nombreux départements, « on n’autorise que des tous petits marchés dans de petites communes, de trois à cinq commerçants, on ne peut pas appeler ça un marché ! », s’emporte Monique Rubin, la présidente de la FNMF, qui fait valoir la situation catastrophique des commerçants et des agriculteurs. Beaucoup de maires sont engagés dans de vrais bras de fer avec leur préfet, « avec deux, trois dérogations refusées, et parfois, même plus de réponse écrite, seulement un ‘non’ au téléphone ! », s’insurge-t-elle.

Des maires dans l’incompréhension
À Flamanville, dans la Manche, le maire, après avoir essuyé un premier refus, a vu les gendarmes débarquer et empêcher la tenue d’un marché exceptionnel et respectant toutes les mesures sanitaires préconisées dans le guide co-rédigé par les associations professionnelles et les ministères de la Santé, de l’Agriculture et de l’Intérieur (lire Maire info du 2 avril) : 20 personnes au maximum sur le marché, barrières, gel hydroalcoolique, surveillance par un policier municipal.
Le 10 avril, sans avoir pris contact avec la mairie, et une semaine après la demande, le préfet avait fait savoir qu’il n’accorderait pas de dérogation car « la commune dispose d’une offre suffisante pour l’alimentation », explique le maire, Patrick Fauchon, à Maire info. « Mais il n’y a que deux supérettes pour 1 800 habitants, livrées une fois par semaine seulement, et beaucoup d’habitants qui n’ont pas de véhicule pour pouvoir se rendre dans les grandes surfaces, à cinq kilomètres. Il me paraissait opportun, en outre, d’y limiter les déplacements et les affluences », relate l’élu, qui a pris mardi soir un arrêté pour autoriser « l’installation gratuite sur l’espace public »  de trois commerçants mercredi matin. Ils en ont été empêchés par les gendarmes, qui ont également dispersé la douzaine de chalands qui étaient venus.
« C’est complètement incompréhensible, un acte d’autorité pris sans aucun dialogue avec moi. On demande aux élus de se mobiliser, et voici la réponse qu’on leur fait », déplore Patrick Fauchon.
Ailleurs, en Corrèze, le préfet a décidé de fermer des marchés qui avaient pourtant eu une dérogation, à Ussel, Égletons ou Meymac, « parce que l’offre alimentaire était trop importante », affirme Monique Rubin. « On préfère inciter les gens à aller s’entasser dans la grande distribution, sans penser qu’il y a des personnes âgées sans véhicule, des personnes modestes ! » 
D’un autre côté, il y a aussi un nombre important de maires qui ne veulent pas faire de demandes de dérogation. Ainsi, dans le Var, où quelques dérogations ont été accordées « dans des secteurs très ruraux, où il n’y a pas d’autre approvisionnement possible, il y a des maires qui ne sont pas très favorables au maintien des marchés, dont moi, car dans un secteur touristique comme le nôtre, les marchés sont très animés et fréquentés, nous n’avons pas tous les moyens de gérer un éventuel mouvement de foule », explique Jean-Pierre Veran, président de l’association des maires du département.

Situations différentes
Si à Saint-Maximin-la-Sainte-Baume, le maire a tout fait, sans succès, pour obtenir une dérogation, appuyé en ce sens par la députée, Valérie Gomez-Bassac, qui a écrit au préfet le 14 avril, à Sanary-sur-Mer, au contraire, le maire, Ferdinand Bernhard, a décidé, avant même l’annonce par le Premier ministre, de fermer son marché quotidien, pourtant élu « plus beau marché de France en 2018 »  et donc vecteur économique important pour la commune, devant le « comportement »  des chalands. « J’étais effaré de voir les gens toucher les fruits et légumes, se presser devant les étals. Si on ouvre les marchés, il faut ouvrir le reste ! Je ne comprends pas qu’on ait bloqué le pays et qu’on autorise les gens à sortir », explique l’édile.

E.G.E.

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