Maire-info
Le quotidien d’information des élus locaux

Édition du vendredi 23 juillet 2021
Coronavirus

Projet de loi sanitaire adopté par les députés : les (quelques) changements à retenir 

Les députés ont adopté, à 6 heures ce matin, le projet de loi sur la gestion de la crise sanitaire, après une nouvelle nuit entière de débats. Comme on pouvait s'y attendre, le texte n'a que très peu changé par rapport au projet de loi initial, les amendements du gouvernement ayant quasiment été les seuls à être adoptés. 

Par Franck Lemarc

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© Assemblée nationale

C’est avec 24 heures de retard que le texte a été adopté, les députés ayant tout de même réussi à imposer de disposer d’un jour (et une nuit) de plus pour examiner les quelque 1 200 amendements déposés sur ce projet de loi. Alors que la discussion au Sénat aurait dû débuter hier soir, le texte a été adopté ce matin à l’aube et publié sur le site de l’Assemblée nationale vers 7 h. On peut donc s’attendre à un examen en commission des lois du Sénat à partir de cet après-midi, et en séance publique à partir de demain. 
Les débats ont été particulièrement âpres. D’un côté, l’opposition a tenté de faire valoir que ce texte remet en question des « droits fondamentaux »  et représente une atteinte aux libertés « inadmissibles ». De l’autre, la majorité et le gouvernement ont mis en avant que ces mesures sont « le seul moyen »  d’éviter de nouvelles restrictions face à la reprise de l’épidémie : « C’est soit le pass sanitaire, soit de nouvelles contraintes sanitaires. C’est soit le pass sanitaire, soit le couvre-feu. C’est soit le pass sanitaire, soit reconfinement. Le reste, c’est de la littérature », a par exemple asséné hier, dans un brouhaha indescriptible, un membre du gouvernement.

Carton plein pour la majorité

Sur les 1198 amendements examinés en séance publique, seuls 64 ont été adoptés – soit 5 %, ce qui est un taux exceptionnellement bas. Et encore, ce chiffre est, en réalité, encore plus faible. D’une part, si l’on prend en compte les amendements rédactionnels sans réelle portée normative et les amendements similaires qui ont été adoptés plusieurs fois ; et surtout, parce que le gouvernement a fait jouer le mécanisme de la « seconde délibération »  pour faire annuler l’adoption de certains amendements. Rappelons que la procédure parlementaire autorise le gouvernement, à la fin de l’examen du texte, à déposer des amendements en seconde délibération – en jouant sur le fait qu’en fin de débat, il y a souvent moins de députés présents ou qu’il est possible de battre le rappel des députés de la majorité pour les faire venir dans l’hémicycle. Exemple : les députés avaient adopté des amendements supprimant l’obligation du pass sanitaire pour les personnes visitant ou accompagnant des patients dans les hôpitaux ou les Ehpad. En fin de séance, le gouvernement a présenté un amendement rétablissant cette obligation, qui a été adopté. Le pass sanitaire sera donc bien obligatoire pour accéder à l’hôpital, sauf en cas d’urgence. 
Tous les amendements présentés par le gouvernement (lire Maire info d’hier) ont été adoptés : nouvelle rédaction sur les sanctions contre les salariés et agents qui ne présenteraient pas leur pass sanitaire ou refuseraient l’obligation vaccinale, prolongation de la suspension du jour de carence dans la fonction publique jusqu’au 31 décembre, instauration de l’état d’urgence en Guadeloupe, possibilité pour les directeurs et chefs d’établissement d’accéder aux données vaccinales des élèves… 
Le gouvernement est également revenu sur certaines dispositions votées en commission. Notamment le fait de fixer par décret un « seuil »  pour l’obligation de présenter le pass sanitaire dans les bars et cafés – les députés de la commission des lois ayant estimé que dans les territoires ruraux, notamment, cette obligation n’avait pas forcément de sens. Le gouvernement a fait supprimer cette tolérance, jugeant que la mesure doit s’appliquer « à l’ensemble des activités de restauration et de débits de boisson ». 

Modifications à la marge

Au final, à peine une petite dizaine d’amendements venus de l’opposition ont été adoptés, sans qu’ils apportent de changements profonds ni à la lettre ni à l’esprit du texte. 
Parmi eux, on peut retenir : la possibilité d’accéder aux données Sidep pendant six mois au lieu de trois, afin « de permettre à des personnes ayant été testées positives au covid-19 il y a plus de trois mois, d'en obtenir la preuve et d'ainsi pouvoir achever leur parcours vaccinal plus rapidement en n'ayant besoin que d'une injection ». Un durcissement des peines pour les personnes qui s’en prendraient à des biens destinés à la vaccination : ces derniers jours, plusieurs cas de dégradations (notamment par incendie) de lieux de vaccination ont été constatés. Les députés ont voté le principe d’une amende de 75 000 euros et cinq ans de prison pour ce délit.
Dans la liste des lieux qui seront soumis à l’obligation de présentation d’un pass sanitaire, qui comprenait déjà les foires et salons professionnels, les députés ont ajouté « les séminaires ». Au sujet de l’obligation vaccinale, ils ont également adopté une disposition précisant que les travailleurs handicapés employés dans les Esat ne seraient pas concernés. 
Enfin, l’opposition a obtenu la suppression d’une disposition adoptée en commission, qui prévoyait de punir l’utilisation d’un faux pass sanitaire de 5 ans de prison et 75 000 euros d’amende, jugeant que cette sanction était « complètement disproportionnée ». 

Précisions à retenir

Indépendamment de ces débats, quelques informations à noter ont été distillées hier sur l’utilisation du pass sanitaire. 
Lors de la réunion hebdomadaire de la cellule vaccination, les associations d’élus ont été informées que dans les ERP (établissements recevant du public) concernés, le pass sanitaire devait être demandé « dès le premier entrant ». Le ministère de la Santé a également indiqué que d’après ses prévisions, un pic de vaccination aura lieu au début du mois d’août : il appelle donc les communes à maintenir au maximum l’activité des centres de vaccination, en indiquant que l’État « compensera les frais engagés par les collectivités locales dans le cadre de l’organisation de la campagne de vaccination ». Un point précis sera fait, en cette fin de semaine, sur les livraisons de vaccin à venir, afin de donner de la visibilité aux centres de vaccination. 
Autre précision importante, donnée hier par la Direction générale de la Santé (DGS) : la jauge ouvrant l’obligation de demander le pass sanitaire dans certains ERP (50 personnes) doit s’appliquer en fonction de la capacité d’accueil des lieux et non du public réellement accueilli. Explication : certains établissements, notamment des cinémas, ont décidé depuis mercredi de limiter le nombre de spectateurs à 49, afin que ceux-ci n’aient pas besoin de présenter un pass sanitaire à l’entrée. Pas question, a répondu la DGS, interrogée par Franceinfo : « Dans une salle de cinéma, le pass sanitaire s’applique à partir du moment où cette salle contient plus de 50 places, même si seulement 10 sièges sont occupés lors d’une séance. (…) Il n’est pas possible pour une salle ayant une capacité d’accueil de plus de 50 personnes d’abaisser sa jauge, sous peine de sanction pour non-application du pass sanitaire. » 
Le projet de loi sur le pass sanitaire et l’obligation vaccinale va maintenant continuer son parcours parlementaire au Sénat, avant une commission mixte paritaire qui aura lieu probablement pas avant dimanche. 
Maire info, qui interrompt sa parution quotidienne à partir d’aujourd’hui et jusqu’au mercredi 1er septembre, informera toutefois ponctuellement ses lecteurs du contenu du texte adopté et des éventuels changements décidés par le Conseil constitutionnel. 

Accéder au texte adopté par l’Assemblée nationale. 

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